Blackout

C’est le titre d’un dossier passionnant du numéro 5 de la Revue militaire suisse de cette année. Le dossier est introduit par quelques lignes du Rédacteur adjoint de la Revue, le cap Grégoire Chambaz, qui résume ainsi « l’ambition » du dossier : « sensibiliser au risque de blackout et ses conséquences ; inviter à considérer les vulnérabilités de nos sociétés modernes ; fournir aux lecteurs des connaissances afin de se préparer à ce risque ou de s’y prémunir ; donner aux personnes qui le souhaitent la possibilité de sensibiliser à leur tour d’autres personnes ».

Cette dernière « ambition » m’interpelle, car je n’ai lu ni vu aucun commentaire médiatique de ce passionnant mais inquiétant dossier de la Revue militaire suisse. En effet, le blackout y est présenté comme « un des risques majeurs pour le pays », mais comme « un risque encore trop peu connu ». Plusieurs « appels du pied » y sont adressés au monde politique, à l’administration fédérale, des critiques sont formulées à l’égard de certains textes légaux, à l’égard même du « tout-numérique », ce qui, évidemment, n’est pas très politiquement correct. Il ne s’agit pas de faire du « catastrophisme », mais la meilleure manière de parer au danger est d’oser le voir et le prévoir. Notre pays ne semble pas très avancé sur ce point. Son réseau électrique est vieillissant, ce qui représente un risque incontestable, parmi d’autres, mais ce qui touche à la production d’électricité et à l’approvisionnement est un peu tabou !

Puisse ce dossier de la Revue militaire suisse ne pas simplement souffrir de l’antimilitarisme primaire de certains milieux ! Il sort nettement du cadre strict de la défense militaire. Que tous ceux qui le peuvent le fassent connaître.

N. B. Un aimable commentateur signale que des informations peuvent être lues sur le site www.revuemilitairesuisse.ch. qui est en plein renouvellement. Vérification faite, le texte auquel fait référence le blog ci-dessus n’est pas en libre accès. Il peut être acheté en version papier ou électronique.

 

Y a-t-il peine de mort et peine de mort?

Le tueur de Strasbourg a été appréhendé et tué par la police hier soir, 13 décembre 2018, et la foule a applaudi la police.

Cette situation, parfaitement dans l’ordre des choses puisqu’ on nous dit que le terroriste tenait aussi les policiers en joue (il y avait donc légitime défense), pose cependant la question de la peine de mort. En applaudissant, la foule approuve-t-elle le principe de la peine de mort?

Il est impensable, à tête reposée, dans la quiétude d’un tribunal, de condamner un être humain à mort, quel que soit son forfait. D’abord, on ne peut jamais garantir qu’il ne s’agisse pas d‘une erreur judiciaire. Ensuite, on ne peut jamais exclure qu’un être humain puisse avoir des circonstances atténuantes, ni qu’il s’améliore. Enfin, savoir qu’on est condamné à mort et ignorer quand l’exécution aura lieu, c’est subir un supplice supplémentaire (et je résume très grossièrement quelques arguments contre la peine de mort, arguments que je fais miens). Peut-on d’ailleurs exercer le métier de bourreau, à froid, en toute tranquillité d’âme ?

J’ajoute que, quand la police tue un malfrat quelconque qui la menace ou qui veut lui échapper, elle se fait souvent traiter d’assassin et punir.

Mais quand il s’agit d’un terroriste, la musique est toute différente. Combien d’attentats se soldent ou se sont soldés par la mort des auteurs, tués par la police (quand ils ne se sont pas fait sauter eux-mêmes) ? Et là, aucun chœur des indignés. Et pourtant, peut-être que l’auteur « présumé » n’était pas vraiment libre de ses actes, peut-être qu’il avait été trompé sur les conséquences de l’acte accompli, peut-être aurait-il pu plaider la menace pesant sur lui, bref, invoquer des circonstances atténuantes permettant d’éviter une « condamnation à mort », voire une condamnation tout court, l’acte étant celui d’une personne devant être traitée peut-être, plutôt que punie.

On pourrait certes objecter qu’un terroriste (présumé, car le fait que Daech revendique l’acte ne signifie pas encore que l’auteur soit un terroriste : il jouit aussi de la présomption d’innocence, en théorie du moins) est dangereux même en prison et c’est exact. Le tuer c’est probablement une bonne protection contre d’autres actes dont le but serait, pour ses comparses, de le libérer ou le venger. On pourrait aussi rappeler que, pour un terroriste, mourir est une récompense alors que rester en vie est une sorte d’échec punitif. Mais ce n’est pas à nous de décider de récompenser un terroriste.

En fait, par les lignes ci-dessus, j’aimerais seulement montrer que le débat sur la peine de mort – que d’aucuns voudraient remettre sur le tapis – exige une très grande retenue de ceux qui y participeraient et qu’il est en fait insoluble parce que c’est le pendant de la légitime défense. Pourtant, à froid, hors de tout contexte de guerre, la peine de mort est philosophiquement insupportable. En pleine crise, peut-elle devenir légitime ?

 

De l’inutilité de certaines taxes dites “écologiques”

Le Conseil national a rejeté les taxes sur les billets d’avion et limité à 8 centimes de plus à la colonne le prix des carburants. Dans quel but prévoit-on de telles taxes ? Dans celui de limiter les émissions de CO? Inutile, pour deux raisons principales :

D’abord, si l’on en croit micro-trottoir rapporté par les médias, cela ne changerait rien au mode de vie de la très grande majorité des usagers qui entendent bien continuer d’utiliser leur voiture quand ils en ont besoin et de voyager quand ils en ont envie. Ensuite parce que cela accrédite le principe pollueur-payeur, qui a toujours été compris et mis en œuvre de manière que l’on pense qu’il suffit de payer pour avoir le droit de polluer.

Ajoutons encore que le comble du ridicule de ces taxes est atteint quand « les recettes devraient être reversées à la population » (sic), ainsi que Le Temps nous l’apprend, dans son édition du 11 Décembre, à propos des taxes sur les billets d’avion. C’est d’ailleurs un principe analogue qui est déjà appliqué pour « le solde du produit de la taxe carbonne » (cf. la loi actuelle), ce qui permet de voir sa prime LAMAL diminuée par exemple de 2 CHF par mois (0.5% dans mon cas) après, sans doute, des calculs incroyablement sophistiqués et dont l’exactitude est invérifiable par les citoyens. Le triomphe de l’usine à gaz.

La redistribution, c’est l’usine à gaz avec, en prime, la suppression éventuelle de tout effet pédagogique de la taxe, puisque cette redistribution est assurée à chacun, indépendamment de ses efforts ou de son absence d’efforts personnels pour diminuer sa consommation d’énergie polluante. On croit rêver.

La seule raison d’être d’une taxe dite écologique serait la constitution de fonds de soutien à de la recherche ou à du développement de techniques (start-up peut-être) permettant de transformer ou de récupérer le CO2 émis ou d’améliorer la pureté de certains produits ou de trouver de nouvelles énergies, ou de mieux récupérer des déchets ou de diminuer la nocivité de certains moteurs etc… Mais le prélèvement de taxes écologiques dont « les recettes devraient être reversées à la population » (sic), c’est hallucinant de sottise.

 

 

 

L’Europe plus suicidaire que jamais?

Le Centre d’histoire et de prospective militaires de Pully avait organisé hier une journée d’études passionnante sur le sujet « climat et conflits ». Une quinzaine d’intervenants de haut niveau y ont traité le sujet avec des philosophies et sous des angles très divers.  Je retiens en particulier trois éléments frappants.

La Chine – qui ne se préoccupe guère de lutter contre le réchauffement – construit l’avenir en cherchant la meilleure utilisation possible des conséquences du réchauffement notamment du côté de l’Arctique. Cet immense pays asiatique – dont le régime ne s’embarrasse évidemment pas de problèmes éthiques (c’est moi qui le dis!) – a élaboré et commencé à réaliser toute sa stratégie de conquête économique et politique grâce aux voies de communication ouvertes par la fonte des glaces polaires. C’est impressionnant mais aussi effrayant. La Chine construit discrètement son hégémonie mondiale

Aux Etat-Unis – où les termes de réchauffement climatique sont proscrits par le Président – le Département de la défense, conscient du fait que les armées sont d’énormes productrices de gaz à effet de serre, s’efforce, en toute discrétion, de transformer les moyens techniques militaires, dans toute la mesure du possible, pour que l’armée devienne verte, mais sans perdre son efficacité, bien au contraire.

Et que font les pays d’Europe, pendant ce temps ? Ils discutent, rédigent des projets, prélèvent des taxes carbonne, mal reçues par les citoyens souvent, ou cherchent à s’imposer des règles lourdes pour les entreprises afin de diminuer, tout seuls, donc pratiquement sans aucune efficacité, le CO. Ils s’écharpent sur les migrations, et, comble d’ironie – mais cela n’a pas été dit hier par les intervenants – l’Union européenne s’acharne même à nuire économiquement à la Suisse, seul pays dont le déficit respecterait – et de beaucoup – les exigences européennes s’il était dans la zone euro. Elle parle d’une défense commune mais ne semble pas se préoccuper d’une armée verte.

L’Europe serait-elle vraiment suicidaire et la Suisse avec elle ?