Le Temps du 17 mai rendait compte de « La colère des opposants à la loi covid » (titre de la p. 9). Ces opposants précisent toutefois qu’ils « ne s’opposent pas aux aides financières mais uniquement aux suppressions de libertés arbitraires et disproportionnées ». Ils reprochent en outre à la brochure qui sera envoyée aux citoyens d’être lacunaire. Cette brochure est déjà disponible sur le site de la Confédération et je suis allée la consulter. C’est vrai qu’elle pose un gros problème, à cause du caractère tout à fait exceptionnel des lois urgentes. La brochure n’explique absolument pas aux citoyens les particularités de leur vote.
La loi covid soumise au vote dont le texte est transcrit dans la brochure n’est plus celle qui s’applique aujourd’hui
La loi covid-19 du 25 septembre 2020 dont le texte figure dans la brochure de vote est bien celle contre laquelle le référendum a été demandé, mais elle a été modifiée le 18 décembre 2020 et le 19 mars 2021 par de nouvelles dispositions, également urgentes, donc entrées en vigueur immédiatement, également soumises au référendum mais contre lesquelles le référendum n’a pas été demandé du moins à ce jour. Autrement dit, le texte sur lequel nous devons nous prononcer le 13 juin et qui figure dans la brochure n’est en réalité pas vraiment celui qui est en vigueur. Quel serait alors l’effet d’un vote négatif ?
En cas de refus de la loi Covid-19, quel sera le sort des modifications apportées par le Parlement à cette loi en décembre 2020 et mars 2021, modifications déjà en vigueur mais qui ne sont pas l’objet du vote du 13 juin?
Les modifications sont de deux sortes : les unes modifient des articles existants de la loi covid-19, les autres sont des articles tout à fait nouveaux, ajoutés à cette loi. Si la loi covid-19 est refusée, les modifications d’articles existants devraient, à première vue, perdre toute vigueur au 25 septembre 2021, car on ne peut pas modifier des textes qui n’existent plus.
En revanche, les articles tout à fait nouveaux introduits dans la loi covid-19 par les modifications de décembre 2020 et mars 2021 devraient pouvoir subsister car leur sens est indépendant du reste de la loi covid-19. Il y aura là un délicat travail d’interprétation juridique qui pourrait bien déboucher sur quelques procès, vu que les modifications sont essentiellement de portée économique et financière.
Trois articles de la modification du 19 mars 2021 – qui concernent la santé – posent un problème particulièrement diabolique
Ce sont les articles 3a, 3b et 6a qui ne figurent évidemment pas dans la brochure de vote, puisqu’ils ne se trouvent pas dans la loi covid-19 du 25 septembre 2020, mais seulement dans la modification du 19 mars 2021 (dont le délai référendaire expire le 8 juillet). Ces articles concernent respectivement : 1) la suppression de la quarantaine pour les personnes vaccinées dont il est prouvé (sic) que le vaccin prévient la transmission du virus, 2) la consécration du principe d’un système de test et de traçage des contacts et 3) le certificat sanitaire.
Ces articles seront-ils aussi abrogés au 25 septembre 2021 si la loi covid-19 est refusée? On peut en douter, vu leur autonomie.
On peut toutefois regretter qu’ils aient été glissés dans la modification de la loi covid-19 alors que le Conseil fédéral et le Parlement savaient déjà, en mars dernier, que le référendum contre la loi covid-19 avait abouti et que cela poserait quelques problèmes juridiques, les citoyens non juristes pouvant, de bonne foi, penser que les modifications feraient partie du vote de la loi de base.
La présentation du problème et la réponse aux questions ci-dessus pourraient influencer le résultat du vote.
Il est impératif que le Conseil fédéral informe clairement les citoyens, dans la brochure de vote, de la complexité exceptionnelle de la situation juridique créée par la loi covid-19 urgente soumise au référendum du fait des modifications ultérieures déjà en vigueur mais non soumises au vote, sauf à se voir reprocher d’avoir empêché les citoyens de se forger une opinion libre.