Remerciera-t-on aussi les militaires?

« C’est la mobilisation la plus importante depuis la dernière guerre mondiale ». Telle était l’annonce faite aux nouvelles il y a quelque temps. On avait mobilisé non seulement des troupes sanitaires mais aussi des troupes « classiques », probablement de l’infanterie, afin de renforcer la garde aux frontières ou pour d’autres tâches encore.

Dans les deux cas, la mobilisation a été rapide, efficace. Les militaires ont répondu « présents » et fourni les personnes et le matériel demandé, en particulier sanitaire. Les congés étaient supprimés et tout a fonctionné. Bon ! On découvre qu’il y a eu trop de personnes mobilisées, mais ce n’est pas une erreur de l’armée dont la mobilisation est décidée par le politique. Quand remerciera-t-on tous ces militaires ? Dira-t-on leur dévouement comme on dit, à juste titre, le dévouement des civils, soignants et autres ?

Si cette mobilisation a bien joué, ne serait-ce pas parce que l’armée, mieux que le monde civil, sait anticiper les cas de crise et s‘y préparer ?

C’est son rôle, assurément, et pourtant il y a tellement de voix qui la déclarent incapable, inutile etc…

Le monde civil n’avait pas anticipé la pandémie, malgré, paraît-il, des rapports existant depuis des années et parfaitement clairs. Aurait-il mieux valu l’anticiper et ne pas en avoir en fin de compte ? C’est l’éternel problème de la préparation aux catastrophes dont on sait qu’elles peuvent se produire, parce qu’elles sont inhérentes à l’aventure humaine, mais dont on espère qu’elles ne se produiront pas. Faut-il « investir » pour être prêt « au cas où… » au risque d’avoir fait des dépenses inutiles, ou suffit-il de croiser les doigts pour qu’elles ne se produisent pas et de les ignorer ? L‘expérience actuelle de la pandémie apporte une réponse claire en matière de préparation hospitalière et médicale (masques, désinfectant, anesthésiants, respirateurs, etc…) mais aussi en matière militaire.

Comme les pandémies, la guerre fait partie des dangers toujours possibles

Elle peut prendre toute sorte d’aspects, vu la complexité du monde actuel. Il importe donc d’avoir une armée prête à faire face aux formes les plus variées de menaces (espace aérien, black-out, cyber attaque, terrorisme etc…) parce que la raison d’être de l’armée est d’être prête à toute éventualité. Elle vient de montrer son utilité dans une situation plutôt inattendue. Quand on remerciera les militaires de leur engagement, il faudra aussi accepter de leur fournir tout le matériel nécessaire pour leur formation et l’efficacité de leur entraînement à venir. Il serait bon que les citoyens y réfléchissent et pas seulement les parlementaires.

 

Suzette Sandoz

Suzette Sandoz est née en 1942, elle est professeur honoraire de droit de la famille et des successions, ancienne députée au Grand Conseil vaudois, ancienne conseillère nationale.

18 réponses à “Remerciera-t-on aussi les militaires?

  1. L’armée possède des centaines de chars d’assaut stockés dans des locaux climatisés et seulement 100 respirateurs… 900 pièces ont été commandés en urgence la première semaine de confinement !

    Il serait peut-être temps de redéfinir les priorités au moment ou on veut dépenser des milliards pour des avions de combat !

    1. Malheureusement l’Histoire du monde ne vous a rien appris! Dans les années 30 les gouvernements successifs français avaient négligé l’équipement de leurs forces aériennes. Lors de l’offensive de Mai 40 l’Armée de l’Air française malgré un sacrifice héroïque n’a pas été en mesure de pouvoir assurer la supériorité aérienne de l’Armée de Terre ce qui entre autre a conduit à l’humiliante défaite. Quelques semaines plus tard l’Angleterre mieux inspirée sur ce sujet et au prix de lourdes pertes a été en mesure d’empêcher son anéantissement par l’Allemagne. Il ne sert à rien d’opposer des systèmes d’armes aux autres aux vues d’une crise même celle que nous vivons maintenant. Vous comme moi ne pouvons pas prévoir la prochaine crise qui pourrait nous toucher et si cette fois il serait impératif et même vital de devoir assurer la protection H24 de l’espace aérien. Est-ce que vous pensez que si nécessaire nos autorités sont capables de former en quelques jours ou même semaines suffisamment de pilotes de chasse et bien entendu construire un nombre suffisant d’avions pour remplir de cette fonction ? L’Armée est un ensemble avec des composants différents qui peuvent soient être utilisés ensemble ou alors séparément comme en ce moment avec les troupes sanitaires. L’achat des nouveaux avions de combat n’est pas un dépense mais un investissement pour notre sécurité collective. Les pays qui l’ont oublié l’ont souvent payé au prix fort.

      1. Blague à part, car on est pas là pour rigoler, ceux de nos “vieux” qui avaient fait la Mob donnaient une autre leçon. Au général Guisan, Mussolini, alors en panne d’avions, était venu lui demander s’il pouvait lui en prêter quelques-uns. Réponse du général:

        – Mais oui. Combien en veux-tu – un, deux ou tous les trois?

      2. Je me doute bien qu’on ne pourra pas acheter des avions de combat durant la première semaine d’un conflit, contrairement aux respirateurs !!! Mais les menaces autres que militaires sont clairement sous-évaluées…

      3. On est en 2020. Actuellement, ce ne sont plus les avions en carton, mais les moyens numériques qu’il faut mettre en avant.
        Surtout, acheter des avions étrangers, bardés de technologies étrangères, avec possibilités non-nulles de backdoors, remote control etc, n’a aucun sens à notre époque. Le grippen a déjà souffert de ses puces américaines – non sans raisons.

        Les missions de l’armée doivent être redéfinies, de même que ses priorités et, enfin, son matériel, de manière à répondre à des menaces réelles et modernes. L’époque du «Les Rouges nous attaquent par air, les Jaunes par les airs, et les Verts sont neutres mais nous aident» est révolue (désolé pour les “couleurs”, c’est ce qui a bercé ma formation de fusiller territorial début 2000).

        Si on veut faire les choses correctement, il nous faut des ingénieurs réseau, des ingénieurs système, reprendre la main sur notre IT national, et former, former, former aux menaces numériques réelles, s’assurer de la protection des infrastructures critiques (réseaux SCADA, entre autres), s’assurer qu’on est apte à fournir du réseau en toutes circonstances pour le commandement ET le civil.

        Et là, ma foi, je ne vois pas à quoi serviraient des avions. Bombarder les centres de hackers étatiques en Russie peut-être ?

        La pandémie a, enfin, depuis 45, montré que l’Armée peut être utile (il y a aussi eu l’épisode des inondations à Sion). C’est un fait. Mais si on regarde, elle n’est pas utile pour le combat classique. Ici, on l’utilise en appui des infrastructures civiles, principalement sur le plan logistique. Peut-être devrions-nous en tirer des leçons et employer cette nouvelle base de connaissance pour redéfinir l’usage de nos uniformes.
        Des avions ? Bah.

      4. Parce que vous croyez qu’avec 30 coucous dont la moitié seront en état de volet dans le meilleur des cas nous aurons la supériorité aérienne?

    2. Et vous ne pouvez pas pour une fois laisser de côté l’aspect politique et simplement dire merci aux militaires, qui sont des civils comme nous 11 mois par année ?
      Certainement que non. Ce serait trop dur pour votre fierté d’admettre un élément positif de l’armée, sans que vous pussiez le contrebalancer par au moins 3 éléments négatifs afin d’apaiser votre “bonne” conscience.

    3. Je me permets de vous rappeler que les verts (armée) interviennent quand les bleus (police, sanitaire, pompiers, civile) n’arrivent plus tout seul à gérer la situation. L’armée est comme une un puzzle et il faut de tout pour qu’elle soit efficace. Diminuer voir abandonner une troupe ( recco, inf, etc) au profit d’une autre troupe (san,log) simplement parce que dans cette situation de COVID 19 ça donne un sens serrait faux. On ne sait pas de quoi est fait demain est il est indispensable de maintenir les compétences militaires dans tous les secteurs.

  2. Pour votre “paraît-il”
    chercher sous pandémie etc…sur le site de l’administation fédérale( référence supprimée par Mme Sandoz pour que le lien ne soit pas actif, conformément à la tradition sur ce blog)
    La Suisse a ensuite eu le choix … mais fait les mauvais choix:
    – libéralisation de la régie des alcools au 1er janvier 2019, donc plus de gels hydroalcooliques en suffisance;
    – abandon de la politique des stocks pour une responsabilisation des entreprises (hôpitaux, etc) donc pas de masques en réserve;
    – …

    Mais, malgré tout, comme d’hab, la Suisse allemande s’en sort par la responsabilité individuelle, le Tessin souffre et les cantons romands font à peine mieux que la France…

    A interroger mr Maillard sur cet article (Sandoz: du Blick publié sur internet; même remarque que ci-dessus) plutôt qu’à lui demander servilement des conseils économiques..

  3. Bravo, voilà un avis solide et réaliste.
    Merci chère Madame. Je ne peux que me réjouir à vous lire depuis que je suis inscrit.

  4. Bonjour,

    Je suis de votre avis, l‘armée a montré qu‘elle possédait quelque chose que la société civile peut difficilement fournir ; une aide en personnel, qui « stocké » dans des casernes peut être rapidement mobilisée. Cependant, étant moi-même impliqué à un certains échelons de l’armée, je constate que les vrais apports que pourrait fournir l’armée, sont marginalisés au profit du conception vieillie de l’armée. Notre armée devrait être en mesure de soutenir lors de situations d’urgence (terrorisme, panne majeur de nos infrastructures, cyberattaques, catastrophes naturelles , etc.) nos services civiles professionnels. C’est-à-dire, l’armée doit repenser ses valeurs et ses priorités: suppressions des troupes « offensives » (comme les troupes blindées, explorateurs, etc. au profit de troupe d’aide à la population (sanitaire, sauvetage, cyber) en gardant un noyau dur professionnel (DRA-10 entre autre) pour certaines interventions spécifiques que la société civile ne pourrait et ne saurait accomplir.
    De saluer le succès de cette mobilisation ne fera que renforcer les dirigeants actuels sans qu’une remise en cause ne se fasse et ce à cause de leurs préjugés idéologiques en matière de défense.
    Oui l’armée est une institution importante de la Suisse pour la cohésion et pour l’effort commun en cas de crise, mais nous ne devons en aucun cas nous satisfaire de son état actuel.

    1. Je me permets de vous rappeler que les verts (armée) interviennent quand les bleus (police, sanitaire, pompiers, civile) n’arrivent plus tout seul à gérer la situation. L’armée est comme une un puzzle et il faut de tout pour qu’elle soit efficace. Diminuer voir abandonner une troupe ( recco, inf, etc) au profit d’une autre troupe (san,log) simplement parce que dans cette situation de COVID 19 ça donne un sens serrait faux. On ne sait pas de quoi est fait demain est il est indispensable de maintenir les compétences militaires dans tous les secteurs.

  5. Bravo et merci, madame. En ces temps troublés un merci est bien plus porteur que de vagues promesses, et ce dans tous les corps de métier. Alors bravo pour votre prise de position et merci à vous.

  6. « Il faudra aussi accepter de fournir tout le matériel nécessaire, il serait bon que les citoyens y réfléchissent… »

    Bien sûr qu’il sera bon que les citoyens réfléchissent eux-mêmes de quelle manière ils veulent se protéger, sans attendre des mois les masques et l’alcool, pendant que l’OFSP réfléchit, envisage, et conseille. Actuellement, c’est la société m3 Sanitrade de M. Abdallah Chatila, de sa propre initiative, qui réussit à fournir les hôpitaux et EMS en masques, et a déjà écoulé un premier stock destiné aux particuliers. Donc les militaires, les accompagnants à domicile, et les personnes qui déjà aujourd’hui n’ont pas le choix de rester à la maison, et demain toutes les autres, c’est à m3 Sanitrade qu’elles devront s’adresser, par le biais de mystore.ch qui vend en ligne. Après avoir déjà importé 140 millions de masques, Sanitrade annonce continuer à commander de grosses quantités : 5 millions sont déjà réservés par les entreprises suisses en prévision de la reprise de travail appelée « déconfinement progressif » par nos autorités. Celles-ci considèrent comme plausible le port obligatoire du masque par les travailleurs, qui sera décrété en temps voulu… Si les recherches en cours devaient aboutir à la nécessité que tout le monde doive porter un masque après le déconfinement, et on ne sait évidemment pas encore quand, ce serait un à deux milliards d’unités qui devraient être fournies pour l’usage de deux masques par jour, ceci durant douze mois (évaluation de M. Chatila). Les impératifs économiques dictent une reprise qui ne devrait pas tarder, l’OFSP ne peut encore se prononcer, de son côté le gouvernement déclare vouloir se procurer 550 millions de « masques de toute sorte ». Le calcul peut donc être fait aisément en rapport du besoin de 2 masques par jour pour la population « non soignants » si cela devait être décidé : moins de 3 mois d’autonomie. Même si ce calcul devait être surestimé, parce que chacun ne suivra pas la consigne, l’autonomie reste faible et conduit au risque d’une demi-mesure qui n’a plus de sens, la transmission du virus n’étant pas divisée par deux !

    C’est l’esprit des décideurs qui me semble divisé en deux, incertains d’eux-mêmes, dans l’incertitude de l’évolution du phénomène viral qui les englobe. L’OFSP fait en ce moment part de son inquiétude en rapport de la future petite commande de 550 millions de masques : « Les prix proposés sont quatre fois plus élevés que ce que d’autres entreprises paieraient pour la même marchandise ». Quelles autres entreprises ? Sanitrade qui s’engage à vendre en ne dépassant pas une marge de 20 à 30 % sur le prix qu’elle paye aux fournisseurs chinois ? Que tout cela est vague, et donne l’impression d’une inertie qui craint la prévention excessive autant que l’urgence devant laquelle elle serait dépourvue.

    Cette marge de 20 à 30 %, calculée sur le P.A. est sensiblement plus basse que celle pratiquée par les importants fournisseurs privés de matériel médical, moyens auxiliaires, et consommables. Les chiffres que je peux donner sont anciens (2000-2010), mais donnent un indice sur les intentions de profit. Les fournitures d’articles les plus courants allaient jusqu’à 8x le prix payé à la commande en Chine. Les articles de demande moindre, en moyenne 4x, livrés par des distributeurs d’Allemagne (fabrication allemande). Je m’abstiens de décrire les tergiversations et le détachement affiché par les participants des commissions d’achat du canton de Vaud, aucunement motivés à négocier ni commander directement, mais préférant la visite des représentants pour parcourir vaguement les catalogues et se faire conseiller, confortablement assis devant un café. Je faisais partie de ce monde de gens sans motivation, et ai eu la chance de pouvoir prendre le large à temps. Actuellement cela n’est peut-être pas différent, c’est donc sur soi-même qu’il faut compter pour ne pas payer 4x plus cher, ou même n’avoir rien.

  7. soit, mais si gardait les effectifs utilisés depuis 1945, il ne resterait pas beaucoup de monde sous les drapeaux :
    – La Défense aérienne ou police de l’air ainsi que la DCA (radars)
    – la protection civile en cas de catastrophe
    – les effectifs sanitaires
    – les transports de marchandises et de troupes
    – les renforts aux frontières ( contrôles administratifs )
    ( – la cyberdéfense , aujourd’hui en sous effectifs )
    aucune trace de troupes blindées et autres paras à la gâchette facile !
    Oui, il serait temps de revoir les priorités de notre défense centrée sur des objectifs plus civils que militaires !

  8. S’il faut aussi soutenir les nouveaux rôles de l’armée, voire en développer certains, n’abandonnons surtout pas sa mission première, la défense du territoire national.
    Qu’en sera-t-il des possibles menaces sur la Suisse d’ici une, deux ou trois décennies ?
    En caricaturant un peu, que pourrait faire une armée désarmée, c’est à dire sans aviation, chars et autres moyens complémentaires aux armes légères, face à ce que certains estiment impensable aujourd’hui, par exemple une France islamisée incontrôlable, une Russie impériale en expansion ou même une Allemagne surpuissante voulant s’imposer ?
    Il y aurait alors un nouveau Marc Bloch pour écrire une nouvelle “Étrange défaite” !

  9. L’armée doit pouvoir faire face à toutes les menaces qui existent… Et contrairement à ce que pensent certains grands naïfs dans leurs commentaires, l’apparition de nouvelles menaces ne font pas disparaître les anciennes! L‘armée suisse était certainement une des armées les plus puissantes d‘Europe durant la guerre froide. Il faut cesser de sous investir dans notre outil de défense aujourd’hui (0.7% du PIB) ou nous risquerons d‘en payer un jour le prix fort. L’acquisition de nouveaux avions de combat est une priorité pour notre pays et sa sécurité. Surtout que le monde multipolaire d’aujourd’hui n‘a jamais été aussi dangereux depuis très longtemps.

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