La jeune génération asservie par la gratuité ?

Heidi.news, l’excellent journal sur internet (payant parce que sans publicité) lancé cette année, nous informe que, selon un communiqué fribourgeois, « la jeune génération n’est pas prête à payer pour de l’information ».

La nouvelle est des plus inquiétantes bien que peu surprenante. En effet, toute la réduction en esclavage des générations présentes est fondée sur la gratuité. Il faut créer le besoin par une offre non payante et ensuite, on peut enfiler aux gogos absolument tout ce que l’on veut. Les algorithmes informent les esclavagistes des goûts et des vices des consommateurs et … c’est parti pour harponner ces derniers puis les asservir.

Que la jeune génération – qui a bien l’intention de gagner confortablement sa vie, ce qui est en soi légitime – considère que l’information doit être gratuite trahit une carence éducative grave. Elle témoigne aussi de l’efficacité du lavage de cerveau opérée par les innombrables offres gratuites de toutes sortes de biens autant par les journaux (gratuits) que par internet.

La bonne information se paie et doit se payer. Tout travail honnête mérite salaire. Le salaire du bénévolat, c’est la joie du don. Les personnes qui contribuent à la création de l’information gratuite sont-elles des bénévoles ? Personne ne parle cependant de leur bénévolat et pour cause. Elles sont, en principe, payées pour leur travail mais sans que les bénéficiaires (non payants) de ce travail se soucient un seul instant de la source de leurs revenus. D’ailleurs certaines publications gratuites connaissent même des difficultés financières notamment parce que les esclavagistes qui les nourrissent de publicité se détournent d’elles pour envahir le marché d’esclaves beaucoup plus vaste que représente la toile.

Que faut-il donc enseigner dans les familles et dans les écoles pour que les jeunes générations ne soient plus asservies par ce qui est gratuit ? Peut-être simplement que la liberté – après laquelle chacun soupire – n’est accessible qu’à celui qui a la volonté et la capacité de choisir puis d’assumer le prix de son choix.

Suzette Sandoz

Suzette Sandoz est née en 1942, elle est professeur honoraire de droit de la famille et des successions, ancienne députée au Grand Conseil vaudois, ancienne conseillère nationale.

20 réponses à “La jeune génération asservie par la gratuité ?

  1. “on peut enfiler aux gogos”

    Deux points:
    1. Les entreprises engagent des professionnels pour capter et rendre dépendants les jeunes. Je vous invite à télécharger un jeu gratuit tendance gratuit pour mobile, et vous forcer à y jouer une après-midi… vous verrez qu’arrêter ne sera pas simple…

    2. Le problème avec les journaux est la confiance, pas leur coût. Nous ne payons plus pour obtenir des informations le jour suivant alors qu’elles nous sont déjà données en temps réel sur les réseaux sociaux… et dont la plus-value n’est pas de confiance (sorte de goulibaba socialiste).

    Vous voulez qu’on paie pour un journal? Intéressez-vous à nos besoins et à nos intérêts!, ne nous infantilisez pas…

    1. La confiance que l’on peut accorder à une information ne dépend pas que de l’honnêteté du journaliste, mais également d’une recherche qu’il aura faite pour s’assurer de sa fiabilité, et cela a un coût. L’actualité offerte par les réseaux sociaux est fournie par tout un chacun, où la part du vrai, du faux, des omissions, des déformations, constitue un grand champ d’incertitudes. L’information fiable, présentée sous un regard critique, répond au besoin de la personne adulte. L’information gratuite a le bon goût d’une sucette, elle répond à un certain intérêt immédiat mais pas aux vrais besoins : là est l’infantilisation …

      1. 1. Vous déclarez que les réseaux sociaux répondent à un besoin infantile et que l’information n’y est pas présentée sous un regard critique.
        2. Je vous réponds qu’il est infantile de croire que vous avez besoin d’un tiers pour vous assurer de la fiabilité d’une information; nous avons un cerveau et une capacité d’analyse et de jugement. Je vous invite à les utiliser, y compris lorsque vous tentez d’infantiliser toute une génération.

        … sauf que, bien sûr, vous pensez certainement que le bon peuple est trop bête pour penser par lui-même et qu’il faut des personnes bien pensantes (actuellement des journalistes, avant des curés, avant encore des préfets, etc.) pour l’instruire sur ce qu’il doit penser et comment… Pas de doute, cher Dominic, vous êtes un convaincu socialiste qui est arrivé sur le marché du travail durant les années 1960-1965… Cela fait quoi d’être à la retraite ? et de passer votre temps à asséner la bonne parole sur des blogs de droite ?

        1. @ M. Gogo

          Merci pour votre commentaire qui me permet de mieux comprendre votre malaise. Vous déplacez le sujet de l’information sérieuse à celui des rapports d’autorité, c’est là votre perception qui rend un dialogue difficile. Vous vous sentirez donc mieux pour vous instruire sur les réseaux sociaux en mangeant des Smarties, mais pourquoi pas finalement !

  2. N’oublions simplement pas que l’asservissement au tout gratuit a été initié par la génération précédent “la jeune génération” dont parle Madame Sandoz et que l’entier de la société à des degrés divers est contaminée par cette prétendue gratuité. Un (esc)lavage de cerveau généralisé.

  3. Oui, vous avez raison. Cependant, c’est l’occasion de s’en prendre un peu aussi aux journaux électroniques et traditionnels qui multiplient leurs présences sur le net. suis abonné à 6 journaux dans 2 langues différentes et cela me coûtent une petite fortune et je me demande si tout ça est vraiment utile pour moi, c’est beaucoup.
    Pourquoi les journaux ne se groupent-il pas les offres par bouquets comme les télévisions le font depuis une trentaine d’années ? et d’offrir leurs continus, qui ne sont pas toujours au top, à des prix plus acceptables ?
    La 2ème chose qui me fait rire est qu’Opération Libero prétend que les jeunes lèvent 500 ou 600 mille francs pour soutenir le mouvement chaque année, très probablement un pur mensonge. Les jeunes pensent d’abord à eux-mêmes et en 2ème lieu à leurs propres poches et à leurs loisirs, etc.

    1. @Oct: Je rejoins votre commentaire.
      J’ai appris qu’aucune publication n’était neutre. Je dirai même qu’une publication papier ou internet n’est justifié que s’il entreprend de défendre un point de vue (qui n’est pas forcément une idéologie) et que pour se faire une opinion fondée et indépendante il faut pouvoir comparer plusieurs sources. En ce sens oui, il y a d’un côté le gratuit, de l’autre le trop cher, surtout si l’on veut pouvoir différencier les points de vues.

  4. Chère Madame,

    Je vous remercie pour vos blogs que je lis toujours avec beaucoup d’intérêts et d’attention.

    Avec mes cordiales salutations.

    André Wagner

  5. C’est bien connu rien n’est gratuit sur internet. Le paiement se fait par vos données personnelles, que ce soit de l’information ou des logiciels. Seule exception les logiciels libres, dont le code est publié comme par exemple LibreOffice ou Firefox ou encore Linux. Tout le reste est de l’arnaque.

    1. Firefox et Wikipédia sont des entreprises que je considère comme honorables et de grande valeur dans les buts qu’elles poursuivent, elles survivent grâce au bénévolat d’idéalistes, et aux dons. C’est un exemple positif de gratuité variable à choix, par le partage dans un intérêt commun. Cela est donc possible sans abonnement, il faudrait espérer que ce concept puisse se développer. Je me souviens de nombreux Moteurs de recherche qui offraient des possibilités de partage et de diffusion d’intérêts bien plus grandes que Google, qui ont disparu, ou ont été rachetés pour rejoindre ce géant qui nous accueille dans son monde de bonne morale spirituelle et commerciale made in USA. Il est à souhaiter que nos quelques journaux encore de qualité ne soient pas contraints de vendre leur âme sur le même modèle pour survivre corps et biens !

  6. Chère Madame Sandoz, merci pour votre aimable citation à Heidi.news (www.heidi.news), nouveau média digital (payant) lancé en mai 2019, dont j’ai le plaisir d’être l’éditeur. Pour compléter le sujet que vous abordez, je mentionne la belle série de 7 articles de Gea Scancarello publiée sur Heidi.news sur le thème de l’addiction digitale (modèles d’affaires incluant les effets de libération de la dopamine) “On a piraté votre cerveau”
    Tibère ADLER, Heidi.news

  7. Pour aller dans votre sens, je vous traduis un proverbe russe qui illustre parfaitement la situation.
    Il dit: le seul fromage gratuit se trouve dans les souricières.

  8. Ancien typographe, je devrais défendre l’existence de l’imprimé sous toutes ses formes. Pour des raisons culturelles, corporatistes aussi et par simple nostalgie, également, de toute chose imprimée véhiculant idées, débat et développement de la raison.
    Le journal est un produit particulier; mais il est soutenu par un modèle économique. C’est le client ou le lecteur qui adhère ou qui sanctionne; un bon produit vit et se développe, un produit ne répondant pas aux attentes meurt, à moins d’être fortement subventionné!
    «Le plus grand ennemi du nouvel ordre est celui qui profite de l’ordre ancien», a écrit Machiavel. On accuse les grandes plateformes mondiales de la numérisation alors que ce sont les modèles économiques d’hier qui menacent le journalisme de qualité.
    Pourquoi devrais-je acheter un journal imprimé, alors que quelques articles ou éditoriaux seulement m’intéressent, puisque mon intérêt pour la politique nationale ou internationale est nourri par d’autres sources. Je ne suis pas intéressé par trois pages de cours boursiers, ni par le fait que «Lavaux veuille mettre plus de vin dans son tourisme»; la politique locale de Genève ne focalise pas non plus mon intérêt. La personne qui a besoin d’une chemise blanche n’est pas nécessairement disposée à acheter un costume et de nouvelles chaussures en même temps. Je privilégie la confrontation des idées, le poids des avis contradictoires. Je n’aime pas l’eau tiède!
    Pourquoi le journalisme de qualité évite-t-il le potentiel d’individualisation des médias numériques? Pourquoi les médias sociaux ou une communication ciblée ne sont-ils pas considérés comme une opportunité d’apporter un contenu personnalisé à ses lecteurs et lectrices? L’innovation sous forme de présentation audiovisuelle originale ne permettrait-elle pas de donner plus d’individualité et de personnalité à l’éditeur? Cela éviterait de financer plusieurs sources pour la même nouvelle. Je suis prêt à payer un prix raisonnable pour une information de qualité adaptée à mes intérêts.

    1. Beau plaidoyer, venant d’un ancien typographe. Comme l’enseignant et le chercheur, le journaliste n’est pas un employé comme les autres. On lui demande de faire une information, qui est une denrée immatérielle. Il n’a pas à se soucier de la gestion commerciale du journal, affaire des services de publicité et des abonnements. Le prix de vente d’un quotidien au numéro ne correspond en rien à son contenu. Il n’a pas moins une valeur matérielle bien réelle.

      Tout dépend donc du modèle économique choisi, mais aussi de la conception que les medias se font de leur domaine d’activité. Or, il est surprenant de constater combien de journalistes, qui devraient être les premiers concernés par elle, sont réfractaires à l’informatique. Ce mot ne combine-t-il pas les morphèmes d’INFORmation et d’autoMATIQUE? Il est donc d’autant plus remarquable d’entendre un fils de Gutenberg, dont la profession est la première touchée par elle, plaider en sa faveur. Pour avoir fait mes débuts de journaliste comme aide-tourneur dans l’imprimerie crasseuse, bruyante et nauséabonde de l’obscur quotidien local d’une non moins obscure petite ville du Midwest américain dans les années soixante, aujourd’hui ingénieur informaticien, j’en suis d’autant plus touché.

      1. Vous m’excuserez mais même si je suis très passéiste et compatis de tout coeur à la complainte des typographes, il y a quand-même des moments où, au risque de contredire Mme Sandoz, je me dis que la gratuité a du bon, si elle peut avoir pour effet qu’on soit débarrassés de cette presse gauchisante imbuvable.

        De même je bénis le conseil d’administration de Ringier-Axel Springer qui nous a débarrassés de L’Hebdo. A quelque chose, malheur est bon. La presse paye aussi le prix des ses fourvoiements idéologiques antisuisses. Tant pis pour elle!

        Et si des milliardaires de gauche acceptent de se ruiner pour faire les “mécènes”, en portant à bout de bras une presse dont les lecteurs ne veulent plus, parce qu’ils en ont marre de se faire traiter de frileux, rances, nauséabonds, etc., et de subir des contenus idéologiques qui ne leur plaisent pas, eh bien je dis bravo. J’espère que tout ça aura pour effet la ruine définitive des ces mécènes là. Mais hélas, là dessus je suis bien tranquille. Ils laisseront vite tomber quand ils s’apercevront que, tant que les contenus ne vireront pas “populiste”, les chiffres comptables resteront rouges comme les rédacteurs.

        Les bien pensants alors exigeront que ce soit l’état – c’est à dire les contribuables – qui vole au secours de la presse menteuse. Mais alors là, ça sera niet! Le référendum est déjà prêt.

      2. Votre commentaire me rappelle une histoire vraie qui s’est déroulée il y a presque 20 ans dans un pays oriental. Le premier ministre se plaint auprès du patron d’un quotidien, car ses journalistes critiquent sévèrement un projet gouvernemental, et le patron du journal lui rétorque : je ne peux rien faire, ce ne sont pas des employés, ce sont des journalistes !

  9. Madame Sandoz est l’arroseuse arrosée,

    Si votre blog était payant, peu de personnes le liraient.

    Et certainement pas les jeunes qui ont d’autres chat à fouetter que de lire vos idées d’un autre âge.

    Profitez bien de cette gratuité pour encore attirer un peu d’attention.

    1. Quelle violence ! moi j’accepte de vous payer pour autant que vous ne commentiez plus sur le BLOG de Madame Sandoz.

      1. D’accord avec CT 26. C’est miss Mariéthoz qui est prise à sa propre contradiction, car elle insinue perfidement que miss Sandoz ne serait pas lue si sa prose n’était pas gratuite. En attendant elle lit tous ses articles tant elle est accro au plaisir masochiste de se confronter aux idées patriarcales conservatrices de la valeureuse dame de la vieille école. Cherchez l’erreur.

    2. Hé oui Mademoiselle, les vieux aiment apporter leurs opinions, même si celles-ci sont sèches comme deux ou trois derniers biscuits brisés au fond de leur grand cornet. Ces survivants constituent actuellement le 25 % de notre population, ce n’est pas négligeable en rapport du poids des idées mouillées au café noir, et ils vous remercient de payer vos cotisations AVS qui devront être ajustées pour qu’ils puissent continuer à profiter de la vie, et s’offrir le luxe d’un journal payant. Tiens, quand j’y songe… Un abonnement au Temps à prix sympathique, pour les rentiers AVS, que vous financerez à 20 % avec les forces lucratives de votre jeunesse, ce n’est pas une bonne idée ?.. Le Temps gagne de plus en plus de jeunes abonnés, encore plus d’abonnées, et nous les vieux devenons de plus en plus nombreux. Mon idée de partage doit impérativement être étudiée par le comité de pilotage de ce journal !

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