Notre Hébergeur, Tempus-Omnipotens, qui avait lancé sa plateforme de blogs le 4 septembre 2015, a donc décidé, certainement “dans sa très grande sagesse”, de la détruire, un peu comme les bouddhistes thibétains du grand-véhicule passent la main sur leur mandala de sable pour l’effacer une fois qu’ils l’ont achevé pour bien exprimer l’impermanence des choses de ce monde.
Il est vrai que toute permanence n’est qu’illusion ou, pour être plus positif, que tout (matière et énergie) n’est que mouvement, fluctuation, passage d’un champ de forces à l’autre, d’une fraction de temps à une autre, à l’occasion duquel une modification de la réalité peut se produire ou non, conduisant à toujours plus d’entropie et peut-être à « quelque-chose ».
Revenons sur Terre ou plutôt considérons le système que nous formons ensemble, vous-mêmes, chers lecteurs, avec moi-même via les articles de ce blog ouvert dès l’Origine, en 2015, et avec la Direction du Temps.
Nous avons atteint les 5400 commentaires (pour 420 articles). C’est important car peu ont manqué de substance. Tous ensemble, par nos échanges, questions, réponses, confrontations, nous avons contribué à créer une réflexion tangible car lisible, sur les « grandes questions » essentielles qui se posent à l’homme aujourd’hui et sur les moyens concrets de sortir de notre berceau pour un jour mieux pouvoir y répondre. C’est cela le mandala de sable que nous avons réalisé ensemble. Même vouée à disparaître, cette construction n’est pas rien car elle nous a profité aussi bien individuellement que collectivement. Elle a « été » et elle a enrichi l’intellect de chacun de nous.
Je voudrais donc vous remercier, vous tous, d’abord les commentateurs fidèles bien sûr mais aussi les épisodiques, les exceptionnels par leur parole, et même les simples spectateurs muets mais attentifs, par la chaleur de leur nombre et leur attention inexprimée mais réelle, chacun ayant à sa façon apporté sa contribution.
Ce qui fait d’abord l’intérêt des blogs par rapport aux articles de journaux, ce sont précisément les échanges, les réactions immédiates, les interventions, les réponses, comme si nous étions sur l’Agora de nos ancêtres, avec en plus la trace écrite qu’il en reste. D’un autre côté, leur intérêt par rapport aux échanges sur plateaux de télévision ou de radio, c’est la possibilité pour chacun de mieux réfléchir avant de s’exprimer, de « tourner sept fois la langue dans sa bouche » (ou « sa plume dans l’encrier ») comme le dit l’expression populaire. Cela permet à chacun de fournir d’avantage d’arguments ou d’être plus pertinent, de choisir ses mots, de vérifier ses sources, de revenir pour compléter sa pensée déjà exprimée. L’avantage du blog sur le tweet c’est qu’on peut nuancer son expression au-delà d’une interjection enveloppée ou d’un ressenti brutal et donc mieux s’expliquer aux autres et ainsi mieux se comprendre soi-même. Et c’est enfin mieux qu’une simple lettre aussi bien écrite soit-elle car toute personne intéressée en profite et peut participer à l’échange pour y ajouter son grain de sel.
Je suis convaincu que lorsque l’homme sera sur Mars, cette relation pourra continuer sans que le décalage de temps résultant de la finitude de la vitesse de la lumière pose des problèmes insurmontables. Le blog est l’avenir des relations sociales tant que nous resterons les uns et les autres à une distance raisonnable. Et avec 22 minutes-lumière maximum, dans un seul sens, la distance Terre-Mars restera un éloignement acceptable (compte tenu bien sûr du temps de réflexion et d’écriture puis du temps de voyage de la réponse). Comme je n’ai pas l’intention de partir plus loin que Mars, nous pourrons continuer sous d’autres cieux que ceux du Temps, à échanger et à nous enrichir mutuellement l’esprit dans les mêmes conditions optimales. NB : Si je ne pars pas (le Starship ne vole toujours pas et je suis conscient du temps qui passe) je suis convaincu que d’autres partiront.
Lorsque cette colonie sur Mars, à laquelle j’aspire, sera établie, on pourra dire que la «cognosphère*» humaine aura généré son premier alter-ego extraterrestre. Les deux communautés pourront se féconder mutuellement de leur vécu ou de leurs observations réciproques mais finalement la différence de lieu ne changera pas grand-chose pour les problèmes qui nous motivent. Les personnes qui partagent nos préoccupations et intérêts ou notre passion, peuvent tout aussi bien vivre sur Mars que sur Terre. Elles resteront dans la même proximité puisque disposant de quasiment les mêmes possibilités de communiquer. Et comme sur Mars nous aurons certainement (car ce sera vital) une copie des « data-bases » terrestres, nous aurons les mêmes sources pour nous nourrir, réfléchir et spéculer. La seule différence ce sera les conditions environnementales permettant le travail et la réflexion et sur ce point il est moins que certain que les conditions terrestres soient plus favorables que les conditions martiennes.
*ensemble des têtes pensantes et communicantes.
Comme j’y ai fait allusion plus haut, on peut élargir notre cercle au-delà des commentateurs. Ceux-ci sont ceux à qui j’ai d’abord naturellement pensé mais il y a aussi les autres, les lecteurs fidèles mais discrets, au premier rang desquels évolue la cohorte des abonnés-silencieux. J’en connais certains comme on a aperçu des météores, et qui de temps en temps me font part directement de leurs observations ou de leurs sentiments, sans pour autant recourir à l’écrit sur le blog. Je peux donc vous assurer que cette nébuleuse qui forme l’essentiel en nombre des quelques 700.000 visiteurs au total ayant effectué quelques 1.750.000 incursions dans notre monde, existe bel et bien et qu’elle nous enveloppe de sa chaleur lointaine, un peu comme la Ceinture d’Astéroïdes (qui est en réalité la Ceinture des Abonnés) mais aussi les Ceintures de Kuiper ou encore les Nuages de Oort pour les plus lointains et les plus froids. Ses éléments constituants ne sont pas lisibles eux-mêmes mais ils participent néanmoins à notre système en lisant mes articles et vos commentaires. Et de temps en temps, quand l’envie de participer est trop forte, l’un ou l’autre se risque à envoyer un message et devient alors visible en rejoignant notre communauté vivante car inter-communicante, un peu comme une comète décroche de son nuage glacé et descend jusqu’à nous.
Nous avons même eu quelques objets interstellaires qui n’avaient jamais lu un article du blog mais qui ont interféré en passant, en donnant leur avis sur quelque chose ou n’importe quoi (tout n’est pas publié !), et en repartant aussitôt très loin dans l’infini d’où ils venaient et qui sans doute les appelait, à moins que leur vitesse ne leur ait pas permis de s’arrêter chez nous. Je les salue aussi comme on lance une bouteille à la mer ou plutôt une balise dans l’espace en réaction à un espoir diffus, pour qu’eux-mêmes se rapprochent à nouveau (maintenant sous d’autres cieux), si la trajectoire de leur réflexion le leur permet et au cas où notre force gravitationnelle, qui s’est exercée sur eux une première fois lors de ce passage, puisse un jour les faire revenir…si bien sûr ils ont alors quelque chose de pertinent à dire.
Il y a eu aussi dans un passé dont nous nous sommes maintenant heureusement un peu éloignés, un accident extraordinaire comme le fut l’extinction de l’Ordovicien-Silurien. Je fais référence à la supernova de l’étoile-massive hélas proche, nommée Sylvia Ekström qui, enflant considérablement à partir de son domaine de compétence, l’astrophysique, pour faire intrusion dans la planétologie, l’exobiologie et même l’astronautique, était parvenue à son stade d’implosion avant explosion, en faisant du « battage » à propos de son livre « Nous ne vivrons pas sur Mars ni ailleurs ». J’avais trouvé très mauvaises les raisons qu’elle avançait dans ce livre telles qu’elles avaient été publiées dans la Presse, sur l’impossibilité de transporter notre vie humaine ailleurs que sur Terre. Je m’étais malheureusement permis de les critiquer avant d’avoir lu son « chef-d’œuvre » moi-même, car je pensais en avoir suffisamment compris la teneur et le sens, rien que par ce qu’en rapportaient les autres. Je ne m’étais pas trompé car ma lecture n’a fait finalement que conforter la mauvaise opinion que j’avais des arguments utilisés baignant dans un océan de certitudes infondées et d’a-priori bancals. J’aurais cependant dû être plus prudent car notre planète a bien failli brûler à cette occasion comme si un sursaut gamma l’avait touchée. Mais le rayonnement brutal de cette étoile hostile s’est vite éteint, la vie a repris, nos échanges ont recommencé à fleurir et à produire leurs fruits.
Alors aujourd’hui ce blog est à nouveau confronté à une onde de destruction massive. Mais cette fois, elle est annoncée et certaine. Après la date fatidique du 30 juin 2023, il ne peut rien rester dans le cadre actuel de ce monde que nous avons construit puisque ce cadre lui-même aura disparu. Notre Univers est plein de systèmes ou d’astres morts. Certains ont été détruits comme le sera le nôtre. Beaucoup d’autres sont peut-être (je dirais volontiers « sans-doute ») totalement stériles parce qu’ils n’ont jamais été porteurs des ingrédients nécessaires. De toute façon on ne peut pas compter sur eux ; trop lointains, nous n’en connaissons encore que ce que nous en dit leur lumière. Et puis nous avons nos spécificités. Il n’y a donc pour nous qu’une seule possibilité, migrer ailleurs, comme un jour certains d’entre nous iront sur Mars. Il ne tient qu’à moi mais aussi à vous-même que notre propre système continue dans ce contexte à tourner autour de son Soleil brûlant mais nourricier que sont les connaissances accumulées par tous, les publications scientifiques paraissant dans le monde entier, vos commentaires toujours renouvelés et l’esprit critique de chacun. Je serai le 30 juin, pour ma part, aussi prêt que possible à partir pour transplanter notre blog sous de nouveaux cieux.
Toute construction matérielle est fragile comme nous le rappelle le mandala de sable. Mais les constructions intellectuelles peuvent s’avérer plus solides, comme l’est l’esprit de ceux qui dessinent le mandala en se nourrissant aux mêmes sources intellectuelles et en le perfectionnant à chaque représentation qu’ils en font. C’est ce que j’espère et que je souhaite. Dans ces conditions, si notre transition pour sortir de l’orbite du Temps réussit, on pourra une fois de plus dire avec Pangloss que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles, en attendant d’en découvrir un autre et peut-être un jour la clef de tous les mystères.
Aux étoiles !
Illustration de titre : vue d’artiste de notre système planétaire encoconné dans son Nuage de Oort. Crédit : Pierre Carril, Novapix (ref : a-com99-90007). Pierre Carril est un des meilleurs illustrateurs spatiaux. Il a notamment obtenu des contrats de l’ESA (magnifique illustration du programme Aurora).
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