La société martienne, quintessence de la population terrestre (« Il faut de tout pour faire un monde »)

J’ai suggéré plusieurs fois que la Colonie martienne devrait être une sorte d’Abbaye de Thélème. Elle sera en effet d’abord une université et un laboratoire compte tenu de la justification importante au voyage que constitueront toujours les recherches planétologiques et exobiologiques. Pour satisfaire à la pression de notre « curiosity », elle comprendra un nombre proportionnellement élevé de chercheurs spécialisés dans ces disciplines mais elle devra également comprendre de nombreux ingénieurs dans toutes sortes de domaines, allant de celui des infrastructures en conditions extrêmes à l’astronautique et toute une population des meilleurs professionnels que nécessite la vie de toute communauté devant compter sur ses seules ressources et son ingéniosité. Entre ces personnes la communication et la collaboration, permettant le « cross-feeding » des connaissances et l’entraide pratique, sera essentielle. Cette société, par la compétence élevée de ses membres, la nécessité d’échanges et de rapports courtois entre eux, pourra donc être une version modernisée de la société idéale, intellectuelle, vivante, brillante, passionnée et joyeuse imaginée par Rabelais dans sa fameuse « abbaye » il y a bientôt cinq siècles.

NB : Il y a un an j’ai publié sur le même thème un billet sous le titre « il faut de tout pour faire un monde ». Il n’a suscité que peu d’intérêt. Comme je ne m’explique pas cette réaction et que je considère le thème important, j’ai souhaité lui redonner une seconde chance. Le voici donc retraité, sous un nouveau titre.

Pour décrire cette population, je me place dans l’hypothèse d’une première colonie de mille habitants telle que nous l’avons étudiée avec mon ami Richard Heidmann, fondateur de l’association Planète Mars (voir référence ci-dessous). Outre les scientifiques et les ingénieurs déjà mentionnés, les professionnels également mentionnés devront permettre de faire face à toutes les sollicitations d’une vie active, à tous les besoins de service (y compris ceux de policiers, de juges, de psychiatres, de banquiers), à la production de presque tous les biens tangibles nécessaires car il ne pourra y avoir que très peu de recours aux importations. D’abord parce que les arrivages sur Mars ne seront possibles que tous les 26 mois (il faudra attendre pour le voyage que les deux planètes soient en position convenable l’une par rapport à l’autre sur leur orbite respective), ensuite parce qu’on cherchera toujours à limiter les masses et les volumes importés en raison du coût du transport et de la capacité des soutes des vaisseaux spatiaux. En même temps qu’on s’efforcera de couvrir tous les besoins, on limitera donc au maximum le nombre de personnes nécessaires au fonctionnement de la Colonie puisque leur transport, le volume viabilisé de leur espace vital, leur maintien en bonne santé et leur rémunération coûteront fort cher. La société martienne sera extrêmement économe, mécanisée et robotisée.

Les deux premières solutions pour concilier ces contraintes, seront bien sûr les télécommunications avec la Terre* et l’impression 3D, la troisième sera un recrutement extrêmement rigoureux du personnel fonctionnel sur des critères de compétence, d’ingéniosité (on pourrait aussi parler de débrouillardise) et de sociabilité.

*NB : Il ne faut pas oublier que la vitesse de la lumière n’étant “que” de 300.000 km/s, le temps nécessaire à une information pour parvenir d’une planète à l’autre va de 3 à 22 minutes. Il n’y a donc aucune possibilité d’action/réaction immédiate à partir de la Terre.

On aura donc une société de personnes exerçant des fonctions très sophistiquées et d’autres moins mais auxquelles le contexte de l’environnement martien imposera des compétences élevées et qui seront puissamment assistées par la robotisation. Regardons-en de près quelques-unes :

Les « préposés au ménage ». Le service qu’ils exerceront, mineur sur Terre, ne sera pas une petite affaire sur Mars et l’effectuer, constituera une lourde responsabilité. Il faudra en effet contrôler et maintenir très sérieusement la viabilité des zones habitées. Leur travail consistera non seulement à enlever les poussières (largement à l’aide de robots) mais aussi à prendre des échantillons qu’on analysera pour vérifier que le contenu rapporté de l’extérieur est minimum (risque de silicose ou d’empoisonnement aux perchlorates), vérifier la composition atmosphérique de chaque bulle de vie et remédier aux déséquilibres de proportion des gaz, ou de pression ; examiner les parois, les meubles et les sols pour stopper au plus tôt toute éventuelle prolifération de bactéries ou de champignons ; contrôler les analyses bactériologiques de l’air et de l’eau effectuées grâce à des réseaux de capteurs (MiDASS de MELiSSA par exemple). Mais ce n’est pas tout ; l’environnement extérieur Martien est fragile et sujet d’études. Il n’est pas question de le polluer et de le transformer avant de le connaître (et même après !). En fait ces « préposés », sans doute mieux nommés « ingénieurs-sanitaires », devront donc traiter les « poussières » et déchets résultant de la vie humaine, pour les recycler ou les détruire (pyrolyse ?), les cendres devant probablement être isolées dans des containers étanches (vitrifiées ?).

Pour prendre un autre exemple, le « cuisinier », qui sera plus un « cuisinier-diététicien », devra gérer l’environnement sanitaire de ses produits avec un soin extrême et penser toujours (1) que l’on ne gâche rien (puisque tout est si difficile à produire), (2) que toute matière, organique ou autre, doit être autant que possible recyclée, (3) que la nourriture n’est pas faite que pour le plaisir mais doit d’abord permettre de survivre dans des conditions diététiques idéales et (4) que la consommation ne peut se faire qu’en fonction des disponibilités prévues (on mangera les produits frais ou congelés / lyophilisés en fonction des plannings de production et des dates optimales de conservation).

De manière générale une profession très demandée sera celle d’« ingénieur-bricoleur ». En dehors de l’utilisation de l’imprimante 3D pour renouveler le petit outillage ou les meubles, il faudra réparer, faire fonctionner des machines complexes ou simples, fatiguées par l’usage ou simplement victimes de défaillances. On ne jettera (presque) rien sur Mars. Avant de mettre une machine en pièces ou au rebut, on cherchera à la réparer ou à la réutiliser d’une manière quelconque, en entier ou en partie.

Pour régler les rapports entre les gens il faudra (outre bien sûr la pratique de la psychologie) introduire l’argent et on aura donc aussi une banque (et un ou deux banquiers). On ne peut en effet envisager de soumettre des personnes différentes, dont le seul intérêt commun sera d’avoir choisi de résider sur Mars pendant (au moins) 18 mois, au même rythme de vie, ou de leur imposer les mêmes consommations. Pendant leur temps libre, certains voudront sortir à l’extérieur de là base aussi souvent que possible, d’autres seront heureux de rester à l’intérieur devant leur ordinateur. Certains voudront faire du sport, d’autres regarder des films, écouter de la musique, et probablement les trois en proportions variées. Certains solliciteront énormément les installations communes, d’autres très peu. Il ne faut pas non plus oublier que l’air respirable et l’eau seront des consommables coûtant fort cher (à la production et au recyclage) et qu’ils auront aussi un prix. La seule façon de gérer la situation et les tensions sera donc de donner un prix aux biens et services et de les faire payer. Cette monétarisation des relations sera aussi le moyen d’introduire dans la société les professionnels individuels qui auront choisi de tenter leur chance sur Mars en indépendants (en accord avec l’administration de la colonie), soit avant de quitter la Terre, soit une fois sur place. Leur succès sera matérialisé par les revenus qu’ils tireront de leurs services à la « Société d’exploitation de Mars », aux autres résidents ou à la Terre lointaine. Mais avant d’entreprendre, ils auront peut-être aussi besoin d’emprunter. D’autres résidents de leur côté auront peut-être envie d’investir. L’intermédiation bancaire sera pour eux indispensable.

Il faut, dit-on, « de tout pour faire un monde » et dans ce monde martien naissant il y aura aussi des artistes et des communicants (la dimension esthétique et émotionnelle de l’aventure étant une motivation capitale et la séduction une condition de sa continuation). Maintenant, comme la population sera très faible pendant longtemps (difficulté du voyage, du développement des abris viabilisés et de la production des consommables de base), il faut aussi envisager qu’une même personne exerce plusieurs métiers. En fonction de leur complexité et de la difficulté intellectuelle à les maîtriser, les Martiens seront donc, comme on dit parfois aujourd’hui, des « slashers ». Mars sera le monde de la souplesse de l’adaptabilité et de la créativité. Tout problème devra être traité, d’une manière ou d’une autre, car très souvent la vie, de soi-même et des autres, sera en jeu.

Lien vers le site APM :

http://planete-mars.com/un-modele-economique-pour-une-colonie-martienne-de-mille-residents/

Image à la Une : Essai de restitution de l’Abbaye de Thélème par Charles Lenormant, archéologue français (1840). On retrouve dans la base martienne, la même idée de lieu non fermé mais protégé de l’extérieur, aussi autonome et confortable que possible et facilitant les échanges entre “résidents”. 

Pierre Brisson

Pierre Brisson, président de la Mars Society Switzerland, membre du comité directeur de l'Association Planète Mars (France), économiste de formation (Uni.of Virginia), ancien banquier d'entreprises de profession, planétologue depuis toujours.

18 réponses à “La société martienne, quintessence de la population terrestre (« Il faut de tout pour faire un monde »)

  1. Bonne nouvelle, Mars sera capitaliste et monopolistique! Voila qui garantit une collaboration harmonieuse et une cohabitation sans tension. Reste une petite question : ceux qui auront fait faillite seront-ils juste éjectés avec 30min d’oxygène ou renvoyés sur terre aux frais de la princesse?

    1. Oui, je pense que Mars sera capitaliste, comme devrait l’être toute société sensée (on a vu le “succès” des sociétés socialistes!). De toute façon une société ne peut fonctionner que si ses membres ont chacun un intérêt personnel à la faire fonctionner. Par ailleurs compter indéfiniment sur l’argent public de gouvernements terriens me semble être une erreur car au bout d’un certain nombre d’années ces financements risquent de se tarir, faute de contrepartie.
      Vous ajouter que Mars devrait être, selon ce que j’écris, “monopolistique”. Je ne vois vraiment pas ce qui vous le fait supposer. Si la société martienne est régie comme je le suppose, par la libre entreprise, il n’y aura certainement pas de monopole (sauf peut-être pour les “commodities” telles que la production d’oxygène ou d’eau). D’ailleurs je souhaite une société démocratique et une telle société ne tolérerait pas les monopoles. C’est la multiplicité des initiatives et les financements que ces initiatives pourront attirer (de la Terre aussi bien que de Mars) qui feront la créativité et la prospérité de la société martienne.
      Quant à l'”éjection” des résidents qui ne subviendraient pas à leurs besoins, certes elle devra bien avoir lieu au bout d’un “certain temps” (et surtout au début de la colonisation période pendant laquelle les ressources seront particulièrement rares) mais seulement lors des fenêtres de retour sur Terre, tous les 26 mois et si on ne peut trouver d’emploi pour ces personnes car il serait évidemment plus “rentable” d’utiliser les capacités productives présentes sur place.

      1. Bonjour,

        Le commentaire de Michel Henry me semble un peu à l’emporte-pièce mais je suis plutôt d’accord avec lui. De quel droit imposerait-on le capitalisme ou tout autre forme de néo-libéralisme à la société martienne ?
        Dans un premier temps, les colons vont affronter des conditions de vie spartiates, rigoureuses et probablement dangereuses. Seule la coopération et une bonne dose d’altruisme entre les membres assurerons la survie collective puis une progressive amélioration des conditions de vie. Du coup, dans une communauté aussi réduite, toute tentative d’enrichissement personnel sera au mieux mal vu, au pire brutalement réprimée.
        Par la suite, quand les conditions de vie seront réellement devenues plus faciles, les martiens se poserons probablement la question d’une forme de gouvernement. Mais à ce moment là, ne nous leurrons pas, ils ferons comme bon leur semble et ce n’est pas la Terre à 9 mois de distance qui leur dictera leur conduite.

        1. Désolé mais je maintiens mon point de vue. Je pense qu’il serait très négatif d’imposer le socialisme ou tout autre forme d’organisation administrée à la société martienne. En effet on parle ici d’une colonie de mille habitants. On sera donc sortis de l’installation proprement dite et il faudra se développer aussi vite que possible vers l’autonomie*. Ce développement ne pourra se faire (à mon avis) qu’avec un maximum d’audace, de créativité et d’argent. C’est un peu comme aujourd’hui miser sur Elon Musk plutôt que sur la NASA pour une première mission habitée sur Mars. Avec Elon Musk vous avez une chance dans les 10 prochaines années, avec la NASA vous n’en avez pratiquement aucune avant la fin des années 2040. NB: Le capitalisme n’exclut pas la coopération (les alliances, les actions coordonnées) mais il exclut tout gaspillage, tout atermoiement et l’inefficacité (ce qu’il convient précisément d’éviter).
          *Atteindre l’autonomie (non l’autarcie) sera nécessaire pour assurer la pérennité d’une installation de l’homme sur Mars.

      2. Vous avez raison, le système capitaliste a largement fait ses preuves, au point que nous en sommes à vouloir coloniser Mars avant que la Terre ne soit plus viable pour l’espèce humaine.
        Votre optimisme béat est affligeant. Et le plus désolant, c’est que ce sont des gens comme vous, qui ne doutent de rien, qui nous amènent droit dans le mur.

        1. Je ne comprends pas que les gens comme vous soient si agressifs alors que généralement ils se prétendent démocrates. Vous pouvez avoir votre opinion et j’ai la mienne et on peut en discuter mais au-delà de l’agression verbale, je ne vois pas vos arguments.
          Oui je pense qu’effectivement le système capitaliste est le meilleur possible, bien meilleur que tous les systèmes socialistes ou collectivistes ou “écolo-gauchistes” (ce qui revient au même) et je crois que cet avantage vient de ce qui l’inspire c’est la liberté conjointement à la responsabilité (un système ne peut être dit capitaliste s’il ne répond pas à cette définition et s’il n’utilise pas la concurrence pour y parvenir/le maintenir). Dans le système capitaliste ou libéral, les gens travaillent et recueillent le fruit de leur travail et sont sanctionnés négativement par le marché s’ils proposent des biens et services que les autres personnes ne veulent pas ou positivement s’ils offrent des services qui sont demandés par les autres. Le socialisme ou le collectivisme sont par ailleurs animés par l’envie et la déresponsabilisation et ils briment évidemment les initiatives individuelles (puisque l’Etat prétend prendre des décisions pour le bien de tous alors qu’en fait il n’est qu’un groupe d’individus qui prétend, même s’ils en sont incapables, prendre les décisions à la place des autres individus qu’ils ont spoliés par l’impôt). Le socialisme c’est le système de l’absence de sanctions, du gâchis, de la mauvaise utilisation des ressources rares et de l’appauvrissement. Dans le principe même c’est un système qui tend vers le totalitarisme (toujours plus d’Etat, toujours plus de redistribution, toujours plus de décisions intrusives ne tenant pas compte des désirs des individus et de leurs capacités d’initiatives et de création) et à la ruine de l’environnement (cf par exemple l’URSS qui a eu quelques dizaines d’années pour s’exprimer).
          Effectivement je ne suis pas d’accord avec vous et j’espère qu’il y aura toujours sur Terre suffisamment de gens d’accord avec moi pour que nous puissions poursuivre notre rêve jusqu’à sa concrétisation. Et oui j’ai confiance que les capitalistes sauront offrir des biens et services écologiques (puisque c’est cela qui est demandé actuellement) mais je pense aussi que l’offre et la demande ne doivent pas se réduire à cela. La vie c’est beaucoup d’activités pour poursuivre beaucoup de rêves et on ne va jamais tous rêver en même temps de la même chose et des mêmes moyens pour l’obtenir. Ce serait l’enfer! Contrairement à ce que vous pensez, je suis confiant que le progrès technologique nous permettra de dominer nos problèmes écologiques sans abandonner nos autres projets (dont la conquête spatiale). Ayez confiance en l’homme !

  2. Si il y a bien une profession dont pourrait se passer l’hypothétique colonie martienne est celle de banquier: la société idéale décrite plus haut peut aisément se passer d’intermédiaire financier par un haut degré de participation collective où chacun apporte son effort sans compter au bien commun.
    Cette parenthèse d’idéalisme étant refermée, je dois rappeler encore les inconvénients majeures qui règnent sur Mars: le manque d’eau , si vital pour les besoins des humains, l’absence d’ozone protégeant la vie contre les UV, l’absence de champ magnétique déviant les rayons cosmiques…. Bref tous les éléments qui ont contribué à l’émergence de la vie sur Terre sont absents de cette planète qui restera stérile à jamais !

    1. L’avantage de Mars par rapport à la Lune c’est précisément qu’il y a pas mal d’eau en surface. On la trouve certes sous forme de glace et sous une couche de régolite (sauf aux pôles) mais elle sera facilement exploitable. Par ailleurs l’atmosphère donne une certaine protection contre les radiations, équivalente à celle dont bénéficient les astronautes dans l’ISS (ils y reçoivent moitié moins que ce qu’on recevra dans l’espace profond, pendant un voyage qu’il ne faudra pas répéter plus d’une ou deux fois dans sa vie).Pour se protéger contre les UV, pas de problème car on devra porter des combinaisons à l’extérieur des bases (atmosphère irrespirable de CO2 et pression beaucoup trop basse) et, pour se proteger des radiations plus dures (protons solaires ou radiations galactiques), les habitats seront recouvert d’une couche de régolite ou de glace d’eau.
      Comme vous voyez tout est prévu. Je ne dis pas que les conditions environnementales seront les mêmes que sur Terre. Elles seront certes plus hostiles mais on pourra s’y adapter, un peu comme l’homme, africain des savanes d’origine, s’est adapté aux grands déserts du Nord de l’Afrique puis aux régions froides du Nord de la planète Terre.
      Quant aux banquiers, je pense que vous avez tort. Dans une petite communauté, refuser la monnaie pour exprimer ses choix de vie me semble une grosse erreur et, dans une société monétarisée, il faut quelqu’un pour faire circuler l’argent afin qu’il soit affecté au mieux des besoins de chacun et de tous. Il faut aussi un banquier pour lever des fonds (y compris bien sûr, sur Terre) et pour organiser des financements sans cesse necessaires. L’illusion d’un monde où chacun travaille pour le bien de tous, sans récompense particulière, me semble totale et très contre-productive pour une communauté. Elle décourage l’effort et ne permet pas de sérier les priorités.

  3. Je suis d’accord avec les intervenants qui mettent en évidence le fait que ce sera en fin de compte aux futurs «Martiens», et à eux seuls, de définir le type d’organisation de leur société qui leur paraîtra le plus approprié, et aussi que celui-ci ne sera pas forcément «capitaliste». Dans le contexte de société idéale qui a été pris comme hypothèse de base ici (contrairement à ce que l’on a pu connaître sur Terre dans le passé, les futurs colons martiens seront en principe issus de la «crème» de l’Humanité), le système socio-économique de la future colonie martienne pourrait bien, par la force des choses, être plus proche du communisme – dans le sens noble et originel du terme et non sous sa forme dévoyée implémentée dans certains pays au XXème siècle – que du capitalisme. Une petite société vivant dans un environnement foncièrement hostile devra nécessairement, pour sa survie même, être plus solidaire et égalitaire que ce à quoi le capitalisme a conduit sur Terre dans un contexte très différent. On ne peut en effet envisager qu’il soit possible à certains individus de «capitaliser» à leur seul profit des biens et des ressources qui seront et resteront rares et précieuses (disposer d’un véhicule privé, pour prendre un exemple simple). De toute manière TOUTES les nécessités de base sur Mars (y compris l’air à respirer) devront être assurées à CHACUN, automatiquement et gratuitement. On ne peut condamner à mort quelqu’un qui ne pourrait ou ne voudrait plus payer pour celles-ci. Pour ce qui est du «superflu» (tout ce qui n’est pas réellement nécessaire à assurer son maintien en vie dans des conditions raisonnablement acceptables), ainsi que des souhaits plus personnalisés, on peut imaginer un « comité d’attribution des biens et ressources », démocratiquement élu et régulièrement renouvelé bien sûr, qui examinerait les demandes qui lui seront soumises et statuerait sur celles-ci en fonction des disponibilités et en tenant compte les cas échéant des mérites du requérant en matière de contribution au bon fonctionnement de la société.
    Mais de toute manière c’est du «laboratoire martien» lui-même qu’émergeront des modes d’organisation/fonctionnement de cette nouvelle microsociété humaine auxquels nous ne pensons peut-être même pas aujourd’hui. Inutile donc de trop spéculer «dans le vide» (même si Mars a quand même une faible atmosphère !).

    1. Je suis également d’accord avec tout le monde pour dire que ce sera aux futurs Martiens de définir le type d’organisation de leur société. Ceci dit il me semble intéressant et je l’espère utile, de réfléchir dès maintenant à cette organisation.
      La société martienne sera très spéciale par rapport aux autres communautés humaines en ce que ses membres seront (1) isolés ; (2) situés dans un environnement extrêmement hostile ; (3) en principe extrêmement qualifiés (surtout la première génération constituée de personnes provenant de la Terre et choisies pour leurs compétences) ; (4) « piégés » sur Mars, en quelque sorte puisque le retour sur Terre ne sera possible que lors de fenêtres ne s’ouvrant que tous les 26 mois.
      Dans ces conditions je ne pense pas qu’une sorte de « communisme » soit la meilleure organisation, même sous sa forme « noble et originelle du terme » (elle est totalement utopique et vouloir s’en approcher conduit à des catastrophes comme on le voit encore au Venezuela aujourd’hui). Les besoins minima de chacun (air, eau, espace vital, nourriture) seront bien entendu couverts puisque ne pas le faire serait condamner les plus « pauvres » à la mort. Mais au-delà de la couverture de ces besoins, je pense que tout le reste devrait être monétarisé. L’alternative serait une attribution administrative comme il est suggéré ici, mais qui serait effectuée en fonction de quels critères et par qui ? La direction de la colonie en faveur des « plus gentils » ? Pourquoi faire uniquement confiance à un petit cercle de dirigeants (même élus)? L’argent permet une affectation souple des biens en fonction des besoins et de l’apport à la communauté de chacun, et elle évite aussi les gaspillages ou les inefficacités et oriente vers les besoins les plus importants à satisfaire (telles que le ressentent les agents économiques qui sont disposés à les payer). Pourquoi renoncer à cet excellent outil ? Je ne vois pas où seraient introduites les injustices car les disponibilités de chacun proviendront de leur apport à la communauté, qu’il travaille (la rémunération étant fixée à la rencontre d’une offre et d’une demande) ou qu’il consomme (les réserves en capital ou les revenus terrestres du « touriste » lui permettant de dépenser et par la même de contribuer au financement des diverses facilités et activités qu’il utilisera et / ou pratiquera sur Mars).
      La monétarisation sera un complément de démocratisation de la société, car elle donnera aux résidents, individuellement, des possibilités d’autonomie dans leur choix de vie qui pourraient autrement leur être refusées par un « comité d’attribution des biens et ressources » qui pourrait fort bien avoir ses « têtes de turcs » (l’expression, traditionnelle, n’est pas à prendre au pied de la lettre) ou ses « chouchous ». Comme je le disais plus haut, les Martiens seront des êtres humains ayant de fortes compétences et probablement de fortes personnalités, pas des mineurs ou des débiles, du moins au début (et par la suite leur survie dépendra du maintien d’un haut niveau de compétence et de travail).
      Enfin le début de la colonisation sera une période où il faudra développer très vite les infrastructures et les outils pour les exploiter. Toutes les initiatives doivent pouvoir s’exprimer dans la limite des contraintes de sécurité (auxquelles les « autorités » veilleront). Pour « s’exprimer » elles auront besoin de capitaux et on ne va pas attendre qu’un comité multinational sur Terre, correspondant du « comité d’attribution » sur Mars, étudie la demande et recherche des financements (même si cette méthode peut exister en parallèle). Ne cherchons pas à recréer sur Mars une « Administration du Plan » comme dans les pays communistes (où la France d’après-guerre) qui discutait le plus souvent « hors sujet ». L’administration de Mars aura certes un rôle mais ce devrait plutôt être un rôle de coordination…et encore une fois, de contrôle de la sécurité.
      Bien entendu pour couvrir le coût des « commodities » (air, eau, etc…) au moins au niveau des frais variables (et autant que possible d’un certain amortissement des frais fixes) une contribution devra être levée par l’administration (ou les propriétaires des équipements produisant ces commodities) auprès des résidents. Il y aura des compteurs à eau et à air. Il y aura aussi un loyer pour les volumes viabilisés occupés. Ceux qui ne pourront pas les payer ne seront pas pour autant sacrifiés en place publique (le supposer est inhumain et donc inimaginable) mais je pense qu’on peut se poser la question de leur rapatriement sur Terre à la première occasion car Mars, surtout au début, aura besoin de tous ses bras et toutes ses têtes productives et ne pourra se permettre de nourrir indéfiniment des improductifs.

      1. Au jour d’aujourd’hui (presque) tout est envisageable en ce qui concerne l’organisation et le fonctionnement d’une future communauté martienne d’une certaine importance et aucune hypothèse ne peut/doit être rejetée a priori. De toute façon bien peu d’entre nous aurons la possibilité de voir de leur vivant leurs hypothèses sur ces questions confirmées ou non dans les faits.
        Cela dit, du fait de la rareté de toutes ressources sur Mars, et d’une capacité d’importation de la Terre des plus réduite, il est à prévoir que la mise à disposition «d’extras» (au-delà de ce qui sera impérativement nécessaire pour assurer des conditions de vie acceptable) restera très limitée. A quoi servira donc à certains d’accumuler le cas échéant des «moyens financiers» qu’ils ne pourront de fait pas vraiment utiliser ? Pour ma part, j’en resterai là, car il serait bien présomptueux de prétendre trancher définitivement ce genre de projection futuriste; chacun peut donc camper sur ses positions.

        1. Il pourrait y avoir des entrepreneurs sur Mars, c’est à dire, par exemple, des constructeurs de nouveaux habitats (et des architectes/ingénieurs proposant de nouveaux modèles de construction), des fabricants de meubles (surtout par impression 3D), des constructeurs de pistes sur lesquels les véhicules circuleront plus vite et plus sûrement (moyennant péages!), des constructeurs de rovers préssurisés (ou assembleurs et équipementiers de ces rovers), des journalistes et des communicants (vendant à la Terre les activités en cours sur Mars), des installateurs et gérants de poste refuges avancés en dehors de la base, des guides touristiques (pour faire visiter certains lieux spectaculaires à de riches touristes), des cuisiniers tenant des restaurants, des boulangers, des commerçants, des médecins, des cinéastes, des entreprises minières (et d’abord pour l’extraction de l’eau), des entreprises de chimie développant de nouveaux process adaptés à l’environnement particulier de la planète et utilisant des molécules interdites sur Terre du fait de leur danger pour le réchauffement climatique, une société de contrôle biologique des environnements viabilisés, une entreprise de transports pour conditionner les quelques exportations physiques devant partir vers la Terre et assurer le service aux voyageurs, des avocats pour résoudre les conflits, etc…
          Toutes ces personnes et leurs entreprises pourront avoir une activité indépendante de l’administration martienne (qui aura fort à faire avec…l’administration). Cette dernière sera leur cliente comme les autres entités économiques actives sur Mars. Bien sûr certaines entreprises appartiendront à des sociétés terrestres mais leur représentants sur place pourront gagner de l’argent et rien ne devrait pouvoir empêcher qui que ce soit de créer une entreprise sur Mars.
          Les marges dégagées par l’exercice de leurs profession devrait permettre à ces personnes ou sociétés de réinvestir dans leur développement ou dans le développement de nouvelles activités. La libre fixation des prix et services seraient une incitation à développer ces nouvelles activités. Le prix des produits offerts devraient bien sûr être proportionnel aux moyens financiers dont disposeront les autres résidents de Mars (autrement ils ne seraient pas vendus) et fonction des coûts de production (autrement il n’y aurait aucun intérêt à les produire). Bien entendu le démarrage de tout nouveau “business” supposera un investissement qui ensuite devra s’amortir et c’est là où interviendra le banquier. C’est comme cela que commencera le développement de Mars. Ce démarrage incitera de nouveaux Terriens à venir sur Mars et à amplifier le mouvement.

  4. Bonjour Pierre,

    Vous devriez être content. Ce coup ci votre article provoque de nombreuse réactions. 😉
    Selon moi, le seul moyen de résoudre la question du meilleur système économique pour une société martienne, c’est :
    1) Prendre l’avis de professionnels de la question, des économistes, des sociologues, …
    2) Réaliser une simulation en vraie grandeur, comme à la grande époque des communautés Hippies mais de manière plus sérieuse.
    Pour ma part, j’ai toujours pensé que l’homme avait un côté altruiste et coopératif au moins aussi développé que son côté égoïste et compétitif. Le problème de notre société, (traditions, enseignement, lois, modèle économique, …) c’est qu’elle est intrinsèquement conçue pour favoriser les seconds au détriment des premiers.

    1. Merci Xavier. Effectivement j’ai eu quelques échanges animés ! En fait je crois qu’ils le sont toujours quand on parle d’organisation de la société. Je trouve que le sujet en vaut la peine et je vous réponds donc volontiers.
      1) On peut toujours consulter des « professionnels » mais je pense qu’on peut avoir un avis personnel, comme tout être humain qui pourrait un jour décider d’aller sur Mars et qui donc choisirait de vivre dans le cadre de la société fonctionnant sur cette planète. Par ailleurs, je suis économiste de formation et j’ai été banquier d’entreprises pendant une vie antérieure assez longue et j’ai donc une expérience et des idées sur ce qui peut permettre à une société de fonctionner (considérant ses ressources matérielles bien entendu).
      2) On peut toujours faire des simulations mais on ne restituera jamais vraiment les conditions si particulières de Mars (éloignement et durée du séjour dans des conditions un peu dures !). Je pense donc que, comme souvent, le véritable test ne pourra se faire que sur place. Comme de toute façon l’homme hésite visiblement beaucoup entre l’utopie « fraternelle » et surtout égalitaire d’une part et la dure réalité du « chacun pour soi », d’autre part, on devrait au début de l’installation de l’homme sur Mars, installer deux colonies bien séparées géographiquement, dans chacune desquelles on tenterait l’expérience d’une organisation sociale différente (l’une communiste, l’autre libérale).
      Compte tenu de l’histoire de l’homme sur Terre, je n’ai personnellement aucun doute qu’au bout d’un certain temps, quasiment toutes les personnes dynamiques et entreprenantes se retrouveraient dans la colonie libérale et que la colonie communiste dépérirait. Après tout, les Etats Unis d’aujourd’hui sont plus le résultat de l’esprit pionnier inégalitaire du Far West que de celui des très sages et très égalitaires colonies mennonites. En Israël, l’expérience des kibboutz n’a pas duré non plus très longtemps.
      Je crois qu’il est très important de considérer que sur le long terme les Etats terrestres peuvent se lasser de financer à fonds perdus (sans retour financier) des colonies martiennes. La pérennité de l’établissement martien ne peut à mon avis être assurée que si (1) il acquière aussi tôt que possible son autonomie vis-à-vis de la Terre et (2) la relation entre l’établissement martien et la Terre est mutuellement « intéressante ». Et cela doit aller bien au-delà de la recherche, que l’on pourrait mener à partir de petits postes abritant des scientifiques et du personnel de maintenance que l’on enverrait lors de chaque fenêtre de lancement et que l’on rapatrierait aussitôt le programme de recherche réalisé. Il s’agit de projet de vie, sur la durée.
      NB : je reconnais que chaque homme (du moins je l’espère) porte en lui une inclinaison altruiste mais je pense que sauf exception, ce n’est pas ce qui domine. La société « marche mieux » quand on introduit la compétition et la concurrence entre ses membres. Cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas imposer quelques règles mais on ne devrait le faire que pour la sécurité et pour la transparence. La déloyauté fausse la concurrence et la liberté. dans notre monde moderne je pense contrairement à vous que la société est devenue beaucoup trop intrusive et traite les citoyens plus comme des mineurs que comme des adultes. Dans les pays très socialisés, le sens de la responsabilité s’est perdu .

    2. Bonjour Monsieur Philippon. Entièrement d’accord avec vous. Surtout que l’on s’était ici placé dès le départ dans le contexte d’une utopie (Abbaye de Thélème) et de la recherche d’une société idéale pour une colonie martienne d’un millier d’individus environs (rien à voir donc avec un pays comme le Venezuela!); société idéale rendue possible, du moins, on l’espère, par la sélection d’êtres humains représentant le meilleur de ce que peut offrir l’humanité. Comme je l’ai dit, on peut spéculer à l’infini (même les spécialistes) sur le mode d’organisation que se donneront les futurs “Martiens”, car eux seuls en décideront en fin de compte et il me paraît difficile de “simuler” sur Terre de manière suffisamment réaliste l’environnement qui sera le leur. On peut/doit attendre qu’ils arriveront à faire mieux sur ce plan que ce que l’on connaît sur Terre aujourd’hui, la communauté étant très restreinte et l’environnement sociétal plus favorable; cette nouvelle page blanche à écrire est d’ailleurs un des aspects qui rend cette future “expérience martienne” passionnante, même si le résultat ne sera très certainement pas ensuite extrapolable sans autre aux sociétés terrestres. On ne va pas aller sur Mars pour reproduire les “erreurs” et “dérives” observées sur Terre, du moins on peut l’espérer!

      1. Je pense que même dans une communauté embryonnaire, le capitalisme, une liberté aussi grande que possible dans entrepreneuriat et la concurrence seront des facteurs essentiels de développement (nullement incompatibles avec une Abbaye de Thélème dont la devise était “fais ce que voudra”). C’est cette liberté et ce potentiel qui rendront le départ de la Terre pour Mars attractif à toutes sortes d’aventuriers (ce qui n’est pas une qualité négative si elle se combine avec compétence et courage). Au début, certes, les contraintes imposées par le milieu seront fortes et pesantes mais le développement permettra de les alléger et la communauté sera porteuse d’un énorme développement si elle sait se montrer séduisante. C’est pour cela que les entrepreneurs, dans de multiples domaines, seront les bienvenus. Pour eux, investir sur Mars ne sera peut-être pas porteur d’importants retours immédiats mais ils pourront spéculer qu’ils le deviennent sur le moyen terme.

  5. Bonsoir,

    Pour revenir à notre société actuelle et à l’ultralibéralisme, le plus grave problème, c’est l’absence d’alternative. Nous tenons pour acquis que les grandes sociétés sont là pour faire de l’argent à tout prix et que le seul moyen de survivre s’est d’écraser les autres. Seule la guerre a droit de citer, avec toutes les dérives que cela entraine. Plus aucune place ne reste pour les respect des autres, l’altruisme, la coopération, la préservation de l’environnement, …
    J’ai lu quelque part, que cet absence d’alternative est une des causes du terrorisme et du rejet du modèle occidental par de nombreuses communautés. Je partage complètement cette idée.

    Du coup, quand je parlais de simulation, je ne pensais à l’environnement martien mais à un environnement socio-économique terrestre fondé sur la coopération, le partage des ressources et l’altruisme. Une sorte de communisme éclairé et librement consenti par les participants. L’objectif est de définir la taille minimum d’un système socio-économique alternatif, stable et viable.
    Cette idée m’est venue au contact des membres d’Open Source Ecology http://opensourceecology.org/

    Je m’éloigne peut-être un peu du sujet mais sachant que les équipements de la première colonie Martienne seront standardisés et open source, pour une raison de survie, je ne dois pas être trop loin tout de même.

    1. Merci de votre commentaire mais je ne suis pas d’accord avec vous.
      D’abord je pense que la société française d’aujourd’hui puisque c’est de celle-là dont il s’agit si j’ai bien compris (en Suisse, du fait de la structure cantonale, il y a des systèmes très différents qui cohabitent au niveau fédéral), n’est pas du tout « ultralibérale ». Je dirais qu’elle est plutôt terriblement socialiste (redistributive) et surtout étatique.
      Ceci dit, comme vous l’avez compris, je ne suis absolument pas en faveur du type d’organisation idéologico-économico-sociale que vous préconisez. Je pense qu’en voulant faire le bien de tous, le communisme (même « éclairé ») conduit en fait à faire le malheur d’un très grand nombre et d’abord des composants les plus actifs et les plus dynamiques de la société (d’où d’ailleurs la situation catastrophique de la France d’aujourd’hui). J’ajoute que rien n’interdit à une société libérale de pratiquer « le respect des autres, l’altruisme, la coopération et le respect de l’environnement ». J’aurais beaucoup d’arguments pour étayer cette affirmation mais il suffit de constater dans quel état le régime communiste de l’URSS a laissé sa population et son territoire (notamment sur le plan écologique).
      Nous sommes loin de Mars et des problèmes qui se posent préalablement à l’organisation de la future société martienne mais puisque le sujet intéresse, j’y consacrerai mon prochain blog.
      NB: “Open Source Technology” ne vit pas de l’air du temps et pour survivre, ils font appel à des dons. Si un régime communiste était instauré, j’imagine que les dons seraient obligatoires. On retombe dans les travers du système: injustice, arbitraire et démotivation.

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