A-t-on une chance de trouver une nouvelle-Terre dans notre environnement le plus proche ?

Les deux semaines précédentes j’ai évoqué les 33 systèmes stellaires qui évoluent dans le rayon d’une douzaine d’années-lumière de notre Soleil, c’est-à-dire les étoiles les plus proches de nous, celles que nous avons le plus de chance de mieux connaître et un jour peut-être d’atteindre.

Sur ces 33 systèmes j’ai éliminé les 2 centrés sur des étoiles blanches et les 26 centrés sur des étoiles naines-rouge. J’ai ensuite souligné les particularités défavorables des étoiles doubles, des jupiters-chauds et des super-terres. Ces éliminations ont été faites dans le but de focaliser notre intérêt sur les systèmes les plus susceptibles de pouvoir comprendre une « nouvelle-Terre ». Je voudrais cette semaine réfléchir sur eux avec vous.

Après exclusions, il nous reste donc à examiner de plus près les étoiles de type solaire ou d’une masse légèrement inférieure, les « naines-orangées », également intéressantes car plus stables que les naines-rouges et d’une masse permettant à leur zone habitable de se situer assez loin de leur source de radiations.

Nous avons dans notre environnement trois naines-jaunes et quatre naines-orangées donc, à ce stade, sept systèmes stellaires « candidats ». Regardons les capacités de chacun à l’habitabilité réelle. Nous disposons pour ce faire de données encore insuffisantes du fait que ces petites planètes sont difficiles à « voir » mais nous pouvons aujourd’hui approcher la réalité mieux que nous ne l’avons fait jamais.

Alpha Centauri

Le système le plus proche (4,39 AL) est le couple Alpha-Centauri-A (0,945 MS, naine-jaune) et Alpha-Centauri-B (0,445 MS, naine-rouge mais presque orange). Notez bien qu’elles sont différentes de la petite naine-rouge, Proxima-Centauri (0,123 MS) qui leur est liée gravitationnellement mais qui en est éloignée de 13.000 UA. Avec ce couple A et B, on se retrouve dans une configuration d’étoile double qui, comme exposé la semaine dernière, me semble peu propice à la présence d’une nouvelle-Terre. Mais comme ce sont deux étoiles de masses situées dans notre cible et que leur système est le plus proche du nôtre, on ne peut les éliminer d’emblée.

Que nous offre ces étoiles ? Les deux orbitent entre elles en 80 ans et leur distance varie de 11,2 UA (équivalent à la distance Soleil/Saturne) à 35,6 UA (un peu plus que la distance Soleil/Neptune). Une masse se situant entre celle de Neptune et la moitié de celle de Saturne, orbite autour d’Alpha-Centauri-A à une distance de 1,1 UA (« C1 » pour « Candidate 1 » ou « Polyphème » pour David Cameron dans son célèbre film « Avatar »). C’est une situation idéale mais on n’est pas certain que cette masse soit agrégée en planète (ce qui serait compréhensible du fait de l’instabilité de la matière entre les deux étoiles) et si elle l’était, elle serait largement trop massive. En effet, comme vous vous en souviendrez, les super-terres pas plus que les jupiters-chauds ou les mini-neptunes ne sont a priori des nouvelles-Terres. Mais elles peuvent avoir des lunes qui, elles, comme l’hypothétique « Pandora » (toujours Avatar !), pourraient l’être !

61 Cygni

Le système 61 Cygni est à 11,43 AL. C’est encore une étoile double ! Elle comprend deux naines-orangées de 0,60 et 0,63 MS. Celles-ci sont distantes de 90 UA, ce qui laisse une certaine place entre elles pour des planètes et une Ceinture de Kuiper (la nôtre évolue de 30 à 55 UA) d’autant que la masse de chaque étoile étant plus petite, leur zone d’attraction est plus faible et leur Ceinture de Kuiper plus proche. Cependant leurs nuages de Oort ne disposent pas de « la place » nécessaires pour être séparés. Les implications pourraient être négatives.

Du fait de certaines irrégularités d’orbite de 61-Cygni-B, il y a possibilité d’une planète autour d’elle mais à ce jour, la planète n’a pas été localisée et elle devrait plutôt avoir une grosse masse, bien supérieure à celle de la Terre et elle serait en dehors de la zone d’habitabilité.

Y aurait-il quelque chose de plus petit, plus près ? Nous ne le savons pas mais si c’était le cas, la forte variabilité de l’activité de 61 Cygni B constituerait un facteur négatif pour un séjour humain, d’autant que la zone habitable est proche de l’étoile (0,24 à 0,50 UA).

Epsilon Eridani

Epsilon-Eridani est à 10,50 AL. C’est une petite naine-jaune d’une masse de 0,85 MS et cette fois, c’est une étoile sans compagnon.

L’abondance de poussière tendrait à signaler un système jeune, toujours en formation. Trois planètes sont possibles, Une première (« Epsilon-Eridani-c ») de quelques petits dixièmes de masse joviennes, à environ 35 UA (« chez nous » elle serait au-delà de Neptune) ; une deuxième (« Epsilon-Eridani-b ») de masse jovienne, à environ 20 UA ; une troisième (« Epsilon-Eridani-a ») de 0,86 Mj, avec une orbite très excentrique allant de 0,6 à 3,4 UA (distance Soleil/Ceinture d’Astéroïdes 2,8 UA).

Donc une seule planète passe par la zone habitable mais elle est trop grosse et elle a une orbite trop excentrique. Et si on envisageait une lune de cette dernière, elle serait, de ce fait, soumise à des variations environnementales énormes.

Epsilon Indi

Epsilon-Indi est à 11,83 AL. C’est une naine orangée de 0,77 MS. L’étoile principale, Epsilon-Indi-A contrôle une planète Epsilon-Indi-Ab de plus de 3,25 masses joviennes (confirmée en Octobre 2019). Elle est « assortie » de deux naines brunes, étoiles avortées, doubles (distantes entre elles de seulement 2,5 UA), qui orbitent autour d’elle à quelques 1500 UA et d’une masse de 28 et 47 masses joviennes (respectivement 0,027 MS et 0,045 MS). Ce sont plutôt de très grosses planètes satellites que des concurrentes gravitationnelles (les naines brunes ont une masse de 13 à 75 masses joviennes soit de 0,01 à 0,07 MS).

A la distance où ces naines brunes se trouvent d’Epsilon-Indi-A, elles devraient pouvoir cohabiter du fait de leur sphère d’influence (sphère de Hill) limitée, avec quelques « vraies » planètes plus proche de l’étoile mais la seule observée, Epsilon-Indi-Ab, est extrêmement éloignée de la zone habitable (11,6 UA soit plus loin que la distance de Saturne -9,54 UA- et l’énergie reçue, l’irradiance, est égale à celle d’Uranus compte tenu de la masse de l’étoile). Pour le moment nous n’avons aucune indication de planète de type terrestre évoluant dans la zone habitable de l’étoile.

Tau Ceti

Tau-Ceti, distante de 11,90 AL est la dernière candidate. C’est une naine-jaune de 0,81 MS. Sa faible teneur en fer indique qu’elle est beaucoup plus vieille que le Soleil (estimation 10 milliards d’années soit plus du double de son âge). Sa zone habitable (fonction de la masse de l’étoile) est située entre 0,55 et 1,16 UA. Elle est entourée d’un disque de débris nettement plus important que celui du système solaire. On a identifié 4 possibilités de planètes telluriques mais aucune ne semble une nouvelle-Terre possible. Tau-Ceti-e est une superterre, de 4,29 MT orbitant à 0,55 UA ; elle est plus une planète du type de Vénus (en cas d’atmosphère proche de celle de la Terre, la température moyenne au sol serait de 68°C). Tau-Ceti-f est également une superterre, de 6,67 MT ; située à 1,35 UA, elle est nettement plus martienne que terrestre (pour ce qui est de l’irradiance). De plus il y a un problème général sans doute rédhibitoire, l’âge du système. La faible métallicité qui en résulte implique une insuffisance des éléments chimiques nécessaires à la vie et sans doute des difficultés graves pour un séjour humain prolongé.

Comme vous le voyez, pour le moment pas d’enthousiasme !

Mon pessimisme repose sur plusieurs hypothèses que je pense solides : l’impossibilité de conditions semblables à celles de la Terre dans les systèmes de naines-rouges ou d’étoiles multiples et bien sûr d’étoiles à cycle de vie court (blanches et géantes). Il reste quand même deux possibilités : 1) celle de découvrir une planète de masse terrestre dans la zone habitable d’Epsilon Indi ; 2) celle de découvrir une lune de masse terrestre ou martienne orbitant autour d’une géante gazeuse (une Pandora orbitant une Polyphème) située dans la zone habitable d’Alpha-Centauri-A. A noter que je n’ai pas évoqué Proxima-Centauri-b, la planète qui orbite dans la zone habitable de Proxima Centauri, bien qu’elle ait une masse assez proche de celle de la Terre (minimum environ 130%). La raison? C’est une planète de naine-rouge et elle est probablement d’une masse trop importante pour servir un jour de « nouvelle-Terre ». Cela n’exclut pas qu’on l’étudie.

Pour terminer sur les distances, je rappelle qu’il faudrait 20 ans à la vitesse de 20% de la vitesse de la lumière pour atteindre Alpha Centauri et 55 ans pour accéder au système de Tau Ceti. Comme par ailleurs il est moins qu’évident de pouvoir atteindre cette vitesse et ce d’autant plus que la masse de notre vaisseau serait importante, le projet d’aller visiter physiquement nos proches voisines reste encore largement un rêve. NB : je prends cette vitesse comme « étalon » tout en ayant bien conscience de la difficulté de l’atteindre car c’est la vitesse qu’espèrent les promoteurs de Breakthrough Starshot pour la flotte de voiles photoniques de masse unitaire de 2 grammes qu’ils veulent envoyer vers Proxima Centauri. Pour ce qui est de la communication par ondes, on mesure aussi la difficulté posée par la distance puisqu’un échange par télécommunication avec une sonde dans l’environnement d’Alpha Centauri mettrait près de 9 ans et dans celui de Tau Ceti, près de 24 ans, aller et retour bien sûr…après que la sonde soit arrivée sur place !

Même si l’espoir est ténu, une de nos priorités en tant qu’hommes reste de rechercher par tous les moyens dans des systèmes aussi proches que possible (irai-t-on jusqu’à 15 années-lumière ?), la présence d’un socle planétaire sur lequel nos descendants pourraient un jour se poser. Les premiers critères à sélectionner doivent être la gravité, la luminosité (donc aussi la température) et l’eau. La localisation en « zone habitable » n’est pas suffisante.

Illustration de titre: le système d’Epsilon Eridani. Vue d’artiste, crédit NASA (PIA11365).

illustration ci-dessous: Vue d’artiste du système stellaire d’Alpha Centauri. Crédit ESO/L. Calçada/N. Risinger — ESO, CC BY 4.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=23163877:

liens:

Stellar and substellar companions of nearby stars from Gaia DR2, par Pierre Kervella et al. in Astronomy & Astrophysics manuscript no. Nearby-PM-v5r1-arXiv, 11 février 2019, copyright ESO.

Epsilon Eridani  Backman_2009_ApJ_690_1522.pdf

lien: Stellar and substellar companions of nearby stars from Gaia DR2, par Pierre Kervella et al. in Astronomy & Astrophysics manuscript no. Nearby-PM-v5r1-arXiv, 11 février 2019, copyright ESO.

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Des étoiles naines de toutes les couleurs

Notre Soleil est une étoile assez banale, du type dénommé « naine jaune », à ne pas confondre avec « naine brune», « naine rouge » ou même « naine blanche », quoi qu’il soit précisément destiné à entrer dans cette dernière catégorie, avant de devenir beaucoup plus tard une toujours hypothétique « naine noire ». Mais ne vous inquiétez pas, nous ne serons plus là pour le voir car la transformation en naine blanche n’arrivera que dans plus de 6 milliards d’années et de toute façon, la Terre sera devenue inhabitable bien plus tôt et de surcroît l’espèce humaine telle que nous la connaissons aura disparu depuis très longtemps, du simple fait de l’évolution darwinienne.

Le « diagramme de Hertzprung-Russel » établi au début du XXème siècle par le Danois Ejnar Hertzprung et l’Américain Henry Norris Russel classe les étoiles selon leur « luminosité absolue » en fonction de leur température de surface et indirectement de leur masse. En effet plus une étoile est massive, plus son éclat est fort (et plus sa vie est brève) et inversement. Chacune d’entre elles peut passer au cours de sa vie par plusieurs positions sur ce diagramme en fonction de sa masse initiale qui détermine son évolution. Ainsi le Soleil qui est actuellement dans la « séquence principale » du diagramme est une naine jaune (luminosité « 1 » !) puis elle deviendra une géante rouge avant de devenir une naine blanche. La séquence principale des naines jaunes est située en dessous de deux groupes, un ensemble de « géantes », comprenant les géantes proprement dit, les sous-géantes, les géantes lumineuses, et le groupe des supergéantes ; et elle est située au-dessus des « naines-blanches ». Les « naines rouges » sont situées à l’extrémité « froide » de la séquence principale. Les « naines brunes » constituent un groupe à part.

Il faut voir qu’une étoile est une sorte de réacteur à fusion nucléaire, allumé par la simple pression interne résultant de sa masse concentrée par la gravité, à partir du moment où la densité du nuage de gaz et de poussière précurseur est suffisante pour déclencher sa concentration gravitationnelle. Le matériel initial est l’hydrogène, matière de base de l’Univers, qu’il s’agit de convertir, par nucléosynthèse, en élément plus lourd, le deutérium d’abord (mais c’est encore de l’hydrogène), l’hélium ensuite, et plus ou moins de « métaux » enfin (pas seulement de métaux au sens ordinaire mais tous les éléments plus lourds que les trois précités), en fonction de la puissance de la « machine » c’est-à-dire de sa masse. Plus la masse est importante plus on descendra dans le tableau de Mendeleïev vers le fer. Au-delà de la transformation « normale » de la matière stellaire, on dépassera le stade du fer lors de la séquence explosive de l’évolution stellaire (nova ou supernova), si elle a lieu, ce qui dépendra encore une fois de la masse de l’étoile.

La moins « puissante » des naines, la brune (la noire est une forme extrême que j’évoquerai plus tard), a une masse allant d’environ 13 à 75 fois celle de Jupiter (soit 0,07 masses solaires). C’est un objet hybride, plus chaud qu’une étoile mais pas suffisamment massif pour que sa densité interne permette une nucléosynthèse, si ce n’est marginalement celle de l’hydrogène en deutérium (hydrogène lourd). Le résultat de cette non-transformation interne est une très grande stabilité. Son histoire se résume à une lente contraction gravitationnelle et à un lent refroidissement (d’environ 2500 à environ 200 K). Il y a une infinité de naines brunes dans l’espace mais comme leur rayonnement est très faible, elles sont difficiles à observer, plus difficiles encore que le sont les exoplanètes dont le rayonnement interfère avec celui d’étoiles de masse supérieure. Il ne faut pas confondre ces naines-brunes, quasi-étoiles, avec les planètes orphelines ou errantes, c’est-à-dire ne dépendant pas d’une étoile. Ces dernières seraient par définition plus petites (en fait de toutes tailles inférieures à 13 masses joviennes, autrement ce seraient des naines brunes). On peut penser qu’elles ont fait partie à l’origine d’un système stellaire mais qu’elles en ont été éjectées (comme l’hypothétique cinquième planète de notre système solaire, entre Saturne et Neptune, peut-être éjectée par le retour de Saturne accompagnatrice de Jupiter dans son « grand tack », plus loin vers l’extérieur que leur lieu de naissance).

Les étoiles naines plus lumineuses que les brunes, les rouges, sont extrêmement communes dans l’Univers. Notre plus proche voisine Proxima Centauris est l’une d’entre elles et la plupart des exoplanètes observées à ce jour dépendent d’elles (leurs planètes sont relativement plus facilement observables qu’autour d’étoiles plus lumineuses ou massives car elles orbitent plus près d’elles et, pour une masse planétaire égale, leur contraste de luminosité ainsi que l’oscillation autour de leur centre de gravité commun sont relativement plus importants). Les naines rouges sont de véritables étoiles. Leur masse varie de 0,07 à 0,7 masses solaires ; leur température monte à quelques 4000 K et leur luminosité n’excède pas 10% d’une étoile de type solaire (elles émettent dans le rouge du spectre lumineux – elles rougeoient – et dans l’infrarouge). Leur nucléosynthèse (hydrogène vers hélium) est très lente et leur masse est entièrement convective c’est-à-dire que l’hélium résultant de la nucléosynthèse ne peut se concentrer au centre de gravité et que l’intérieur des astres reste donc homogène. Cette lenteur et le brassage permanent de la matière de l’étoile permettent aux réserves d’hélium de durer très longtemps et l’homogénéité est un facteur de stabilité. Leur longévité serait donc extraordinairement longue, plusieurs centaines de milliards d’années (NB : notre Univers n’a jailli du Big-bang qu’il n’y a que 13.8 milliards d’années) ; on n’a donc pas encore pu observer une fin de cycle pour ce type d’étoiles (épuisement de l’hélium). Cependant le fait qu’elles contiennent quelques éléments lourds (des « métaux ») impliquent qu’elles ne sont pas des étoiles primordiales (de première génération).

Les naines jaunes sont particulièrement intéressantes puisque notre Soleil est l’une d’entre elles. Au-delà de notre système, la plus proche est Alpha Centauri A. Elle se trouve à 4,5 années-lumière (notre galaxie, la Voie Lactée, fait plus de 100.000 années-lumière de diamètre) et il n’est pas impensable de pouvoir l’atteindre physiquement et d’abord avec nos robots (une vingtaine d’années seraient nécessaires selon les promoteurs du projet Breakthrough Starshot).

Leur masse varie entre 0,7 et 1,2 masses solaires. Elles pratiquent elle-aussi la nucléosynthèse mais de façon plus active que les naines rouges. La transformation de l’hydrogène en l’hélium se fait à partir du centre, comme chez les naines brunes ou rouges mais l’hélium se concentre au centre et évolue, par couche, vers la périphérie. Leur température de surface varie de 5000 à 6000°C mais au centre elle peut atteindre une quinzaine de millions de degrés. Elles ont une espérance de vie de l’ordre de 10 milliards d’années. Lorsque la réserve d’hélium de leur cœur est épuisée (le Soleil contient 74% d’hydrogène, 24% d’hélium et 2% de « métaux »), la fusion se propage dans les couches plus superficielles (la zone radiative puis la zone de convection) qui se dilatent de plus en plus du fait de la température et du fait qu’elles ne sont pas contraintes avec la même intensité par la gravité que le centre. Les naines se gonflent alors démesurément en géantes rouges. Le Soleil englobera ainsi Mercure, Vénus puis sans doute la Terre. A la fin de la phase de géante rouge, la température aura atteint une centaine de millions de Kelvin ce qui déclenchera le « flash de l’hélium », une réaction de fusion extrêmement rapide (quelques secondes) qui donnera du carbone et un peu d’oxygène. Ensuite, après quelques vicissitudes, les géantes rouges devenues très instables projettent leurs couches externes dans l’espace en une « nébuleuse planétaire » (notre système solaire, engagé dans son « nuage interstellaire local » traverse peut-être actuellement les vestiges d’une ancienne nébuleuse de quelques 30 années-lumière de diamètre…depuis quelques dizaines de milliers d’années et peut-être encore dix ou 20 mille ans, seulement un instant au regard des séquences de temps de l’Univers !). Après cette éjection, elles ne sont plus assez massives pour poursuivre leur nucléosynthèse au-delà du carbone, vers le néon, le sodium ou le magnésium. Il ne reste plus que leur cœur de carbone, très chaud (jusqu’à 100.000 K) et dense qui s’effondre sur lui-même en une « matière électronique dégénérée », devenant une naine blanche qui perdra peu à peu sa chaleur, très lentement car la sphère étant toute petite (ce qui restera du Soleil n’aura plus que le diamètre de la Terre) sa surface radiative sera très réduite. Un jour elle pourrait théoriquement devenir une « naine noire » dont la température serait celle de son environnement et dont plus aucune radiation ne sortirait. Mais ce dernier état reste hypothétique car l’Univers n’est pas encore assez vieux pour qu’une seule naine blanche ait atteint ce stade.

Comme évoqué plus haut, le Soleil aura bien avant le stade de géante rouge, dans « seulement » quelques 500 millions d’années, éradiqué toute vie de la surface de la Terre. En effet ses radiations et sa température vont augmenter continûment du seul fait de son « fonctionnement » interne et la hausse des températures va augmenter continûment l’évapotranspiration : l’atmosphère comprendra de plus en plus de vapeur d’eau et cette vapeur d’eau absorbera de plus en plus de gaz carbonique. Les plantes manqueront de ce gaz qui permet leur photosynthèse. Les espèces végétales terrestres puis marines disparaîtront progressivement…ainsi que les animaux qui s’en nourrissent. 500 millions d’années c’est beaucoup puisque par symétrie dans le temps on remonterait dans le passé jusqu’à l’époque cambrienne, au début de l’éon phanérozoïque (celui de la vie animale) qui a commencé il y a 541 millions d’années et puisque la divergence entre homme et singe n’est survenue qu’il y a environ 7,5 millions d’années. Il faut bien voir que sur cette durée mais déjà sûrement dans une dizaine de millions d’années, l’homme et son environnement auront profondément changé de par la simple évolution darwinienne. Dans 500 millions d’années d’une manière ou d’une autre, nous ne serons donc plus là. Nous aurons passé le flambeau à une autre ou plutôt à plusieurs autres espèces et on ne peut qu’espérer qu’au moins l’une d’entre elles aura conservé et fait prospérer l’Intelligence et la Sensibilité.

Les naines blanches sont donc « notre » futur, par succession de formes de vie en devenir au delà de la nôtre. Il est catastrophique mais il est très lointain. Nos éléments constitutifs, au niveau de l’atome, résultant de notre désintégration, que le Soleil aura engloutis, seront traités comme le reste de la matière absorbée et expulsés vers l’espace dans une nébuleuse planétaire et un jour peut-être, par suite de quelque phénomène de nouvelle concentration de matière, seront intégrés à un autre système planétaire. Si notre étoile était plus massive l’aventure ne s’arrêterait pas là. En effet pour les étoiles qui dépassent les 8 masses solaires, la naine blanche aurait une masse supérieure à 1,4 masse solaire (« masse de Chandrasekhar ») et l’équilibre entre la gravité et les forces de pression serait impossible ce qui conduirait le cœur à une explosion en supernova et à un surcroît d’enrichissement en métaux de cette matière disséminée dans l’espace.

En attendant nous avons beaucoup de belles choses à accomplir pour nous accomplir nous-mêmes. L’une d’elles est la recherche urgente et avide de connaissance et de compréhension de l’Univers autant que nous le permettent nos progrès technologiques et entre autres, la recherche ailleurs que dans notre système solaire de traces d’une autre vie ou plutôt, d’une évolution vers la vie, pour au moins mieux comprendre ce phénomène à ce point extraordinaire qu’il est probablement unique, du moins dans sa forme la plus développée que nous incarnons. La tâche est difficile car la complication supplémentaire à celles déjà évoquées dans ce blog est que toute étoile, même accompagnée de planète(s) dans sa zone habitable, n’est pas forcément un centre dispensateur de conditions suffisantes à la vie. Les géantes ont une vie trop courte, les naines brunes sont trop froides et les naines-rouges ont une zone habitable trop proche. Reste les naines jaunes d’un certain âge (pour avoir permis le lent développement que nous avons-nous-mêmes connus) nées dans un univers déjà riche en métaux (ce qui exclut les deux tiers de l’histoire de l’Univers), pas trop proche du centre galactique (trop de perturbations et de radiations) et pas trop loin non plus (un minimum est requis pour disposer d’une bonne métallicité)…De telles étoiles « ne courent pas les rues » !

Illustration de titre :  Tablizer traduit par Kokin — Traduction de l’image sous licence GFDL issue de la wikipedia anglophone

Illustration ci-dessous : le diagramme de Hertzprung Russel (créé par Richard Powell, avec sa permission pour une diffusion sur Wikipédia).

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