Nos contemporains conscients doivent effectuer une révolution copernicienne. Encore plus que la Terre, notre « planète-A », ce qui compte c’est la vie, notre vie ou plutôt celle de notre espèce, petite pousse d’un rameau perdu à l’extrémité de notre arbre phylogénétique et sa concrétion la plus aboutie.
Bien entendu la Terre est notre mère et nous vivons toujours d’elle comme des enfants non sevrés. Il n’est pas question de déprécier son importance et de ne pas faire tout notre possible pour ne pas l’épuiser, la faire vieillir prématurément, l’enlaidir. Nous devons prendre soin d’elle avec sollicitude et avec amour.
Mais un jour, certains d’entre nous devront partir pour porter ailleurs la vie qu’elle nous a donnée. Le refuser ferait de ceux qui en seront capables, des ingrats ou des jouisseurs égoïstes et paresseux.
Bien sûr nous ne pourrons tous partir et certains partiront et mourront. Toutes les graines ne germent pas.
Ce que je veux dire c’est que de toute façon nous sommes uniques et que cela nous oblige. La probabilité d’une autre espèce consciente, intelligente, communicante et constructrice dans notre petit coin de l’Univers est extrêmement réduite et aucune autre (s’il en existe) ne partagera notre histoire, nos sentiments qui font que nous sommes des êtres humains et ne pourra remplacer l’accumulation des créations intellectuelles dont nous sommes porteurs et que nous voulons préserver, transférer à nos descendants.
La planète-B n’est pas étiquetée comme telle, nulle carte ne l’indique, mais elle le deviendra si nous l’adaptons au moins en petite partie à nos besoins vitaux, si nous nous adaptons nous-mêmes aux contraintes qu’elle nous imposera et si nous nous y établissons. Et il y en aura plusieurs si nous décidons de « partir ». Sa première version sera évidemment Mars puisque nous savons aujourd’hui que nous disposerions du nécessaire pour y survivre, donc y vivre et y prospérer. Et ensuite il y en aura d’autres. Chaque fois ce sera difficile, encore plus difficile que difficile, mais à chaque étape notre technologie aura évolué et nous permettra d’aller plus loin et de « faire mieux ».
A chaque époque ses défis. Nous avons jadis quitté l’Afrique (ou le « Paradis ») et sa douceur de vivre pour aller vers le Nord, aux nuits froides, aux longs hivers sans fruits et aux forêts désertes de nos semblables mais pleines de dangers et de dragons supposés plus que réels. D’autres se sont lancés sur leurs pirogues, des rives du continent eurasiatique ou du bout de l’archipel indonésien, à l’assaut de l’Océan Pacifique sans savoir s’ils trouveraient une autre terre pour les accueillir une fois que leurs provisions seraient consommées. Les derniers d’entre eux avec Hotu-Matua sont arrivés jusqu’à Rappa-Nui après avoir bu leur dernière goutte d’eau douce et les avant-derniers, Alacaloufes, descendus depuis le détroit de Béring dans ce qui deviendra l’Amérique, sont parvenus à l’autre bord du monde et y sont restés puisque de l’autre côté il n’y avait plus rien qu’un continent de glace où ils ne pouvaient pas vivre.
Nous avons atteint l’âge du départ vers les étoiles et à notre tour il faut maintenant oser partir.
NB : Remerciement à mon ami Patrick Sibon, de Marseille, qui a évoqué cette idée d’humanité-B. Si on la considère, tout change. Encore plus que la planète c’est notre humanité qu’il faut sauver car cette dernière est encore plus précieuse que son support. La Terre vide d’hommes n’aurait littéralement aucun sens puisque le sens est en nous.
Image de titre :
Mars au lever du Soleil (vue d’artiste): pourquoi ne pas aller s’installer sur notre planète voisine ? Cela vous effraie-t-il ? Moi, non et je ne suis pas le seul. Donc, « nous » irons !