Trafic d’êtres humains

 

 

 

Hergé, Coke en stock, 1958 (tous droits réservés, Casterman).

En 1958, Hergé publie le 19e album des aventures du reporter sans plume Tintin : Coke en stock.

Cet humaniste conservateur y dénonce le terrorisme d’État, le renversement du gouvernement légitime, le trafic des armes de guerre par les mercenaires nostalgiques du colonialisme et la traite des êtres humains par les négriers capitalistes.

Tintin contre le commerce meurtrier des êtres vivants.

Une économie très rentable !

Celle de la vie humaine qui longtemps a nourri la traite mondiale des esclaves – d’abord “orientale” (interne à l’Afrique) puis atlantique selon Olivier Grenouilleau (Les Traites négrières: Essai d’histoire globale, Paris, Gallimard, 2005) ou Marcus Rediker A bord du négrier: Une histoire atlantique de la traite, Paris, Seuil, .

En Mer rouge — cadre géopolitique de la rocambolesque aventure dans la poudrière proche-orientale qui part de et revient à Moulinsart — les négriers  modernes vendent et achètent des être humains. Soit des migrants africains détournés de leur pèlerinage vers La Mecque. Orchestrée dans l’ombre par le milliardaire Rastapopoulos qu’adule la jet society, la traite des humains embarqués comme du bétail  sur un cargo trafiqué s’y effectue sous le langage codé de ” coke en stock ”  – soit réserve d’esclave.

Atrocité de l’esclavage qui provoque la colère homérique de Haddock paternaliste – la plus tonitruante peut-être de toute la saga !

Comme beaucoup d’autres épisodes, cet album minimaliste d’Hergé n’a rien perdu de sa puissance narrative .

Son actualité politique reste vive.

Plutôt pessimiste comme d’autres épisodes de la saga (Tintin et les Picaros, 1976).

Aujourd’hui, le trafic d’êtres humains est  un fléau planétaire.

Le revers terrifiant de la mondialisation. La tragédie humanitaire des réfugiés et des exilés qui fuient le dérèglement climatique, la guerre, le répression politique ou les génocides pour aspirer légitimement à la protection internationale (HCR) du droit des personnes.

La tragédie quotidienne réactive le trafic des êtres humains. Notamment entre l’Afrique et l’Europe, les réseaux maffieux des passeurs prospèrent sur la détresse humaine. Au prix fort.

Celui du racket.  Du kidnapping. De la prostitution.De la maltraitance des enfants.

Mais aussi celui de l’intimidation et des représailles familiales, voire de la mise en esclavage,  avec des complicités étatiques.

S’y ajoute l”économie de la mort”.

L’ ” économie de la mort ” escorte le trafic des êtres humains. Elle la conditionne. Elle en est la composante essentielle. Elle en est le ressort. Elle génère les profits considérables des réseaux de passeurs. Elle draine des capitaux substantiels vers le secteur bancaire occidental. En Libye, le trafic des migrants pèse 4.5 milliards de dollars. Au bas mot.

Si les les Dingy en bois sont bricolés dans les pays voisins du départ de l’exil, ceux “insubmersibles” en caoutchouc sont usinés en Chine. Avec les moteurs de hors-bord, leur commerce mondial est plutôt juteux. Importés par des grossistes cosmopolites, ils sont exportés via  Malte par containers maritimes en Libye ou d’autres rivages méditerranéens du désespoir. Les services douaniers sont impuissants  à contrôler et confisquer des marchandises dites “commerciales”. L’économie libérale est intouchable. Même celle de la mort programmée.

Embarqués sur les frêles esquifs achetés à prix d’or au marché noir de la survie, d’innombrables réfugiés naufragent dans la Méditerranée centrale.

S’y noient les femmes et les enfants d’abord.

L’exil au prix de la vie. Au prix de l’économie de la mort.

Au prix de notre aveuglement ou de notre impuissance devant la trafic des êtres humains.

Comment l’abolir? La colère du capitaine Haddock est insuffisante.

Même avec un porte-voix !

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