Fioretti

Dans sa jeunesse, La Ligne Claire avait grandi en Italie ; le motorino que son père lui avait offert auxquels venaient s’ajouter dix puis vingt mille lires d’argent de poche suffisaient à son bonheur, une fille du lycée assise en amazone derrière lui les cheveux au vent, en ces temps où sévissait l’inflation et où Celentano chantait Svalutation.

Aujourd’hui La Ligne Claire ne se hasarderait plus guère sur un motorino, moins encore avec une fille. C’est donc en voiture qu’il s’est rendu ces jours-ci à Bologne, certes pas un insider tip mais néanmoins à l’écart des grandes destinations touristiques que constituent Venise, Florence et Rome. Bologne est la ville qui abrite la plus ancienne université d’Europe, dont on peut visiter le siège, l’élégant Palais de l’Archigymnase, datant du XVIe siècle, restauré après sa destruction causée par le bombardement américain de la ville en 1944. Initialement destinée à bombarder Prato, une ville industrielle au nord de Florence, l’escadre aérienne n’avait pu mener à bien sa mission en raison de la météo. Mais les bombes, oui les bombes, on ne va pas tout de même les ramener à la maison ? Alors, bombardons plutôt Bologne et tant pis pour neuf siècles de culture, on balaiera après la guerre.

Septante ans plus tard, parmi les milliers d’étudiants qui fourmillent dans toute la ville, on observe ici et là un professeur d’uni américain : pantalon de toile claire, veste de velours, chemise en coton avec boutons de col, suivi d’un groupe d’étudiants dont on imagine qu’ils répètent « Captain, my captain » indifférent semble-t-il aux ravages causés par son grand-père, capitaine de l’US Air Force.

Les Bolonais ne lui en tiennent pas rigueur car nous sommes ici en Emilie-Romagne, le pays du catho-communisme, illustré par les comédies de Don Camillo et Don Peppone et visible ici sous la forme de l’imposante statue du pape Grégoire XIII sur la façade du Palazzo Comunale,  qui semble faire bon ménage avec les partisans communistes tombés sous les balles fascistes lors de la libération de la ville, et dont les photos ornent la même façade.

Et puisque le Palazzo Comunale est un lieu public, franchissez-en le portail, personne ne vous demandera ce que vous venez faire là, gravissez la monumentale cage d’escalier et, arrivé sur le palier, entrez dans l’imposante salle Farnese d’où vous jouirez de la meilleure vue sur la Piazza Maggiore qu’on puisse avoir. Mais surtout, puisque le public c’est vous, admirez les fresques de Fontana, celle figurant François Ier de passage à Bologne auréolé de sa fraîche victoire à Marignan ou celle dépeignant le couronnement de Charles-Quint, dernier empereur à avoir été couronné par le pape, auréolé de sa victoire à Pavie en 1525 sur son compère François. And so to bed.

 

Mont Saint Michel

Michaelmas

Ce terme désigne en anglais la fête des archanges qui tombe le 29 septembre mais aussi le trimestre d’automne de l’année académique dans les universités de langue anglaise. Peu de lecteurs en feront grand cas. On retrouve dans la Bible trois archanges, Raphaël, Gabriel et Michaël ou Michel, le prince des archanges. Mentionné à peine une demi-douzaine de fois dans la Bible, l’archange Michel est singulièrement présent dans le paysage artistique européen.

Sans doute, sa manifestation la plus visible est-elle celle du Mont Saint-Michel dont les lecteurs des aventures de Lefranc dans l’épisode de l’Ouragan de Feu se souviendront. Ailleurs, le saint ailé se dresse sur la flèche de l’hôtel de ville de Bruxelles, d’où il terrasse le dragon car il est dit de lui dans l’Apocalypse (XII, 7) qu’à la tête de ses anges, il engagerait une bataille céleste avec le Dragon, et que bien entendu, ce dernier aurait le dessous.

A Rome, le Dragon a, au cours des siècles, pris tantôt l’aspect des Goths, tantôt celui des soldats de Charles VIII roi de France ou encore celui des lansquenets de Charles V. C’est sans doute la raison pour laquelle, des papes successifs, mus par la prudence qu’exige leur office, ont jugé bon non seulement de fortifier l’antique mausolée d’Hadrien mais de le placer sous la protection de l’archange dont une statue couronne désormais l’édifice. Car le saint ange du Château Saint-Ange n’est autre que l’archange Michel.

Que ceux que ces histoires de sanctuaires ennuient se rassurent car si Michel s’est révélé impuissant pour empêcher que la Tosca ne se précipite dans le Tibre, il reste présent dans notre vie quotidienne. Un verre de San Miguel à la main, on pourra, selon les âges, écouter de la musique chantée par Sir Michael Jagger ou par Michael Jackson et évaluer les chances qu’a Michel Platini de succéder à Joseph (un autre nom biblique) Blatter à la tête de la FIFA.

FB-f-Logo__blue_512La Ligne Claire est également disponible sur Facebook.