Pape François

Synode et Chemin synodal

Il y a quelques mois, à l’issue d’une messe qu’un prêtre allemand ami de La Ligne Claire avait célébrée sous les murailles du château centenaire de sa famille, il lui confiait que l’intention cachée derrière le Synode sur la synodalité lancé en 2021 était de noyer le Chemin synodal allemand qui avait lui démarré en 2019. La mise en garde très sévère émise par le Saint-Siège à l’égard du Chemin synodal dans un communiqué daté du 21 juillet dernier semble confirmer ce point de vue.

On se souviendra que lors des JMJ de Rio en 2013, peu après son élection, le Pape François avait enjoint les jeunes à « mettre la pagaille » dans l’Église. Cette première injonction s’est révélée assez typique du pontificat, qui laisse volontiers courir les initiatives, dont certaines se révèleront à la lumière du discernement portées par l’Esprit Saint et d’autres pas. Dans ce contexte, le Chemin synodal que le Pape avait du reste encouragé dès juin 2019, est bien le fils de François.

Entretemps le Chemin synodal a approuvé des résolutions qui exigent des changements radicaux dans quatre domaines : l’ordination d’hommes mariés, l’ordination de femmes, la gouvernance de l’Église et une nouvelle approche doctrinale au sujet de la sexualité humaine, dont en définitive seul le premier est susceptible de faire l’objet d’un débat à l’échelle de l’Église universelle. Une déclaration récente de la présidente du comité central des catholiques allemands en faveur de l’acceptation de l’avortement, qui contredit de front non seulement la position de l’Église mais le point de vue personnel du Pape François, a sans doute eu raison de la bienveillance pontificale et déclenché la publication de ce communiqué.

La question pour le Pape François portait donc sur la façon de discipliner cet enfant turbulent. Déjà des voix alarmées s’étaient élevées de la part d’évêques aux Etats-Unis, en Pologne et d’ailleurs qui craignaient les dérives schismatiques de l’Église allemande. La pagaille allemande n’a donc pas porté de fruit, estime le Pape qui, selon le journal La Croix porte un jugement critique plus sévère encore en privé qu’en public : « Ce n’est pas un synode, ils ont oublié l’Esprit-Saint ». Toujours selon La Croix, le cardinal allemand Walter Kasper, proche du pape et réputé libéral, estime que le défaut de naissance du Chemin synodal est de s’être appuyé sur les sciences humaines plutôt que sur l’Évangile.

Pour le Pape François, le temps des anathèmes est révolu ; surtout il existe un précédent en Allemagne car l’excommunication de Luther en 1521 a contribué à la division de l’Église plutôt qu’œuvré à la consolidation de son unité si bien qu’il lui fallait trouver un autre moyen. Il ne fait guère de doute dans l’esprit de La Ligne Claire que le Synode sur la synodalité corresponde à la vision qu’entretient le Pape François pour l’Église. Mais l’exigence, dans un sec communiqué d’intégrer justement les propositions allemandes dans le Synode sur la synodalité, a l’heureux effet de bel et bien noyer le poisson du Chemin synodal.

La Reine Elisabeth II

Le jubilé de platine d’Elisabeth II

Célébré le mois dernier, la Ligne Claire juge que ce Jubilé représente un grand succès pas seulement pour la souveraine mais pour l’institution monarchique elle-même.

Ces quatre jours de célébration ont en effet fourni l’occasion de mettre scène la majesté propre à l’institution, le décorum qui l’entoure mais surtout la famille royale elle-même qui l’incarne, une famille à la fois sui generis et semblable aux autres en définitive, avec ses joies et ses peines, les naissances, divorces et les deuils et son lot de querelles.

Le clou cependant réside dans l’apparition au balcon du palais de Buckingham de la reine et de ses trois successeurs, quatre générations qui sont appelées selon leur âge à grandir, se marier, vieillir et mourir, illustrations de la monarchie, à la fois immuable et changeante. C’est la raison pour laquelle, de l’avis de La Ligne Claire, l’institution monarchique constitue la forme idéale de représentation de la nation, qui elle aussi change sans cesse tout en restant elle-même.

Le contraste avec Elisabeth Ière est saisissant, alors qu’elle ne s’est jamais mariée de sorte qu’il n’y a pas à son époque un héritier unique dont la légitimité est incontestée. La scène du balcon il y a quelques semaines avait donc pour objectif de montrer au public que la reine et ses descendants ont rempli leur rôle premier qui est celui d’engendrer non pas un héritier, mais trois. Plus qu’un succès, c’est un triomphe.

La Ruse

Le film La Ruse s’inscrit de plein pied dans le genre anglais des period dramas, c’est-à-dire des films ou des séries historiques, qui accordent une belle place aux décors et aux costumes évocateurs de la période en question ; Downton Abbey et The Crown en fournissent des exemples récents.

Si, aux yeux de La Ligne Claire, le genre n’est pas dépourvu de charme, il ne fournit pas non plus ipso facto le gage d’un bon film.

Nous sommes à Londres en 1943. La ruse dont il s’agit ici consiste à faire croire aux Allemands que le prochain débarquement allié se déroulera en Grèce plutôt qu’en Sicile. L’Angleterre n’a pas son pareil pour produire, particulièrement en temps de guerre, des aristocrates excentriques qui inventent ici l’histoire vraie d’un cadavre muni d’une mallette qui recueille de papiers prétendument secrets, qui sera largué au large de Cadix. Leur intention est de s’assurer que les autorités de l’Espagne de Franco s’en emparent et transmettent le contenu de la mallette à l’Abwehr, le service de renseignement allemand, en dépit des (fausses) protestations de l’Amirauté britannique. C’est l’Opération Mincemeat, l’Opération Viande Hachée, brillante et farfelue.

En 2010, Ben Macintyre en a tiré un livre palpitant, où il traite cette histoire vraie à la manière d’un polar et où verra apparaître Ian Fleming, le futur auteur de James Bond.

Rien de tout cela ne transpire dans le film. De l’avis de La Ligne Claire, le réalisateur John Madden non seulement n’a pas su recréer la tension inhérente à cette intrigue compliquée mais au contraire se sent contraint de l’expliquer au spectateur qui navigue entre l’incompréhension et l’ennui. Pour donner le change, il se réfugie derrière l’académisme qui préside aux canons du period drama, ici des uniformes d’officiers de marine et des personnages, dont le principal est incarné par Colin Firth, qui affectent de parler avec un accent qui, même au sein de la famille royale, n’a déjà plus cours. Une intrigue amoureuse, inventée cette fois-ci, demeure trop superficielle que pour émouvoir le spectateur et le tirer du long ennui où l’a plongé ce film de 147 minutes.

Aussi, amis lecteurs, La Ligne Claire vous enjoint à vous passer du film et à vous plonger dans le livre de Macintyre.