Cathédrale de Lausanne

Pape et empereur à Lausanne

Le Moyen Âge dit central se plaisait dans la construction de cathédrales, dont celle de Lausanne constitue assurément le plus bel édifice de style gothique en Suisse.

Le siège épiscopal de Lausanne remonte aux temps reculés du Royaume de Bourgogne mais l’édifice que nous avons aujourd’hui sous les yeux date lui du XIIIe siècle. Les hommes de cette époque-là ne savaient pas qu’ils vivaient au Moyen Âge ni non plus que, mille ans plus tard, leurs descendants se sentiraient un peu gênés de cette période de leur histoire que les Anglais n’hésitent pas à appeler The Dark Ages. Non, les hommes du XIIIe siècle eux vivaient dans un espace géographique, religieux et culturel qui s’appelait la chrétienté et dont ces cathédrales formaient le témoignage visible. Car ces cathédrales, c’était toute une affaire et c’est pourquoi, à l’occasion de la consécration solennelle de la cathédrale, et le pape, Grégoire X et l’empereur, Rodolphe de Habsbourg, firent le déplacement.

Tebaldo Visconti, archidiacre du puissant évêché de Liège, était réputé pour sa vie austère. Elu pape pour cette raison-là, il prit le nom de Grégoire X et s’empressa de convoquer un concile à Lyon, dans le but notamment d’assurer la réunion des Eglises grecque et latine. C’est de là, qu’en remontant le cours du Rhône, il joignit Lausanne.

Rodolphe, lui, c’était presque un gars du pays. Petit prince possessionné en Argovie, élu précisément pour cette raison-là en qualité de candidat de compromis pour mettre un terme à vingt-trois ans d’interrègne, il allait assurer à sa Maison la destinée que l’on sait.

On imagine la rencontre. « Hi, Greg », « Salü Rudi » non, sans doute pas, plutôt « Sainteté », « Majesté » car au XIIIe siècle, le pape et l’empereur, ce sont les deux faces d’une même médaille ; au premier revient la charge pastorale de l’unique peuple de Dieu, dont le second assure le gouvernement dans le siècle. C’est pourquoi ils président conjointement à la consécration d’une cathédrale. C’était à Lausanne en 1275, là où les observateurs attentifs reconnaissent ce X de la croisée du Camino et de la Via Francigena.

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Cathédrale de Lausanne

Lausanne, carrefour des nations

Sur le parvis de la cathédrale de Lausanne est dessiné un X imaginaire, comme celui qui figure sur les parchemins qui désignent l’emplacement du trésor dans les films de pirates, un X secret à découvrir, un X sur la carte de l’Europe, à l’endroit précis où se croisent le chemin de Compostelle et la Via Francigena, un X à creuser au couteau suisse pour découvrir ce que Montaigne appelait « Plus est en toi ». Le premier de ces chemins prend sa source aux marches du Saint-Empire tandis que la Via Francigena relie d’un trait Canterbury à Rome. Tant le Camino que la Via ont reçu du Conseil de l’Europe l’accolade d’Itinéraire culturel européen.

Lausanne, carrefour des pèlerins, qui l’eût dit? Là sur le parvis on est confronté au choix, pourvu que l’on en soit informé, de se rendre au chevet de saint Jacques ou à celui de saint Pierre. Dans les faits seul un coquillage indique la direction à suivre, le long des rives du Léman vers Genève et par-delà vers Compostelle. Dans l’autre sens, pas de clés de saint Pierre qui pointent vers Rome, pas de panneau portant la mention VF, pas de petit moine avec capuche et bourdon car en Suisse la Francigena demeure peu connue et pour cette raison pas signalée en tant que telle si bien qu’elle ne forme qu’un tronçon du chemin de grande randonnée numéro 5.

Voie des Francs qui se rendaient en Italie, la Via traverse le territoire actuel de Suisse de Vallorbe au col du Grand Saint Bernard, mais il n’y a guère qu’à l’abbaye de Saint Maurice en Valais qu’on prend conscience de parcourir un itinéraire de première importance au Haut Moyen Age ; là, juste devant l’église abbatiale, une grande carte de la Via dessinée sur le mur du petit bâtiment qui sert de billetterie, rappelle que l’abbaye s’insère au sein de l’univers culturel que parcourt la Via, un univers où la cathédrale gothique de Lausanne se glisse comme un grain sur un chapelet entre celles de Canterbury, de Laon, de Reims et de Sienne, sentinelles d’une époque où l’Europe s’appelait la Chrétienté, voulant par là désigner justement un espace autant culturel que géographique.

(A suivre)

http://www.viefrancigene.org/fr/

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