Le faux procès fait à la Documenta 15

Cette année, il n’y avait donc pas vraiment de “stars” à Cassel. Pas d’artistes entrepreneurs en attente des effets bénéfiques de leur participation sur leur cote. Ruangrupa, le collectif indonésien qui en assurait le commissariat a sciemment boycotté le système de cooptation en vase clos qui fait qu’on se rend à la Documenta pour mieux se vendre à la foire de Bâle ou de Miami. Dans le plus pur esprit situationniste, l’art est redevenu, le temps d’une Documenta, une activité collective, parfois alimentaire et lucrative, mais jamais spéculative. La manifestation est aussi très politique, ouvertement engagée dans certains des grands chantiers de notre époque, l’égalité des genres, l’éveil anticolonial, l’écologie politique ; une constellation de tout ce que notre monde, déchiré entre pandémie et guerre, peut encore produire d’intelligent et de critique sur le front de l’art. Si la Documenta 15 s’inscrit parfaitement dans la démarche politique et documentaire initiée par Catherine David en 1997, elle en constitue ainsi une forme d’intensification. Plus radicale, moins consensuelle, elle apporte une véritable réponse à ce qui apparaît de plus en plus comme la principale menace pour le monde de l’art contemporain : sa dévitalisation. La Documenta 15 replace l’art là où la modernité l’avait imaginé : au cœur des processus d’émancipation sociale. Un tel projet, qui témoigne d’une indifférence assumée à l’art institutionnel et commercial, pouvait difficilement ne pas faire l’objet d’amertume de la part de ceux qui s’en sentent exclus.

Taring Padi à Cassel en 2022.

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