On ne saurait dire avec certitude si l’immeuble de la rue Beauregard est le plus beau de Genève. Ce que l’on peut dire sans trop de risque de se tromper, c’est que le destin de cette belle bâtisse du XVIIIe siècle est étroitement lié à l’histoire de Corpus. La dernière rénovation d’un appartement dans ce chef-d’œuvre du néoclassicisme genevois n’est en effet que le dernier acte d’une série d’interventions qui se perdent dans l’histoire de l’agence.
Pas moins de neuf interventions entre 1997 et aujourd’hui font de l’agence les dépositaires d’une précieuse connaissance de l’ensemble classé. Chaque intervention, qu’il s’agisse de réparer une toiture, de refaire une façade, d’installer un ascenseur ou d’aménager les caves voûtées, a été l’occasion de fouiller dans les archives, d’en dénicher de nouvelles et de retravailler le cadre administratif strict qui conditionne l’intervention sur le bâtiment.
Projet après projet, Corpus a appris à connaître ses murs, tout comme un archéologue connaît d’avance ce qu’il cherche. Ils ont appris à voir ce qui n’est pas nécessairement référencé dans la documentation existante, à anticiper les couches d’aménagement dissimulés. Si ce lien étroit entre les architectes et leur objet d’étude peut s’apparenter à de l’artisanat, il instruit surtout une autre manière de faire de l’architecture.
Un architecte qui serait à l’acte de construire ce que le médecin traitant est à la médecine. Une pratique ajustée, attentive à l’existant, capable de s’effacer derrière ce qu’elle configure. Une architecture de la connaissance profonde des choses, et de l’expérimentation pour ajuster les solutions et matériaux standards du XXIe siècle au bâti à préserver, transformer ou restaurer.
Ce projet et son importance dans l’histoire du bureau est révélateur d’une époque où la transformation n’est plus pensée comme un acte secondaire, mais comme la forme d’architecture la plus aboutie, la plus légitime. Là où la construction neuve est de plus en plus standardisée, conditionnée par les nouveaux outils de coordination et de formatage numérique, le travail sur l’ancien devient le terrain de déploiement d’une architecture plus ajustée, portée par une compréhension multifactorielle de l’objet à reconstruire. C’est aussi le lieu où une véritable sensibilité environnementale peut s’exprimer dans la capacité à maintenir plutôt qu’à remplacer ce qui peut l’être. Pour toutes ces raisons, l’acte de construire dans l’existant peut légitimement prétendre incarner l’activité architecturale dans sa forme la plus aboutie. Une documentation plus fournie sur l’immeuble Beauregard est disponible sur le site du bureau CORPUS.
Merci de nous avoir entr’ouvert les portes de cet immeuble unique, dont on dit qu’il manifeste “le plus pur classicisme” genevois. Qui n’a pas été intrigué et impressionné en passant sous ses murs par sa masse imposante, solitaire sur son terre-plein, qui le détache du reste de la vieille ville comme un monde à part, énigmatique pour qui n’a pu en pénétrer les arcanes? Chez le passant la “folle du logis” se met à fantasmer de toutes sortes d’histoires et d’intrigues qui ont pu s’y dérouler entre ses murs autrefois. Sans doute la réalité, pour peu qu’il s’y intéresse, lui paraîtrait-elle plus prosaïque mais au fait, que connaît-on de l’histoire de cet immeuble?
Pour en savoir plus, j’ai consulté le site de l’agence CORPUS et ne regrette pas d’avoir fait le détour. Il donne une première idée déjà riche en informations sur les remarquables travaux de rénovation de l’immeuble, comme vous le relevez à juste titre. Alors, pourquoi ne pas indiquer l’adresse du site de CORPUS? Elle vaut bien le détour eu égard à l’importance architecturale et historique de l’immeuble de la rue Beauregard: https://corpus.ch/fr/portfolio/renovation-dun-patrimoine-rare.
Mais ne serait-il pas intéressant de mieux connaître non seulement les fondateurs de cet immeuble mais aussi ses occupants? Georg a publié un ouvrage, “Département des travaux publics et de l’énergie / Service des monuments et des sites. Répertoire des immeubles et objets classés”, Chêne-Bourg / Genève : Georg, 1994, pp. 190-191, qui devrait fournir quelques pistes de recherche mais je n’ai pu en trouver la trace sur le site de l’éditeur. Existerait-il des documents aux archives municipales sur cet immeuble et son histoire?
Merci pour le lien que j’ajoute à l’article.