Les ambulanciers défient les indignités

À l’occasion de la publication de son nouveau site internet, lÉcole Supérieure d’Ambulancier et de Soins d’Urgence Romande (ES ASUR) présente sur sa page d’accueil un Guide de gestion des abus et des harcèlements.

Gestion des abus et des harcèlements

Le monde professionnel préhospitalier est aussi concerné par les abus, les harcèlements et les discriminations. Les uns comme les autres pouvant sévir en tout temps et défigurer collaboratrices, collaborateurs, stagiaires, sans compter les cohésions d’équipes au sein des services d’exploitation.

(2 minutes de lecture – le féminin est compris dans le texte – 115ème post)

Spécialement conçu pour les ambulancières et ambulanciers en exercice, cet outil de gestion en 10 points, comme 10 étapes, complète les actions de prévention, les mesures de gravité et de détection enseignées au sein de l’école supérieure ASUR depuis 2016. Ce guide a été élaboré par une psychologue d’urgence et un économiste d’entreprise puis étayé et complété de 2017 à 2021 par une coalition pluridisciplinaire composée d’experts en ressources humaines, soins d’urgence, travail social et police.

Guide pratique et comportemental

Durant les formations initiales et continues dispensées par l’ES ASUR à destination des futurs ambulanciers mais aussi de leurs chefs et adjoints de service, des cas de figure concrets ont été traités en ateliers. Depuis lors, ce sont plusieurs services d’ambulances qui mettent en œuvre ces enseignements dans leurs organisations. Ainsi, du bassin lémanique jusqu’à Neuchâtel, des outils de prévention et de résolution des problèmes sont développés conjointement par les praticiens et leurs cadres à tous les échelons décisionnels et opérationnels.

C’est le but de tout employeur que d’assurer la protection de ses employés, de la théorie à la pratique. En clair : incarner les expériences et leurs analyses dans la transformation du management.

Sinon, à quoi servent les formations d’adultes ?

Transcrire, dupliquer, compléter

Vaincre l’harcèlement c’est aussi – veuillez excuser le côté méthodique qui ne saurait supplanter les souffrances humaines – de l’organisation et de la détermination. C’est pourquoi si je devais retenir une composante utile de ce guide, plutôt qu’une autre, ce serait sans nul doute les conseils relatifs aux points 7. , 8. et 9. invitant les victimes et les éventuels témoins à documenter et compléter les méfaits subis ou/et leurs observations. Comme le précise ledit document, toute transcription a un effet thérapeutique très important mais permet aussi, des années plus tard, d’évacuer les doutes et les relativisations (dès lors qu’elles existent) peu productives des entourages familiaux ou professionnels.

Et, si la force venait à manquer, n’oublions pas que les régulateurs téléphoniques (144) et les ambulanciers sont des professionnels de toute première intervention qui, avec l’aide de ce guide, veillent et se préoccupent de leur bien-être institutionnel interne mais à qui l’on peut aussi confier ses difficultés ou ses craintes liées à toutes formes d’abus.

ES ASUR, en sa qualité d’espace innovant de formation et de laboratoire de recherche-action, se devait et se doit, aujourd’hui, de partager ses compétences et de défier les harcèlements, les abus et les discriminations partout où ils pointent leur nocivité.

En matière d’abus, seule l’enquête indépendante.

En matière d’abus et d’atteinte à l’intégrité physique, psychique et morale des personnes, seule l’enquête indépendante permet de connaître la vérité.

C’est valable dans tous les domaines d’activité.

L’église catholique romaine de France ne peut plus ignorer le cri des victimes de son clergé et de son personnel laïc.

Le rapport de la Commission Sauvé publié mardi 5 octobre 2021 – “un phénomène systémique ” prouve et démontre l’ampleur des blessures.

Déni et arrogance

Hier, j’ai travaillé en faveur de l’église catholique romaine. J’ai entendu, écouté et vu les abus. Je les ai dénoncés. Rien n’y fit. Le silence a tout emporté.

Les sports, les milieux hospitaliers, les médias, les écoles d’arts, et j’en passe… tous ces champs institutionnels ont connu et connaissent leurs révélations. Tous mettent en place des instances d’enquêtes indépendantes. Plusieurs y ont été contraints. Un seul champ se braque. Le plus emblématique : la police.

Le repli institutionnel est néfaste à la résolution des problèmes

Aujourd’hui, je travaille en faveur d’une vingtaine de corporations de polices et d’organisations de secours d’urgences comme les services d’ambulances ou les sapeurs-pompiers dont les apparentements organiques avec les polices sont si étroits qu’ils se confondent parfois.

Je constate que les fonctionnements qui prédestinent aux professions de secours d’urgence, de contrainte et d’ordre puisent dans des schémas assez proches de ceux de l’église catholique romaine : prédominance des mâles, forte hiérarchisation, uniformisation, rites, disciplines, obéissance aveugle, etc.

L’académie de police de Savatan sous le feu des critiques, juin 2018.

Seule la détection, l’enquête, le traitement et la régulation opérées par des instances indépendantes donnent des résultats !

Les services d’ambulances comme ceux des sapeurs-pompiers professionnels, les uns après les autres se remettent en question et s’engagent dans d’authentiques démarches de résolution des problèmes ; en confiant à des instances externes indépendantes leurs processus d’identification, de guérison et de réhabilitation.

La police, comme entité morale, quant à elle, persiste – toujours – à vouloir s’examiner toute seule. L’ultime question, à son sujet, dans les tourments de l’actualité, aujourd’hui, n’est plus de savoir pourquoi ? Mais, quand ?

Quand osera-t-elle appliquer ce qui la fonde et la légitime : la séparation des pouvoirs.

 

L’éthique salvatrice

Questionné sur mon bilan intermédiaire, alors que la pandémie nous laisse quelque répit, je note, de façon générale, que nos polices suisses sont toujours aussi efficientes dans leurs missions opérationnelles.

(2 minutes de lecture – le masculin est compris dans le texte – 111ème post)

Par contre, plusieurs polices sont moins déterminées dans leurs remises en questions managériales et dans la mise en œuvre des réformes structurelles. Une progression en la matière leur permettrait de mieux appréhender les disqualifications et autres pénibilités internes : liées à un type d’organisation par trop militarisé, hiérarchisé et introverti.

Technologie, numérisation et robotisation

Néanmoins, et avant tout, ce que je retiens, du point de vue institutionnel, comme une préoccupation d’avenir, c’est cette forme d’ambivalence qui prévaut dans l’usage croissant de certains moyens technologiques, numériques et robotiques de nouvelle génération.

Cette forme assez équivoque d’asservissement concerne aussi d’autres organisations de secours d’urgence tels que les services d’ambulances ou de prévention et lutte incendie.

Une ambivalence qui déroute de plus en plus les femmes policières de terrain que j’interroge au quotidien.

L’attribution en hausse de ces nouvelles technologies, toujours plus sophistiquées, réduisent le discernement humain de l’agente du service public. Les compétences de cette dernière se dilatent avec pour conséquence des responsabilités éthiques professionnelles qui ont peine à s’exercer. Ces moyens artificiels sont à l’étude, testés et parfois déjà appliqués au sein de plusieurs polices à l’exemple de la reconnaissance faciale ; des chiens robots et autres outils de surveillance.

Il n’est pas question, ici, de décrier – naïvement – ses médiums utilitaires mais de leur opposer une maîtrise, des contre-pouvoirs de surveillance et de recours. Ce, dans le but de garantir, en toutes circonstances, le respect de la sphère privée des individus.

L’éthique appliquée…

… comme espace de préservation et de développement professionnels.

Alors même que l’éthique appliquée commence à faire ses preuves dans la régulation, la résolution et, le cas échéant, la réhabilitation des policières ayant pu commettre des erreurs – avant que faute ne survienne -, l’usage augmenté de la robotique questionne la responsabilité de nos professionnelles d’ordre.

Quelle distinction entre les moyens de substitution et d’extension ?

Quelle est donc la distinction que l’on peut produire entre substitution et extension des moyens et pouvoirs de l’agente d’État ?

  • Les moyens de substitution relèguent les pouvoirs de la policière, ainsi que sa proportionnalité non discriminatoire, à des objets ou outils dont elle ne maîtrise pas les processus d’élaboration, ni ceux d’ajournement.

Exemple : caméra de reconnaissance faciale développée et déployée par des entreprises tierces.

  • Les moyens d’extension proposent des objets ou outils dont l’articulation et la responsabilité dépendent majoritairement de la réflexion, du discernement et de la dextérité de ladite policière.

Exemple : armes létales et coercitives ; journal de bord et d’observation de quartier avec relation aux événements et aux auditions de témoins.

Cette distinction est capitale pour 4 raisons :

  1. Permettre à la policière, en tout temps, de développer ses compétences et ses vigilances afin de renforcer son indépendance critique, son empowerment et, finalement, sa durabilité et son enthousiasme au travail.
  2. Éviter que nos polices ne dépendent technologiquement de tierces entreprises qui ne répondent pas des valeurs qui fondent notre État de Droit.
  3. Réduire les zones d’influences idéologiques, notamment ultra-nationalistes, qui ont tendance à proliférer dans les organisations de sanction.
  4. Mieux prévenir la détection des malveillances, des harcèlements et autres discriminations dans les organisations de police elles-mêmes.

Conclusion

Les évolutions et mutations profondes des technologies sont profitables à la lutte contre les criminalités mais potentiellement dangereuses dans le fossé qu’elles creusent entre l’agente du service et de la protection publiques et ses bénéficiaires libres et présumés innocents ; migrants, touristes, résidents et citoyens.

La profession policière est avant tout une profession de l’humain. La prévention d’éventuelles dérives technologiques doit donc faire naître une habilité policière de sauvegarde et de maîtrise des Droits fondamentaux plus forte encore.

Enfin, nos polices sont nos défenses institutionnelles légitimes, prioritaires et concrètes contre les dérives des intelligences artificielles les plus impatientes.

Un management bicéphale

Un management parallèle et pluriel pour nos polices.

La nature managériale de nos polices est atrophiée lorsque ces dernières font mine de se suffire à elles-mêmes ; abritées qu’elles sont des enjeux de rentabilité et de concurrence.

Le défaut : les polices peinent à se réformer.

L’avantage : les polices ne doivent pas leurs viabilités à leur esprit compétitif mais à leurs capacités de garantir la paix (et ses valeurs fondamentales inhérentes) au sein de notre État de Droit. Elles veilleront néanmoins à gérer leurs dépenses avec rigueur économique.

Comment défier cette tension : entre les exigences de performance entrepreneuriale et la sécurité administrative publique ?

À la fois être performant tout en résistant aux pressions financières de la compétition rentable ?
Un vrai paradoxe. Un dilemme éthique de plus. Captivant.

En police, le management bicéphale serait profitable

C’est ce que je préconise. Deux managements parallèles, tel que j’ai pu le rappeler vendredi 12 mars 2021 passé aux étudiant-e-s du cours « Globalisation et Circulation » de l’Institut des sciences sociales de l’Université de Lausanne.

Deux gestions managériales (…même trois ?)

Une, pour protéger et l’autre pour servir

Protéger

Héritière de la tradition et des méthodes disciplinaires (une forme de surprotection institutionnelle), hiérarchisée, gradée, valorisant l’expérience en adéquation avec les hausses salariales… qui est, sommes toutes, efficace dans les interventions d’urgence ou celles présentant un danger de confrontation. Vous savez, là où et quand c’est pas le moment de discuter les ordres…

Servir

L’autre, de management participatif et transversal, favorisant l’émergence des talents jeunes et séniors, de tous genres, de toutes orientations, de toutes disciplines, rebelles, contestataires. Un management qui intervient en amont, revisite le bienfondé d’une enquête, remet en question les chiffres, les pratiques, les coutumes. Bref, défie les « … on a toujours fait comme ça… » et renforce le travail de proximité et de prévention.

Un management parallèle qui offre des responsabilités à celles et ceux qui en veulent et non pas aux viennent-en suite de la longue liste des redevabilités et des qualifications biaisées.

Servir et protéger

Deux managements qui se côtoient, débattent en colloque, et finalement pondèrent les défauts pour valoriser les avantages de se réinventer et de se diversifier.

La troisième gestion serait celle de la « bande d’arrêt d’urgence », celle recueillant les confidences de la pénibilité, du doute et de la résignation : le lieu de vidage par excellence.

Un espace virtuel et présentiel qui radiographie l’état de santé du Corps de police, documente les défaillances et les dysfonctionnements. Et, dans les situations les plus graves, confie à un organe extérieur, neutre et indépendant, les régulations utiles avant qu’elles n’aboutissent au seuil du pouvoir judiciaire.

 

 

Une carte d’aide à la décision

Une police apaisante et conciliante, ça existe.

Et c’est rien de le dire… en cette période… durant laquelle nos voisins et amis de l’Hexagone sont si malmenés… de part et d’autre.

(Le féminin est compris dans le texte – 2 minutes de lecture – 105ème blog)

La fin de l’année approche et les stations suisses de ski suisses seront vraisemblablement ouvertes.

 

Résoudre un dilemme est la mission première d’une police !

Comme avant chaque haute saison, la Police Municipale de Crans-Montana se questionne pour améliorer sa pratique et répondre à ce dilemme : comment faire pour accueillir dans les meilleures conditions un grand nombre de visiteurs et de touristes* au sein de la station de 1’070 mètres qui culmine jusqu’à 1’500 mètres d’altitude ?
Et, en même temps, garantir la cohabitation et la sécurité pour tous sur la voie publique.

À ce défi, vous y ajoutez des conditions météorologiques capricieuses et vous aurez les ingrédients du bon – moyen discrétionnaire** – dont dispose toutes les polices de qualité.

L’occasion aussi de vérifier celles qui font preuve de capacité d’innovation.

*qui compte, en haute saison, jusqu’à 60’000 résidents, hôtes et habitants inclus. Alors que le long de l’année, ce sont 12’000 habitants permanents qui y vivent.

Une carte d’aide à la décision inventive et efficace : le triangle de résolution

Dans le cadre de leur cursus de formation continue, les collaborateurs de la Police Municipale de Crans-Montana ont suivi un enseignement spécifique sur la bonne application du moyen discrétionnaire** dans la gestion des stationnements et de l’établissement des amendes d’ordre.

Les objectifs de cette formation étaient les suivants :

  1. Appréhender les infractions au stationnement et autres particularités avec équité et efficience.
  2. Discerner, argumenter et intervenir dans le respect du bien public, de la proportionnalité, de la non discrimination négative et des ordres de service.
  3. Concevoir et disposer d’une carte d’appréciation de la situation concrète et d’aide à la décision.

De cette formation un outil est né !

Simple, sous la forme d’une petite carte (format carte de crédit) que chaque agent et chaque assistant de sécurité publique porte sur lui :

Recto :

 

Verso :

Au moins deux réponses positives – 2 ou 3x OUI – et l’assistant ou l’agent peut produire une amende d’ordre / un rapport***.

Au moins deux réponses négatives – 2 ou 3x NON – et l’assistant ou l’agent peut appliquer son moyen discrétionnaire** et préventif, une recommandation par exemple.

Flyer de résolution du stationnement de la Police Municipale de Crans-Montana.

Ainsi, l’arbitraire est exclu. Chaque situation est pensée, mesurée et contextualisée à sa juste valeur. Dans le cas d’un ressentiment négatif, un échange constructif est alors engagé autour de l’appréciation et des déductions logiques de la carte et non dans une confrontation bilatérale – souvent émotionnelle et non fructueuse – entre l’agent et son interlocuteur.

Bien joué.

Prenez soin de vous, respectez les mesures sanitaires et bonnes vacances !

 

 

**le moyen discrétionnaire offre au policier une liberté d’action qui lui permet d’adapter ses décisions selon les conditions et le contexte. Par exemple, donner un avertissement plutôt qu’une amende parce que l’automobiliste n’était pas mal intentionné ou que les difficultés étaient si particulières et exceptionnelles qu’il ne pouvait pas renoncer à l’erreur.

***sont exclus des présentes déductions, les cas de force majeure.

Diversité policière

Le Conseil d’État fribourgeois veut renforcer le pouvoir de police de ses inspecteurs du travail.

Les inspecteurs du travail fribourgeois seront promus agents de police

Ces derniers seront promus agents de police judiciaire et verront leurs pouvoirs augmentés (voir RTS du 15 juillet 2019).

Il s’agit là d’une excellente décision.

L’attribution de ces prérogatives supplémentaires accordée aux inspecteurs du travail du canton de Fribourg est la démonstration même du développement pluridisciplinaire des autorités de polices, toutes formes confondues. À l’avenir, nos polices se découvriront avec des facettes toujours plus larges et multidisciplinaires. Condition “sine qua non” pour défier les réalités sociétales et, dans le cas précité, le marché du travail, toujours plus complexes.

Avantages

Cette diversité renforce le rayon d’action de nos polices déjà passablement éclaté en Suisse (environ 330 corporations, 80 principales). Une plus grande variété de postures et de fonctions équilibre les rapports de force, élargit les point de vue, laisse place à la critique et aux opinions contradictoires pour de meilleures résolutions ; et multiplie ainsi l’ingéniosité des réflexions et des actions.

Inconvénient

Augmenter les pouvoirs du côté policier c’est prendre le risque de diminuer les moyens de défense du côté des bénéficiaires notamment des personnes interpellées.

Résultante

Plus nos polices de Droit civil disposent de pouvoirs et de rayonnement d’action, plus elles ont – et auront – besoin de moyens de régulation et d’arbitrage ainsi que d’organes de contrôle neutres et indépendants.

Deux polices, deux exemples

Je reviendrai à la rentrée sur deux initiatives exemplaires produites par la Police Région Morges et la Police Municipale de Crans-Montana. Ces deux polices comptent parmi les plus entrepreneuriales du pays. Toutes deux ont imaginé des outils de médiation ; l’une pour la régulation et l’appréciation la plus objective possible des contraventions et l’autre pour sa gestion du stationnement en zone de forte densité touristique.

Ces deux polices démontrent que l’augmentation des pouvoirs peut être régulée dans l’intérêt commun tout en privilégiant l’attention au plus faible.

Polices du futur

En marge de mes interventions en milieux policiers, nombreuses sont les interrogations concernant l’avenir de la profession.

Plus précisément, l’avenir des 120 spécialisations (ou métiers) exercées au sein des 330 corporations de polices suisses (dont 80 principales environ) comme autant d’orientations et de mutations sous-jacentes.

(3 minutes de lecture – le féminin est compris)

Prévision météo des polices

Cinq orientations *

Police numérique

Composée de techniciens en navigation virtuelle, eux-mêmes accompagnés d’informaticiens et de spécialistes en Droit numérique, cette police est active sur les réseaux sociaux et le darknet.

Police environnementale

Garante de la protection des milieux naturels, de la faune et de la flore, cette police veille, selon les cantons, au respect du patrimoine et des aménagements territoriaux. Exemple : Police cantonale bernoise.

Police comportementale

Très active dans les pays anglo-saxons, s’émancipe à Zurich (Ville et canton) et en France avec de nouvelles prestations comme l’attention portée aux LGBT. Exemple français : l’association FLAG.

Police de résolution

Appelée police de proximité en Suisse latine ou communautaire dans les pays nordiques, tantôt valorisée, tantôt jugulée par certains gouvernements, cette orientation se restaure peu à peu en une police de maillage socioculturel et de prévention, notamment des radicalisations religieuses ou ultra-politisées.

Police investigatrice

Relais des polices judiciaires (ou de sûreté – les dénominations varient), cette police (en civil et non uniformée) est déjà multifonctionnelle et composée de diverses brigades (finances, mœurs, mineurs, scientifique & laborantine, etc.). Elle ouvre ses portes aux compétences extérieures et se prédestine à une forte pluridisciplinarité. C’est déjà le cas en Europe de l’Ouest et dans les pays scandinaves où experts-comptables, travailleurs sociaux et psychologues comportementalistes, entre autres, sont intégrés à part entière dans les effectifs. Ces spécialistes disposent de pouvoirs de police sans être ressortissants d’écoles ou d’académies policières classiques.

Une constance et cinq mutations *

Cette constance est singulièrement helvétique. Les cinq mutations sous-tendent et influencent les orientations précitées.

Constance fédéraliste

Le système fédéral est plutôt plébiscité dans les milieux policiers suisses que je fréquente. Sous le regard “policier-prati-quotidien” notre fédéralisme présente néanmoins quelques lourdeurs dans la coordination intercantonale et les subdivisions régionales ou municipales mais offre l’avantage d’une grande diversité linguistique et socioculturelle ainsi que d’une certaine marge de manoeuvre dans l’application des règlements communaux. Ce fédéralisme, tel que nous le pratiquons, renforce l’employabilité des agents brevetés et favorise des politiques managériales différentes, plus ou moins audacieuses, d’une région à l’autre, d’une direction politique à l’autre, d’un commandement exécutif à l’autre.

Ne pas oublier, ici, l’apport essentiel du Réseau national de sécurité qui réunit la Confédération et les cantons.

Mutations technologiques…

L’évolution est tellement rapide, les moyens financiers des groupes économiques tellement puissants que les polices ont peine à combler le retard du point de vue technologique, expertises et effectifs.

… prédictives…

C’est la nouvelle tendance nord-américaine qui se développe en tous sens.

Dans cette vaste mutation impliquant les nouvelles technologies, les limites provoquent de grands débats démocratiques comme tout récemment à San Francisco au sujet de la reconnaissance faciale.

Voir aussi Temps Présent RTS du 29 mars 2018.

… de force compensée…

L’arrivée des exosquelettes (photo) dans plusieurs unités d’interventions en Asie du Sud-Est ou aux USA représente sans doute la facette la plus spectaculaire. Mais l’usage des body-caméras et autres outils de reconnaissance ou de localisation confèrent également au pouvoir policier de nouvelles étendues pratiques. Les confusions sont nombreuses entre les outils dits d’extension et ceux dits de substitution (j’ai déjà abordé cette ambivalence dans de précédents blogs).

… de coopération (policière) internationale…

Les acquis de Schengen, l’accord et la convention offrent depuis quelques années des opportunités de collaboration étroite sur un vaste espace réunissant 26 États membres. Pour la Suisse, l’entrée en vigueur date du 1er mars 2008. 

… de transversalité et d’interchangeabilité.

Il s’agit, ici, pour cette cinquième mutation, de considérer toutes les polices dites “d’ordre thématique”. La police (fédérale) des transports, les polices pénitentiaires (les agents ou surveillants pénitentiaires ne sont pas considérés comme policiers à part entière et pourtant leurs prérogatives territoriales, coercitives et discrétionnaires sont pleinement policières), les techniciens de prévention et lutte contre les incendies ou inondations (services du feu / pompiers), les sanitaires urgentistes, ambulanciers secouristes (exemple : Ville de Berne) et autres interventionnistes “feux bleus” sont aujourd’hui inscrits dans des filières professionnelles supérieures dont les contours et les matières sont très proches du statut policier.

Par incidence, et on l’a vu plus haut dans l’orientation Police investigatrice, les complexités sociétales obligent les polices à coopérer avec des professionnels aux compétences de plus en plus éclatées. Est-il fini le temps où le policier cuisinait, réparait son véhicule en plus de remettre de main à main les courriers judiciaires au sein de sa commune ? En Ville de Fribourg, par exemple, c’est un policier local – un Sergent de Ville –, représentant les autorités, qui se déplace à domicile ou dans les homes pour prononcer un discours et remettre le cadeau officiel aux huitantenaires et autres citoyens jubilaires.

Autant d’orientations et de mutations qui influenceront mes prochains blogs.

* non exhaustives, sans ordre de priorité, telles que recensées chronologiquement aux côtés des cent vingts policiers, agents pénitentiaires, centralistes et urgentistes suisses romands et alémaniques avec lesquels je suis intervenu, au moins un jour entier, ces trois derniers mois de mars, avril et mai 2019. Ces orientations complètent les champs conventionnels des polices territoriales, mobiles et secours de Suisse. En France, d’autres polices conventionnelles ou “familles” sont à l’oeuvre.

Voir mon blog – police du XXIème siècle – du 6 janvier 2016

Délit de faciès : l’enlisement policier

Une demi génération au moins, c’est le retard qu’accuse la Police de Lausanne et d’autres dans l’exercice opportun de l’interpellation et dans l’application du moyen discrétionnaire lors des contrôles de personnes. C’est un déficit dommageable sachant que ces polices, principalement urbaines, doivent se positionner puis intégrer partiellement ou totalement les nouvelles sciences et modus operandi génétiques, prédictifs et autres méthodes d’anticipation et de robotisation. Il y a lieu de parier qu’elles resteront à la traîne encore une ou deux décennies.

Les conséquences sont connues : agents de terrain frustrés et désabusés, statistiques remodelées à la veille des élections, hiérarchies qui se couvrent et se recouvrent d’insignifiance.

L’excellent reportage de Shyaka Kagame et Gabriel Tejedor diffusé par Temps Présent RTS le 27 septembre passé (2018) révèle avec finesse et intelligence la problématique du délit de faciès et l’incapacité policière à la résoudre.

Discriminations persistantes au sein de plusieurs polices

Nombreux sont les intervenant-e-s externes qui ont constaté puis dénoncé publiquement une détérioration des pratiques d’interpellation et une augmentation des discriminations raciales depuis 2015, après s’être réjouis d’une accalmie liée à l’introduction du Brevet fédéral de policier dès 2004. Voir mon opinion publiée par Le Temps le 17 avril 2018.

La clairvoyance du policier courageux

Dans ce reportage, nous découvrons un – jeune ex – policier qui témoigne à visage découvert. Son diagnostic ne souffre d’aucune subjectivité. Il est le reflet des dizaines de policières et policiers que je croise chaque semaine et qui, pour diverses raisons, n’osent ou ne peuvent pas s’exprimer. Ils le feront, me rassurent-ils, une fois libérés du métier trompe-l’oeil.

Ce seul témoignage suffit par sa qualité argumentative.

Néanmoins, on peut regretter que ses anciens pairs aient oublié que la parole libérée reste l’arme la plus efficace du policier.

Articles de lois contre la discrimination raciale et professionnelle

Des fusils d’assaut policiers ?

À la mi-août, plusieurs médias annonçaient que la Police cantonale neuchâteloise étudiait la possibilité de se munir de fusils d’assaut.

(2 minutes de lecture – le féminin est compris dans le texte)

La Police cantonale valaisanne se forme actuellement à l’arme automatique (FASS 90, version courte).

Plusieurs polices de Suisse centrale ont déjà intégré de tels fusils dans leur arsenal.

Le fusil d’assaut, comme son nom l’indique, est une arme de combat. Une arme qui, symboliquement et pratiquement, entraîne les forces de paix que sont nos polices civiles dans un pli guerrier qui leur est incompatible et qui peut corrompre leur nature intrinsèque. Une arme qui fait appel à des compétences opposées à celles que développe usuellement tout policier d’état civil. De plus, le fusil dassaut n’est pas une arme propice aux densités urbaines de notre territoire helvétique. Il n’est pas indiqué en zone d’habitation : trop dangereux pour les tiers, encombrant dans son usage. Tous les policiers expérimentés ne sont pas convaincus par le fusil dassaut.

Ce vice de forme ne me laisse pas tranquille. Son acquisition ne me réjouit pas. De plus, des questions subsistent dans l’usage d’une telle arme… 

Le danger que représente les fusils dassaut en zone urbaine avec leurs balles pénétrantes et les risques encourus pour les personnes derrière l’objectif (en zone 3 pour les spécialistes, les procédés tactiques inhérents, etc. ) ?

Quelle complémentarité entre ce fusil version courte et le pistolet mitrailleur HKMP5 et ses balles déformantes ?

Malgré ces questions ouvertes et le vice de forme évoqué plus haut,

j’approuve le principe d‘acquisition de ce fusil d’assaut pour trois raisons :

1. Une telle arme permettrait de neutraliser une personne particulièrement dangereuse et menaçante, porteur d’un gilet pare-balles ou distancé, eu égard, bien entendu, à l’habitat environnant et à sa fréquentation publique.

2. Le fusil d’assaut est un outil d’extension et non de substitution comme certains moyens informatiques policiers qui potentiellement peuvent violer la sphère privée des individus. Le policier reste maître de son discernement et de sa proportionnalité. Il peut user d’une telle arme tout en préservant les valeurs démocratiques qu’il détient et qu’il représente en notre nom ; l’habilité, la responsabilité et les pouvoirs de l’agent policier ne sont en rien altérés.

3. Enfin, si nous devons nous mêler à tout instant et en tout lieu de l’action de nos polices sur le champ social de nos vies parce que nous en sommes les bénéficiaires ; les attributs métier, par contre, leur appartiennent en propre. Si certaines polices jugent utile l’acquisition d’une telle arme, je peux les suivre.

Ci-après, mon précédent blog en la matière datant du 2 décembre 2016

Des fusils d’assaut policiers

https://mail.google.com/mail/u/0/?shva=1#search/fusil+d’assaut/158b9460a7653182?projector=1&messagePartId=0.1

 Sur le même sujet voir Le Courrier du 24.08.18, pdf disponible ici

20 ans déjà et encore

20 ans déjà !

Le temps d’un souffle, d’une génération et nous célébrons aujourd’hui la croissance d’un média de référence – Le Temps – initiateur et hébergeur de ce blog. Que mes vœux les plus fous accompagnent toute son équipe !

Nos polices dans 20 ans

Le temps de progression pour nos polices ; mieux servir et protéger ; accueillir les plaintes, établir les faits, écouter les témoins, rassembler les preuves, monter les enquêtes, maîtriser ses paroles et ses gestes.

20 ans pour grandir sa fierté, celle de femmes et d’hommes d’État, de Droit civil et de service public, assermenté-e-s, garant-e-s et détenteur-trice-s des valeurs fondamentales et constitutives* de notre démocratie.

20 ans encore…

Le temps pour nos polices de se restaurer et de compter autant de femmes que d’hommes, de toutes origines, dans leurs États-Majors.

   

20 ans pour que nos corporations de polices deviennent de véritables instituts de recherche et de résolution pluridisciplinaires.

20 ans pour surpasser la force physique par le discernement, l’adaptation et l’investigation.

20 ans pour se défaire du maintien de l’ordre.

20 ans pour créer des commissions indépendantes de vidage et de traitement des erreurs.

20 ans pour réduire les grades.

20 ans pour y croire ; ne pas céder aux peurs ni aux préjugés et encore moins aux discriminations.

20 ans pour défendre les plus faibles, les minorités et la diversité du commencement à aujourd’hui !

Préambule … sachant que seul est libre qui use de sa liberté et que la force de la communauté se mesure au bien-être du plus faible de ses membres,