Polices londonienne et écossaise : institutionnellement racistes.

Tels sont les aveux des directions et commandements de ces deux polices du Royaume Uni.

(3 minutes de lecture – 128ème post)

Londres étant considérée comme l’une des villes les plus importantes du monde, une telle déclaration compte. En police la remise en question est rare. Lorsqu’elle survient, nous pouvons la qualifier de courageuse et salutaire. L’institution ne perd alors rien de ses prérogatives, tout au contraire, elle augmente son crédit et sa capacité introspective, facultés qui consolideront à terme la viabilité de son management.

“La bonne chose à faire pour moi, en tant que chef de la police, est d’affirmer clairement que le racisme institutionnel, le sexisme, la misogynie et la discrimination existent au sein de notre institution” a déclaré publiquement, le jeudi 25 mai 2023, Iain Livingstone, chef de la police écossaise.

Cet aveu intervient après celui du chef commissaire (Sir Mark Rowley) de la police londonienne*, le 21 mars 2023, qui a reconnu son organisation comme étant raciste et sexiste sur le plan structurel, précisant que les femmes policières sont également victimes au quotidien au sein même de l’institution alors qu’elles devraient être protégées.

Les introspections de ces deux polices – unanimement saluées par les critiques internes et externes – ont été rendues possibles suite aux publications de rapports indépendants.

Qu’en est-il des polices de notre Confédération helvétique ?

La représentativité organique de nos 180 à 330 polices (selon le type de décompte et la considération des tailles et des configurations territoriales) est différente du point de vue géopolitique. Le fédéralisme segmente les effets néfastes de ce que pourrait produire une organisation monolithique qui chercherait à couvrir ses failles. Néanmoins, les systèmes se ressemblent. Ils sont cousus de secret, de repli sur soi, d’effets de compromissions (compagnons d’armes), de redevabilité et de pressions disciplinaires qui, souvent, empêchent la parole de se libérer. Les inclinaisons racistes et sexistes sont récurrentes – non généralisées ! – au sein même de nos organisations suisses de petite, moyenne et grande tailles. Elles ne sont pas généralisées – faut-il le répéter ? – mais elles subsistent.

Heureusement, de plus en plus de corporations suisses empoignent les problématiques sexiste et raciste.

… plusieurs polices suisses, aujourd’hui, se préoccupent sincèrement des dérives internes et mettent concrètement en oeuvre des actions réfléchies, pluridisciplinaires, concertées, sans formation alibi.

Elles communiquent à l’interne et rendent des comptes au public à l’exemple de la Police municipale de Lausanne avec sa campagne “ça va ?”.

Résolutions

Reste à repenser les recrutements, à diversifier les représentations du personnel et à s’ouvrir aux expertises indépendantes et externes. Car les formations continues ne suffisent pas, il est nécessaire de réformer l’organisation et le système managérial.

 

L’Observatoire des polices

… vous donne dès le 30 juin 2023 rendez-vous sur mon site : fredericmaillard.com (site web qui sera entièrement renouvelé et transfiguré) et sur les réseaux sociaux.

En effet, le quotidien Le Temps ferme ses blogs pour la fin de ce mois de juin 2023.

Je continuerai d’écrire des opinions dans la version journal du quotidien Le Temps.

Pour moi, l’aventure a commencé le 14 septembre 2015 avec mon tout premier post :

A quoi reconnaît-on un policier ?

Commenter l’actualité policière est un devoir citoyen et politique. En 2003, à l’instauration du Brevet fédéral de policier, le Conseil fédéral a communiqué le désir de voir les intervenants extérieurs, dispensant les formations comportementales des futurs policiers, réagir et critiquer les éventuels dysfonctionnements institutionnels mais aussi commenter les pratiques policières dans l’espace public. Espérant en cela que les lignes bougent au sein des corporations jugées par l’autorité fédérale trop repliées sur elles-mêmes.

Dans ce but et depuis 2011, j’interviens régulièrement dans les médias, je publie des Avis d’expert et des opinions dans le quotidien Le Temps.

Et, depuis 2015, avec le blog de l’Observatoire des polices et ses 128 posts, comprenant ce dernier, j’ai partagé mes expertises avec des lectrices et lecteurs toujours plus nombreux.

Le post le plus retentissant, qui a enregistré 25’000 vues et 75’000 répercussions et transferts de références, était celui rendant hommage à feu Olivier Guéniat :

Olivier Guéniat. La liberté de penser !

*la Metropolitan Police, plus grande force du pays d’Angleterre avec plus de 43 000 officiers et membres du personnel.

 

Recommandation

L’excellent hors série heidi.news Les Explorations de Julie Eigenmann et Sami Zaïbi intitulé “Racisme, la Suisse en flagrant déni”.

136 pages d’enquêtes, de témoignages et de données chiffrées – Avril 2023.

À commander sur le site heidi.news

Frédéric Maillard

Frédéric Maillard, socio-économiste, accompagne les nouvelles gouvernances d’une dizaine de corporations policières suisses. De 2005 à 2015, il a analysé les pratiques professionnelles de 5000 agent-e-s. Depuis, il partage publiquement son diagnostic, commente l’actualité et propose des innovations. fredericmaillard.com

2 réponses à “Polices londonienne et écossaise : institutionnellement racistes.

  1. La difficulté avec le terme “institutionnellement raciste”, c’est qu’il implique que la structure même de l’institution contient des éléments de racisme. Or de tel éléments ne sont jamais démontrés. Il y a un glissement entre des comportements, certes parfois le fait de nombreuses personnes et l’institution elle-même. Je ne vois pas ce que ce genre de confusion apporte à l’analyse de la situation.

  2. Le racisme, la xénophobie à des degrés diverses, c’est moralement inacceptable, mais humainement normal. Nous sommes né avec des gènes qui rejettent la différence. Et ça ne s’arrête pas au racisme. La différence sociale, la grossophobie, etc, complètent le tableau.
    L’extrême gauche à la haine de la police sans connaître les individus, c’est un mécanisme de xénophobie.

    Diversifier le recrutement aidera sur un aspect pas et peut-être péjorera sur un autre. Ainsi, engager une personne d’origine africaine a des risque d’homophobie supplémentaires, voir de sexisme, mais pas de racisme envers les africains mais peut-être du racisme envers les asiatiques.
    La diversification ne fait que diversifier les attitudes, mais ne résoudra pas grand chose.

    L’humain, par essence, rejette la différence quelque soit son origine, son genre. Il n’y a pas de solutions miracles. Faut juste faire au mieux et accepter que le monde n’est pas parfait. Le métier difficile de la police qui est soumis à une violence d’une partie de la société renforce l’instinct sur la morale.

    Bref la justice seule doit être “parfaite”.

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