L’auto-maîtrise des policiers

Enfin, le débat s’ouvre au public.

(Le féminin est compris dans le texte – 3 minutes de lecture)

“Le débat contradictoire doit se loger au cœur du perfectionnement policier.” me confiait, il y a deux ans, un conseiller fédéral.

Il n’est pas dans les coutumes des policiers de s’expliquer, de s’excuser ni, par exemple, de revenir sur les lieux d’une intervention pour en justifier les raisons.

“C’est quand même pas de notre faute !” ou “Et, eux, tous ces voyous, vous ne les éduquez pas ?” sont les réponses types des quelques agents contrariés.

C’est à ce moment précis de l’exercice policier que doit intervenir la réflexion sur le comportement professionnel d’agent d’État, appelés aussi agent du service public.

Quatre préalables

  1. Distinguer les causes. Ce n’est pas parce que mes voisins sont malveillants que je devrais l’être aussi.
  1. Distinguer les références. Les casseurs, lors d’une manifestation publique, n’engagent pas directement l’État dans leurs propos et actes.
  1. Distinguer les branches du Droit. Le Droit privé en temps de paix ne dispose pas des mêmes contours que le Droit public.
  1. Distinguer les réponses. L’attente vis à vis d’un représentant d’État légitimé, assermenté et rémunéré par les soins du tout-public n’est pas comparable avec celle espérée d’un individu privé.

Je déplore les violences à l’encontre des agents d’État, policiers de surcroît. Je ne peux pas faire grand-chose face aux personnes physiques qui peinent à respecter les lois en vigueur. Je dois compter sur nos instances étatiques – comme les polices – et l’application du Droit et de la justice. Fort heureusement d’ailleurs… sans quoi je risquerais de glisser dans une spirale violente et incontrôlable.

Tout comme je déplore les discriminations ou indignités commises par nos agents d’État, policiers de surcroît. Par contre, dans ce cas, je peux beaucoup…

… en ma qualité de citoyen. Les policiers sont assermentés devant nos autorités qui me – et nous – représentent et devant le public-témoin auquel j’appartiens. Ces agents d’État portent sur leurs épaules l’écusson de ma commune, de ma région ou de mon canton. Ma responsabilité de citoyen est alors pleinement engagée.

… en ma qualité d’intervenant extérieur. Pour ma part, je contribue aux formations d’adultes des policiers et autres agents d’ordre et de sanction. Je crois à leur auto-maîtrise. Quand, ensemble – avec les policiers apprenants – nous examinons leurs cinq dernières interpellations, eux-mêmes se montrent sévères et exigeants. Ils ont raison. Une interpellation sur cinq est aujourd’hui perçue comme discriminante, dégénérescente ou insatisfaisante à leurs yeux et à l’aune de leurs propres critères professionnels. En soi, cette proportion n’est pas alarmante, notamment à la vue des complexités d’une intervention de terrain. Mais, elle est le résultat d’une lente dégradation, depuis deux ans, environ.

Pourquoi une telle détérioration ?

Entre autres, j’entrevois deux raisons principales :

  1. un contexte exogène menaçant, qui, de plus, est savamment entretenu par certains politiques ayant intérêt à flatter ou à apeurer leur électorat.
  2. Une distorsion entre certains policiers – les plus soucieux de vouloir bien faire, ai-je constaté… – et leurs institutions. Les connaissances et compétences des policiers, en Suisse, ont considérablement augmentées ces dix dernières années depuis l’introduction du Brevet fédéral. Elles renforcent ainsi leurs capacités de jugement, leur esprit d’initiative et leur autonomie professionnelle. Toutefois, dans certaines corporations, ces formes d’émancipations des individus se heurtent aux contraintes de service obsolètes et – toujours – fortement hiérarchisées. Le policier en question, frustré ou même désabusé, trouve alors dans certaines situations opérationnelles l’exutoire dont il a besoin, à défaut de pouvoir décharger la pénibilité de son travail dans l’institution elle-même.

“Vaut la peine de critiquer les institutions pour épargner les individus.” me rappelait, à toute cause, un de mes professeurs, expert en analyses institutionnelles.

Que faire alors ?

 A l’échelle de l’institution policière

  1. Reconnaître l’auto-maîtrise des policiers de terrain et développer leur critique analytique.
  2. Créer un organe de parole – ou de vidage – autour des dysfonctionnements, libre, neutre et indépendant, afin d’y recueillir des chiffres et des données objectifs et fiables. Le policier déviant déposera sa colère dans cet espace protégé plutôt que dans la rue.
  3. Former en continu. C’est déjà le cas. Mais, certaines formations sont trop peu ouvertes à l’introspection et à la pluridisciplinarité.

 A l’échelle de l’individu policier

  1. Être capable de résister, jusqu’à désobéir… à son ennemi intérieur. C’est refuser de se soumettre aux effets compromettants du groupe lorsque ceux-ci sont discriminants, c’est refuser l’inclinaison revancharde, expéditive et/ou violente; jusqu’à désobéir à son supérieur si ce dernier ne respecte pas les fondements de la Constitution qui garantissent la fonction de policier et la démocratie de notre pays.

“… expert autoproclamé, à la recherche de mandats…”

«…expert autoproclamé, à la recherche de mandats… »

dixit Pierre Maudet sur RTS La 1ère le 20 février 2017 en réponse à mon intervention sur RTS La 1ère du 16 février 2017.

Chers lecteurs,

après 41 blogs traitant du métier de policier – que j’aime par dessus tout, est-ce nécessaire de le préciser ? –  et de géopolitique, vous ne m’en voudrez pas de parler de moi sur une telle longueur. Il s’agit sans doute du prix et de la valeur de mon expertise… comme celui de la liberté d’expression.

Monsieur Maudet défend ses intérêts politiques. Je le comprends.

Je défends le respect de la dignité humaine pour tous et par tous. Ai-je tort ?

 

Commentaire personnel 

Une fois n’est pas coutume.

Par respect des faits, des dates et des chiffres, je décline, ici, une fraction de ma trajectoire professionnelle en Suisse romande. Plusieurs mandats au profit de polices cantonales et municipales romandes ne sont pas divulgués car ils ont été contractés sous ordre de confidentialité totale. Je me tiens également à disposition pour traduire mes autres prestations alémaniques et européennes.

Contexte historique des années 2003 et 2004

Le Brevet fédéral du policier suisse opté par le Conseil fédéral doit être opérationnel pour 2004. Le Module Droits humains et éthique appliquée est l’un des quatre modules qui charpente le Brevet. Une forte pression se fait sentir dans les Corps de police.

On reconnaît mes compétences en matière de Droits humains.

Je poursuis une formation continue en Sciences de gestion à l’Université de Genève. On me sollicite.

D’emblée, j’implique les agents de terrain. Jusque-là, ils étaient peu considérés.

Je découvre un grand malaise – également observé et signalé dans le rapport de l’auditeur en chef de l’Institut Suisse de Police, voir ci-après, en date du 12 mai 2009.

J’insiste et donne la parole « au terrain », étant convaincu ainsi de pouvoir prévenir d’éventuels débordements, ou pire des exactions, résultants des insatisfactions chroniques constatées.

Mes cours sont unanimement appréciés par les participants. Je dispose de toutes leurs évaluations personnelles écrites (1.).

La parole se délie.

On essaie de me faire taire, de me mettre à l’écart, sans succès, grâce, entre autres, aux soutiens des Conseillers d’État David Hiler et Isabel Rochat.

Actualité

Il a fallu attendre treize années et l’audition de 4’500 policiers romands… pour qu’à des fins politiques Monsieur Pierre Maudet renie mon expertise ce 20 février 2017 sur les ondes de la radio romande. Ce dernier a pourtant sollicité mes conseils et m’a mandaté en mars 2009 pour la supervision de la refonte de la Police municipale genevoise dont il avait la responsabilité.

 

Les faits par ordre chronologique

1993 à 1996, Berne. Frédéric Maillard est président de la Commission nationale suisse de prévention et de vigilance des violences policières (sous l’égide de l’ONG ACAT-Suisse) réunissant une quinzaine de responsables policiers, militaires et politiques suisses. Cette commission de travail inaugure l’Observatoire des pratiques des polices en Suisse et forge les toutes premières propositions et résolutions en faveur d’un futur Brevet fédéral de policier.

2003. Sollicitation de Frédéric Maillard (FM) par la Police cantonale genevoise (Polcantge). A cette occasion, on lui précise : « Nous savons que vous aimez la police et avez comme nul autre compris son rôle vital, n’hésitez pas à être critique avec nous, nous en avons besoin. »

17 décembre 2004. Engagement formel de FM par la Commission de pilotage (composée de cinq cadres policiers représentant la Gendarmerie, la Police Judiciaire et la Police de Sécurité Internationale de la République et canton de Genève). Commission chargée de la préparation et de l’introduction du Brevet fédéral au sein de la Polcantge.

Janvier 2005 jusqu’à fin juin 2013. Conception, administration, ingénierie et animation principale du cours Formation de base (FOBA) en Droits humains (DH) et des cours Formations continues (FOCO) en Analyse de pratique professionnelle et Modèles de gestion d’affaires et de résolution des problèmes par l’éthique et la déontologie.

Janvier 2005 jusqu’à fin juin 2013. FM élabore et rédige la totalité des examens tests et officiels finaux et éliminatoires en DH du Brevet fédéral pour le compte de la Polcantge, sous l’égide de l’Institut Suisse de Police (ISP).

Volées 2009, 2010 et 2011. FM est chargé d’organiser les remédiations de l’examen final et éliminatoire en DH du Brevet fédéral pour le compte de l’Académie de Police de Savatan. A ces occasions, il reçoit des témoignages accablants.

Courant 2009. FM reçoit l’aide volontaire de 34 policières et policiers (y c. des officiers et des spécialistes du Groupe d’intervention) cantonaux genevois qu’il réunit et sollicite régulièrement en cours comme témoins et experts. FM met en place des relais multiplicateurs Droits humains et des conseils de terrain dans les postes et les Brigades. Malgré ses quatre rapports écrits et ses sollicitations, FM ne reçoit aucun signe, aucune approbation, aucune réponse de la direction. Les agent-e-s se portent volontaires mais ne reçoivent jamais aucun soutien. Ils s’en plaignent régulièrement. Dégoutés et continuellement désavoués – dans le cas présent, par un silence pesant – , ils n’ont pas de mots assez durs contre leur direction. FM a beaucoup de peine à canaliser leurs colères.

Mars 2009. Inscription, conception et dispense des cours FOCO dans le processus d’acquisition et de reconnaissance du Diplôme supérieur de policier, maîtrise fédérale ou Brevet fédéral II, sous la houlette de FM.

31 mars 2009. M. Pierre Maudet, Conseiller administratif de la Ville de Genève, confie le mandat de supervision du groupe de travail chargé de la mise en œuvre de la nouvelle organisation de la Police Municipale genevoise à FM et Yves Patrick Delachaux (YPD).

Courant 2009. Introduction du Diplôme supérieur de policier et de ses deux modules introductifs traitant du comportement policier par les analyses de pratiques professionnelles (après 6 ans de service) et de résolution des problèmes (après 12 ans de service) sous la responsabilité de FM.

12 mai 2009. Accréditation de FM par l’Institut Suisse de Police (ISP). Audition, inspection in vivo, validation et accréditation des cours de FM par le directeur des examens fédéraux et l’auditeur en chef, le Dr. M. Kurt Hügi (2.), vice-directeur de l’Institut Suisse de Police. Validation et accréditation obtenue et fournie sans conditions. M. Hügi précise par écrit dans son rapport (3.) : « M. Maillard est un excellent formateur… Excellents modèles présentés par l’instructeur (Frédéric Maillard ndlr.). L’auditeur a été impressionné par la qualité et l’engagement de l’instructeur. M. Frédéric Maillard est un spécialiste des matières traitées et connaît très bien la Police genevoise, élément qu’il convient de relever pour un instructeur externe. »

Remarque écrite de l’auditeur en chef dans le même rapport : « Le sentiment de malaise général dans la police, rapporté par les participants, a eu tendance à bloquer le processus d’apprentissage. »

15 et 16 décembre 2009. A Couvet/NE. Participation active et complète de FM au cours pour formateurs en Droits humains et éthique professionnelle de l’ISP.

Décembre 2009. Publication de l’ouvrage de FM (avec YPD) « Police, état de crise ? Une réforme nécessaire. » Préface du Conseiller d’État David Hiler, Président du Conseil dÉtat de la République et canton de Genève. Postface du Dr. M. Olivier Guéniat, docteur en sciences forensiques, criminologue et chef de la Police judiciaire du canton de Neuchâtel.

2009 – 2011. FM est consultant et formateur continu (avec YPD) des polices municipales de Vernier et de Veyrier (sises en République et canton de Genève).

1er mars 2010. Lettre de M. Pierre Maudet remerciant FM et YPD « …le rendu de votre rapport final met un terme à votre mandat et je vous réitère mes remerciements pour le travail fourni. »

17 mai 2011. Implication de FM en qualité d’expert-consultant extérieur autour du projet « Phénix » par Madame la Conseillère d’État Isabel Rochat en vue des nouvelles visions et stratégies de réorganisation de la Polcantge.

Courant 2011. Engagement de FM et YPD pour la formation de base obligatoire et éliminatoire en Droits humains et relations interculturelles de l’ensemble des Polices municipales genevoises.

16 mai 2012. FM réorganise la pédagogie des formations continues dispensées à la Police cantonale genevoise et instaure, à la demande de la cheffe Mme Monica Bonfanti, une nouvelle gestion des ressources éthiques et déontologiques.

19 juin 2013. FM reçoit une lettre de la cheffe Mme Monica Bonfanti et du DRH de la Polcantge signifiant le terme de son mandat. Extrait : « … nous souhaitons encore préciser que cette décision ne relève en rien de votre compétence en tant que chargé de formation, mais bien d’une divergence d’opinion sur l’exemplarité et le devoir de réserve. Nous ajoutons que le fait de ne pas avoir été informés de vos projets de communication et de vos publications… » (en référence à l’ouvrage daté de décembre 2009 cité plus haut et préfacé par le Président du Conseil d’État David Hiler, ndlr.)

Commentaire personnel 

Cette rupture de collaboration intervient peu avant le terme du mandat politique d’élu de M. David Hiler, Conseiller d’État jusqu’au 10 décembre 2013. « Jusque-là j’étais protégé par sa présence et subsidiairement par celle de Madame Isabel Rochat. A l’approche de la fin du mandat exécutif de M. Hiler, j’ai été surveillé par deux policiers lors d’une conférence publique à Genève et auditionné le 11 juin 2013 par le responsable ad intérim du Centre de Formation de la Police de Genève en des termes et des moyens dignes de la Stasi. »

28 juin 2013. FM écrit à M. le Conseiller d’État Pierre Maudet (successeur d’Isabel Rochat) pour faire rapport de fin de mandat. Ce dernier le reçoit dans son bureau quelques jours plus tard. L’entente est franche et cordiale. M. Maudet désapprouve la rupture du mandat de FM. Au terme de l’entretien, il précise « N’est-ce pas que cette police est malade ? » Frédéric Maillard lui rétorque : « Non, elle est composée de gens extraordinaires, mais les flux de communication son bouchés. »

9 juillet 2013. FM répond en pli recommandé à la Cheffe et au DRH de Polcantge. En vertu de la Loi fédérale sur le principe de transparence au sein de l’Administration publique, FM demande les copies des documents le concernant. A ce jour, il n’a toujours pas reçu d’avis de réception à son courrier.

2 février 2015. Sur sollicitation, FM intervient, avec le partenariat du CICR (Comité International de la Croix-Rouge), auprès d’une dizaine de représentants officiers de la Garde nationale et de la Sûreté nationale de Tunisie au sein de Police de Lausanne.

6 juillet 2015. Le municipal M. Grégoire Junod sollicite, signe et confirme l’engagement de FM et YPD comme chargés de mission et consultants à Police de Lausanne. Mandat : examiner et rapporter la qualité de l’accueil du public dans les postes de quartier et à l’Hôtel de Police.

20 novembre 2015. Remise du Plan d’action pour une nouvelle gestion de l’accueil dans les postes et à l’Hôtel de Police de Police Lausanne.

2015 – 2016. FM (avec YPD) est formateur des correspondants et médiateurs de nuit de Police Nord Vaudois et du service de jeunesse et cohésion sociale d’Yverdon les Bains.

2017. FM accompagne aujourd’hui quatre corporations de police dans divers mandats en cours, dispense des cours en Haute école spécialisée et répond plusieurs fois par semaine aux médias et à diverses sollicitations de conseil en faveur d’Administrations publiques.

Commentaire personnel

J’ai bien assez de travail, je vous remercie. Mais, pour en avoir davantage, que je ne saurais supporter, je devrais me taire, non ?

Bilan quantitatif résumé

2004 à juin 2013. Frédéric Maillard a accompagné et dispensé le cours en Droits humains du Brevet fédéral de policier (FOBA – 16 à 24 heures selon les écoles) auprès de 26 écoles de polices cantonales et municipales et formé (FOCO – 8 à 16 heures) 1’500 policiers-ères confirmé-e-s, en Suisse romande. De plus, il a été chargé d’étudier la pratique professionnelle de 1’500 policières et policiers en trois configurations distinctes : municipales (milieu urbain), régionales et cantonales, aussi bien suisses alémaniques que romandes.

De fin 2003 à ce jour (20 février 2017 ndlr.) Frédéric Maillard a formé et analysé en continu la pratique de 2’000 policières et policiers au sein de quinze corporations suisses.

« J’ai passé la barre des 5’000 personnes avec la 3ème formation continue que j’ai dispensé à Police Région Morges le mardi 21 avril 2015. »

« Ce mercredi 1er mars 2017, je clôture la 12ème formation de base en faveur des policiers municipaux genevois, telle que je la dispense depuis 2008. »

Précisions

(1.) FM détient, pour chaque journée de formation, une évaluation écrite et rédigée par chacune et chacun des participant-e-s. L’identité des auteurs participants et les contenus à caractère policier sont garantis par la confidentialité.

(2.) M. Kurt Hügi est aujourd’hui directeur du centre de formation des polices zurichoises, deuxième centre de formation de police par importance de Suisse.

(3.) Pour chaque pièce évoquée dans ce texte, FM dispose d’un justificatif écrit et signé par le mandant ou le partenaire.

Fin, Frédéric Maillard, le 20 février 2017 à Berne et Lausanne

 

Violences policières en Suisse

Depuis 2015, j’enregistre une détérioration des interpellations policières et par conséquence une recrudescence des violences. Je ne dispose malheureusement pas de chiffres. Les “cas” sont le plus souvent classés – pour ne pas dire étouffés – à l’interne des corporations. Selon les témoignages que je recueille au jour le jour et selon mes estimations, une interpellation sur cinq n’est plus opérée avec décence et objectivité.

J’identifie trois causes,

la première, d’ordre temporel…

  1. Un cycle temporel propre aux institutions suisses. S’agissant des métiers de sanction, nous nous trouvons face à des oscillations qualitatives toutes les 6 et 12 années, environ. 2015 correspond à la 11ème année après l’introduction du Brevet fédéral et son cours obligatoire en Droits humains. L’autorité référentielle que produisait ce Brevet semble ainsi résorbée.
  1. La deuxième, d’ordre pédagogique. Policière / policier : une formation d’adultes. Les policiers du bassin lémanique et du Valais sont formés à l’Académie de Police de Savatan. Cette Académie est rétrograde et privilégie des modes opérationnels de confrontation plutôt que de résolution des problèmes.
  1. La troisième, d’ordre managérial. Un contenant managérial de défiance. Plusieurs corporations sont encore soumises à une organisation par trop militarisée, ultra-hiérarchisée et recroquevillée sur elle-même. La gradation et le salaire y sont liés. Ces derniers paramètres sont assujettis aux qualifications et au bon vouloir de ceux qui vous précèdent, ce qui engendre des effets de redevabilité très forts et sournois. Face à la dégénérescence d’une interpellation “… vous êtes tenté de couvrir vos erreurs, pire vos fautes, plutôt que de les avouer et ensuite les traiter” me confie-t-on souvent.

Trois résolutions possibles

  1. Encore et davantage enseigner le contexte géopolitique, les origines criminologiques et notre rapport historique aux valeurs fondamentales, celles qui forgent notre démocratie et de surcroît les actions policières. Donner un sens profond et universel à l’engagement policier contribue à prévenir les baisses cycliques de motivation.
  2. Ouvrir les formations de base et continues à la pluridisciplinarité et aux sciences de gestion.
  3. Confier des lieux de vidages et de médiation à des organes neutres et indépendants. Ouvrir les postes à responsabilité au personnel civil qualifié comme ont su le faire les polices de Grande-Bretagne après avoir reconnu, dans les années 90, une hausse des violences policières. Enfin, intégrer les femmes ainsi que les ressortissants étrangers dans les états-majors.

C’est bien parce que l’on bénéficie, en Suisse, de très bonnes polices que l’on devrait pouvoir remédier aux manquements constatés ou… avoués.