Paris, l’état d’urgence

Contenir mon émotion et en même temps ne pas me taire telles furent les tensions de mon dilemme le long… de ce long weekend… rien qui ne soit comparable aux souffrances des victimes et de leurs proches.

J’ai été bouleversé lorsque j’ai découvert que l’actualité rattrapait mon dernier commentaire, celui publié sur ce blog le 13 novembre passé.

Le Président François Hollande parle d’un acte de guerre. En réalité, c’est l’état d’urgence qui a été décrété. Les militaires ont été appelés en renfort mais ne remplacent pas les polices civiles. L’état d’urgence donne des pouvoirs supplémentaires aux polices et leur permettent, notamment, de limiter la liberté de mouvement des citoyens et d’opérer des perquisitions de domicile la nuit. La France n’est pas en guerre selon la définition usuelle mais l’Etat islamique autoproclamé a bel et bien déclaré la guerre à la France.

L’état d’urgence est une procédure transitoire qui recèle néanmoins nombre de pièges et d’amalgames qu’il s’agira de contenir. Limiter les droits fondamentaux ne va pas sans conséquences. Cette situation exceptionnelle risque de nous entraîner progressivement dans le puits des ténèbres, un puits sans fond, sans lumière et sans espérance. S’y abandonner sans conscience des dangers pour la démocratie serait faire le jeu maléfique des terroristes. Après avoir semé la terreur, ces derniers pourraient nous jeter le sort d’une guerre capable de se nourrir toute seule, en dehors de ses protagonistes. Ce jeu stratège est pervers et dangereux. Il est comparable à l’histoire de l’ogre qui mange ses propres enfants. Une stratégie qui peut paralyser notre pensée, notre discernement et notre persévérance.

Si elle venait à se réaliser, ce serait le début de la rupture entre citoyens qui, à terme, pourrait embraser les extrêmes et, finalement, se retourner contre les autorités gouvernementales. Une telle dégénérescence sociale – la plus sordide sans doute – pourrait déboucher sur une guerre civile. Les Français contre les Français. Les populistes qui prétendent savoir comment faire pour éviter de telles violences – alors qu’ils n’ont rien fait pour les prévenir – contre ceux qui s’arment de courage et de perspicacité, ceux qui se renseignent et traquent la moindre source d’endoctrinement, de dégradation et de défiguration de l’être humain et… résistent.

Frédéric Maillard

Frédéric Maillard, socio-économiste, accompagne les nouvelles gouvernances d’une dizaine de corporations policières suisses. De 2005 à 2015, il a analysé les pratiques professionnelles de 5000 agent-e-s. Depuis, il partage publiquement son diagnostic, commente l’actualité et propose des innovations. fredericmaillard.com