Joseph Kabila au Vatican

République Démocratique du Congo : Joseph Kabila au Vatican

Ambiance tendue lors de la réception du président congolais Joseph Kabila au Vatican le 26 septembre. Il faut dire que l’Eglise catholique du pays s’était retirée du dialogue national  après le récent massacre de dizaines manifestants à Kinshasa. Non seulement l’Eglise critique l’inaction du pouvoir au nord Kivu où des personnes sont emprisonnées, tuées, des villages saccagés, en toute impunité, mais encore les évêques congolais, courageux, ont déclaré que tout accord politique devait stipuler que « l’actuel président de la République ne sera pas candidat à la prochaine élection présidentielle ».

En effet, Joseph Kabila, au pouvoir depuis 2001 sans élections (suite à l’assassinat de son père qui avait chassé Mobutu),  veut briguer un troisième mandat contrairement à la Constitution, emboîtant ainsi le pas à ces nombreux chefs d’Etats africains qui arrangent la démocratie à leur manière, suivant ainsi les bons conseils des Chinois. Les droits de l’homme, c’est secondaire et tant pis pour la liberté de presse et pour le nombre de morts. D’ailleurs Joseph Kabila est fortement influencé par le président du Rwanda Kagame ; les deux semblent se partager les richesses du nord Kivu, le coltan en particulier, si nécessaire pour les technologies de pointe dont sont friands les pays industrialisés qui se taisent.

Le pape François a accueilli Joseph Kabila pour un entretien de 20 minutes au cours duquel il a souligné l’importance de la collaboration de tous les acteurs politiques,  représentants de la société civile et communautés religieuses, en faveur du bien commun, ceci à travers un dialogue respectueux et inclusif pour la stabilité du pays.

Que cherchait donc Joseph Kabila en venant au Vatican ? A contrer l’action des évêques congolais ? C’est raté. A entendre un autre point de vue que ses élites corrompues ? Peut-être. C’est surtout un homme mystérieux qui s’exprime très peu, dont on dit que la mère est rwandaise tutsi. Le pape lui a remis ses encycliques, dont celle sur l’écologie (Laudato Si » pour sauver « notre maison commune ». Cela pourrait l’inspirer puisque son nouveau ministre de l’environnement  a cautionné l’attribution de vastes concessions forestières par son prédécesseur Liyota Ndjoli,   à deux sociétés à capitaux chinois (Somifor et Codeco)- Quand on sait que 60 % des forêts denses du bassin du Congo sont les poumons de la terre avec celles de l’Amazonie, il y a de quoi s’irriter contre les rapaces du bois et de l’argent. Kabila pourrait bien commencer par là…

Assise 2016, pendant que des bombent tombent sur un convoi humanitaire en Syrie…

Assise 2016, pendant que des bombes tombent sur un convoi humanitaire en Syrie…

Du 18 au 20 septembre, ils étaient environ 500 représentants des différentes religions, une rencontre organisée par Andrea Riccardi (ancien ministre italien), fondateur de la Communauté Sant ‘Egidio. Bien sûr, on se moque facilement de telles initiatives : elles font naître de belles images, mais c’est si peu face aux drames qui ensanglantent le monde… Mais il faut refuser ce scepticisme. Nous avons besoin de tels moments pour reprendre notre souffle dans le combat jamais achevé contre la division, la haine, la guerre, la manipulation maléfique des religions. Mardi 20 septembre, Din Syamsuddin, président du Conseil des Oulemas d’Indonésie, le pays qui compte le plus de musulmans au monde a proclamé : « La violence ne peut jamais utiliser le nom de la religion, jamais ! ». (La Croix 20.09.16)

Une rencontre comme celle d’Assise, initiée il y a 30 ans par Jean-Paul II, est d’autant plus légitime que la naïveté n’y a pas cours. Chacun avait profondément conscience de la difficulté de la tâche, de la patience requise : « La paix obtenue par la force sera renversée par la force » a souligné Koei Morikawa, un dignitaire bouddhiste japonais. Le seul chemin fiable vers la paix est celui du dialogue et de la prière, voilà le message d’Assise.

Le pasteur Harutium de l’Eglise évangélique arménienne de Syrie a raconté qu’il y a un siècle, c’est Alep qui sauvait les Arméniens où ils ont pu s’installer.

Et le pape François de conclure : « Sans syncrétisme, sans relativisme, nous avons prié les uns à côté des autres, les uns pour les autres ». On ne peut pas trouver des mots plus simples pour exprimer la force faible des religions face à ce que François a appelé  : « Le paganisme de l’indifférence ».

Soudan du Sud: George Clooney enquête sur la corruption des élites

La guerre civile qui ravage depuis 3 ans le Soudan du Sud est une excellente affaire pour les potentats qui s’y déchirent.C’est ce que constate un rapport de The Sentry présenté à Washington le 12 septembre. Ce bureau d’investigation a été créé par l’acteur George Clooney et John Prendergast, défenseur des droits de l’homme. Tous deux enquêtent sur les financements des conflits en Afrique (La Croix 13.09.2016), conflits qui, on le sait, engendrent des groupes criminels comme Boko Haram (et l’EI au Moyen Orient) et jettent sur les routes des milliers de réfugiés.

Des dizaines de milliers de Sud-Soudanais tués, 2,5 millions en fuite, 5 millions manquent de nourriture…

Les élites politiques et militaires sud-soudanaises dont le président Salva Kiir et son ancien vice-président Riek Machar, chef de la rébellion, sont accusées de s’être enrichies durant la guerre civile qui a débuté en 2013. Ce pays est devenu indépendant après la partition du Soudan en 2011. D’après George Clooney:”Les familles des élites sud-soudanaises vivent à l’étranger dans des villas de luxe de plusieurs millions de dollars, passent leurs vacances dans des hôtels cinq étoiles, récoltent les bénéfices d’un système de népotisme et de contrats douteux.” Le rapport cite le chef d’état major Paul Majong qui est propriétaire de deux luxueuses maisons en Ouganda, et une autre au Kenya. Il détient aussi les preuves qu’un fils de 12 ans du président Kiir possède une participation de 25 % dans une compagnie pétrolière créée en février 2016.

Le Sentry dénonce aussi l’impunité des protagonistes de la guerre qui se moquent des menaces internationales:”Les dirigeants du Soudan du Sud ne prennent plus au sérieux les menaces des Nations Unies, des Etats-Unis et d’autres pays, de punir leurs actes.”  Comme dans de nombreux autres pays d’Afrique malheureusement, c’est la trahison des élites qui sacrifient leurs populations sur l’autel de leur bien-être et de leurs familles.