Migrations: un Lampedusa au milieu du désert

La première ministre italienne Giorgia Meloni a déclaré récemment l’état d’urgence en Italie à cause de la venue de milliers de migrants, 18 000 depuis le début de l’année. Elle avait bâti sa stratégie pour les élections italiennes sur sa lutte contre les migrants… ! Il est vrai que le reste de l’Europe ne c’est pas beaucoup préoccupé des problèmes italiens, comme d’ailleurs de la Grèce qui accueille tant bien que mal les refoulés de Turquie qui reçoit pourtant des millions d’Euros pour les contenir.

La goutte d’eau qui a fait déborder la colère de Giorgia Meloni a été les déclarations du président tunisien le 21 février dernier. Kaïs Saïed s’en est pris violemment aux migrants originaires d’Afrique sub-saharienne présents en Tunisie. Selon lui: « l’objectif inavoué des vagues successives de migrations clandestines est de réduire la Tunisie à sa dimension africaine et de la dépouiller de son appartenance arabe et islamique.» Raciste et complotiste ? Il est vrai que la majorité est catholique, l’Église leur vient en aide, mais ne prend aucune position politique. Ils seraient beaucoup plus que 10 000 et vivent dans la peur d’être agressés ou renvoyés, quittant tout ; logement, travail, études. Les départs en mer ont augmenté considérablement, comme les naufrages d’ailleurs, même pendant les jours de Pâques. Giorgia Meloni a appelé Bruxelles pour leur dire de soutenir la Tunisie confrontée à une grave crise financière, sous peine de déclencher une vague migratoire sans précédent vers l’Europe (l’île de Lampedusa n’est qu’à 150 km de la Tunisie). Elle a confirmé un projet de mission italo-française de leurs ministres des Affaires étrangères.

Il n’en fallait pas plus à l’UE sous direction de la Suède depuis janvier, pour choisir de barricader les frontières et d’expulser les migrants qui se maintiennent en Europe sans droit de séjour. La présidente de la Commission Ursula von der Leyen, toujours animée d’un désir de faire le bien, a demandé aux leaders européens d’utiliser tous les instruments légaux : visas, possibilité de migrations, accueil par des ONG, ou par des privés. «Bienvenue au Club», a ironisé le trublion de l’Europe, Viktor Orban, qui dit avoir dix ans d’avance en la matière. Mais l’Allemagne préfère de son côté recourir aux leviers européens en nouant elle-même des accords. En pénurie de main d’oeuvre, elle s’est fixée l’objectif d’attirer 400 000 travailleurs, afin d’enrayer le déclin démographique, comme avec l’accueil des Syriens il y a 3 ans. Elle n’a pas les mêmes craintes que le président tunisien ! Pourtant, partout les présidents des états européens, tremblent de peur face à ces arrivées qu’ils pensent massives et pour leur souveraineté.

Ils ne sont pas les seuls ! L’Algérie et le Maroc font de même. Les migrants d’Algérie, avec femmes et enfants, sont refoulés, mains nues, dans le désert. Ils essayent de parvenir à Assamaka, une petite bourgade surpeuplée, à 15 km, à la frontière du Niger. Il en arrive 300 par semaine. Les ONG ont lancé un appel de détresse humaine. Encore pire que Lampedusa au milieu de la Méditerranée…

Ces misères sont le retour du balancier de la colonisation qui fait encore rêver les jeunes qui veulent échapper à la pauvreté chez eux, une pauvreté conséquence de l’inflation, produite par la guerre en Ukraine, mais aussi d’une mauvaise gestion de certains de leurs leaders (corruption), qui ne se sont guère préoccupés de la formation de leurs jeunes.

Faim: Le renard, la Somalie et l’Ukraine

Ce matin, j’ai lancé un petit paquet de nourriture au renard affamé qui vient presque chaque jour le chercher. Que lui donner ? Je pense au poème de La Fontaine : le Corbeau et le renard qui veut lui prendre son fromage. Cela m’arrange bien, car je n’ai pas de viande, le Gruyère et les croquettes du chat font l’affaire. Je remarque qu’après avoir mangé, son estomac se crispe, il a de la peine à souffler et à se déplacer et je me souviens alors d’une remarque de Jean Ziegler responsable de l’Onu pour les questions alimentaires : mourir de faim provoque des douleurs atroces.

Et le même jour, je lis que des centaines de milliers de personnes sont menacées par la faim en Somalie (aussi au Kenya). Elle connaît la pire sécheresse depuis 40 ans. Une «crise humanitaire majeure» alerte les Nations unies. L’urgence est absolue, chaque minute, un enfant somalien est admis à l’hôpital pour malnutrition. Je pense à mon renard qui souffle péniblement et qui a de la peine à atteindre le petit paquet…

La porte-parole du CICR pour cette région du sud, Alyona Sinenko, explique : «Dans nos centres de nutrition, nous soignons trois fois plus d’enfants qu’il y a un an».

Près de 8 millions de personnes sont affectées par le sécheresse qui frappe ce pays, soit la moitié de la population, et 300 000 personnes sont en situation d’insécurité alimentaire critique. Dans les districts les plus touchés, au sud, à Baidoa, à 250 km à l’ouest de Mogadiscio, il y a 1,2 million de personnes déplacées, la population de 800 000 habitants a doublé. Alyona Sinenko admet :»Les responsables locaux et les organisations humanitaires ont tiré la sonnette d’alarme depuis plusieurs mois, mais l’aide internationale est insuffisante. La guerre civile s’enlise depuis l’effondrement du gouvernement central il y a 30 ans. Et les zones contrôlées par les groupes armés, notamment les djihadistes chebabs, concentreraient plus de la moitié de la population touchée par la sécheresse».

Pendant ce temps, une photographie fait la une des journaux le 3 décembre aussi : elle montre une tonne de missiles russes lancés sur Kharkiv (Ukraine) en ne seule journée : les habitants fuient eux aussi pour échapper au froid, à la faim, aux maladies… Ils trouvent de l’aide pour autant que leur convoi ne soit pas bombardé. Les vieux ont de la peine à suivre, mon renard lui va finir par mourir, comme beaucoup d’êtres humains et d’animaux en Somalie…Il est possible que la Chaîne du Bonheur ait récolté suffisamment pour venir en aide aux enfants pour qu’ils cessent de souffrir. On ne sait pas vraiment. On l’espère, Quel est ce monde de la faim ?

La Cop 27 à Charm El Cheikh

La COP 27, à Charm- El- Cheikh (7-18 novembre)

Les Africains auront enfin leur mot à dire ! Voilà une tribune qui pourra relayer les priorités de l‘Afrique ! Et elle le fera bien grâce notamment au président du Ghana Nana Akufo-Addo, un ancien avocat de 78 ans qui vient d’être fait le 10 octobre docteur honoris causa de la Sorbonne !

Francophile et parfait francophone, il s’est fait l’avocat de l’équité qui est «de refuser un avantage qui ne vous appartient pas». En matière climatique, selon lui, il s’agirait pour les Occidentaux de rendre un avantage, de compenser une situation acquise indûment en ayant provoqué des dommages qui affectent aujourd’hui toute la planète ! Or la solidarité se fait attendre. De 25 milliards réclamés lors d’un comité préparatoire de la COP 27, 25 millions ont été promis … Ce n’est pas juste, affirme-t-il, pas équitable, c’est sur le continent africain que se joue une grande part de l’avenir du monde, et de l’Europe…

Avec raison, car il a dit ce que beaucoup d’Occidentaux pensent au vu des échecs de l’aide internationale : «Il n’y a que nous qui pouvons développer notre continent, il n’y a pas de Père Noël !

Le président ghanéen est un dirigeant aguerri par de longues luttes pour les libertés dans son pays. Nana Akufo Addo fait du principe de justice la clé de la stabilité des sociétés et du système international. Il a dénoncé vivement l’agression de la Russie contre l’Ukraine dont les conséquences économiques déstabilisent les pays africains. «L’alternative à un monde livré au pillage, à l’arbitraire, à la violence, c’est un monde régi par le droit et guidé par l’esprit de justice. Cela doit commencer dès la COP27 , a-t-il encore souligné à la Sorbonne. Espérons que les pays africains qui veulent rester «neutres» le comprendront.

Les Russes en Afrique

Les Russes en Afrique

Pendant que Poutine, prisonnier de sa logique impérialiste, poursuit ses objectifs en Ukraine dans les territoires désormais russes où il peut utiliser sans complexe l’arme nucléaire, en bon joueur d’échecs, il attaque aussi ailleurs. Notamment en Afrique, depuis 10 ans, où il chasse les Français «colonialistes» dans leur pré carré utilisant les ressentiments des Africains contre la France. Et puis quand la situation se tend trop, il a recours à un sabotage de gazoducs, ou à un divertissement orchestré par le fou de la Corée du Nord qui lance un missile par dessus le Japon effrayé. A la récente réunion de l’Assemblée générale de l’ONU à New York, la guerre en Russie a été condamnée presque unanimement. Pourtant de nombreux pays africains (35) s’étaient abstenus à l’ONU quelques semaines auparavant. Ils veulent rester «neutres».

En 2018 une importante influence russe a commencé en Centre Afrique (RCA) pour soutenir le président Touadera aux prises avec des groupes armés. La Russie envoie des instructeurs à Bangui avec des armes, suivis par le déploiement du groupe Wagner «privé» de son ami Prigojine, un oligarque qui réclame en plus des concessions minières. S’en suit une campagne virulente anti-française qui s’étend dans presque toute l’Afrique francophone. Il est vrai que la France a sous-estimé la puissance des réseaux sociaux et a manqué de vigilance face à cette nouvelle guerre devenue hybride.
Même scénario avec le Mali assailli par des groupes armés djihadistes qui pillent les campagnes et tuent les civils sans retenue. Qui les arme ? Les Russes, les Chinois, le groupe Wagner, dans le but de continuer à déstabiliser le continent africain ? On ne sait pas. Au Mali, le président Keita démocratiquement élu, est renversé en août 2020 et remplacé par une junte qui se divise entre les partisans des Occidentaux et ceux qui veulent s’en affranchir.

Les autorités maliennes accusent les Français de tous les maux, les soupçonnant même d’être complices des groupes terroristes ! Autant de fausses informations que la société civile ne peut vérifier. Un discours qui a conduit la France à rompre avec Bamako et à mettre un terme à l’opération militaire Barkhane en février 2022. Les derniers soldats français ont quitté le nord du Mali le 15 août dernier. La stratégie russe cible aussi le Niger, pierre d’angle pour Barkhane au Sahel, mais aussi le Cameroun qui a signé un accord de coopération militaire russe. Et le même scénario s’est répété ces jours au Burkina Faso. L’ancien président Bamika, depuis janvier 2022, a démissionné pour éviter un bain de sang et la destruction des biens français. Le nouveau président autoproclamé, le jeune commandant Traoré qui siégeait fier sur un vieux tank russe devant un foule l’acclamant en agitant de petits drapeaux russes.

La guerre en Ukraine affecte non seulement l’Europe, mais aussi l’Afrique où l’ancien ordre est complètement bouleversé, notamment par des jeunes déboussolés qui n’ont pas de travail, ont faim et renversent des gouvernements en place comme un jeu de cartes. Même s’ils condamnent l’Europe «néocolonialiste», ils ne rêvent que de s’y exiler alors que les Européens eux les acceptent de moins en moins…

Dimanche 2 octobre le Pape François a lancé un appel solennel à Vladimir Poutine pour obtenir la mise en place d’un «cessez-le-feu immédiat» entre l’Ukraine et la Russie, le suppliant d’arrêter cette «spirale de violence et de mort, aussi par amour pour son peuple.» Même demande à Volodymyr Zelensky, qu’il soit «ouvert à des propositions sérieuses de paix.» Mais il refuse de parler avec Poutine qui a le soutien indéfectible du Patriarche de Moscou Cyrill, un ancien du KGB pour lequel la guerre en Ukraine est une guerre sainte. Cyrill a solennellement annoncé quelques jours auparavant que les soldats russes mobilisés qui commettraient le mal en Ukraine étaient pardonnés par Dieu… Quand les dieux s’en mêlent…

Le naufrage de l’Afrique du Sud en 5487 pages…

Le juge Raymond Zondo a été déclaré «héros de la Nation». Il fait partie de
ces hommes (et femmes) exceptionnels dont ce grand pays a le secret qui ne
veulent pas le laisser disparaître dans la corruption et le pillage. In
fatigable, il a commencé ses travaux il y a dix ans pour montrer comment
une clique de truands les deux frères Gupta, ont fait main basse sur l’État
sud-africain avec la complicité de l’ancien président Jacob Zuma,
détournant 3,5 milliards de dollars (Le Monde Afrique).

C’est le 22 juin que le juge Zondo, à la tête de la commission d’enquête sur
la «capture d’État», a remis les deux derniers volets de son énorme rapport
au Président Cyril Ramaphosa (plus de 5000 pages). Il n’épargne personne,
ni l’ANC (le parti de Mandela au pouvoir depuis 1994), ni le Président lui-même
(l’affaire de cambriolage).

Il faut se souvenir de l’intronisation de Mandela en 1994 par un juge blanc
à Prétoria devant une foule accourue du monde entier. Mandela lui même
un «héros», 29 ans de prison, a bénéficié de l’aide de plusieurs anges-

  • gardiens

    qui l’ont aidé à monter les marches de la présidence : entre
    autres : le CICR et ses visites de prison, dont Nicolas de Rougemont (fils de
    Denis de Rougemont l’Européen),

  • puis le professeur de Droit
    constitutionnel de l’Université d’Afrique du Sud, Marinus Wiechers, qui
    lui a fait passer ses examens en Relations internationales en prison (il était
    déjà avocat), ensuite Frederik de Klerk qui a compris ses compétences
    pour lui succéder ; sa femme qui ne l’a pas suivi, a été assassinée. Enfin et
    non des moindres, des Namibiens au pouvoir depuis 1990 qui l’ont
    persuadé de faire le pas de la présidence.

    L’Afrique du Sud, tant critiquée, était ainsi à son apogée. Mais les loups
    étaient à l’affût… Jacob Zuma, sans éducation scolaire formelle, n’a pas été
    à la hauteur, il est devenu la marionnette des frères Gupta issus d’une
    famille richissime d’origine indienne. Ils l’ont manipulé comme un pantin.
    De ce fait, la Commission du juge Zondo va refaire ce que la Commission
    Vérité et Réconciliation de l’évêque Tutu et de Mandela 30 années plus tôt,
    avaient entrepris, et qui avait démontré, TV à l’appui, ce que la politique
    d’apartheid, notamment la Police, avait fait subir au peuple noir consterné
    de tout apprendre. Une Mama africaine s’est exclamée à la déposition d’un
    policier blanc : «Pauvre type» ! La commission du juge Zondo a aussi
    provoqué une catharsis collective. – Trois cent témoins ont pu raconter
    devant la TV, comment des gardes de corps de cadres ont dû transporter
    des sacs pleins de cash, par exemple, ou comment des lanceurs d’alerte ont
    été réduits au silence par des membres de l’ANC qui peu à peu a
    commencé à perdre ses membres aux élections. Corruptions et pillages à
    l’ordre du jour!

    En 2018, le président Zuma a été démissionné par le Parlement. Les deux
    frères Gupta, Atul et Ragesh, -le troisième Ajay n’est pas impliqué à ce
    stade-, ont disparu de la scène et ont été retrouvés à Dubai début juin 2022
    et arrêtés grâce à Interpol. Le gouvernement sud-africain en a demandé
    l’extradition, «mais cela va être compliqué avoue-t-il, car ils doivent
    d’abord passer devant un juge de Dubai. Tout cela pourrait durer des
    années». En plus ils ont un ami sur place à Dubai, Al Zarooni, qui a un
    commerce sur la rue de Bourg à Lausanne, Charles King SA, qui vend
    officiellement des vêtements, mais peut faciliter des transferts…

    Cette histoire incroyable, révélée par un juge sud-africain, résilient et
    incorruptible, sert d’exemple non seulement pour le peuple sud-africain,
    mais aussi pour d’autres pays d’Afrique. Il montre que la démocratie a
    bien fonctionné à toutes les étapes difficiles. On ne peut que s’en réjouir,
    car cela prouve que l’impunité n’a pas le dernier mot.

  • Faim Afrique : un retour à la nourriture traditionnelle ?

    Les populations en Afrique souffrent de plus en plus de la famine. L’augmentation des prix rend les aliments importés inabordables pour les plus pauvres. Un projet au Kenya encourage la population et pourrait s’étendre à d’autres pays africains, d’où la nécessité urgente de le faire connaître…
    Pendant des siècles, les peuples d’Afrique ont réussi à se nourrir eux-mêmes malgré les sécheresses et les inondations. Ils ont développé des cultures culinaires variées et saines grâce aux légumes, aux herbes, aux épices et aux fruits indigènes. Les représentants des régimes coloniaux ont apporté en Afrique leur mode de vie européen, qui a été adopté par les classes aisées et éduquées. La nourriture traditionnelle a longtemps été considérée comme un signe de pauvreté et d’arriération. Des «maladies de civilisation» sont alors apparues : le diabète, les maladies cardiaques et le cancer se sont répandues avec ce mode d’alimentation européen ; et même des maladies psychiques avec la manière de travailler et le stress que cela implique, observé en Namibie et en Afrique du Sud Pour lutter contre les préjugés envers l’alimentation traditionnelle, des instituts de recherche, des organisations communautaires et des services gouvernementaux du Kenya ont mis au point un projet intéressant il y a déjà 20 ans dont voici quelques résultats : 24 variétés de légumes parmi les 210 utilisées en Afrique ont été analysées en termes d’acceptation, de fiabilité commerciale et d’impact sur la santé. Il a été constaté que de nombreuses plantes traditionnelles ont une valeur plus élevée que les trois légumes les plus populaires : le chou, le chou frisé (sukuma wiki) et la bette. Quelques exemples : les feuilles de la plante araignée fournissent plusieurs fois plus de vitamine A que le chou. L’amarante contient 12 fois plus de fer et de calcium et 2x plus de fibres. Les feuilles de manioc, un légume important en Afrique centrale, sont riches en protéines et en vitamine A. La pulpe du baobab peut fournir jusqu’à 10 x plus de vitamine C que les oranges. Les insectes, comme les termites volantes et les oiseaux, tels les cailles sont une source importante de protéine, comme les champignons. Personnellement je recommande les gros champignons qui poussent sur les termitières qui font penser à des steaks !
    Toutes ces plantes utiles et bien d’autres protègent d’une alimentation déséquilibrée, évitent la malnutrition très répandue chez les enfants et préviennent les maladies.
    Un grand succès : des semences ont été collectées, améliorées et distribuées aux personnes intéressées. Des experts sont allés conseiller des agriculteurs sur la culture à faire, sur les recettes de cuisines et la commercialisation de leurs produits. Donc peu à peu, la situation s’est inversée, les supermarchés ont commencé à offrir des légumes traditionnels, comme le mchicha, le managu et le saga, même dans les petits marchés de rue. Leur consommation n’est plus stigmatisée négativement. Le succès de cette campagne a attiré l’attention de l’UNESCO et cela a été inscrit sur la liste de la protection du patrimoine culturel…
    Qu’on imagine ce qu’aurait signifié pour les Français si des étrangers leur avaient supprimé des frites, aux Italiens des spaghettis et aux Suisses leurs fromages ! Une perte d’identité profonde! Il est temps que les Africains suppriment peu à peu cette dépendance des importations de nourritures extérieures, et se réapproprient leur bonne alimentation traditionnelle en ces temps de guerre en Ukraine, d’insécurité alimentaire et de manque de blé.

    Afrique: la faim n’est pas une fatalité…

    Selon l’ONG Oxfam, il y aurait 27 millions de personnes qui souffrent de la faim en Afrique de l’Ouest, et le CICR estime à 346 millions d’Africains souffrant globalement d’une faim alarmante ; il déplore cette crise alimentaire «inaperçue», parce que nous sommes capturés par les évènements à l’Est de l’Europe. Les grands bailleurs de fonds ne sont pas au rendez-vous, alors que les besoins augmentent du fait de la hausse des prix sur les marchés mondiaux à cause de la guerre. La folie d’un tsar et ses acolytes, qui veulent reconstituer l’ancien empire russe (URSS), a des répercussions dramatiques sur le continent africain où règne une sécheresse implacable, notamment dans la Corne de l’Afrique. Aujourd’hui, avec la mondialisation des marchés, tout est lié. Une erreur à un point de la terre se répercute durement ailleurs. Les ONGs et le CICR agitent la sonnette d’alarme pour éviter que ne se répète la catastrophe de 2011 en Somalie où 250.000 personnes étaient mortes de faim… Elles citent 2017 l’année pendant laquelle la mobilisation internationale avait permis d’éviter la famine. La preuve que la faim n’est pas une fatalité !

    Aujourd’hui nous sommes tous paralysés par les images en Ukraine de destructions massives et les aides affluent, y compris en matériel de guerre. C’est le prix de la démocratie, un système politique qui fait si peur aux dirigeants russes, mais aussi chinois. Les récoltes africaines sont déjà perdues et le bétail meure, faute d’eau. Il y a urgence pour l’Ethiopie, la Somalie, le Kenya et le Soudan du Sud. Si les êtres humains ne sont pas directement responsables de la sécheresse, il n’en va pas de même avec les inondations catastrophiques en Afrique du Sud, dans la région de Durban. La corruption pratiquée par l’ancien président Zuma aidé par une famille hindoue les Gupta, a beaucoup affaibli le pays qui, grâce à Mandela et à des Blancs éclairés, était un espoir pour tout le continent. Le président actuel Cyril Ramaphosa fait ce qu’il peut. Il y a déjà de nombreux morts (500) et l’est du pays mettra beaucoup de temps pour s’en remettre faute de moyens et de structures qui n’existent plus…

    Il est hautement regrettable qu’il faille 6 rapports des experts du GIEC pour faire pendre conscience aux principaux dirigeants des pays qu’ils jouent avec le destin de l’humanité. Il a été prévu que les catastrophes climatiques seraient extrêmes, et nous y voilà ! Que va faire la Suisse qui compte sur d’autres pays pauvres pour calculer ses émissions permises de CO2, qui sont bien réelles de toute manière ? Nous devrions avoir honte.

    Afrique: et les massacres commis par des Russes continuent…

    Alors que nous sommes tous secoués par les massacres à Boucha et ailleurs en Ukraine, commis par des soldats Russes, le même scénario se passe au Mali par les mercenaires russes du groupe Wagner appuyés par l’armée malienne, selon Human Richts Watch (HRW): «La pire atrocité au Mali depuis le début du conflit il y a une dizaine d’années. Elles sont soupçonnées d’avoir exécuté près de 300 civils parmi lesquels se dissimulaient des combattants djihadistes».
    Ce massacre a eu lieu à Moura, centre des violences intercommunautaires qui endeuillent le pays depuis plusieurs années.

    Les victimes ont été tuées d’une balle dans la tête par petits groupes précise HRW qui cite des témoins directs. Cela s’est passé le 27 mars lors du marché aux bestiaux où les villageois et des commerçants venaient vendre leur bétail. Les hommes ont été emmenés vers un terrain vague, principalement des Peuls soupçonnés par Bamako de soutenir les groupes djihadistes de la région. Ni l’armée française en train de se retirer du Mali, ni la mission de l’ONU au Mali, pas informée, n’ont pu intervenir.

    La présence du groupe Wagner de mercenaires russes, qui se fait payer, donne un très mauvais exemple au continent africain. Egalement actif en Centre Afrique et dans des pays voisins sur demande, il vient court-circuiter la tendance des Africains à se prendre enfin en main. Telle l’armée rwandaise, appelée récemment au Mozambique, qui se comporte beaucoup mieux que les mercenaires du groupe Wagner, et rapporte ainsi de l’argent au pays. De plus, la République Démocratique du Congo, selon le Wall Street Journal (2.04), fait pression sur les Chinois, pour avoir une meilleure part du marché du cobalt pour les batteries des voitures électriques et commence à s’opposer à la présence chinoise en Afrique. Le Tribunal de Lumumbashi a retiré pour 6 mois la direction de la mine de Tenke Fungurume à China Molybdenum, «société publique congolaise» où l’on a constaté que les contrats chinois sont opaques… Les compagnies minières chinoises ont consacré ces dix dernières années, des milliards de dollars pour acheter de mines de cobalt, et même d’uranium (Namibie).

    On ne peut que souhaiter aux Africains de prendre toujours plus en mains les richesses de leurs sols et d’en faire mieux bénéficier leurs populations.

    Guerre n Ukraine: La poutinophilie d’une partie des pays africains s’explique par le rejet de l’Occident…

    Le titre du texte provient du Monde Afrique du 9.03.22. En effet, lors du vote de la résolution de l’ONU condamnant l’agression russe en Ukraine, 17 pays africains se sont abstenus… Mais l’écrasante majorité de l’assemblée onusienne 141 sur 193, ont condamné l’invasion de la Russie.

    Paul Simon Handy, un chercheur camerounais, basé à Addis Abbeba à l’Institut de Sécurité de l’Union Européenne, s’y attentait : « L’éloignement géographique du conflit crée une distance émotionnelle ; c’est une guerre entre grandes puissances et les Africains préfèrent ne pas s’aligner. Mais il faut regarder l’ensemble : des 55 pays africains, 28 ont condamné massivement l’invasion russe de l’Ukraine, cela montre qu’une majorité tient au principe (colonial !) de l’intangibilité des frontières et au respect, par les grands pays, de l’intégrité territoriale des petits états, des principes non négociables, selon eux.

    A Moscou évidemment, cela a été interprété comme un geste amical ! D’autant plus que le Mali et le Centre Afrique, sous «directive du groupe russe Wagner», se sont aussi abstenus. La Guinée et le Burkina Faso, aux mains de militaires, ne pouvaient pas se positionner. Seule l’Ethiopie a voté franchement contre la résolution de condamnation. Rappelons que le Premier ministre éthiopien, Ahmed Aby qui assaille le Tigré, est prix Nobel de la Paix (2019)… Les autres états étaient absents.

    Ce qui interpelle, c’est l’abstention du Sénégal. Le Président Macky Sall est conscient d’un discours antifrançais et anti occidental dans une partie du peuple sénégalais. Mais, comme au cours de 2022, il assurera la présidence de l’Union Africaine (UA), il se doit d’appeler au respect de la souveraineté nationale de l’Ukraine…

    L’abstention sénégalaise pose cependant problème, elle s’explique de plusieurs manières. Le Russie instille une certaine peur : l’offensive militaire genre Wagner (Kremlin) est très active au Mali, au Soudan, en Centre Afrique et même à Madagascar. Certes. Mais les Sénégalais et d’autres pays africains francophones craignent surtout les manœuvres de désinformation russe et la manipulation de la fibre populaire. Il s’agit de les contrer par une information tout azimuts. Et ce n’est pas simple, les moyens de communication africains étant limités sur le continent africain.

    Le continent africain prépare sa révolution industrielle

    Le successeur de Mandela, Thabo Mbeki en 1999, avait proposé une Renaissance de l’Afrique à l’Union Africaine, mais elle ne s’était pas concrétisée. Plus tard, l’idée d’un continent africain mieux organisé et structuré avait été proposé par le président rwandais Paul Kagame, mais elle n’avait pas vraiment décollé, bien que l’idée ait fait du chemin. C’est que l’Afrique, un continent riche et prometteur, a passé par une très lente évolution économique, qui paraît en gros, suivre le même parcours qu’ont suivi les états européens : des Louis XIV qui pillent leurs sujets ou s’enfuient avec leur magot comme Louis XVI ; un empereur pathétique, Bokassa, qui distribue ses diamants, des dictateurs qui saignent leur pays à blanc (Mobutu, Dos Santos, etc), d’autres qui ont pourtant conquis de haute lutte leur liberté comme Mugabe, mais s’arrogent ensuite des droits divins avec l’aide de leur femme et d’une caste corrompue, notamment aussi par des multinationales, ou alors qui partent en guerre pour piller d’autres états (les précieuses ressources du Congo), etc. Quant à l’évasion fiscale, elle représenterait quatre fois le montant de l’aide étrangère…. De quoi faire naître des djihadistes…

    Depuis plus de vingt ans, ce sont les Chinois qui se sont intéressés aux ressources des sols africains (uranium, lithium, pétrole, bois, etc), en proposant leur «win-win», qui dans certains cas sont des winwin-win, n’hésitant pas à corrompre de nombreux cadres, et se mettant eux-mêmes au travail, en se débarrassant ainsi de leurs prisonniers. Depuis peu, ce sont les Russes, aussi intéressés par les fabuleuses ressources des sols qu’ils paient en assistance militaire, remplaçant maintenant les Français au Mali priés de partir par les putschistes du nouveau gouvernement. Un imbroglio militaire auxquels s’ajoutent les 12 000 soldats de la Minusco dans les environs.

    Quel gâchis tout cela ! Où la majorité des jeunes n’ont pas eu la priorité dans l’éducation, qui, faute de travail, se tournent vers l’Europe en train de se barricader partout, ou vers les djihadistes ! Ainsi, on ne peut plus accuser le colonialisme en un rituel délivrant de toute responsabilité… Car l’Afrique n’a pas manqué de sages pour montrer le chemin: les deux anciens présidents du Sénégal, Léopold Senghor et Abdou Diouf, pays qui est à l’origine de la «Charte africaine des droits des peuples», dont se sont inspirés des constitutionalistes pour la nouvelle constitution de la Namibie (1990) et sud-africaine (1994). Ajoutons encore Julius Nyerere (Tanzanie), Nelson Mandela, et tant d’autres hommes et femmes, telle la directrice nigériane de l’OMC Ngozi Okonjo-Iwalea. Des personnalités qui ont été épargnées par le fétichisme de l’argent et ont pensé au bien commun de leurs peuples, contrairement à Jakob Zuma ancien président sud-africain, qui a contribué largement à la décadence de l’ANC, le parti de Nelson Mandela.

    Les 17 et 18 février, c’est l’Union Européenne qui organise un sommet Europe-Afrique et affirme sa volonté d’être un partenaire «fiable» des Africains, comme le dit fermement la présidente de la Commission Ursula von der Leyen. L’Europe se réveille enfin ! Non seulement elle veut contrer l’avance chinoise, mais elle veut aussi renforcer une zone de libre échange et le développement de ses infrastructures pour attirer de nouvelles usines en comptant sur des investisseurs et ingénieurs africains, et non pas seulement sur des étrangers. Des projets portés par la société civile. Les usines actuelles produisent essentiellement pour l’exportation : extraction et alimentation. La Chine semble se désengager de l’industrie textile à l’est, faute d’infrastructures compétitives et de main d’oeuvre qualifiée. Il y a malgré tout quelques pays qui connaissent un début d’essor industriel : le Maroc (industrie automobile notamment), l’Ethiopie (industrie des baskets), des Centres d’appels et de services informatiques (Île Maurice). Et bien sûr l’Afrique du Sud déjà très avancée qui va produire des vaccins en grande quantité, car seulement 11 % de la population du continent est vaccinée contre le Covid.

    L’UE a promis 150 milliards d’Euros à l’Union Africaine jusqu’en 2027, permettant des investissements conséquents Mais il faudra bien une génération pour rattraper ce retard et stopper les djihadistes qui sont particulièrement intéressés par les pays du Golfe de Guinée (Côte d’Ivoire, Bénin, Togo) et ses ports pour toutes sortes de trafics. La situation globale est très complexe avec en plus la famine qui plombe certains pays du Sahel, les migrants et les changements climatiques. Rien n’est vraiment acquis. Espérons que les jeunes seront enfin mieux formés, pas comme enfants soldats, et contribueront au succès de ce sommet à long terme. Le temps est un facteur important en Afrique dont il faut tenir compte.