République Démocratique du Congo:”Habemus pactum”

 

« Habemus pactum » titrait le 1er janvier le journal Afrik.com. En effet, la majorité au pouvoir et le Rassemblement de l’opposition sont parvenus à un accord tard le soir du 31 après la menace de l’Eglise catholique de se retirer de son rôle de médiation depuis le 8 décembre. La RDC évite ainsi la prolongation d’une longue crise politique et le bain de sang annoncé (voir blog du 22 déc. RD Congo : La grande inquiétude). Un accord arraché au forceps il est vrai, et qui a réussi aussi grâce au geste de Moïse Katumbi, un opposant important, qui met de côté son intérêt personnel.

Cet accord est l’épilogue de longues semaines d’âpres discussions menées sous l’égide de la Conférence épiscopale nationale du Congo (Cenco) dirigée par Mgr Marcel Utembi. Il prévoit la tenue de l’élection présidentielle d’ici la fin 2017, l’interdiction pour Joseph Kabila de s’y présenter, l’impossibilité d’ici là de modifier la Constitution, y compris par voie référendaire, l’attribution au poste de Premier ministre au Rassemblement de l’opposition, l’encadrement de la CENI, et la mise en place d’un Conseil national  de contrôle du suivi  de l’accord, présidé par Etienne Tshisekedi , opposant historique de Kabila.

Bien sûr tout n’est pas résolu pour autant. Si l’Eglise catholique, seule institution stable et respectée de la RDC,  a accompli là un « miracle », il faut aussi dire que cela tient à la maturité de cadres de l’opposition et au désir de beaucoup de vivre enfin mieux : 88 % des 71 millions d’habitants vivent en-dessous du seuil de pauvreté (1,25 $ par jour), seulement 10 % ont l’eau et l’électricité (moyenne ville-campagne), plusieurs groupes rebelles à l’Est sèment la terreur, il y a 2 millions de déplacés, les grands singes et les gorilles sont décimés par les conflits…  Et pourtant, dans ce pays grand comme 30 fois la Belgique,  les énormes ressources minières attirent tous les vautours du monde (multinationales) : or, diamants, coltan, cobalt, cuivre, etc. Il y a un potentiel hydraulique majeur avec le fleuve Congo et le  lac Tanganyika) et une très grande biodiversité. Impossible donc de laisser tous ces trésors en mains des corrompus du régime Kabila. Et puis, l’exemple du Burundi voisin avec 500 assassinats depuis  que Pierre Nkurunziza s’accroche au pouvoir et 300 000 déplacés qui survivent dans des camps. Celui de l’Ouganda où le président Museweni s’est installé à vie, comme au Rwanda aussi où règne la dictature de Paul Kagame. De quoi faire réfléchir tous les Congolais car la pauvreté dans ces régions mène à Boko Haram…

Il est intéressant de constater qu’en RDC, comme au Kenya il y a quelques années, l’Eglise catholique  est très impliquée pour la défense de la démocratie et des Droits de l’homme, malgré les assassinats (3 en RDC) de prêtres courageux. En Afrique du Sud aussi, les Conseils des Eglises d’Afrique du Sud (toutes Confessions) et en Namibie, ont joué le même rôle pour libérer les pays de l’apartheid et pour l’indépendance. Les Eglises en Afrique restent donc les veilleurs de la démocratie et de la dignité humaine, ce qui n’est pas encore le cas de la plupart des pays  musulmans, fortement influencés par le wahabisme de l’Arabie Saoudite.

Cet accord tiendra-t-il ? La France et l’Union Européenne ont proposé d’accompagner financièrement et stratégiquement la nouvelle période de transition. C’est bien la moindre des choses si elles veulent moins de réfugiés !