Ce matin, j’ai lancé un petit paquet de nourriture au renard affamé qui vient presque chaque jour le chercher. Que lui donner ? Je pense au poème de La Fontaine : le Corbeau et le renard qui veut lui prendre son fromage. Cela m’arrange bien, car je n’ai pas de viande, le Gruyère et les croquettes du chat font l’affaire. Je remarque qu’après avoir mangé, son estomac se crispe, il a de la peine à souffler et à se déplacer et je me souviens alors d’une remarque de Jean Ziegler responsable de l’Onu pour les questions alimentaires : mourir de faim provoque des douleurs atroces.
Et le même jour, je lis que des centaines de milliers de personnes sont menacées par la faim en Somalie (aussi au Kenya). Elle connaît la pire sécheresse depuis 40 ans. Une «crise humanitaire majeure» alerte les Nations unies. L’urgence est absolue, chaque minute, un enfant somalien est admis à l’hôpital pour malnutrition. Je pense à mon renard qui souffle péniblement et qui a de la peine à atteindre le petit paquet…
La porte-parole du CICR pour cette région du sud, Alyona Sinenko, explique : «Dans nos centres de nutrition, nous soignons trois fois plus d’enfants qu’il y a un an».
Près de 8 millions de personnes sont affectées par le sécheresse qui frappe ce pays, soit la moitié de la population, et 300 000 personnes sont en situation d’insécurité alimentaire critique. Dans les districts les plus touchés, au sud, à Baidoa, à 250 km à l’ouest de Mogadiscio, il y a 1,2 million de personnes déplacées, la population de 800 000 habitants a doublé. Alyona Sinenko admet :»Les responsables locaux et les organisations humanitaires ont tiré la sonnette d’alarme depuis plusieurs mois, mais l’aide internationale est insuffisante. La guerre civile s’enlise depuis l’effondrement du gouvernement central il y a 30 ans. Et les zones contrôlées par les groupes armés, notamment les djihadistes chebabs, concentreraient plus de la moitié de la population touchée par la sécheresse».
Pendant ce temps, une photographie fait la une des journaux le 3 décembre aussi : elle montre une tonne de missiles russes lancés sur Kharkiv (Ukraine) en ne seule journée : les habitants fuient eux aussi pour échapper au froid, à la faim, aux maladies… Ils trouvent de l’aide pour autant que leur convoi ne soit pas bombardé. Les vieux ont de la peine à suivre, mon renard lui va finir par mourir, comme beaucoup d’êtres humains et d’animaux en Somalie…Il est possible que la Chaîne du Bonheur ait récolté suffisamment pour venir en aide aux enfants pour qu’ils cessent de souffrir. On ne sait pas vraiment. On l’espère, Quel est ce monde de la faim ?