Hommage à Ruqia Hassan

Alors que nous reparlons des journalistes de Charlie Hebdo morts assassinés il y a un an, n’oublions pas les courageux journalistes syriens qui ont été exécutés au cours de 2015. La journaliste indépendante syrienne Ruqia, 30 ans, rouge à lèvres et visage encadré par un foulard noir cerné d’un bandeau doré, a été maintes fois menacée par les djihadistes.

Née à Raqqa

Née à Raqqa et d’origine kurde,  ayant étudié la philosophie à l’Université d’Alep, elle a toujours refusé de quitter sa ville natale passée alors sous l’Etat islamique en 2014. Autant anti-Assad que anti-Daech, elle racontait de l’intérieur le quotidien des habitants. En réaction à l’interdiction de Daech de se servir des lieux wifi à Raqqa, elle avait rétorqué sur Facebook: “Allez-y, coupez nous l’accès à Internet, nos pigeons voyageurs s’en moqueront !”

Cinq autre journalistes syriens

Selon Delphine Minoui (Istanbul), cité par Le Temps du 7 janvier, elle vient tristement rallonger la liste des journalistes syriens enquêtant sur toutes les exactions commises par Daech. Cinq sont connus, mais il y en a sans doute plus, les familles craignant d’en parler par peur de représailles… L’annonce cette semaine du décès de Ruqia Hassan suit celui  d’un autre journaliste syrien, Naji Jarf à Gaziantep, ville turque frontalière de la Syrie. Il venait de réalisé un documentaire sur les violations des droits de l’homme commises par Daech à Alep. Fin octobre, les corps de deux autres reporters syriens décapités avaient été retrouvés à Sanliurfa en Turquie. L’un collaborait à un réseau d’activistes qui enquêtait sur “Raqqa massacrée en silence”.

“Je garderai ma dignité”

Lucide, Ruqia Hassan savait que son tour viendrait, mais elle refusait de partir: “J’ai reçu des menaces de mort. Et quand Daech va m’arrêter et me tuer, c’est OK, parce qu’ils vont me décapiter, mais je garderai ma dignité, c’est mieux que de vivre humiliée par EI”.

Assis confortablement dans nos fauteuils, ayons une pensée de profonde admiration pour ces courageux journalistes syriens qui offrent leur vie pour faire éclater la vérité. En serions-nous capables ? Rendons leur hommage à notre manière en accueillant généreusement des réfugiés syriens  en Suisse pour que leurs morts portent au moins des fruits.

Christine von Garnier

Christine von Garnier, sociologue et journaliste, a vécu 20 ans en Namibie où elle était correspondante du Journal de Genève et de la NZZ. Elle a aussi travaillé comme sociologue dans le cadre des Eglises. Aujourd’hui, secrétaire exécutive de l’antenne suisse du Réseau Afrique Europe Foi et Justice.

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