Les Verts ont gagné cinq sièges ce dimanche au Grand Conseil de Neuchâtel. Ce succès n’est pas isolé : le parti a obtenu 12 sièges supplémentaires lors des dernières élections cantonales, dont beaucoup en Suisse romande. A cela s’ajoutent l’élection d’Alec von Graffenried à la Mairie de Berne et la belle victoire de Jurg Altwegg, qui a battu son concurrent UDC avec 60 % des voix à la Municipalité de Winterthur. L’écologie a de nouveau le vent en poupe, et pas seulement en Suisse. En Autriche et en Hollande, ce sont les Verts, avec Alexander van der Bellen et Jesse Klaver, qui ont fait sensation lors des dernières élections et barré la route à l’extrême droite populiste. Ces succès suisses et européens sont bien sûr le résultat de l’engagement fort, sur le terrain, de personnalités vertes dont la crédibilité a été reconnue par les électeurs. Mais ils s’inscrivent également dans un mouvement de fond, dont j’aimerais souligner ici deux aspects.
On assiste tout d’abord à une repolitisation de l’écologie. Les Verts ont subi des pertes un peu partout en Suisse entre 2011 et 2015, après que Doris Leuthard ait annoncé la sortie du nucléaire. Ce déclin ne doit pas être interprété comme un rejet de l’écologie. Le thème est simplement passé, dans sa dimension politique, après d’autres préoccupations, dont la crise migratoire et la force du franc. Cependant, la dimension politique de l’écologie est progressivement revenue sur le devant de la scène. En Suisse, la population a compris, au fil du traitement de la Stratégie énergétique, passablement édulcorée puis attaquée en référendum par l’UDC, que le tournant énergétique n’était pas joué d’avance et qu’un engagement politique restait nécessaire dans ce domaine comme dans d’autres. Parallèlement à cela, les Verts ont mené devant le peuple deux initiatives populaires, pour une économie verte et pour une sortie programmée du nucléaire, remettant les enjeux écologiques au cœur du débat public. Au niveau international, la signature de l’Accord de Paris, quelques semaines après les élections fédérales de 2015, a montré qu’un engagement politique concerté au niveau international était possible, rendant espoir à de nombreux citoyens favorables à l’environnement. Peu après, l’élection de Trump et sa volonté de détruire les récentes avancées environnementales et climatiques, ont mobilisé ces citoyens, qui ont constaté que rien n’était définitivement acquis. On peut enfin citer les mouvements de rejet, partout en Europe, des accords TTIP ou CETA, qui manifestent la même prise de conscience. Notre engagement comme consommateur responsable ne suffit pas. Les solutions qui font la transition écologique existent aujourd’hui déjà, mais elles ont besoin, pour s’imposer, de conditions-cadres favorables et d’un soutien clair au niveau politique. Or les Verts restent le parti le plus crédible sur les questions environnementales.
Les Verts sont aussi le parti d’une société ouverte sur le monde, accueillante, tolérante, respectueuse. En 2015, il n’est pas exclu que cette orientation ait contribué à leurs pertes, en pleine crise migratoire, alors que les craintes que cette crise a pu susciter ont été habilement récupérées par l’UDC. Mais la donne a changé. La montée de l’extrême droite et de courants populistes, nationalistes et xénophobes, choque à juste titre une partie croissante de la population. En Suisse, celle-ci sanctionne désormais les excès de l’UDC en votation. Le repli et l’exclusion n’apportent aucune réponse aux conflits et à la misère qui contraignent des centaines de milliers de personnes à l’exil. Le vert hollandais Jesse Klaver, dont les parents sont issus de la migration, a su montrer qu’au contraire, la solidarité et l’ouverture sont une chance et constituent les fondements de l’Europe. Si les Verts défendent une société et une économie ouvertes, ils exigent des règles du jeux équitables pour cadrer les échanges internationaux et les mettre au service tant de l’environnement que des citoyens. Une telle perspective d’avenir, confiante et positive, est nécessaire aujourd’hui pour contrer les discours conservateurs des populistes. Une société et une économie à la fois ouvertes et équitables, c’est possible et c’est ce que nous devons construire ensemble : voilà ce que disent les Verts. Et ils sont entendus, car ils ont toujours défendu cette ligne, par beau comme par mauvais temps.
Trump et ceux qui s’en inspirent sont allés trop loin. Instrumentaliser les peurs issues des conflits et des ratés de la mondialisation, nier les grands enjeux environnementaux, tout en ne proposant aucune vision crédible pour l’avenir : cela ne peut pas être convaincant sur le long terme. Nous avons au contraire besoin d’un projet collectif positif pour demain. Les récents succès des Verts illustrent certainement cette aspiration.
Remarquable analyse! Bon vent aux Verts!