Pourquoi on ne peut se passer de l’apport des scientifiques dans l’élaboration des politiques publiques

Depuis l’échange entre parlementaires et scientifiques organisé au Palais fédéral le 2 mai dernier, les relations entre la politique et la science ont fait couler beaucoup d’encre.

Certains élus ont critiqué l’événement, disant que ce n’était pas aux scientifiques du GIEC de décider de nos politiques climatiques. Je fais partie des parlementaires qui ont au contraire apprécié la rencontre, mais je suis d’accord avec cette affirmation. Le dialogue entre la science et la politique est essentiel, mais chacun doit rester dans son rôle. Nous sommes en démocratie, pas dans une technocratie : les élues et les élus sont ceux à qui il incombe de décider, et c’est bien ainsi. Cependant, pour que ces décisions soient prises de la manière la plus éclairée possible, les élues et les élus ont le devoir de se documenter, et de prendre en considération les résultats scientifiques, parmi les nombreux paramètres dont ils tiennent compte dans le processus décisionnel.

Comment se constitue une politique publique 

Les sciences politiques, en tant que sciences humaines, constituent aussi une discipline scientifique. Elles montrent que les politiques publiques passent par plusieurs étapes lors de leur élaboration. A chacune d’entre elles, le dialogue avec les scientifiques représente un apport essentiel, sans pour autant constituer la seule base de réflexion ou de décision.

Au départ, il y a toujours un problème

Les politiques publiques naissent en général suite à la reconnaissance, au sein de la société et, souvent plus tardivement, du monde politique, d’un problème, auquel on reconnait un certain degré de gravité et une envergure collective. Il s’agit de comprendre quels sont les biens et qui sont les personnes lésées par le problème, ainsi que de savoir si les dégâts sont assez importants et les personnes affectées assez nombreuses pour qu’une intervention publique se justifie. Les personnes lésées seront les « bénéficiaires finaux » des politiques publiques mises en place par la suite. Cela signifie que l’objectif de ces politiques publiques sera de les soulager des impacts négatifs du problème reconnu.

A qui la faute ?

Dans un deuxième temps, les acteurs politiques vont devoir définir les causes du problème (« hypothèse causale »). Ceci permet, si tout va bien, d’identifier des comportements, des technologies ou encore des phénomènes économiques ou sociaux, qui sont à l’origine du problème. Derrière eux, on trouve en général des groupes de personnes. Ce sont eux qui constitueront les « groupes cible » des politiques publiques visant à résoudre le problème de départ. Ces politiques publiques devront les amener à modifier leurs comportements et leurs choix technologiques, économiques ou sociaux, de manière à réduire, voire à éliminer l’impact négatif sur les biens et les personnes que l’on souhaite protéger.

Comment initier le changement ?

Enfin, une fois les « groupes cible » définis, il s’agit de savoir comment on peut les amener à modifier leurs comportements et leurs choix technologiques, économiques ou sociaux (« hypothèse d’intervention »). Existe-t-il des alternatives à ces comportements, technologies, ou phénomènes économiques ou sociaux ? Si ce n’est pas le cas, peut-on soutenir le développement de telles alternatives et, si oui, comment ? Si ces alternatives existent, sont-elles connues, disponibles et accessibles pour les groupes cible ? Si ce n’est pas le cas, comment pourrait-on les faire connaître, les rendre disponibles et accessibles ? Si elles sont connues, disponibles et accessibles, mais que les groupes cible ne s’en emparent pas, comment peut-on expliquer cette inertie ? Comment pourrait-on encourager les groupes cible à adopter les solutions qui sont à leur portée ?

Les réponses apportées à ces questions mèneront à définir un éventail de mesures possibles, dont les acteurs politiques vont débattre dans le cadre du processus démocratique. Les mesures qui auront obtenu une majorité au parlement, voire devant le peuple, seront inscrites dans les bases légales et réglementaires, puis mises en œuvre.

Un catalogue d’instruments potentiels

Pour définir la nature de ces mesures, les acteurs politiques disposent d’un catalogue d’instruments qu’ils peuvent activer et qui présentent tous des avantages et des inconvénients. Ils peuvent financer la recherche et des projets-pilotes, soutenir le déploiement sur le marché de certaines pratiques, de certains produits ou de certaines technologies. Ils peuvent agir sur les prix, en taxant certaines pratiques, certains produits ou certaines technologies, ou au contraire en les subventionnant, ou ils peuvent encore en moduler la fiscalité. Ils peuvent autoriser, exiger ou interdire telle ou telle pratique, tel ou tel produit, ou telle ou telle technologie. Ils peuvent imposer la mise à disposition de certaines informations, encourager la formation, financer des campagnes de sensibilisation, soutenir la création de labels. Ils peuvent fixer des objectifs et des conventions, en dialogue avec les branches économiques. Mais ils peuvent aussi finalement décider de ne pas intervenir et de laisser faire le marché…

Un processus sensible, différents intérêts et systèmes de valeur

Ce processus est d’une extrême complexité et constitue un défi pour les acteurs impliqués, qui peuvent commettre des erreurs à chaque étape. Chacune d’entre elles est en effet l’objet d’évaluations délicates, de débats contradictoires et de pesées des intérêts, de gestion des risques, dans le cadre du jeu politique. Et chacune d’entre elles implique des arbitrages souvent difficiles. La manière dont sont menées les réflexions, dont se passent les débats et dont se prennent les décisions, dépend évidemment des informations et des données factuelles dont disposent les acteurs politiques. Cela ne signifie pourtant pas que la prise en considération de telle ou telle donnée scientifique débouchera automatiquement sur telle ou telle décision. Tout d’abord, les résultats scientifiques évoluent au fil des recherches. On a par exemple accordé des autorisations d’usage pour certains produits sur la base de l’état de la recherche à un moment donné, qui les décrivait comme inoffensifs, puis on a dû les retirer du marché par la suite, parce que les scientifiques avaient découvert entre temps qu’ils posaient problème pour l’environnement ou pour la santé. Ensuite, il peut arriver que des résultats scientifiques contradictoires coexistent, rendant le travail politique très délicat et la responsabilité des décideurs particulièrement lourde. Il s’agit alors de privilégier les études indépendantes et d’élaborer une analyse des risques et des opportunités, par exemple pour faire un choix entre plusieurs options technologiques, sur lesquelles on n’est pas sûr de disposer de toutes les informations nécessaires ou qui génèrent encore des débats scientifiques contradictoires. Les principes de précaution et de proportionnalité sont souvent évoqués dans ce type de situations difficiles. Enfin, beaucoup de décisions politiques ne dépendent pas seulement de données scientifiques, mais constituent des choix économiques ou de société.

Dès lors, les données scientifiques ne sont de loin pas le seul paramètre qui entre en jeu, et c’est là un point central. Les réflexions, débats et décisions des acteurs politiques dépendent aussi considérablement des intérêts qu’ils défendent, de leur conception du rôle de l’État, de l’économie et des individus dans la société. Leur système de valeur, leur vision politique et leur représentation du monde jouent un rôle essentiel. Ceci est valable pour les élues et les élus, mais aussi pour les citoyennes et les citoyens, lorsqu’ils ont l’occasion de se prononcer. Dans les deux cas, cela différencie drastiquement les processus politiques des processus scientifiques, qui se déroulent selon des règles tout autres et très spécifiques (expérimentation selon des protocoles précis, vérification ou contestation par les pairs selon les mêmes règles, etc).

Les politiques publiques ont, d’autre part, par définition, une dimension douloureuse, puisqu’elles interviennent suite à l’identification d’un problème, et qu’elles consistent à modifier les comportements et les choix de certaines personnes, les membres du « groupe cible ». Ces personnes vont être amenées, suite à la « pression » exercée par la politique publique, à entamer un processus de changement, qu’elles n’ont souvent pas souhaité, afin de soulager les membres du groupe des « bénéficiaires finaux » (dont elles peuvent toutefois aussi faire partie). Elles sont mises dans une situation qui est, au mieux, momentanément inconfortable, comme c’est le cas dans tout processus de changement, si la politique publique leur ménage des alternatives facilement accessibles. Mais elles peuvent aussi se trouver dans des situations pénibles, si la politique publique est mal conçue, et qu’elles sont soumises à sa pression sans avoir les moyens d’y répondre. Il arrive aussi que des groupes de personnes deviennent des victimes collatérales de politiques publiques, qui ne les visaient pas directement, mais qui vont néanmoins léser leurs intérêts, parfois de manière imprévue et involontaire.

Importance des données scientifiques dans le processus décisionnel

Dans un contexte aussi subjectif et sensible, l’apport des contenus scientifiques est essentiel. Il permet de documenter les décisions politiques et d’ancrer les débats dans une réalité commune et tangible, au-delà des différents systèmes de valeur et de la diversité des représentations du monde.

Ampleur et urgence du problème : une prise de conscience incomplète

Les contenus scientifiques sont notamment indispensables pour aider les acteurs politiques à saisir l’ampleur du problème de départ, ainsi que la nature de ses impacts sur les biens et les personnes affectées. Tant que le problème n’est pas clairement documenté, il est très difficile d’amorcer une réponse au niveau politique. En ce qui concerne le climat, des données scientifiques existent et sont communiquées depuis plusieurs décennies (pour rappel, la première convention internationale sur le climat date du Sommet de la Terre de Rio, en 1992…). Grâce à des publications scientifiques régulières, une prise de conscience a eu lieu et, même si elle a été très progressive, a généré des prises de décision et la mise en œuvre de mesures. On peut par exemple citer la taxe CO2 sur le mazout, qui existe en Suisse depuis 2008, et qui permet de financer depuis des années les subventions pour l’assainissement énergétique des bâtiments.

La très grande majorité des acteurs politiques est aujourd’hui consciente du fait que nous avons un problème important et d’ampleur collective avec le climat. Les derniers rapports du GIEC insistent cependant sur le fait que les mesures prises jusqu’ici n’ont pas réduit suffisamment les émissions de CO2 et que le réchauffement s’accélère dangereusement, avec des conséquences dramatiques à court terme déjà. Le degré de conscience des acteurs politiques est probablement beaucoup moins avancé sur ce point. Le lien entre crise climatique et effondrement de la biodiversité est aussi fortement souligné par les scientifiques depuis quelques années. Là encore, il semble qu’une prise de conscience d’une majorité des décideurs n’ait pas encore eu lieu.

Documenter le choix des groupes cible : un contre-poids au lobbying

Les données scientifiques aident aussi à définir une hypothèse causale qui tienne la route. Cette étape est centrale, dans la mesure où elle définit les groupes de personnes qui seront visées par les politiques publiques. Des erreurs à ce niveau du processus peuvent déboucher sur des politiques publiques totalement inefficaces, ou sur des mesures injustes, par exemple si elles ciblent des personnes qui ne sont pour rien dans le problème de départ, ou si elles omettent de cibler certains groupes à fort impact. A ce stade du processus, les intérêts en jeu ont un poids considérable. Si les membres du groupe cible désigné par l’hypothèse causale bénéficient d’un haut niveau de défense de leurs intérêts au sein des acteurs politiques, et ne souhaitent pas modifier leur comportement, le risque est grand que l’on cherche à minimiser leur rôle, et à désigner d’autres cibles potentielles, disposant de moins de moyens de blocage. Des données scientifiques claires sur le rôle et l’impact des différents groupes d’acteurs sont donc indispensables.

En Suisse, on a ciblé assez rapidement les propriétaires de chauffages à mazout, pour reprendre l’exemple de la taxe CO2, et subventionné avec les recettes de la taxe l’isolation des bâtiments et le remplacement des chauffages à mazout. C’est aussi le cas des importateurs de voitures thermiques, qui sont soumis à des exigences en termes de moyennes d’émissions du parc automobile importé, ainsi que des importateurs de carburants, qui doivent compenser une partie de leurs émissions. Par contre, les banques et les investisseurs, qui constituent pourtant un levier pertinent pour la transition écologique, dans la mesure où ils financent des projets d’infrastructures et des entreprises ayant plus ou moins d’impact climatique, ont été jusqu’ici largement épargnés par les politiques publiques. Il faut dire qu’ils bénéficient de nombreux relais à Berne. De même, l’aviation a jusqu’ici pu se développer de manière considérable sans être visée par des politiques publiques climatiques, malgré un impact clair en termes d’émissions.

Des mesures à la hauteur, sur la base de scénarios fiables

Les données scientifiques permettent de faire des projections sur les impacts à attendre de la part de telle ou telle mesure, et d’en réaliser ensuite un monitoring, en regard des objectifs fixés. Les scientifiques fournissent en particulier des informations fiables sur les différentes trajectoires et scénarios potentiels concernant nos émissions de CO2, et en présentent à chaque fois les conséquences pour nos sociétés : plus ou moins de canicules, de sécheresses, d’événements climatiques extrêmes, atteinte de points de bascule, etc. En fonction des décisions politiques prises (ou pas…) et de leur influence sur la réduction de nos émissions, nous pouvons ainsi connaître la trajectoire dans laquelle nous nous situons et son impact pour notre société.

Le diagnostic scientifique est sévère en la matière : jusqu’ici, la Suisse n’a pas rempli ses engagements en matière de réduction de ses émissions de CO2 (ce qui a nécessité des compensations supplémentaires à l’étranger) et la trajectoire dans laquelle nous nous situons – tout comme les autres pays, d’ailleurs  – va déboucher rapidement sur des conséquences absolument catastrophiques, dont nous vivons aujourd’hui déjà les premières manifestations. Cela signifie indiscutablement que les mesures que nous avons prises jusqu’ici étaient mal ciblées, mal conçues ou/et insuffisantes, et que des corrections urgentes doivent y être apportées.

Quand on sait que les mesures actuelles dans le domaine du bâtiment ne permettent d’assainir que 1 % du bâti par année, et qu’il faudra donc un siècle à ce rythme pour disposer d’un parc immobilier isolé et chauffé de manière écologique (pour rappel, nous devons atteindre zero émission nette en 2050), on mesure l’insuffisance des politiques publiques en place. Dans le domaine de la mobilité, les mesures prises jusqu’ici (moyennes d’émission de CO2 à atteindre pour les véhicules importés et compensation d’une partie de leurs émissions par les importateurs de carburants, avec un léger impact sur le prix de l’essence) n’ont pas enrayé la hausse des émissions. C’est un bon exemple d’effet rebond. Le nombre de véhicules s’est multiplié, ainsi que les kilomètres parcourus, et ces véhicules sont de plus en plus lourds et puissants, ce qui compense les gains d’efficience des moteurs. Des mesures plus efficaces doivent être prises, si nous voulons changer de trajectoire.

Apports des sciences humaines dans le choix des instruments

Les données scientifiques nous permettent de mesurer le succès ou l’échec des mesures prises en termes de réduction des émissions de CO2, mais elles sont aussi utiles en amont, lors des discussions sur le choix des instruments à mettre en œuvre. Il s’agit souvent de contenus issus des sciences humaines, par exemple des analyses sur les impacts économiques et sociaux de telle ou telle mesure. Aujourd’hui, il existe également de nombreux travaux qui analysent les réactions psychologiques, à l’échelle des individus, ou sociales, à l’échelle des groupes, lors de l’utilisation de divers instruments de politique publique, taxes, prescriptions, mesures fiscales, etc. Enfin, les sciences politiques permettent de mieux comprendre le jeu des acteurs, en évaluant par exemple la capacité de blocage de tel ou tel groupe d’acteurs.

En matière climatique, l’échec de la Loi sur le CO2 devant le peuple a montré que des mesures présentes dans la révision de la loi ont été ressenties comme injustes et mal conçues par certains groupes cible. Le rôle de l’État, en matière de transition écologique, devrait être de donner à la population et aux entreprises les moyens, pratiques et financiers, d’accéder aux solutions écologiques, puis de les inciter à s’en emparer. Si les groupes cible visés, qui subissent ces incitations, ont l’impression qu’ils n’ont pas les moyens d’y échapper en changeant leur comportement ou de technologie, alors on peut assister à des blocages. Les apports des sciences humaines, sur les différentes mesures et instruments que nous avons à disposition, et sur leur impact social et économique sur la population et sur les entreprises, sont aujourd’hui centraux. C’est d’autant plus le cas que le débat se déplace de plus en plus, de la question de savoir si nous devons agir ou non, à la question de savoir comment nous devons agir.

Répondre à l’urgence avec des mesures acceptables, au-delà des visions idéologiques

Nous avons besoin aujourd’hui, plus que jamais, du soutien des scientifiques, et ce à deux niveaux. Tout d’abord, le degré de gravité de la situation écologique n’est pas encore compris assez largement, que ce soit au niveau des élues et élus politiques ou de la population. Les scénarios du GIEC montrent pourtant que si nous continuons comme nous l’avons fait jusqu’ici, les conséquences pour notre société seront dramatiques, au-delà de ce que nous pouvons imaginer, et beaucoup plus vite que nous le pensons. Nous devons réduire drastiquement et très rapidement nos émissions de CO2, pour nous placer dans un scénario soutenable. C’est sur la base de ce diagnostic scientifique commun que nous devons impérativement débattre, en répondant aux questions suivantes : quelles mesures et quels instruments, ciblant quels groupes, parmi ceux dont on sait qu’ils sont responsables des émissions, permettent de générer cette réduction drastique et très rapide des émissions ? Et dans quelles conditions ces mesures et instruments peuvent-ils être acceptables, pratiquement et financièrement, pour la population et pour les entreprises ? Les réponses à ces questions doivent nécessairement intégrer les apports des sciences humaines (économie et en particulier économie comportementale, sciences politiques, sociologie, psychologie).

Pour faire face à la situation d’urgence dans laquelle nous nous trouvons, les barrières idéologiques doivent en effet être levées. La majorité du parlement a misé jusqu’ici sur le système des taxes incitatives, un instrument misant sur les forces du marché et permettant l’internalisation des coûts environnementaux, plébiscité par les économistes. Ce système comprend un mécanisme de redistribution partielle, en guise de mesure d’accompagnement. La taxe CO2 incitative sur le mazout, mise en place en 2008, est certes passée sans encombre à l’époque, mais le peuple a tiré la sonnette d’alarme en refusant, en 2021, la révision de la Loi sur le CO2, qui devait la renforcer. Cette révision impliquait en effet une hausse des prix de l’essence (en lien avec l’augmentation des compensations de CO2 sur les carburants) et du mazout (via une hausse de la taxe CO2). Il faut en prendre acte.

Si la transition ne peut pas être financée par l’application du principe du pollueur-payeur, il faut financer les indispensables soutiens, permettant à la population et aux entreprises d’adopter les comportements et les technologies écologiques, autrement. Peut-être que des subventions financées par le budget de l’État seront plus faciles à accepter par la population. C’est ce que prévoit le contre-projet indirect à l’initiative des glaciers, qui veut puiser dans le budget de la Confédération pour soutenir avec 200 millions de francs supplémentaires par an, pendant dix ans, le remplacement des chauffages à mazout. 1,2 milliards de francs annuels, pendant six ans, sont aussi prévus pour soutenir la réduction des émissions de CO2 dans les entreprises. La mise en place de prescriptions visant les producteurs, plutôt que d’instruments ciblant le porte-monnaie des consommateurs, est une autre piste. L’UE innove en la matière, en imposant des prescriptions dans le domaine de la mobilité : dès 2035, les producteurs ne pourront plus mettre sur le marché de nouveaux véhicules thermiques, ce qui permettra d’aller vers un parc automobile ne dépendant plus des énergies fossiles en une dizaine d’années. Certains pays appliqueront même cette mesure plus tôt, dès 2025 ou 2030.

Dans tous les cas, nous ne pourrons avancer qu’en cessant de nous disputer sur des bases idéologiques. C’est désormais l’urgence, déclarée par les climatologues, qui doit mener nos travaux, ainsi que l’acceptabilité des mesures, sur laquelle les sciences humaines peuvent nous informer, par la population. Car dans un pays comme le nôtre, c’est bien le peuple qui décidera, en dernière instance, de notre avenir climatique.

 

 

Adèle Thorens Goumaz

Adèle Thorens Goumaz est conseillère aux Etats verte vaudoise. Elle a coprésidé les Verts suisses entre 2012 et 2016 et siégé au Conseil national entre 2007 et 2019. Philosophe et politologue de formation, elle a obtenu un certificat postgrade en politiques de l’environnement et de la durabilité à l’IDHEAP. Elle a ensuite fait de la recherche et de l’enseignement en éthique et en gestion durable des ressources, puis travaillé comme responsable de la formation au WWF Suisse. Elle siège actuellement à la commission de l’économie, à la commission des finances et à la commission de l’environnement du Conseil des États. Ses dossiers de prédilection sont l'économie circulaire, la finance durable, la transition énergétique, la préservation du climat, l’agriculture et la biodiversité. Plus d’informations sur www.adelethorens.ch

3 réponses à “Pourquoi on ne peut se passer de l’apport des scientifiques dans l’élaboration des politiques publiques

  1. Je ne ferai que deux commentaires pas manque de temps pour reprendre nombre d’affirmations discutables:

    1) Le GIEC n’est pas un groupe scientifique à proprement parler, le véritable terme est IPCC (International Panel on Climate Change), ce qui indique que c’est un “Panel” donc un groupe ouvert à tout les monde, scientifique ou non et les derniers scandales du GIECC avec un rapporteur bardé de faux diplômes qui n’était qu’un militant de Greenpeace sans aucun diplôme montre qu’il faut être très prudent quand on parle de scientifique. Par ailleurs l’IPCC travaille sur la base du consensus, tout le monde apporte ses données, vérifiées ou non et au final on fait une moyenne. Certains scientifiques avancent 1° pour 2100, Greenpeace 6° et le rapporteur indique 3° pour satisfaire tout le monde. Il faut lire en détails le rapport complet, pas uniquement les résumés pour se faire sa propre opinion. La notion de “scientifique” est donc à prendre avec précautions, car elle n’est pas garante de vérité absolue.

    2) La rigueur scientifique doit aussi s’appliquer aux données que l’on met en avant. Ainsi vous vous focalisez sur la Suisse et les mesures prises ou à prendre, coercitives et de nouvelle taxes, mais vous oubliez une chose importante: Elles n’auront strictement aucun effet sur le climat qui est mondial, tout simplement parce que la Suisse ne représente que 0,1% du CO2 mondial. Même si la Suisse passe à zéro émissions de CO2, cela ne changera strictement rien car 0,1% n’a aucun effet au plan mondial, même pas 0,01°.
    La Chine, l’Inde, et les USA représentent à eux trois 80% du CO2 mondial, c’est là qu’il faut agir, pas sur le 0,1%. Tous scientifique rigoureux vous dira que vous être entrain d’essayer de vider le Léman avec un verre en essayant de baisser les 0,1% du CO2 mondial de la Suisse. Bien sur, vous allez m’opposer qu’un Suisse émet plus de CO2 qu’un Indien, certes, mais la question n’est pas ce qu’un Suisse émet comme CO2, mais où faut-il agir pour avoir un impact ? Le climat se moque de votre bonne conscience. Tout scientifique qui se respecte vous dira de vous focaliser sur les 80% avant de regarder les 20% et encore moins les 0,1%.

    Conclusion, vos efforts en Suisse vous donnent peut-être bonne conscience, mais ils n’ont strictement aucun effet sur le climat, allez militer en Chine ou en Inde qui ouvrent plusieurs centrales à charbon tous les mois, où en Allemagne qui depuis une décennie a remplacé des réacteurs nucléaires par des centrales à charbon et contribue pour 6% du CO2 mondial plutôt que de vouloir taxer encore plus les Suisses et leur interdire de voyager.

  2. Vous nous dites vous appuyer sur des scientifiques.

    Lesquels?
    Ceux qui prédisaient 200’000 morts du Covid en Suisse au printemps 2020?
    Ceux qui ont dit de mettre des terres en jachère en 2022, malgré la guerre en Ukraine et les sanctions contre la Russie…, jettant 1 milliard d’humains dans la famine ?

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