Le Conseil national doit s’engager pour une économie verte

Le contre-projet du Conseil fédéral à l’initiative des Verts pour une économie verte sera traité par la commission de l’environnement du Conseil national à fin février. L’idéal aurait été que les autorités fédérales soutiennent l’initiative, dont le but est de rendre l’activité économique compatible à long terme avec les limites des ressources naturelles. Le Conseil fédéral dit soutenir ses objectifs, mais juge trop ambitieuse l’exigence de réduire l’empreinte écologique de la Suisse à une planète jusqu’en 2050. Il propose donc un contre-projet indirect, via une révision de la Loi sur la protection de l’environnement. Ce n’est pas rien.
Ce contre-projet a failli ne pas passer la rampe au Conseil des États. Heureusement, un nombre suffisant de sénateurs a pris la liberté de ne pas suivre les consignes d’Economiesuisse, mais d’écouter plutôt les cantons, favorables au contre-projet, tout comme les grands groupes de distribution, les associations professionnelles des cleantechs et du recyclage ou l’industrie du bois. La Chambre des cantons a finalement adopté le contre-projet sous une forme édulcorée.
L’essentiel y demeure cependant, avec l’inscription dans la loi du principe de la préservation des ressources naturelles. La loi propose en outre divers instruments permettant une meilleure revalorisarion des déchets et des matériaux. Enfin, plusieurs articles visent à réduire la présence, sur notre marché, de produits portant massivement atteinte à l’environnement, comme le bois issu de coupes illégales dans des forêts primaires. Ces mesures concrètes constituent un premier pas dans la bonne direction.
Le contre-projet contient cependant des lacunes:
– Il ne fixe aucun objectif en matière de réduction de notre consommation de ressources, alors que l’Union européenne vise, elle, un usage durable des ressources pour 2050.
– Il n’est pas clair sur la manière dont on peut prendre en compte les charges environnementales sur l’ensemble du cycle de vie d’un produit, de l’extraction des matériaux – qui a souvent lieu à l’étranger – à son élimination. L’importance de l’ecodesign, par exemple, qui permet de concevoir en amont les produits ou les processus de production de manière à préserver les ressources, n’est pas reconnue.
– Il se concentre principalement sur les entreprises. La responsabilité des collectivités publiques est peu engagée, alors que leur rôle d’exemplarité pourrait être renforcé, tout comme celui de la formation.
– Enfin, il ne propose aucune mesure pour favoriser l’optimisation de la durée de vie des produits et, notamment, la lutte contre l’obsolescence programmée.
Il faut espérer que les conseillers nationaux prendront conscience, à l’occasion des débats à venir, de l’importance de l’économie verte pour notre environnement, mais aussi pour la durabilité de notre économie. L’initiative et son contre-projet soutiennent en effet l’innovation et l’emploi, et améliorent notre compétitivité sur un marché mondial où les impératifs de la lutte contre le réchauffement planétaire et la raréfaction des ressources ne peuvent que s’amplifier.

Ce texte a également été publié sur Politblog.

Adèle Thorens Goumaz

Adèle Thorens Goumaz est conseillère aux Etats verte vaudoise. Elle a coprésidé les Verts suisses entre 2012 et 2016 et siégé au Conseil national entre 2007 et 2019. Philosophe et politologue de formation, elle a obtenu un certificat postgrade en politiques de l’environnement et de la durabilité à l’IDHEAP. Elle a ensuite fait de la recherche et de l’enseignement en éthique et en gestion durable des ressources, puis travaillé comme responsable de la formation au WWF Suisse. Elle siège actuellement à la commission de l’économie, à la commission des finances et à la commission de l’environnement du Conseil des États. Ses dossiers de prédilection sont l'économie circulaire, la finance durable, la transition énergétique, la préservation du climat, l’agriculture et la biodiversité. Plus d’informations sur www.adelethorens.ch