Il suffirait d’une petite étincelle pour provoquer l’insurrection dans les centres d’enregistrements “hotspots”(1) à Lesvos, Samos, Chios et Kos. Il y a quelques jours le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) communiquait la gravité de la situation en pointant du doigt les autorités grecques trop lentes à réinstaller les familles sur le continent. Il faut dire que depuis le début du mois de septembre les arrivées sont plus nombreuses. A Lesbos par exemple, Médecins sans frontières (MSF) comptent 1’500 nouvelles arrivées.
“Le HCR appelle les autorités à accélérer rapidement les procédures pour les personnes pouvant être transférées sur le continent; augmenter la capacité d’accueil sur le continent pour les accueillir; améliorer rapidement les conditions dans les centres d’accueil et fournir un hébergement alternatif aux plus vulnérables.”
Le temps presse car l’hiver approche. Aujourd’hui les centres d’accueils sont surpeuplés et dangereux pour la santé publique car les autorités grecques ont abandonné le contrôle des installations sanitaires et de la gestion des déchets qui s’empilent aux abords des tentes et des eaux stagnantes. Les camps sont aussi devenus des lieux où règnent les abus sexuels et la violence. Les toilettes et les douches sont des “no-go zones” pour éviter les abus.
D’autres nouvelles donnent la nausée. Les enfants font régulièrement des tentatives de suicide, les femmes accouchent seules dans des tentes et les soins médicaux ne sont accessibles qu’après des heures de queue.
Dans les camps de Vathy (Samos) et Moria (Lesvos) le nombre de personnes est plus de trois fois supérieur à leur capacité d’accueil(2). Les centres “hotspot” des îles de Chios et de Kos ont presque doublé leur capacité d’accueil.
On est traité comme des rats
Moria est un centre dangereux où le désespoir donne envie d’en finir. Situé au milieu d’une oliveraie, dans la commune de Moria sur l’île de Lesbos, ce camp est le premier centre d’enregistrement “hotspot” en Grèce. A Moria, Médecins sans frontières (MSF) a constaté une escalade de violence à l’intérieur et autour du camp.
Là-bas, les requérants d’asiles estiment qu’ils y sont “traités comme des rats” et l’ONG a déploré plusieurs tentatives de suicide et de nombreux cas d’automutilations parmi des enfants. Mais ce n’est pas tout. Le rapport des inspecteurs de la santé publique de l’île de Lesbos vient de condamner la situation sanitaire critique du camp à cause de la quantité importante de déchets sur le site considéré comme “dangereux pour la santé publique et l’environnement”. La gouverneure régionale Chrisinana Kalogirou a exigé des mesures concrètes d’ici le 10 octobre 2018 au Ministre des migrations et au directeur du camp pour éliminer les déchets et surtout pour adapter et réparer les installations sanitaires sans quoi le camp sera fermé.
Le HCR critique la paresse des autorités grecques
Ces niveaux de surpeuplement n’ont pas été observés depuis mars 2016 selon le HCR qui souligne dans son communiqué qu’à l’époque les taux d’arrivée étaient beaucoup plus élevés. Ce sont en grande majorité des familles de Syrie, d’Irak et d’Afghanistan qui ont été victime des retards administratifs et logistiques grecs. Mais le HCR rappelle les financements importants reçus de l’Union européenne et propose de venir en aide au gouvernement grec pour accélérer les transferts rapides des personnes les plus vulnérables.
Lire aussi:
Inside Lesbos’ Moria camp, home to thousands of trapped refugees and migrants
EU to shore up borders, returns and migrant detentions
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- Un centre “hotspot” est un centre de réception et de rétention des requérants où les procédures d’identification et d’enregistrement sont effectués notamment avec la prise systématique des empreintes digitales des requérants d’asile.
- Vathy a une capacité d’accueil de 700 personnes. En août 2018 ce sont 2’700 personnes qui étaient bloquées là-bas. Moria a une capacité de 3’100 personnes. Le nombre d’occupants a atteint 9’000 personnes selon MSF.