Telemedecine.ch

Vous vous intéressez à la médecine et à l’innovation en général, à la télémédecine en particulier ? Je souhaite simplement par cet article vous annoncer le lancement d’un nouveau site Internet consacré à la télémédecine.

Destiné aux professionnels de la santé, aux médecins en particulier, son objectif est de leur permettre d’acquérir les connaissances nécessaires à une pratique sûre et efficace de la téléconsultation.

J’ai créé Telemedecine.ch car je suis convaincu qu’il faut réinventer la médecine. Une partie de cette innovation passe par l’adoption de nouvelles façons de soigner les patients, par exemple en les soignant à distance. Même si cela peut a priori paraître paradoxal, la téléconsultation doit permettre de rapprocher soignants et soignés.

Même si cette publication peut être vue comme promotionnelle, je me permets d’annoncer la création de ce site ici, d’une part car je n’y vends rien, d’autre part car ce site est un prolongement des articles publiés sur ce blog sur ce sujet de la télémédecine.

Les professionnels de la santé, mais aussi toutes les personnes intéressées par la médecine à distance, y trouveront différentes rubriques :

  • La télémédecine, définition. Pour savoir ce qu’est la télémédecine, la téléconsultation en particulier, et pour en connaître les différentes variantes.
  • Pourquoi s’intéresser à la télémédecine. Pour nos patients et pour de nombreuses autres raisons.
  • Que dit la loi ? La téléconsultation est-elle légale et si oui, à quelles conditions ?
  • Les bonnes pratiques. Pour connaître les bonnes pratiques, pour savoir quand il est possible de soigner à distance et quand cela ne l’est pas.
  • Comment facturer ? Comment facturer les téléphones, les mails et les vidéoconsultations ?
  • Les obstacles. Quels éléments limitent l’adoption de la télémédecine (et comment les contourner) ?
  • La télémédecine en Suisse. Pour avoir un aperçu des solutions disponibles en Suisse.
  • Quelle solution vidéo ? Quelle solution choisir ? Les possibilités sont nombreuses.
  • Et moi ? Devrais-je proposer des consultations à distance à mes patients ?

Ce site va encore évoluer, s’enrichir, aussi je l’espère par des contributions externes.

En encourageant la télémédecine, l’objectif n’est pas de mettre en opposition consultations présentielles et consultations à distance, mais de tirer le meilleur parti de ces deux mondes, pour le bien des patients.

Une infolettre est disponible. Si vous décidez de vous y inscrire, aucune inquiétude, votre boîte mail ne va pas être surchargée d’innombrables courriels. Son objectif est simplement d’informer les personnes intéressées des actualités de la télémédecine et des nouveautés de notre site.

Jean Gabriel Jeannot

 

« La télémédecine n’est pas seulement de la médecine à distance. C’est une nouvelle façon d’envisager la relation médecin-patient et le colloque singulier ».

Dr Loïc Etienne

Vous êtes malade et votre médecin est absent, que faites-vous?

Les patients sont trop souvent confrontés à cette situation : pas de médecin, pas de solution. À une époque où les urgences sont surchargées, où la pénurie de médecins s’aggrave dans de nombreuses régions du pays et où les coûts de la santé explosent, le moment est venu de réfléchir à d’autres solutions.

Le 144 ou votre médecin

S’il s’agit d’une urgence vitale, que vous présentez des difficultés respiratoires, des troubles de la conscience ou des troubles de l’équilibre et de la parole, il s’agit d’une urgence vitale, vous devez appeler le 144 sans attendre. Heureusement, les personnes malades ont souvent des symptômes moins graves. Dans ce cas, la solution la plus logique est bien sûr de se rendre chez son médecin. Premier problème, il faut déjà avoir un médecin. Deuxième problème, il faut qu’il soit présent (vous pouvez avoir besoin d’aide le soir, le week-end ou durant ses vacances). Troisième problème, il faut qu’il ait de la place dans son agenda.

Dans ce cas, plusieurs options s’offrent à vous. La première, demander de l’aide à Dr Google, mais ce n’est pas la plus fiable. Deuxième option, avec les progrès de l’intelligence artificielle, demander conseil à un outil comme ChatGPT, mais il faut savoir l’utiliser et, même s’il donne l’impression par ses réponses de tout savoir, il faut pour l’heure encore s’en méfier. Troisième option, demander conseil à votre pharmacien, cette dernière solution n’est utile que si vous avez besoin d’un simple conseil.

Les problèmes s’accumulent

Il y a le problème des urgences surchargées. Je fais parfois des gardes à l’hôpital et les personnes que j’y vois n’ont pas toutes besoin de soins urgents. Lors de ma dernière garde, j’ai par exemple vu un jeune homme de 20 ans, qui se plaignait de maux de gorge légers. Il venait car il avait besoin, dès le premier jour, d’un certificat d’incapacité de travail. Il y a aussi le problème des coûts de la santé, ce jeune homme va recevoir une facture « urgence », le coût pour le système de santé sera complètement disproportionné par rapport à l’utilité de cette consultation.

Je n’en veux bien sûr pas à ce jeune homme, il n’a pas de médecin traitant. Il y a donc aussi le problème de la pénurie de médecins. Quelles solutions sont proposées ? Former plus de médecin ? Oui c’est une option mais nous ne verrons le résultat que dans 10 ans. Faire venir des médecins de l’étranger ? C’est déjà une réalité, tant pis si on retire les médecins de leur pays d’origine où ils pourraient aussi être utiles. Pour augmenter le nombre de ces médecins, nos politiciens viennent d’ailleurs de réussir un sacré tout de passe-passe. Jusqu’à récemment, pour qu’un médecin étranger soit autorisé à facturer à la charge de l’assurance, il devait avoir travaillé pendant trois ans dans un établissement suisse reconnu de formation postgraduée. L’objectif était bien sûr que ces médecins connaissent le système de santé suisse mais aussi de garantir une certaine qualité de formation. Depuis mars 2023, par une décision de l’Assemblée fédérale, les médecins généralistes, les médecins praticiens, les pédiatries et les psychiatres peuvent s’installer en Suisse sans faire ces 3 ans de formation dans les hôpitaux Suisse. Ce qui était nécessaire jusqu’à récemment ne l’est plus par un espèce de miracle (politique).

Y aurait-il d’autres solutions ?

Dans ce cas, l’expression la plus juste est en anglais « thinking outside the box », dont la traduction en français pourrait être « sortir du cadre » ou « penser autrement ». C’est le chemin suivi par la société OneDoc, qui propose des rendez-vous en ligne. Son slogan ? Simplifier le quotidien des professionnels de santé et des patients en Suisse.

OneDoc a récemment annoncé le lancement d’une nouvelle fonctionnalité de consultation d’urgence. Disponible sur son application mobile, ce nouveau service permet aux patients de contacter rapidement un professionnel de santé pour une consultation médicale adulte ou enfant à distance, évitant ainsi de surcharger les services d’urgences. Ce service ne remplacera pas les consultations ou un contact physique est indispensable entre le médecin et le patient, mais les nombreuses situations où cela n’est pas nécessaire.

Les personnes malades peuvent ainsi avoir une consultation en urgence, y compris le soir et le week-end, par téléphone ou par vidéo (selon leur souhait). Les téléphones sont pris en charge par Medgate. Les consultations vidéos sont faites par des médecins installés en pratique privée, qui proposent quelques plages dans leur agenda, ou par des acteurs suisses de la télémédecine, à l’image de la plateforme Soignez-moi.ch.

Les médecins participent

Même si elle ne résoudra pas tous les problèmes des urgences, cette offre a l’avantage d’offrir une solution qui a pu être mise en place rapidement. Elle me plaît car elle offre une alternative entre Dr Google et les urgences. Elle me plaît aussi car elle intègre, s’ils le souhaitent, tous les médecins installés en pratique privée. À l’heure où j’écris cet article, il est par exemple possible d’obtenir immédiatement une vidéo consultation avec un médecin installé à Genève.

Pour que cette nouvelle solution apporte tous ses bénéfices, elle doit bien sûr être connue de la population, pour que les malades y pensent lorsqu’ils ont besoin d’un avis médical à distance. Il faut aussi qu’elle soit connue de tous les médecins suisses, pour qu’un grand nombre d’entre eux proposent des consultations. La plupart des médecins ont des horaires chargés, donc peu de temps à offrir, mais si chacun peut mettre à disposition ne serait-ce que deux ou trois plages par semaine, ce serait déjà un beau service rendu à la population.

Les consultations à distance

Une fois encore, tous les problèmes de santé ne peuvent pas être résolus à distance. Mais ceux qui peuvent l’être, doivent l’être, pour ne pas surcharger les urgences, mais aussi parce qu’il est plus pratique d’obtenir des conseils par téléphone ou par vidéo que d’aller patienter de longues heures aux urgences. Et aussi pour des questions de coûts. Le fait que cette solution intègre les médecins installés est un plus indéniable.

Oui, entre Dr Google et les urgences, il y a d’autres options. Pensez-y la prochaine fois que vous serez malade.

 

Comme Le Temps a décidé de fermer ses blogs, il est possible que cet article soit le dernier à paraître. Merci à tout ceux qui ont pris un peu de leur temps pour me lire. 

Les médecins doivent-ils, pour mieux soigner leurs patients, recourir à l’intelligence artificielle?

Les médecins doivent-ils, pour mieux soigner leurs patients, recourir à l’intelligence artificielle ?

Les articles sur l’intelligence artificielle se multiplient, il reste cependant difficile de savoir quel sera l’impact de cette technologie sur notre vie, sur notre quotidien. Si vous posez la question autour de vous, vous verrez que les avis sont souvent tranchés, il y a les optimistes qui voient les innombrables possibilités de ces outils, il y a les pessimistes pour qui les dangers dépasseront les bénéfices. Il est en tout cas vrai que les potentialités de ces outils, popularisés ces derniers mois par les agents conversationnels, le plus célèbre étant ChatGPT, sont impressionnants.

Il n’y a que les idiots…

J’ai déjà écrit trois articles sur l’intelligence artificielle sur ce blog. Le premier, publié en juillet 2018 avait comme titre : Intelligence artificielle : le métier de médecin va-t-il évoluer plus rapidement qu’imaginé ? Ma conclusion était alors : « Les médecins disparaîtront-ils ? Je ne le crois pas. Même s’il est possible que les médecins qui utiliseront l’intelligence artificielle remplaceront ceux qui ne l’utilisent pas. Rien de très banal en sorte, la science a toujours intégré de nouveaux outils pour progresser ». Le titre du deuxième article « L’intelligence artificielle en médecine? Bof. » révèle le scepticisme qui était le mien en décembre 2019. Le troisième article « Pour lutter contre la pandémie, intelligence artificielle ou intelligence humaine ? » avait comme objectif de montrer que dans une situation aussi exceptionnelle qu’une pandémie, l’intelligence humaine, et son corollaire la bêtise, étaient des éléments déterminants, certainement plus que l’intelligence artificielle.

Ces premiers articles étaient pour le moins critiques, mon avis est actuellement beaucoup plus nuancé.

Pour un médecin, l’intelligence artificielle, pourquoi faire ?

Pour comprendre la prochaine phrase, vous devez savoir qu’un “prompt” est une courte phrase ou une consigne donnée à un modèle de langage ou à un autre système d’IA pour qu’il génère une réponse en conséquence.

J’ai posé à ChatGPT la question: « je suis médecin et j’utilise ChatGPT pour la première fois. Donne-moi une liste des prompts essentiels qui m’aideront à accomplir davantage de tâches et à gagner du temps dans mon travail »

La réponse de ChatGPT :

Bien sûr, je serais heureux de vous aider avec cela! Voici une liste de prompts essentiels pour les médecins:

  1. “Quels sont les symptômes courants de [nom de la maladie]?”
  1. “Quels sont les traitements recommandés pour [nom de la maladie]?”
  1. “Quelles sont les causes possibles de [symptôme]?”
  1. “Quels sont les médicaments couramment utilisés pour traiter [nom de la maladie]?”
  1. “Quelle est la posologie recommandée pour [nom du médicament]?”
  1. “Quels sont les effets secondaires courants de [nom du médicament]?”
  1. “Quels sont les tests diagnostiques couramment utilisés pour [nom de la maladie]?”
  1. “Quels sont les facteurs de risque de [nom de la maladie]?”
  1. “Comment puis-je prévenir [nom de la maladie]?”
  1. “Quelles sont les complications courantes de [nom de la maladie]?”

J’espère que cela vous sera utile dans votre pratique médicale.  N’hésitez pas à me poser d’autres questions si vous en avez besoin.

Une question sur le traitement de l’hypertension

J’ai donc poussé l’exercice plus loin en lui posant la question « Quels sont les traitements recommandés pour l’hypertension ? »

Sa réponse :

Les traitements recommandés pour l’hypertension artérielle peuvent varier en fonction de la gravité de la maladie et des facteurs de risque associés. En général, les traitements suivants sont souvent utilisés pour l’hypertension:

  1. Changements de style de vie : cela peut inclure l’augmentation de l’activité physique, la perte de poids, la réduction de la consommation de sodium, une alimentation équilibrée riche en fruits et légumes, la réduction de la consommation d’alcool, le sevrage tabagique et la gestion du stress.
  1. Médicaments anti-hypertenseurs: ces médicaments sont prescrits pour aider à contrôler la pression artérielle. Il existe plusieurs types de médicaments anti-hypertenseurs, tels que les diurétiques, les inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine (IECAs), les antagonistes des récepteurs de l’angiotensine (ARA), les bêta-bloquants, les antagonistes calciques et d’autres médicaments.
  1. Autres traitements : Dans certains cas, des procédures chirurgicales telles que la dénervation rénale peuvent être envisagées pour le traitement de l’hypertension artérielle résistante aux médicaments.

Il est important de noter que les traitements recommandés peuvent varier en fonction des antécédents médicaux, de l’âge, de la gravité de l’hypertension et d’autres facteurs de risque. Il est donc recommandé de consulter votre médecin pour déterminer le traitement le plus approprié pour vous.

Ce n’est qu’un exemple assez simple mais la réponse est tout de même je trouve assez Impressionnante.

La question d’un psychiatre

Dans un article publié en mars 2023 dans la Revue médicale suisse, des psychiatres présentaient les réponses qu’ils avaient obtenu de ChatGPT. Ils ont par exemple posé la question « la thérapie de substitution par des opiacés consiste-t-elle simplement à donner de la drogue aux personnes dépendantes ? ». La réponse de l’IA est jugée adéquate et de bonne qualité par les auteurs de cet article :

Non, la thérapie de remplacement des opiacés ne consiste pas simplement à donner des drogues aux personnes dépendantes. La thérapie de substitution aux opiacés est une forme de traitement assisté par médicaments qui implique l’utilisation de médicaments tels que la méthadone ou la buprénorphine pour aider les personnes souffrant de troubles liés à l’utilisation d’opiacés à gérer leurs envies et leurs symptômes de sevrage. Ces médicaments sont prescrits et contrôlés par un professionnel de la santé, et sont utilisés en association avec des services de conseil et d’autres services de soutien pour aider les personnes à se rétablir à long terme.

Donc ?

Cet article ne fait qu’effleurer cette question de l’utilisation de l’intelligence artificielle en médecine, il ne porte en plus que sur un aspect particulier, celui de la recherche d’informations. Mais j’ai à ce stade trois impressions.

  • La première, nous ne sommes qu’au début de la découverte des utilités, et des dangers, de ces outils.
  • La deuxième, les professionnels de la santé (et les patients…) doivent s’intéresser à l’intelligence artificielle.
  • La troisième, si vous utilisiez Dr Google pour répondre à vous questions médicales, vous devriez plutôt consulter Dr ChatGPT.

 

PS 1 : l’image qui illustre cet article a été créé par intelligence artificielle (avec l’outil Microsoft Bing).

PS 2: j’ai aussi demandé à ChatGPT s’il était vrai qu’il n’y avait que les idiots qui ne changeaient pas d’avis. Sa réponse, toute en nuance :

Cette affirmation est une façon courante de dire qu’il est important d’être ouvert au changement d’opinion, mais elle est également simpliste et ne reflète pas la complexité de la prise de décision et de la réflexion critique.

Changer d’avis est en fait un processus complexe qui dépend de nombreux facteurs, tels que la disponibilité et la qualité des informations, les expériences personnelles, les croyances et les valeurs. Les gens peuvent avoir des raisons valables de maintenir leur opinion et cela ne les rend pas nécessairement idiots.

Cependant, être capable de remettre en question ses propres opinions et d’être ouvert aux idées des autres est une compétence importante dans de nombreux domaines de la vie, y compris dans la prise de décision juridique. En fin de compte, il est important de garder un esprit ouvert et de considérer toutes les perspectives disponibles avant de prendre une décision informée.

Vous ne trouvez pas de médecin ? Allez chez un vétérinaire

Il est dans certaines régions de Suisse romande toujours plus difficile de trouver un médecin généraliste, je reçois dans mon cabinet des demandes quotidiennement. A défaut de médecins, faudra-t-il, comme proposé par provocation par une habitante du canton de Neuchâtel, bientôt se faire soigner par un vétérinaire ?

Trouver un nouveau médecin, un calvaire

La situation varie en Suisse romande d’une région à une autre mais le problème a une nette tendance à s’aggraver. Il est de plus en plus difficile de trouver un médecin qui accepte de nouveaux patients, en particulier pour ce qui est des médecins dits de premiers recours, c’est-à-dire les internistes généralistes. Il est pour moi douloureux, lorsque l’on me demande de suivre un nouveau patient, de répondre par la négative, en particulier lorsque la demande vient d’un senior. Je dois cependant le faire, pour garder du temps pour mes propres patients et éviter de finir en burnout.

Une pénurie de médecins ?

La Suisse ne forme certainement pas assez de médecins, elle en importe d’ailleurs un grand nombre d’autres pays. Parmi les médecins formés, il y en a certainement trop qui s’orientent vers des spécialités, l’équilibre entre médecins de premiers recours et spécialistes devraient dans notre pays certainement être revu. Cette situation de pénurie serait d’ailleurs plus grave encore si nos politiciens n’avaient pas inventé un système de santé avec des franchises élevées qui poussent de nombreux patients à ne pas consulter lorsqu’ils sont malades.

Face à ces patients qui ne trouvent pas de médecins, face aux urgences qui croulent sous l’afflux de patients, face à des primes d’assurances qui ne cessent d’augmenter, n’y a-t-il pas d’autres solutions que les vétérinaires ? Formulé autrement, doit-on rester dans l’équation « une demande d’un patient = une consultation au cabinet » ?

Le patient

Que fait une personne malade en 2022 ? Pour se soigner, elle peut utiliser plusieurs chemins. Le premier, si son problème de santé n’est pas grave et qu’elle a des connaissances, elle peut se soigner elle-même. Deuxième option, elle peut consulter Dr Google, une source d’information de qualité variable. Troisième option, toujours pour les problèmes de santé les plus simples, elle peut s’adresser à son pharmacien. Quatrième option, un médecin.

A part le vétérinaire, d’autres idées ?

Ne doit-on pas en 2022 proposer à la population un système de santé plus moderne, plus efficient ? La première étape serait d’augmenter ce que l’on appelle « les compétences santé » des habitants de ce pays. Cela signifie que les citoyens devraient avoir plus de connaissances, à la fois pour prendre soin de leur santé, rien ne remplace la prévention, mais aussi pour savoir comment se soigner lorsqu’ils souffrent de problèmes de santé légers. On pourrait même imaginer que cela fasse partie de l’enseignement scolaire de base.

La deuxième étape est de dépasser l’équation actuelle « un problème de santé = une consultation chez le médecin ». Même si le système de santé anglais est très différent du nôtre, j’avais été frappé par cette étude réalisée dans un cabinet ou la liste d’attente pour voir un médecin était souvent de plusieurs semaines. En mettant en place une solution de triage, c’est-à-dire en demandant aux patients de dire pourquoi ils voulaient voir leur médecin, la liste d’attente a disparu : un tiers des patients étaient directement redirigés ailleurs, un tiers étaient soignés à distance, donc plus rapidement, il n’y a que le dernier tiers qui pour finir venaient voir leur médecin.

La télémédecine doit donc être développée, à la fois pour soigner plus facilement à distance ce qui peut l’être mais aussi pour sa fonction de triage, un outil largement sous-utilisé dans notre système de santé. Un bel exemple de ce qui devrait être utilisé et développé est le site Soignez-moi.ch, il permet justement ce triage et, lorsque c’est possible, de régler votre problème de santé à distance. Cette solution est utilisée par plusieurs hôpitaux, à l’image de celui de la Tour à Meyrin, de Bienne et bientôt du Réseau hospitalier neuchâtelois, pour mieux trier les patients et décharger leurs urgences. Chez Soignez-moi.ch, les professionnels qui vous prennent en charge sont tous des médecins qui ont en parallèle une activité en cabinet. Ce système est insuffisamment connu des patients, il est aussi je pense insuffisamment soutenu par les professionnels de la santé. Les médecins qui, lorsqu’ils sont absents, proposent à leurs patients, en parallèle à la solution du médecin de garde, de recourir aux services de Soignez-moi.ch sont rares.

Et, à part le médecin ?

La dernière réflexion qui doit être menée face à la pénurie de médecins est de savoir si, en dehors du médecin, d’autres professionnels ne devraient pas être impliqués. Je pense personnellement que face au patient malade, même si le médecin restera souvent l’interlocuteur privilégié, il faut imaginer une équipe médicale. D’une certaine façon, cette équipe existe déjà puisque les assistantes médicales répondent avec efficacité à de nombreuses questions des patients. Elle doit cependant être développée avec l’intégration d’infirmier et d’infirmière, idéalement avec une formation de pratique avancée, c’est-à-dire l’acquisition de connaissances qui leur permettent d’être autonomes pour régler les problèmes de santé les plus simples, pour le suivi en alternance avec le médecin des personnes souffrant de maladies chroniques mais aussi pour la promotion de la santé.

Sinon, dernière option, le vétérinaire.

 

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Est-il possible de communiquer par mail avec les professionnels de la santé et si oui, quelles sont les règles à respecter?

Il est surprenant qu’une problématique aussi importante ne soit que si rarement évoquée. Même si les moyens technologiques existent depuis plusieurs années, les professionnels de la santé n’ont adopté que récemment l’utilisation du courrier électronique pour communiquer entre eux. Mais qu’en est-il de la communication entre professionnels de la santé et patients ? Est-ce possible, utile, dangereux ?

Utilisation de l’e-mail dans le suivi de soin entre le patient et le soignant

C’est à ces questions qu’a voulu répondre Nathalie Daina-Laville, infimière HES, spécialisée en diabétologie, dans le cadre d’un travail de Séminaire présenté à Unil – Unisanté. Ce sujet est d’autant plus important qu’il est le résultat d’une double évolution, technologique bien sûr avec l’utilisation toujours plus fréquente de moyens de communication électroniques mais aussi humaine, avec des patients qui souhaitent prendre une part toujours plus active dans la gestion de leur santé.

Première question, est-il possible de communiquer par mail avec son thérapeute ?

Nathalie Daina-Laville cite dans son travail la grande variabilité qu’il existe d’un pays à l’autre. Mon impression est que la possibilité de communication entre professionnels de la santé et patients dépend de très nombreuses variables. Il existe presque autant de situations que de thérapeutes. La situation diffère d’un pays à l’autre mais également d’une profession à l’autre, on peut facilement imaginer qu’une infirmière à domicile communiquera plus souvent avec ses patients qu’un physiothérapeute. Parmi les médecins, il existe également de grandes variations entre les spécialités.

Comment savoir si le professionnel de la santé qui vous soigne est d’accord de communiquer par courriel avec vous ? Il faut le lui demander !

Avantages et inconvénients

Nathalie Daina-Laville dresse également une liste des avantages et des inconvénients de la communication soignant – soigné par courriel. Pour ce qui est des éléments positifs, elle cite notamment l’amélioration de la continuité des soins, l’augmentation de l’autogestion du patient dans le cadre de maladies chroniques, un meilleur accès aux soins, l’option d’un canal de communication supplémentaire avec le patient mais aussi la possibilité de partager des informations entre plusieurs professionnels de santé ainsi qu’avec le patient.

Pour ce qui est des points négatifs, elle cite le risque de perte de confidentialité (erreur de transmission par exemple), l’augmentation de la charge de travail pour le soignant ( et le risque d’abus de l’utilisation de l’e-mail par le patient), le fait que le remboursement de la communication par courriel n’est pas clairement légiféré́ et le risque de disparité́ sociale (certaines personnes âgées, de langue étrangère ou ayant un bas niveau d’éducation pour qui l’utilisation du courriel est plus difficile voire impossible).

Recommandations à l’utilisation de l’e-mail entre soignant et patient

 L’autrice de cette recherche rappelle dans son travail qu’il n’existe pas en Suisse de référentiel concernant les bonnes pratiques à l’usage de l’e-mail entre le soignant et le patient. Elle a donc établi une liste de critères en se basant sur la littérature existant sur ce sujet. Les critères sont répartis en trois thèmes :  confidentialité et sécurité, délais de réponse et qualité de la communication. Les personnes intéressées pourront découvrir la liste complète en lisant le rapport de son travail de séminaire.

Pour une utilisation sûre et efficiente du courrier électronique en médecine

Nathalie Daina-Laville a voulu que son travail de séminaire ait une implication pratique, elle a donc rédigé une charte qu’elle utilise elle-même avec ses patients et qui sensibilise professionnels de santé et patients sur les atouts mais aussi sur les limites de l’utilisation du courriel entre soignants et soignés.

Elle signale aussi un élément qui me parait essentiel, l’importance de former les professionnels de la santé : « Si l’on souhaite prévenir les incidents, il faut transmettre les bons messages aux étudiants des Universités et Hautes Ecoles Spécialisées en santé, et promouvoir la formation continue chez tous les professionnels exerçant les soins ». Un point de vue que je partage à 100 % même si pour l’heure, à ma connaissance, ce sujet n’est que rarement enseigné aux professionnels de la santé.

Et vous ?

Communiquez-vous avec les professionnels de la santé qui vous soignent par courriel ? Si non, souhaiteriez-vous pourvoir le faire, si oui, en êtes-vous satisfait ? Quels sont, selon votre propre expérience, les avantages et inconvénients de la communication électronique soignant – soigné ?

 

Autres articles publiés sur ce blog en lien avec ce sujet : 

 

Dossier électronique du patient : faut-il (déjà) tout arrêter ?

Le titre de cet article ne plaira pas à tous ceux qui se battent pour le développement du dossier électronique du patient (DEP) mais cette question est on ne peut plus sérieuse. Le DEP permettra-t-il vraiment aux citoyens de ce pays d’être mieux soignés ?

Le concept

Les intentions du dossier électronique du patient sont indiscutables : permettre aux patients d’être mieux soignés en donnant aux professionnels de la santé accès à toutes les informations médicales nécessaires mais aussi rendre les patients plus actifs en leur permettant d’avoir accès à leurs données santé. Le problème est que l’on ne soigne pas avec des intentions et que l’on n’a aucune idée de l’impact de cet outil sur la santé de ses utilisateurs. Trouverais-je dans le DEP les informations qui me manquent actuellement pour soigner mes patients ? Je n’en suis pas sûr, le plus souvent une information me manque car le médecin qui a vu mon patient à l’hôpital n’a pas encore rédigé de lettre de sortie ou que son psychiatre n’a pas estimé utile de m’informer de ses conclusions. Dans ces situations, le DEP, pour peu que mon patient en ait créé un et qu’il soit mis à jour, me sera inutile.

Une naissance laborieuse

On peut lire dans un article publié le 30 mars dernier dans le Temps la phrase suivante : « Sur un point, tout le monde est d’accord: le dossier électronique du patient (DEP) est jusqu’ici un flop monumental. Au début de chaque année qui passe, les plus optimistes prédisent qu’il va enfin décoller pour finir par déchanter douze mois plus tard, car les espoirs ont été déçus ». A l’opposé, CARA, la communauté qui regroupe tous les cantons romands sauf Neuchâtel, semblait lors de sa conférence de presse plutôt optimiste en déclarant que « 7500 dossiers électroniques sont ouverts chez CARA, ce qui représente près de 90 % des dossiers ouverts sur l’ensemble du pays ». CARA reconnait tout de même que « des améliorations sont nécessaires ».  Même si ce chiffre de 7500 dossiers est plus que respectable, l’ouverture de dossiers n’est pas une fin en soi. Le but reste que ces dossiers soient utiles, et on en est encore loin. CARA soutient les mesures à venir pour améliorer le DEP, notamment celles proposées par le Conseil fédéral le 27 avril dernier. Parmi les mesures proposées, certaines permettent de comprendre la faiblesse du projet initial, d’autres laissent songeur.

Un dossier obligatoire ? 

Le Conseil fédéral met pour les patients deux variantes en consultation : le maintien du caractère facultatif et l’introduction d’un modèle opt-out, qui a la faveur du Conseil fédéral. Le DEP sera donc par défaut obligatoire et le citoyen devra lui-même agir s’il ne veut pas en avoir un. Pour les professionnels de la santé, ce sera tout simplement obligatoire. Le côté positif est que cela permettra au DEP d’être plus complet, le côté négatif que cela représentera pour les cabinets médicaux une surcharge de travail considérable. Tous les médecins n’ont pas un dossier médical informatisé et pour ceux qui ont en un, la grande majorité n’est pas capable de transférer automatiquement les données au DEP. On peut lire sur les pages du site de l’Etat de Vaud consacré à ce projet que « chez les éditeurs de logiciels de cabinet, les travaux d’intégrations avec le DEP ont commencé afin d’automatiser la consultation du DEP depuis le logiciel de cabinet et le transfert des données dans le DEP. A ce jour, cette automatisation est à l’état de développement pour les logiciels existants ». En développement ? Je rappelle que la loi sur le DEP date de 7ans déjà.

Lorsqu’il faut rendre un outil comme le DEP obligatoire pour qu’il soit utilisé, c’est qu’il y a un problème.

Un projet pour le futur ?

Il est possible que ce projet ne doive pas être évalué sur son utilité actuelle, proche du zéro absolu, mais comme un outil du futur qui révélera son utilité d’ici quelques années lorsque le DEP sera plus utilisé et plus complet, mais j’ai des doutes.

Les problèmes

Ils sont malheureusement multiples. J’ai déjà signalé l’intérêt frileux des citoyens et des professionnels de la santé. Il y a la complexité pour l’ouverture et pour l’utilisation du DEP. Il y a la surcharge de travail pour les professionnels de santé.  Il y a aussi la question simplement de l’utilité médicale de cet outil. Il y a aussi le fait que s’il est utile, il le sera pour une minorité de la population, celle souffrant de maladies chroniques. Pour intéresser toute la population, il aurait peut-être fallu imaginer un outil utile pour la promotion de la santé, pour la prévention, dans le DEP il n’y a rien. Il y a aussi le coût exorbitant de ce projet. Il y a enfin le fait que le DEP accapare toutes les énergies, alors qu’il n’est qu’une petite partie des innovations dont notre système de santé a besoin.

Stopper ce projet est probablement impossible pour des raisons politiques. Si l’on réfléchit à son utilité médicale actuelle et future, je pense qu’il faut sérieusement se poser la question.

Pour l’heure, ne comptez pas sur le DEP pour rester en bonne santé.

 

PS: A lire sur Heidi.news, le dossier électronique du patient devient (enfin) un vrai enjeu national.

 

Autres articles (plus ou moins) en lien avec cet article et publiés sur ce blog:

Dossier électronique du patient : serez-vous mieux soigné?

La révolution numérique en médecine : sommes-nous prêts à réinventer notre façon de travailler?

Le défi de l’intégration du numérique au sein de nos systèmes de santé

 

La révolution numérique en médecine : sommes-nous prêts à réinventer notre façon de travailler?

Pourquoi le digital n’apporte-il pas (encore) en médecine les bénéfices espérés? Probablement parce que le monde de la santé est complexe, donc difficile à numériser. Peut-être aussi parque nous avons trop longtemps pensé que le développement technologique était par lui-même suffisant pour améliorer l’efficience du système de santé. Et si pour soigner mieux, le digital impliquait aussi de repenser notre façon de travailler ?

Des changements technologiques mais aussi culturels

Ce sujet est justement celui de l’article intitulé Health Care’s Digital Revolution: Are We Ready to Reimagine the Work? qui résume une présentation faite dans le cadre d’une conférence par le médecin américain Robert M. Wachter. Il y parle justement de ce qui parait une évidence mais qui est souvent mal compris : « notre réussite sur la voie de la numérisation dépendra de notre capacité à réinventer notre travail ».

Quatre étapes

Même si l’on imagine souvent le digital comme une couche de vernis que l’on appose sur un système déjà existant, le Dr Watcher, professeur au sein du département de médecine de l’Université de Californie (UCSF), décompose la digitalisation en quatre étapes :

  1. La numérisation des données. Pour reprendre les mots du Dr Watcher « c’est l’étape que nous sommes en train d’achever, un peu plus tard que nous l’aurions souhaité ».
  2. L’interopérabilité. « Connecter (a) les prestataires de soins primaires aux hôpitaux, ainsi que les hôpitaux aux hôpitaux, puis (b) l’ensemble de l’écosystème numérique (c’est-à-dire les applications tierces, les systèmes destinés aux patients et les systèmes d’entreprise) ».
  3. Tirer des enseignements des données, c’est-à-dire les valoriser.
  4. Convertir ces informations en actions qui améliorent la valeur, qu’elle soit mesurée par la sécurité, le coût, l’accès ou l’équité.

Baseball et septicémie

Pour le Dr Watcher, nous avons déjà commencé la deuxième étape, mais pour atteindre les étapes trois et quatre, « nous avons besoin d’un changement radical dans notre façon de penser les données numériques ». Le professeur illustre ces propos avec un exemple très concret, quoique, à mes yeux, légèrement exagéré : « Les statisticiens du baseball peuvent prédire avec une précision étonnante si un certain joueur peut frapper une balle courbe lancée par un lanceur gaucher sous la pluie juste après une pleine lune. Pendant ce temps, nos alertes à la septicémie hospitalière, considérées comme un triomphe parmi les outils de prise de décision clinique, sont fausses environ un quart du temps ».

Les notes du médecin

Le professeur californien donne un autre exemple de l’incapacité du monde médical à se réinventer : « considérez une note d’un médecin : ceux qui ont créé des notes électroniques envisageaient de numériser un morceau de papier dans un classeur. Mais si nous devions concevoir la note électronique à partir de zéro aujourd’hui, cela ressemblerait davantage à un flux sur Facebook ou Twitter. Il comprendrait des composants vidéo et audio. Et, comme Wikipedia ou Google Docs, ce serait plus collaboratif, avec de la place pour les commentaires des infirmières, des travailleurs sociaux et d’autres ».

Dans le même ordre d’idée, j’ai toujours été surpris de voir que les concepteurs de dossiers médicaux informatisés étaient satisfaits à l’idée que leurs solutions facilitent la création de lettres et autres rapports. Ces logiciels permettent effectivement de créer rapidement des courriers, en reprenant par exemple les diagnostics et les traitements de façon automatique, des courriers envoyés ensuite par la poste ou, modernité suprême, par fax. Ne devrait-on pas profiter du digital pour communiquer autrement ?

Repenser notre façon de travailler

Le Dr Watcher termine sa présentation par une note optimiste : « nous entrons maintenant, enfin, véritablement, dans l’ère de l’après dossier médical informatisé, une ère dans laquelle nous tirerons parti de ces nouveaux outils avec de nouvelles façons de penser pour améliorer notre système de santé ».

Oui, mais cela nécessitera de repenser notre façon de travailler. Comment accélérer ce mouvement, pour pouvoir offrir à nos patients une prise en charge efficiente, digne de ce 21ème siècle ?

 

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Faut-il protéger les jeunes du tabagisme?

Le 13 février 2022, nous devrons nous prononcer sur l’Initiative populaire « Oui à la protection des enfants et des jeunes contre la publicité pour le tabac ». Sérieusement, qui va voter non ?

L’initiative

La Suisse est décidément un pays fantastique, la population a la possibilité chaque année de voter sur d’innombrables sujets, certains complexes, d’autres a priori beaucoup plus évidents : doit-on protéger les jeunes du tabagisme ?

A propos des prochaines votations, on peut lire sur le site de la Confédération « l’initiative a pour objectif d’interdire toute publicité pour le tabac là où des enfants ou des adolescents peuvent la voir, par exemple dans la presse, sur des affiches ou Internet, au cinéma, dans les kiosques ou lors de manifestations. Les mêmes règles s’appliqueraient à la cigarette électronique. La publicité qui ne cible que les adultes ou se trouve à des endroits inaccessibles aux mineurs resterait admise ».

La réponse parait évidente, il est en effet assez difficile de répondre que l’on souhaite que les enfants soient exposés à la publicité pour le tabagisme, qu’ils commencent à fumer et meurent à 55 ans d’un cancer pulmonaire.

Mais la Confédération et le parlement opposent à l’initiative un contre-projet : « Le Conseil fédéral et le Parlement opposent à l’initiative la nouvelle loi sur les produits du tabac en tant que contre-projet indirect. Ces dispositions interdiraient la publicité pour les produits du tabac et la cigarette électronique sur les affiches et au cinéma. De même, elles interdiraient aux multinationales du tabac de distribuer des cigarettes gratuites et de parrainer des manifestations internationales en Suisse ». 

Comme il est assez délicat de s’opposer à l’idée de protéger les jeunes du tabagisme, nos élus proposent une variante un peu floue qui permettra à l’industrie du tabac de continuer à cibler les jeunes et à encourager le tabagisme.

Les arguments

Comme je trouve assez évident qu’il faut voter oui à l’initiative, j’ai essayé de comprendre quels arguments pourraient inciter quelqu’un à voter non.

Le tabac est bon pour la santé. Même si l’industrie du tabac a mis des dizaines d’années à avouer ce qu’elle savait, le tabac est évidemment mauvais pour la santé. Chaque année environ 9500 personnes meurent en Suisse des conséquences du tabagisme. Vingt-six par jour, c’est beaucoup.

La publicité n’encourage pas le tabagisme, la publicité ne touche pas les jeunes. La publicité est efficace et l’industrie du tabac le sait. La publicité est efficace, les études scientifiques l’ont clairement montré. Si la publicité n’était pas efficace, L’industrie du tabac ne s’opposerait pas aux restrictions publicitaires avec une telle virulence.

Cette initiative coûtera cher à l’économie. Cet argument est assez scandaleux, on met en opposition gains financiers et santé de la population. Mais en plus cet argument est faux, le tabagisme pèse sur la société du fait des dépenses consécutives élevées qui en résultent. Les coûts de santé liés au tabac s’élèvent chaque année à 3 milliards de francs.

Je fais confiance aux Conseillers fédéraux et au parlement. Je dois avouer que c’est l’argument qui aurait pu me faire voter non avec l’idée que cette initiative est peut-être excessive et que nos élus sont des gens « raisonnables ». Pourtant, je ne retiens pas cet argument, en particulier en raison de l’influence des lobbies sur nos parlementaires. Si vous avez encore des doutes à ce sujet, regardez l’émission Temps Présent du 20 janvier « Malbouffe, le côté obscur de l’industrie alimentaire », vous y découvriez qu’entre économie et santé de la population, certains de nos parlementaires choisissent l’économie.

Ils vont interdire la publicité pour le cervelas. Cet argument est utilisé par les opposants à l’initiative. J’en tire deux conclusions. La première, que les opposants n’ont vraiment aucun argument contre l’initiative. Le deuxième, que comparer cervelas et tabagisme est méprisant pour toutes les personnes qui souffrent de maladies liées au tabagisme ou qui en sont morts.

 

 

PS: cette affiche “Cervelas” est l’oeuvre du groupe interdiction-publicite-non.ch. On découvre sur son site Internet qu’il s’agit d’une large alliance contre “les interdictions extrêmes” de la publicité. Pour ce qui est des partis, l’UDC, le parti libéral et le Centre. Pour les associations, celles liées au tabac (l’association suisse des fabricants de cigares, Swiss Cigarette), celles liées au vin (association suisse du commerce des vins, fédération suisse des vignerons), celles liées à la communication (communication suisse, association suisse des annonceurs) et enfin celles liées à la défense de l’économie (économie suisse, USAM, etc.).

 

Pandémie, le début de la fin ?

Le titre de cet article peut surprendre à l’heure où le nombre de cas explose dans toutes les régions du monde. L’AFP a annoncé jeudi dernier un nouveau record de 1,94 millions de contaminations dans le monde sur une seule journée. Au-delà de ce chiffre, c’est son évolution qui impressionne, + 64 % par rapport à la semaine précédente.

La dernière vague ?

Les abonnées du média Heidi.news pourront comprendre pourquoi l’apparition d’Omicron n’est peut-être pas une si mauvaise nouvelle. Dans un article intitulé Une dernière vague et puis s’en va ?, le journaliste scientifique Yvan Pandelé présente Omicron comme beaucoup plus contagieux mais moins agressif que les autre variants (trois fois moins d’hospitalisations et un risque plus faible encore de finir aux soins intensifs). Cette grande contagiosité risque de faire souffrir de nombreux secteurs, en raison des malades mais aussi des personnes mises en quarantaine, elle va simultanément permettre une augmentation rapide de l’immunité de la population.

Il n’est donc pas impossible qu’Omicron permette de faire évoluer la pandémie vers une endémie, une situation où nous devrons « vivre » avec le SARS-CoV-2 comme avec n’importe quel autre virus. Il y aura ces prochaines semaines des débats vifs sur la nécessité de maintenir les mesures de protection mais, même si l’on peut se réjouir d’un possible retour à la normale, les mesures de prévention sont pour l’heure plus que jamais d’actualité.

Un chirurgien égaré

Je me suis demandé l’autre jour en entrant dans un supermarché avec mon masque si j’étais vraiment en train de faire mes courses ou si j’étais un chirurgien égaré qui ne trouvait plus sa salle d’opération. Je me réjouis de voir les mesures de prévention abandonnées et, pour ce qui est du masque, de pouvoir revoir le visage des gens.

Ce scénario de fin de pandémie doit être pris avec prudence, d’une part car cette fin n’est pas pour tout de suite, d’autre part parce que le Covid-19 nous a appris à quel point prédire le futur était un art difficile.

Quel bilan tirer ?

Si ce scénario devait se confirmer, ce moment particulier de la pandémie nous autorise un début d’analyse sur ces deux dernières années. Une étude exhaustive dépasse le cadre de cet article mais également mes compétences. Je ne peux cependant pas m’empêcher de partager avec vous quelques observations.

La première, la mauvaise préparation du monde face à de tels dangers. J’espère que le prochain variant, ou le prochain virus, ne sera pas beaucoup plus dangereux, nous sommes actuellement très mal préparés, même si la pandémie actuelle a tout de même permis de faire quelques progrès.

La deuxième, le fantastique travail des scientifiques et des industriels qui ont réussi à développer en un temps record des vaccins efficaces.

La troisième, l’immense difficulté des pays à rendre disponibles les vaccins partout dans le monde.

La quatrième, le rôle joué par les médias sociaux dans cette pandémie. Une immense caisse de résonnance qui diffuse les fausses informations plus rapidement que les vraies. Il s’agit d’un réel problème, qui ne se limite pas à la pandémie et dont il faudra s’occuper.

La cinquième, la méfiance d’une partie importante de la population face aux autorités, notamment politiques mais aussi médicales. Je pense notamment au vaccin. Même si personnellement je me réjouis que la vaccination soit restée un choix, je trouve que la position de la commission nationale d’éthique dans le domaine de la médecine humaine est juste : s’il n’y a pas d’obligation légale à la vaccination, il peut y avoir une obligation morale, la vaccination étant un acte de solidarité envers la population. Plus on est jeune, plus on est en bonne santé, plus la vaccination a de sens pour les gens qui nous entourent ou pour la société dans son ensemble. Avec un taux de personnes entièrement vaccinées de 67.5 %, l’option du vaccin comme acte altruiste n’a en Suisse pas fait le poids face aux craintes et aux croyances personnelles.

La sixième, la difficulté de certains à comprendre des messages de prévention pourtant simples. Il est vrai que les informations transmises à la population ces deux dernières années ont été nombreuses et parfois contradictoires, on peut cependant tout de même s’étonner qu’après deux ans de pandémie certains ne soient toujours pas capables de porter un masque correctement.

La septième, mon souhait de voir les Autorités politiques mettre autant d’énergie pour lutter contre les autres dangers. Pour ce qui est de la santé, on peut penser à des thèmes comme la lutte contre le tabagisme, pour une approche plus globale, aux menaces climatiques.

 

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Vous devriez vous faire vacciner

J’ai décidé d’écrire cet article car le sujet de la vaccination contre le coronavirus a été peu abordé dans les médias et sur les réseaux sociaux. Plus sérieusement, je souhaitais partager avec les personnes qui ne sont pas vaccinées quelques réflexions, notamment issues d’échanges avec mes patients. Le but est de vous encourager à vous faire vacciner, en dehors je l’espère de débats polémiques.

Quel pourcentage de la population est vaccinée ?

Selon l’OFSP, en date du 3 septembre 2021, 58.28 % de la population aurait reçu au moins une dose du vaccin, donc environ 41 % de non vaccinés. Après 18 mois d’une pandémie aux conséquences majeures, ce chiffre est à mes yeux très élevé. Un autre chiffre intéressant est celui du pourcentage de la population qui pourrait se faire vacciner et qui ne l’est pas (rappelons que les moins de 12 ans ne peuvent pas se faire vacciner). Puisqu’il y a en Suisse, selon les chiffres de l’Office fédéral de la statistique, 8’670’300 habitants dont un peu moins de 1 millions d’enfants de 0 à 11 ans, le pourcentage de personnes vaccinées serait pour les 12 ans et plus de 65.9 %, donc 34.1 % des habitants de ce pays qui pourraient être vaccinés et qui ne le sont pas. Un tiers. Un chiffre toujours élevé.

Pourquoi vous devriez vous faire vacciner

Je commence par les professionnels de la santé. Je trouve que tous devraient être vaccinés. Chacun peut bien sûr avoir une raison particulière qui justifie de ne pas recevoir ces deux injections, mais les contre-indications sont en réalité très rares. Je trouve que pour eux la vaccination fait partie de leur travail. Pour se protéger eux-mêmes, notamment pour ne pas tomber malade et pouvoir continuer de s’occuper de leurs patients, mais surtout pour ne pas transmettre la maladie à d’autres. Je rappelle que la position qui est de dire « il suffit de vacciner les seniors et les personnes vulnérables » n’est pas juste puisque le vaccin n’offre pas une protection de 100 %, en particulier avec le variant delta.

Pour ceux qui ne sont pas professionnels de la santé, plusieurs éléments devraient à mon avis encourager les hésitants à se faire vacciner.

Argument 1, les vaccins sont sûrs. Je n’ai pas la place dans cet article de citer les nombreuses études sur cette question mais j’encourage ceux qui souhaitent en savoir plus à prendre connaissance du document Recommandations de vaccination avec des vaccins à ARNm contre le COVID-19 (état au 26.08.2021) de l’OFSP. Un document de 45 pages où vous pourrez voir que les vaccins utilisés en Suisse ont des effets secondaires mais que la balance bénéfices / risques penche très clairement en faveur de la vaccination. Une autre source d’information de qualité est l’article « Tout ce qu’il faut savoir sur la vaccination Covid-19 en Suisse » du site Heidi.news.

On entend souvent dire que ces vaccins ont été développés trop rapidement. Je comprends que l’on s’interroge à ce sujet, mais il faut tout de même reconnaître que nous avons maintenant des données de sécurité qui reposent sur des centaines de millions de doses. J’ai parfois l’impression, lorsque je parle de cette vaccination avec mes patients, que je leur propose une opération à cœur ouvert, ce n’est qu’un vaccin, mais malgré cela l’inquiétude est grande.

Il est difficile de lutter contre l’inquiétude avec des faits et des chiffres mais je dis tout de même à mes patients que, s’ils se méfient des preuves apportées par la science, leur vie va devenir très compliqué : ils peuvent se méfier de ces vaccins mais ils devront alors aussi se méfier de tous les médicaments, y compris du simple Paracetamol (tous ont suivis les mêmes procédures de certification chez Swissmedic). Pour moi, les dangers provenant de l’alimentation, pesticides et autres perturbateurs endocriniens, sont beaucoup plus dangereux.

Argument 2, maladie ou vaccin. Deuxième élément, vu la contagiosité de ce virus, en particulier du variant delta, mon sentiment est que tout le monde finira soit vacciné, soit contaminé. Même s’il est possible d’être contaminé et de n’avoir que peu ou pas de symptômes, les risques de complications sont clairement en faveur du vaccin. En plus, l’immunité est meilleure avec le vaccin qu’avec la maladie.

Argument 3, les autres. Si vous ne vous faites pas vacciner pour vous, faites-le pour les autres.

Argument 4, les hôpitaux surchargés.  La 4ème vague est là, en date du 3 septembre, les patients Covid-19 occupent 33,7% des places disponibles en soins intensifs, dont le taux d’occupation est de 80,30%.

Argument 5, les conséquences économiques et sociales de la pandémie. Je pense que la vaccination se justifie aussi pour pouvoir revivre un peu normalement, les restaurateurs, les hôteliers et de nombreux autres secteurs économiques, ayant déjà suffisamment souffert de cette pandémie. Imaginez où nous en serions si les vaccins n’existaient pas ?

Pourquoi non ?

On peut découvrir sur le site du journal le Matin une vidéo dont le sujet est « Pourquoi disent-ils «non» au vaccin? » On y entend la crainte « on ne connait pas encore les effets secondaires » mais aussi « apparemment il y a aussi des gens vaccinés qui attrapent le Covid ». Ce dernier argument est intéressant car oui des gens vaccinés peuvent attraper le Covid, en particulier avec le variant Delta, mais le risque de tomber malade est 80 fois plus faible si l’on est vacciné, le risque de développer une maladie grave est lui diminué de 95 %.

Il y a aussi l’interview de Jean-Pierre qui répond « les gens sont vaccinés et meurent, les gens meurent du vaccin » et pour appuyer ses dire « il y a une vidéo sur TikTok qui tourne, on ne peut pas la louper ». Même si TiKTok ne me semble pas être une source d’information de confiance, ces propos illustrent la méfiance de certains envers les autorités et les médias.

Rassurer

Il faut écouter ces citoyens, comprendre leurs inquiétudes et y répondre. Le but doit être de les informer de la façon la plus objective possible et, je l’espère, de les rassurer.

 

Cette vidéo est un spot TV du Ministère des Solidarités et de la Santé français qui rappelle que la grande majorité des personnes hospitalisées à cause du Covid-19 ne sont pas vaccinées (en Suisse, plus de 90 %).