Faut-il protéger les jeunes du tabagisme?

Le 13 février 2022, nous devrons nous prononcer sur l’Initiative populaire « Oui à la protection des enfants et des jeunes contre la publicité pour le tabac ». Sérieusement, qui va voter non ?

L’initiative

La Suisse est décidément un pays fantastique, la population a la possibilité chaque année de voter sur d’innombrables sujets, certains complexes, d’autres a priori beaucoup plus évidents : doit-on protéger les jeunes du tabagisme ?

A propos des prochaines votations, on peut lire sur le site de la Confédération « l’initiative a pour objectif d’interdire toute publicité pour le tabac là où des enfants ou des adolescents peuvent la voir, par exemple dans la presse, sur des affiches ou Internet, au cinéma, dans les kiosques ou lors de manifestations. Les mêmes règles s’appliqueraient à la cigarette électronique. La publicité qui ne cible que les adultes ou se trouve à des endroits inaccessibles aux mineurs resterait admise ».

La réponse parait évidente, il est en effet assez difficile de répondre que l’on souhaite que les enfants soient exposés à la publicité pour le tabagisme, qu’ils commencent à fumer et meurent à 55 ans d’un cancer pulmonaire.

Mais la Confédération et le parlement opposent à l’initiative un contre-projet : « Le Conseil fédéral et le Parlement opposent à l’initiative la nouvelle loi sur les produits du tabac en tant que contre-projet indirect. Ces dispositions interdiraient la publicité pour les produits du tabac et la cigarette électronique sur les affiches et au cinéma. De même, elles interdiraient aux multinationales du tabac de distribuer des cigarettes gratuites et de parrainer des manifestations internationales en Suisse ». 

Comme il est assez délicat de s’opposer à l’idée de protéger les jeunes du tabagisme, nos élus proposent une variante un peu floue qui permettra à l’industrie du tabac de continuer à cibler les jeunes et à encourager le tabagisme.

Les arguments

Comme je trouve assez évident qu’il faut voter oui à l’initiative, j’ai essayé de comprendre quels arguments pourraient inciter quelqu’un à voter non.

Le tabac est bon pour la santé. Même si l’industrie du tabac a mis des dizaines d’années à avouer ce qu’elle savait, le tabac est évidemment mauvais pour la santé. Chaque année environ 9500 personnes meurent en Suisse des conséquences du tabagisme. Vingt-six par jour, c’est beaucoup.

La publicité n’encourage pas le tabagisme, la publicité ne touche pas les jeunes. La publicité est efficace et l’industrie du tabac le sait. La publicité est efficace, les études scientifiques l’ont clairement montré. Si la publicité n’était pas efficace, L’industrie du tabac ne s’opposerait pas aux restrictions publicitaires avec une telle virulence.

Cette initiative coûtera cher à l’économie. Cet argument est assez scandaleux, on met en opposition gains financiers et santé de la population. Mais en plus cet argument est faux, le tabagisme pèse sur la société du fait des dépenses consécutives élevées qui en résultent. Les coûts de santé liés au tabac s’élèvent chaque année à 3 milliards de francs.

Je fais confiance aux Conseillers fédéraux et au parlement. Je dois avouer que c’est l’argument qui aurait pu me faire voter non avec l’idée que cette initiative est peut-être excessive et que nos élus sont des gens « raisonnables ». Pourtant, je ne retiens pas cet argument, en particulier en raison de l’influence des lobbies sur nos parlementaires. Si vous avez encore des doutes à ce sujet, regardez l’émission Temps Présent du 20 janvier « Malbouffe, le côté obscur de l’industrie alimentaire », vous y découvriez qu’entre économie et santé de la population, certains de nos parlementaires choisissent l’économie.

Ils vont interdire la publicité pour le cervelas. Cet argument est utilisé par les opposants à l’initiative. J’en tire deux conclusions. La première, que les opposants n’ont vraiment aucun argument contre l’initiative. Le deuxième, que comparer cervelas et tabagisme est méprisant pour toutes les personnes qui souffrent de maladies liées au tabagisme ou qui en sont morts.

 

 

PS: cette affiche “Cervelas” est l’oeuvre du groupe interdiction-publicite-non.ch. On découvre sur son site Internet qu’il s’agit d’une large alliance contre “les interdictions extrêmes” de la publicité. Pour ce qui est des partis, l’UDC, le parti libéral et le Centre. Pour les associations, celles liées au tabac (l’association suisse des fabricants de cigares, Swiss Cigarette), celles liées au vin (association suisse du commerce des vins, fédération suisse des vignerons), celles liées à la communication (communication suisse, association suisse des annonceurs) et enfin celles liées à la défense de l’économie (économie suisse, USAM, etc.).

 

Dr Jean Gabriel Jeannot

Médecin, spécialiste en médecine interne, avec un intérêt particulier pour l’utilisation des technologies de l’information et de la communication en médecine.

30 réponses à “Faut-il protéger les jeunes du tabagisme?

  1. Vous avez raison… et pourtant j’ai voté “non”.
    C’est que nous vivons dans une société de paradoxes: d’une part on veut interdire la publicité pour le tabac, et d’autre part on encaisse des taxes sur le tabac qui (sauf erreur) servent à financer notamment l’AVS.
    D’une part la société se mobilise contre le tabac, et d’autre part la société se mobilise pour légaliser la consommation du cannabis. Une fois légalisé, passera une bonne dizaine d’années, et la publicité pour le cannabis deviendrait monnaie courante? Par soucis d’égalité, avec les mêmes restrictions que pour le tabac.
    Je divague. Mais je suis heureux que dans notre pays on puisse se poser de telles questions sans être stigmatisé.
    Merci de vos papiers.

    1. Il n’y a pas de paradoxe entre lutter contre le tabagisme et encaisser des taxes liées à sa vente. En fait, les taxes sur le tabac devraient couvrir l’ensemble du coût social lié à son usage en plus de la marge normale.

      Pour le reste (légaliser le cannabis ou pas, etc.), vous n’êtes pas sans savoir que dans une société près de 9M d’habitants, il y a plusieurs débats publics sur tout un tas de sujets avec bien sûr des positions variées. Où est le problème et en quoi affecte-t-il le débat sur le tabac?

    2. Lorsque l’on introduit une taxe, soit c’est pour inciter financièrement le consommateur à changer son comportement (taxe douanière, taxe poubelle), soit c’est pour financer durablement un service d’utilité publique (TVA, taxe pompier, taxe sur l’essence, taxe sur le divertissement).

      Le paradoxe apparait lorsque l’on veut combiner les deux buts, ce que la gauche a souvent tendance à faire.
      Et on nage effectivement en plein dedans avec la taxe sur le tabac qui finance l’AVS, et dont l’AVS en dépend pleinement aujourd’hui. Le fumeur se rassure alors (et parfois il s’en vante même) parce qu’il estime contribuer davantage que les autres à la pérennité financière de l’AVS. Pas très dissuasif…
      La taxe sur le tabac devrait effectivement servir au financement du coût lié à son usage, puisqu’une diminution du nombre de fumeurs diminuerait de facto les coûts liés.

      Quant à la publicité pour le cannabis, si ce dernier est un jour légalisé. Nulle doute que les cigarettiers deviendront actifs dans ce secteur pour se réafficher dans l’espace publique.
      L’interdiction de la publicité sur l’alcool avait eu comme effet que tous les grands brasseurs continuaient de s’afficher avec leur (nouvelle) bière sans alcool, créant une injustice commerciale à l’encontre des vignerons et des distilleurs.

  2. Bravo Monsieur Jeannot !

    9’500 morts par année, pour 11’000 employés de cette industrie, cela fait presque 1 MORT PAR ANNÉE PAR EMPLOYÉ . Après 10 ans de boite, un employé de l’industrie du tabac aura donc tué 9 personnes !!!
    Que fait la police…

    3’000’000’0000.- / 9’500 décès, nous donne un coup de 316’000.- par décès.
    Et personne ne porte plainte…

    Quand aux politiciens/manager assez fou et fourbe pour défendre cette industrie, je leur propose une petite sortie à vélo de 4 ou 5 heures afin de leur montrer quelle condition physique on peut avoir à 57 ans, sans jamais avoir fumé…

    Bonne continuation et faite du sport, la vie est courte

    1. Bravo !
      Profitons de pédaler en regardant le soleil ou les étoiles.
      Cet univers où nous sommes libres et pouvons encore rêver à des jours heureux

    2. Intéressant mais quelques montants pourraient nuancer l’analyse. En 2020, la Confédération a perçu 2.1 de taxes sur le tabac. Si on y soustrait le coût des maladies liées au tabac (3 milliards), j’ai limpression qu’on prive l’AVS de 900 millions. Il y avait bien un “sauf erreur” mais la phrase a tout de même été lâchée. J’espère que l’argument n’était pas le plus important au moment de choisir le “non”.

        1. Votre affirmation est fausse. Un décès d’une personne âgée de 50 ans peut donner droit à une rente de conjoint survivant (et d’orphelins). Ainsi, au lieu de recevoir des cotisations pendant encore 15 ans, la caisse de pension se retrouve à devoir verser immédiatement une rente de conjoint survivant pendant potentiellement 40 ans, ce qui est extrêmement onéreux.

  3. super article ! Je vois la CVCI dans cette alliance de pauvres d’esprit et de sinistres personnes n’ayant aucune idée de ce que c’est que de voir une femme mourir d’un cancer des poumons !
    Ecoeuré par cette CVCI, une sombre organisation a l’affut du fric !
    Je suis écoeuré par ces partis politiques UDC PLR Centre etc… qui n’ont d’objectif que le pognon et sont surement sponsorisé par l’industrie du tabac !
    Un tel groupement d’associations scandaleusement subventionnées par l’industrie du tabac est honteux !

  4. Bien sûr moins de publicité pour le tabac (et d’autres choses…) sera mieux mais je me demande quel sera l’impact: fumer du cannabis est courant, y compris chez les jeunes, et pourtant il n’y a aucune publicité…peut-être que l’interdiction de ce produit le rend attrayant? En fumera-t-on moins lorsque ce sera légalisé?

    1. Effectivement, lorsque le cannabis sera légalisé, ils en fumeront moins car ils passeront plus vite aux drogues dures.

  5. Merci pour votre article. Effectivement des parents et des amis sont morts de la cigarette. Ils ont commencé à fumer car “ca faisait bien” vous étiez un homme ou une femme qui s’affirmait. C’est ce que vendait et promettait la pub de l’époque. On voit le résultat. Je vote OUI et j’encourage mon entourage à voter OUI. Honte à notre Conseil Fédéral qui n’ose pas prendre position.

  6. Très bonne pièce, merci.

    A noter que effectivement, cette initiative coûtera cher à l’économie, dans le sens que moins de cigarettes = moins de PIB, et moins de soins = moins de PIB. Ce qui montre juste que cette métrique
    n’est pas forcément toujours le meilleur guide, n’en déplaise à certains.

    Une autre manière de regarder la question est la suivante : les cigarettiers font un profit privatisé, créant des coûts de la santé mutualisés. Autrement dit, un subside du public au profit du privé sans
    aucun bénéfice pour le premier. Étonnamment les cigarettiers n’ont pas envie que cette arrangement cesse…

  7. Christophe Reymond (Directeur du Centre Patronal) apporte dans son billet d’aujourd’hui du 24 Heures un argument qui me convainc à voter non.

    Il met en exergue l’hypocrisie autour d’un produit parfaitement légal mais que l’Etat entraverait la liberté d’entreprendre par n’importe quel moyen. A l’image d’un employé qu’un manager veut se débarrasser, mais qu’au lieu d’être licencié, il subit toute forme de mobbing pour qu’il décide de partir de lui-même.

    Sinon, la réaction du Dr Jeannot sur l’argument du cervelas est du pur wokisme : juste se moquer et s’indigner parce que ça manque de respect et blesse un groupe minoritaire. Voilà où se limite aujourd’hui le débat démocratique.
    Pourtant l’argument du cervelas est très pertinent. Le Dr Jeannot sait très bien que l’obésité menace davantage la santé et le bien-être de la population (pas que les jeunes), et que si l’on interdit la publicité sur le tabac, alors il n’y a aucune raison de ne pas en faire de même sur “tout ce qui est jugé néfaste pour la santé et le bien-être”. Nous en ferions donc un Etat encore plus infantilisant et aseptisant.

    Une dernière remarque :
    L’affiche de la campagne des initiants que l’on trouve sur nos journaux quotidiens, montre un adolescent à l’allure cool avec un gros “oui” écrit à côté d’une cigarette bien mise en valeur. Niveau promotion du tabac chez les mineurs, on peut difficilement faire mieux ! (https://www.enfantssanstabac.ch/)

    Et je dis ça, combien même j’ai horreur du tabac, des mégots qui jonchent la rue, de ceux qui fument à côté de moi ou dans des emplacement où ils n’ont pas le droit, et bien évidemment de ces multinationales marchands de la mort que je rêverais voir changer d’activité ou quitter la Suisse.

    1. Bonjour, je comprends votre point de vue lorsque vous parlez d’hypocrisie mais moi je vous parle de jeunes qui vont commencer à fumer pour différentes raisons, une d’elle est la pub. Avec à la clé, des malades, souvent de nombreuses année plus tard, parfois des morts. Pour ce qui est du cervelas, il y a bien sûr dans mon article un peu de provocation mais la différence est grande entre tabac et cervelas, comme vous le savez la consommation de cervelas n’est le plus souvent pas quotidienne et la dépendance au cervelas n’existe pas.

    2. Christophe Reymond fume-t-il? S’il a des enfants, fument-ils aussi et si non, aimerait-il qu’ils fument?

      Seulement près avoir entendu ses réponses, l’on pourra dire s’il peut donner des leçons d’hypocrisie ou non.

      Comment? J’entends que “c’est sa vie privée”? Non, le tabac n’appartient pas à la vie privée. C’est un problème de santé publique. La fumée secondaire, les mégots dans les rues, la prise en charge des malades, tout ceci est public. Même la fortune des cigarettiers est bâtie sur le dos de la santé publique, en privatisant les profits et en socialisant les pertes.

      Et vous en redemandez en plus?

      1. Dans un débat démocratique, je n’ai jamais vu l’intérêt de s’intéresser à la vie privée de personnes publiques qui s’expriment. Pour moi, ce sont les arguments qui importent.

        Comme dit dans mon premier commentaire, même si on met à terre les cigarettiers, ça ne va rien changer ni de près, ni de loin ma vie. Donc je ne comprends pas votre question “et vous redemandez plus?”.

        1. Alors, parlons des arguments. Ce que l’on découvre, avec le tabac, c’est que rien n’est véritablement privé. C’est ce que ma question “vie privée de personnes publiques” cherche à illustrer… En effet:
          – les cigarettiers peuvent dégager du profit uniquement grâce au fait qu’ils externalisent les coûts liés à l’utilisation de leurs produits sur l’ensemble de la société (dont vous faites aussi partie, non?);
          – les conséquences du tabagisme restent difficilement privées, même dans son domicile (à moins d’habiter une villa) tant la fumée s’insinue partout;
          – Depuis des décennies, les stratégies de communication publique des cigarettiers sont axées sur le mensonge et l’omission. Dans la plupart des pays occidentaux, les tribunaux leur ont fait payer le prix, et les législations les ont enfin traités comme les mauvais citoyens corporatifs qu’ils sont.
          – Oui, le tabac est toujours légal aujourd’hui. Mais c’est uniquement pour éviter que le marché noir s’empare du produit et donc que l’on agrave les choses en perdant le contrôle dessus. Autrement, il serait interdit, comme la Thalidomide, l’amiante ou le plomb dans l’essence et dans la peinture. En attandant, on tolère sa vente légale, mais on prend tous les moyens légaux pour en anéantir le marché.

          1. Si je reprends vos arguments un par un :
            1) Je suis d’accord avec vous, les externalités (coûts et pollution) ne sont pas suffisamment supportées par les cigarettiers et les fumeurs. Mais tant que le produit reste légal, la marge de manœuvre se résume à augmenter le prix du produit (soit par une augmentation de la taxe, soit en faisant payer davantage les charges aux cigarettiers qui vont les reporter sur le prix). Ceci engendre un problème social puisque l’on sait que les fumeurs qui en sont dépendants se ruineraient.
            2) En 20 ans, la généralisation des interdictions de fumer dans des espaces publics fermés s’est imposée, ce qui est une réelle délivrance. Ce que je constate, c’est que les fumeurs qui ne respectent pas les règles ni les autres sont très rarement réprimandés (je n’ai jamais vu un fumeur se faire verbaliser en fumant sur un quai d’une gare hors zone fumeur, alors qu’il y en a tous les jours à toute heure).
            Concernant les problèmes à domicile, la tendance politique est plutôt à tolérer de plus en plus la fumette dans les espaces privés.
            Il n’y a donc aucune volonté politique d’être davantage répressif envers les fumeurs, particulièrement dans les villes où la gauche domine et a horreur de la répression policière (sauf à l’encontre de leurs non-électeurs les automobilistes).
            3) Maintenant, ça fait plus de 20 ans qu’on sait que fumer nuit gravement à la santé. J’ai de la peine à imaginer que les publicités mensongères d’antan ont encore un impact sur les jeunes qui commencent à fumer aujourd’hui. Ou alors on admet que les personnes chargées de la prévention ont été très mauvaises en communication lors de ces 20 dernières années.
            4) Si le tabac reste attractif pour les nouveaux fumeurs, en dépit des interdictions et de la prévention, c’est certainement dû à la pression imposée par la société qui considère que fumer reste une valeur sociale. Je ne peux que comprendre qu’un apprenti soit tenté de fumer pour pouvoir prendre la pause avec ses collègues et le patron qui sortent fumer. On a juste l’air con si on sort mais qu’on ne fume pas.

            Pour synthétiser, on doit surtout reconnaître que notre société (nous tous) avons échoué à rendre ringard cette pratique. Je n’ai d’ailleurs jamais vu de communication allant dans ce sens.
            Bref, vouloir interdire la publicité du tabac, soit, ça ne peut qu’aller dans la bonne direction. Mais pour moi c’est aussi admettre que les responsables marketing sont bien plus doués que les experts en matière de prévention. Et que le fait de toucher au principe de la liberté d’entreprendre pour un produit légal va ouvrir des portes sur des dérives arbitraires anti-libérales pour d’autres produits.

    3. Je vous rejoins tout à fait sur le problème de la dangerosité du tabac qui n’est pas une affaire que privée, car elle concerne directement la santé publique.
      Sauf qu’il y a pleins d’autres formes de dangerosité dont la santé publique est concernée.
      – l’alcool
      – le sucre, la malbouffe (que le cervelas illustre)
      – la sédentarité
      – les réseaux sociaux
      – les 99% des jeux sur mobile

      1. “Sauf qu’il y a pleins d’autres formes de dangerosité dont la santé publique est concernée”

        C’est que contrairement aux items de votre liste, le tabac n’a pas de seuil de consommation sécuritaire. De plus, sa fumée secondaire a un impact aussi grave sur l’entourage large du fumeur (et non pas seulement son cercle relationnel privé). On doit donc le traiter distinctement.

        1. N’ayant jamais fumé, je dois admettre ne pas savoir à quel point la nicotine (entre autre) rend dépendant pour pouvoir le comparer aux autres formes d’addiction.

          Je n’ai non plus jamais été confronté à des voisins fumeurs, ce qui fait que je ne me rends pas compte de la nuisance que ça peut causer. Mais cette nuisance n’est pas du tout la cible de l’initiative.

          C’est à l’Etat d’imposer les règles de consommation et de s’assurer qu’elles soient respectées, afin de prévenir la fumée secondaire. Les cigarettiers n’y sont pour rien.

          1. Absolument. On ne peut pas blâmer les cigarettiers de tenter de sauver leur industriel; par contre ils n’ont rien à voir dans la gestion des affaires publiques. Le problème est entièrement dans le camp de l’État, qui échoue à protéger la population contre les méfaits d’un produit toxique et addictif. Chacun son rôle.

  8. Les cigarettiers ont bâti – et bâtissent encore – leur fortune sur le dos de la santé publique et des systèmes de santé des pays où leurs produits sont vendus. Et contrairement à ce pensent les populistes aux cervelas, il n’y a pas de seuil de consommation sécuritaire pour le tabac et son addictivité le rend assimilable aux drogues dures. Enfin, sa fumée secondaire impacte aussi la santé des non-fumeurs (contrairement à l’odeur du cervelas).
    Un droit acquis historique et surtout la crainte que le produit ne tombe sur le marché noir sont les seules choses qui empêchent les États d’aujourd’hui de traiter le tabac comme il le devrait: en tant que produit toxique interdit à la vente, tout comme l’ont été l’amiante ou l’essence au plomb.
    Imaginez que demain, un fabriquant mette sur le marché un dentifrice toxique et addictif qui provoque annuelement la mort de centaines de milliers de personnes? Un dentifrice tératogène? Les lois ne le permettraient éviemment jamais. Alors pourquoi le tabac?
    On ne doit rien aux cigarettiers; par contre eux ont des comptes à rendre à la société. En attendant l’heure des comptes, il est urgent que la démocratie mette un terme leurs activités moralement criminelles, en commençant par révoquer leur droit à la publicité.

  9. J’ajoute que l’argument de la liberté est fallacieux , puisque les jeunes qui commencent ( Par jeu, par ignorance, pour imiter les adultes, …) ne peuvent plus s’arrêter à cause de la dépendance à ces produits assimilables à des drogues . Leur liberté part en fumée , si j’ose dire …

    1. Très bien dit !

      J’ajouterais que les cigarettiers n’ajoutent pas des sucres et de l’ammoniaque comme additifs par accident.
      Tout est fait pour que l’usager (si possible le plus tôt possible) deviennent accro en augmentant l’effet et la vitesse d’assimilation de la nicotine.

  10. Pour ma part, c’est un grand OUI en majuscule. Et il en serait de même si on interdisait la clope sur le territoire ou si le paquet devait passer à 20 balles – je n’en peux plus de cette fumée, des voisins qui fument 24/7 sur leur balcon, empêchant d’ouvrir les fenêtres pour simplement aérer l’appartement. Croiser quelqu’un dans la rue, c’est 90% de chances de tousser à cause des effluves nauséabondes (oui, je suis très sensible à cette pollution).

    En passant, j’ai été scandalisé d’apprendre qu’une part des taxes sur le tabac est employée pour payer les producteurs de tabac locaux… Il me semblait que ces taxes servaient pour la promotion de la santé – pas pour produire de quoi la détruire chaque jour un peu plus !

    La Suisse, ce pays qui marche sur la tête, à la botte de l’économie, et qui se contre-fiche de ses citoyens, de leur santé, de leur précarité. De quoi donner envie de ne plus payer ses impôts fédéraux….

  11. @ NICOLAS BESSON
    Je dirais qu’on connaît les méfaits du tabac depuis plus de 40 ans; pour le reste je trouve votre analyse très juste. “Pour synthétiser, on doit surtout reconnaître que notre société (nous tous) avons échoué à rendre ringard cette pratique.” 100% d’accord, tout est là. Cet échec trouve sa cause dans des campagnes anti-tabacs peu imaginatives, faites de demi-mesures et appliquées mollement. En Amérique du Nord, où les libertées individuelles ne sont pas exactement bafouées, le tabac est attaqué par tous les angles possibles. Campagnes anti-tabac efficacement auprès des jeunes (et non pas moralisatrices, ce qui crérait l’effet inverse), programmes d’aide à l’abandon du tabac chez les fumeurs, interdiction pure et dure de fumer partout (y compris dans sa voiture personnelle en présence d’enfants), paquets de cigarettes avec photos dégueu, puis finalement complètement blancs et anonymisés, taxes prohibitives, interdiction de fumer à moins de 9 m de l’entrée d’un édifice, interdiction de publicité et de commandites depuis des décennies, et récemment, les points de vente doivent conserver les paquets hors de la vue des clients. Résultat? Un taux de tabagisme très faible, y compris chez les jeunes, pour qui fumer est justement un truc ringuard et de paumé.

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