…pourquoi les insectes disparaissent-ils? signez la pétition…

www.declin-des-insectes.ch :

signez et faites signer la pétition pour soutenir l’action du Conseil fédéral dans sa ferme volonté de protéger notre environnement et la biodiversité dans notre pays

La mort des abeilles n’est qu’un symptôme d’un phénomène de beaucoup plus grande envergure. Il semble en effet que non seulement les abeilles, mais la plupart des espèces d’insectes sont en diminution massive depuis une trentaine d’année. On peut le vérifier chaque été par l’effet du “pare-brise” propre, un phénomène dont les moins de trente ans ne peuvent même pas imaginer l’ampleur (cf  L’accent mis sur les insecticides est-il véritablement exagéré? dans ce blog).

Ainsi, quand j’étais gamin, il fallait s’arrêter sur la route des vacances tous les 100 km environ dans une station service pour nettoyer son pare-brise englué de nuées d’insectes écrabouillés. C’était même un petit gagne-pain pour étudiant(e)s.

Une récente étude* tire la sonnette d’alarme: près de le moitié des insectes auraient disparu en Allemagne voisine. Mais qu’en est-il en Suisse? Ne se satisfaisant plus d’un “y’a rien à voir, circulez” un regroupement d’association diverses, dont des amis de la nature, les fédérations apicoles, l’Union suisse des paysans et quelques député(e)s lancent une pétition pour demander que la Confédération helvétique s’intéresse à cette problématique et fournisse  une réponse sur la situation des insectes dans notre pays également.

A quoi bon, me direz-vous, se préoccuper de moustiques, guêpes, hannetons et autres bestioles nocturnes qui n’ont d’autre but dans la vie que de vous piquer quand vous dormez ou quand vous croquez dans une poire trop mûre, ou de se ruer nuitamment dans les ondes de vos merveilleux cheveux parfumés de senteurs enivrantes? Pourtant, vous vous émerveillez devant la grâce d’un papillon, l’assiduité d’une ruche d’abeilles, la poésie émanant d’un vol de lucioles à la nuit tombée et de l’élégance de l’hirondelle. Les guêpes sont cousines des abeilles. Leurs piqures occasionnent une douleur de la même ampleur et ont le même emploi: se protéger des importuns et des prédateurs. Mais voilà, sans moucherons et autres insignifiants insectes, plus d’hirondelles, de martinets, de rouge-gorges, encore mois de mésanges, de pics ou de chauve-souris. A quoi ressembleraient nos prés et nos forêts, sans les anonymes fourmis, cloportes, vermisseaux et autres rampants qui compostent nos déchets organiques, sinon à des tas d’immondices pestilentiels?

Répartition en Suisse du Hanneton commun (Melolontha melolontha). En rouge: observations depuis l’an 2000; en orange: données historiques (antérieures à 2000).

Et pourtant, c’est aussi cela la biodiversité, des nuées d’insectes sur vos lunettes de cycliste, ou même jusque dans votre estomac si vous pédalez et respirez bouche ouverte, sans compter les pollens, plus ou moins bienvenus ou allergènes.

En attendant d’en savoir plus, n’hésitez pas à visiter le site web du Centre suisse de cartographie de la faune (CSCF), qui vous fournira des cartes de répartition de toutes les espèces du pays. La figure ci-jointe donne l’exemple de celle du hanneton commun. Ces cartes reportent en rouge les observations faites depuis le début du 20ème siècle; les observation antérieures sont indiquées orange. Cet insecte peu répandu aujourd’hui était considéré comme un ravageur lorsque j’étais gosse. Les autorités récompensaient ceux qui les capturaient, au même titre que les taupes et les campagnols.

Si ma mémoire est bonne, les chasseurs de hannetons étaient rémunérés au volume (tant par bocal d’un litre). Puis vinrent les premiers épandages par avion dont  les archives RTS nous offrent un saisissant reportage datant de mai 1965.

Premiers épandages aériens d’Endosulfan pour lutter contre les Hannetons en Valais (Archives RTS;1965). Hautement toxique pour les organismes non-cible, dont les abeilles et les poissons, l’endosulfan est interdit depuis 2012. Ce petit film de la RTS est éloquent! En trois minutes, il nous résume 50 ans d’histoire!

On s’interroge alors déjà sur la potentielle toxicité pour les abeilles de l’insecticide utilisé. Sans surprise, la réponse est claire et unanime: le produit est totalement inoffensif pour l’apiculture nous affirme avec conviction un producteur de miel dans le reportage. Sans surprise non plus, cet insecticide, l’Endosulfan, s’est au contraire avéré très nocif pour l’ensemble des organismes non-cible, à commencer par les abeilles, mais aussi pour les poissons et toute la faune aquatique et, bien entendu pour la santé humaine. Il a été progressivement banni dans la plupart des pays développés dès le début des années 2000, avant d’être définitivement interdit sur le plan international en 2012 dans le cadre de la convention de Stockholm. Mais rassurez-vous si vous avez investi dans l’entreprise américaine qui le commercialise, vos revenus sont toujours assurés. Car selon la revendiquée tradition de la responsabilité individuelle prônée par le libéralisme triomphant, les produits à base d’endosulfan sont toujours en vente et sont, entre autres, encore utilisés en Chine et en Inde (source Wikipedia: Endosulfan)

En consultant le site du CSCF, vous constaterez à quel point nos connaissances sur les insectes dans notre pays sont pauvres et lacunaires. La situation est bien plus alarmante encore dans le reste du monde. Suivant les sources, on estime le nombre d’espèces d’insectes sur la planète entre 1 et 100 millions, approximativement. La grande majorité d’entre elles n’ont pas encore été découvertes, ni décrites évidemment. De nombreuses espèces disparaissent avant même d’avoir été découvertes. On estime leur nombre à 26’000 par année, contre 16’000 espèces nouvelles découvertes dans le même laps de temps (source: Planetoscope).

Si comme moi vous êtes nostalgique des pare-brise englués, que vous souhaitez connaître l’état de notre faune entomologique, et que vous n’avez pas peur d’ingurgiter un moucheron au guidon de votre vélo, signez et faites signer la pétition:

www.declin-des-insectes.ch

* Référence:

Halmann et al. (2017) : More than 75 percent decline over 27 years in total flying insect biomass in protected areas

PLOS/one: https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0185809

 

Suivi :

13.12.2018 :

Un grand succès la pétition a recueilli plus de 165’500 signatures et a été déposée auprès du Conseil fédéral.

Merci à toutes et tous les signataires

Francis Saucy

Francis Saucy, Docteur ès sciences, biologiste, diplômé des universités de Genève et Neuchâtel, est spécialisé dans le domaine du comportement animal et de l'écologie des populations. Employé à l’Office fédéral de la statistique, Franci Saucy est également apiculteur amateur et passionné, et il contribue par ses recherches et ses écrits à l'approfondissement des connaissances sur les abeilles et à leur vulgarisation dans le monde apicole et le public en général. Franci Saucy fut également élu PS à l'exécutif de la Commune de Marsens, dans le canton de Fribourg de 2008 à 2011 et de 2016 à 2018. Depuis mars 2019, Franci Saucy est rédacteur de la Revue suisse d'apiculture et depuis le 15 septembre 2020 Président de la Société romande d'apiculture et membre du comité central d'apisuisse Blog privé: www.bee-api.net

5 réponses à “…pourquoi les insectes disparaissent-ils? signez la pétition…

  1. Signe avec plaisir votre pétition, mais pas par nostalgie, mais parce que chaque moucheron, qu’on l’avale ou non, fait partie de notre écosystème et a son utilité, aussi désagréable, ou sous-estimé qu’il puisse être :)!

    Bien à vous

  2. Il faut chercher la solution encore plus en amont. Nous sommes entrés dans l’Anthropocene et la 6e grande extinction de masse est en cours. Ce ne sont pas uniquement les insectes qui disparaissent à la vitesse V, mais nous avons également perdu 90% des grands prédateurs en à peine plus de 50 ans; d’énormes parcelles de forêts primaires sont brûlées ou rasées quotidiennement pour faire place aux monocultures «durables» (d’après le très cher WWF à Gland VD) de palmiers à huile, qui se retrouve ensuite dans environ 1 produit sur 2 que nous achetons en supermarché; les récifs de corail sont en train de disparaître et de vastes zones océaniques deviennent des déserts maritimes; etc. etc.

    Sur son site Internet, le Canton du Valais chiffre les «dégâts causés par le loup», en proclamant que «Selon l’appréciation des autorités cantonales, les conditions pour un tir de régulation du loup sont remplies.»

    Qu’en est-il en revanche des dégâts causés par Homo «sapiens», dont les montants se chiffrent non pas en milliers mais en milliards de francs? Est-ce que les conditions pour l’abolition du modèle dépassé des allocations pour enfants ne seraient pas également remplies? Ou les conditions pour le remboursement de la vasectomie, non seulement avec une assurance complémentaire mais aussi au niveau de la LAMal? Ou celles pour ôter une fois pour toutes l’impôt ecclésiastique et les cours de catéchisme/lavage de cerveau avec des fables pour la plupart inventées – afin de laisser le soin au «marché religieux» de se réguler tout seul? (Genèse: «Dieu les bénit, et Dieu leur dit: Soyez féconds, multipliez, remplissez la terre, et l’assujettissez; et dominez sur les poissons de la mer, sur les oiseaux du ciel, et sur tout animal qui se meut sur la terre.»)

    Ou les conditions pour arrêter de financer avec nos impôts l’aide au «développement», qui dans le cas de l’Afrique finit bien souvent dans les poches des dictateurs et exacerbe le flux migratoire? Aussi «cruel et choquant» que cela puisse paraître, est-ce que les conditions ne seraient pas également remplies pour accepter à bras ouverts et avec beaucoup plus de dignité les migrants qui préfèreraient tenter la périlleuse traversée de la Méditerranée sans la quasi-certitude d’être secourus par l’industrie du tourisme humanitaire, puis placés artificiellement sur le tapis roulant actuel des réfugiés ad infinitum – plutôt que de rester chez eux et se battre pour un monde meilleur?

    Dame Nature est constamment en train d’essayer de nous indiquer le seul et unique chemin à prendre si nous voulons éviter de rejoindre trop tôt les dinosaurs, ainsi que le 90% des autres espèces qui ont jamais vécu sur notre belle planète. Mais en dépit de l’été torride que nous venons de vivre lorsqu’une bonne partie de l’Europe et du monde était desséché ou en feu (notre Roger national en a d’ailleurs souffert à l’US Open), nous continuons à croire en la fable d’une économie nécessitant une croissance matérielle infinie pour fonctionner. Ou à prier un dieu inexistant pour régler confortablement tous nos problèmes à notre place (alors qu’il a une infinité de galaxies et même l’univers entier à protéger, et doit même défendre sa supériorité envers tous ses rivaux – musulman, juif, mormon, raëlien, scientologue, adventiste, etc. – qui pensent également être les meilleurs et à l’origine du monde)?

    Quant à moi, je préfère les contes, légendes et fables plus chouettes comme par exemple Heidi, les Contes de Grimm, Blanche-Neige et les 7 nains, ou encore le Petit chaperon rouge.

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