L’importance de six milliards de vies humaines

Un réchauffement de 4°C aurait des conséquences dévastatrices

Dans mon blog précédent j’ai discuté l’effet d’un réchauffement de 4°C. Il serait apocalyptique, et certains scientifiques ont calculé qu’il pourrait tuer environ six milliards d’humains, et que seule une petite minorité pourrait y survivre.

Les commentaires m’ont alors accusé de considérations purement émotionnelles. Je ne comprends pas très bien, je crois que je suis restée technique et factuelle.  Estiment-ils que mentionner la mort de six milliards d’humains appartient au domaine de l’émotionnel? Au nom de quelles considérations supérieures? Le cours de l’action des compagnies pétrolières?

Ou considèrent-ils ce chiffre comme exagéré? Je dois insister qu’un réchauffement de 4°C serait d’une gravité extrême, des vagues de chaleur avoisinant les 50°C en Bourgogne et en Suisse, les conséquences seraient très graves partout sur la Planète et que déjà maintenant, le climat cause des nombreuses catastrophes.

Il y a plus d’inondations, plus de vagues de chaleur et de sécheresses, d’ouragans forts,  les coraux meurent déjà, et de nouveaux dangers causés par la foudre, la grêle, les tornades semblent émerger maintenant.  A +2°C plusieurs pays vont subir de graves désastres, et de nombreux écosystèmes s’effondreront.

Pourquoi n’avons nous pas agi plus tôt?

Il y a quelques dizaines d’années, nos autorités ont décidé de ne pas éviter totalement le réchauffement et de privilégier la croissance économique. Maintenant, nous en subirons les conséquences.

Ont -ils pensé que cela n’arrivera qu’aux autres, très loin ou très tard?

Ont -ils alors délibérément décidé la mort de populations entières des pays tropicaux? A +2°C, certains pays courent de très grands risques,  il fera en moyenne 4°C de plus sur la plupart des continents (selon le rapport du GIEC 1,5°C), mais les vagues de chaleur culmineront plus haut.

L’extrême-droite nie-t-elle sciemment le problème du climat en espérant éliminer les populations des pays chauds de la surface de la Terre?

Certains estiment qu’il vaut mieux laisser la Nature se débarrasser du cancer humain et se reconstituer elle-même.  Là, je ne suis pas d’accord, pour moi l’important est de sauver les vies humaines.  D’autre part la bêtise portée à l’extrême pourrait mener à d’immenses bunkers climatisés et des avions privés par lesquels une minorité continuerait à polluer une Planète brûlante et déjà déserte.

Permettre un réchauffement de plus de 2°C, ou plus probablement de plus de 1,5°C,  équivaut à permettre un génocide.  Il deviendrait difficile de tenir le compte des morts dans le chaos généralisé, des pays entiers seraient rayés de la carte.

Nous avons tout intérêt à contenir le réchauffement

La décision de privilégier la croissance se révèle aujourd’hui néfaste, et lourde de conséquences. Le réchauffement climatique touche tous les pays. La Suisse, qui semblait tout d’abord peu exposée, sera frappée par de fortes vagues de chaleur, des glissements de terrain, des foudres et des grêles inconnues jusqu’à peu. Les conséquences s’aggraveront, ce que décris est encore en dessous de la réalité. Des petits ouragans se sont récemment aventurés au-dessus de l’Espagne, de la Grèce, et ou de l’Angleterre, mais si, à des températures supérieures, ils atteignent la taille de l’immense typhon Hagibis qui a frappé le Japon, ils couvriront toute l’Europe.

Un réchauffement de 4°C causerait d’immenses tempêtes. Chaque ville subirait des destructions et compterait des morts et des blessés.  La survie à cette hécatombe tiendrait de la chance, la civilisation succomberait vite, et nos enfants ou nos petits-enfants se battraient pour l’existence entre l’effondrement économique et le déchaînement de la Nature, se cacheraient des vagues de chaleur dans les décombres, défendraient leur potager cultivé sur les décombres de l’école actuelle, fuiraient les inondations.

C’est une mauvaise décision pour l’économie mondiale car le degré et demi ou deux degrés acceptés pour entretenir la croissance économique signifient déjà que les petites mains de cette croissance, les travailleurs du Bangladesh ou d’Inde mourront ou devront se réfugier ailleurs et ne pourront plus être les rouages de cette machine mondiale.

Les transports seront perturbés, les entrepôts inondés ou emportés par les flots et les vents et l’économie en ressentira de nombreux effets. Nous n’aurons pas les moyens de reconstruire notre civilisation de plus en plus souvent. Il coûtera toujours moins cher d’éviter l’aggravation (Lord Stern).

Nous n’avons pas le droit de détruire les conditions de vie de peuples entiers, leur Histoire, leurs cultures. Dans des nombreux pays, la température atteindra ou dépassera cinquante degrés, le sol s’effritera, l’agriculture et le travail physique seront souvent impossibles. Dans plusieurs pays d’Asie, il sera dangereux de sortir une grande partie de l’année. Le climat de plusieurs pays ne permettrait plus de cultiver des aliments. Nous en sommes responsables. Les émissions de carbone mettent en danger de nombreux pays, et les citoyens des pays émetteurs mêmes.

Nos autorités doivent absolument éviter la dégradation des conditions de vie des Humains, de tous les Humains, sur Terre. Le réchauffement climatique a déjà causé les famines du Sahel des années 1980 et ainsi que des nombreuses autres, et les pays émetteurs ou les entreprises responsables doivent en prendre la responsabilité. Au final, cela nous sauvera aussi, car le Futur climatique sera dangereux pour tout le monde.

Dorota Retelska

Dorota Retelska, décrypte les nouvelles du climat. Docteure ès Sciences de l’UNIL, auteure d’Antarctique-Ouest dans le Vide, elle alerte sur les dangers du climat depuis plusieurs années. Elle est active dans plusieurs organisations de défense du climat, entre autres l’Association Climat Genève, Greenpeace, TACA, et le Collectif Climat 2020.

13 réponses à “L’importance de six milliards de vies humaines

  1. Un génocide, c’est bien cela qui se prépare. Je n’ai jamais osé utiliser ce mot terrible, mais vous venez de le faire avec beaucoup de lucidité. Le réchauffement atteindra selon les prévisions récentes nettement plus de 4°C, jusqu’à 7°C est envisagé au siècle prochain avec la libération du méthane des fonds marins et des permafrosts en train de dégeler rapidement. Ce phénomène maintenant bien enclenché est un effet de synergie qui renforce et amplifie considérablement les conséquences de la pollution anthropique au CO2. Il ne fait absolument aucun doute que les coups de boutoir climatiques peuvent très vite mettre en pièces la civilisation, la dégradation se faisant par paliers successifs (la canicule de 2003 était un de ces paliers, mais il y en a eu d’autres depuis). Il faudra donc trouver les compétences et les capacités de faire face, tout en supportant un réchauffement à moyen terme, sinon je vous laisse imaginer la suite…

  2. Le chaos climatique avec ses tempêtes et ses périodes de sécheresse prolongées va détruire les cultures céréalières et maréchaires, les élevages industriels d’animaux destinés à la consommation humaine et va certainement aussi entrainé un chaos social indescriptible. Imaginé un peu les longues fils d’attente, souvent vaines, devant les épiceries, boucheries, fruiteries, etc… avec des tablettes vides de denrées alimentaires. Les populations locales vont alors se révolter et la criminalité va devenir partout exponentionnelle car les gens vont devenir affamés et prêt à tout pour se nourrir et survivre, même à tuer leurs voisins pour voler leurs denrées alimentaires, leurs voitures et même leur maison, s’il le faut.

  3. Je ne sais pas pour qui vous prêchez, mais je suis stupéfaite de voir à quel point vous ignorez archives et statistiques. Non il n.y a pas plus d’événements climatiques,ni cyclone, ni sécheresse s, ni inondations, ni feux de forêts qu’avant. En fait, vous construisez des théories à coup de “si” et de ” mais” basées sur des on-dits médiatiques non-vérifiés. Si c.est le niveau scientifique que vous avez à offrir, je me demande si ça vaut le coup de faire tourner les serveurs pour des opinions aussi peu étayées. Renseignez-vous un peu mieux avant de servir des scénarios catastrophes….

    1. Archives et statistiques ? CO2 dans l’atmosphère: > 400 ppm. Du jamais vu depuis… le Pliocène !! Alors pensez-donc, les archives des derniers siècles ou millénaires ont bien peu de choses à nous raconter sur ce qui nous attend. Si, comme je l’imagine, le climat du futur ressemblera à celui de ce lointain passé, il y a plutôt du souci à se faire. Pour vous faire une idée, le niveau de la mer était environ 25 mètres plus haut. Prenez un atlas et regardez ce que cela signifie pour les zones côtières planes. Et croyez-moi, il ne s’agit pas d’opinions peu étayées. Les sédiments déposés à cette époque sont d’excellentes archives…

  4. L’inertie climatique est telle qu’il faudrait certainement quelques siècles pour voir l’impact de nos mesures prises aujourd’hui, fût-il encore qu’elles soient extrêmistes (arrêt total de nos activités).
    Donc des actions comme mettre des éoliennes ou favoriser les VE sont absolument risibles, puérilles, je dirais même inutiles (sauf pour notre bonne conscience).
    Les navires de croisières continuent à polluer joyeusement dans l’indifférence générale. Ils ont +7% de croissance l’an dernier; peut-être que les gens prennent le bateau au lieu de l’avion pour les vacances.
    Quand allons-nous cesser de rêver et devenir factuels, de regarder la réalité en face?
    Il nous faudra en plus quelques générations pour trouver une entente mondiale sur le sujet du réchauffement (est-il dû aux humains ou cycle naturel)?
    Réponse le siècle prochain…….

  5. En 1948, Aldous Huxley nous a promis l’apocalypse nucléaire aux alentours de l’an 2000 et, en 1949, George Orwell prophétisait l’avènement de Big Brother dans sa dystopie totalitaire, “1984”. On attend toujours…

      1. C’est vrai. Pourtant Aldous Huxley ne venait pas moins d’une famille de scientifiques et tout son œuvre est centré sur la science et ses effets. Son frère Julian Huxley était un biologiste connu pour ses théories sur l’évolution. Son grand-père, Thomas Henry Huxley, était un des plus importants naturalistes du XIXe siècle, surnommé le « Bouledogue de Darwin ». Son fils, Matthew, était épidémiologiste. Les idées de Huxley sur les rôles spécifiques de la science et de la technologie dans la société (tels qu’il les a décrits dans “Île”) sont parentes de celles de penseurs britanniques et américains du XXe siècle, tels que Lewis Mumford, Gerald Heard (et, sous certains aspects, Buckminster Fuller et E.F. Schumacher). Ses expériences hallucinatoires – recours à la mescaline, au LSD et aux psychothropes – ont une ressemblance étrange avec les déclarations apocalyptiques, fort peu scientifiques, de certains climatistes.

        Quant à Orwell, s’il est vrai qu’il n’avait pas de formation scientifique, il n’a pas moins été l’élève d’Aldous Huxley à Eton et très lié d’amitié avec ce dernier.

        Enfin, n’en déplaise à Pascal, à qui l’on doit d’avoir divisé pour l’éternité le cerveau humain en esprits de géométrie et de finesse, ce que l’école s’est employée avec zèle à établir en dogme, l’esprit humain ne reste pas moins ce qu’il est : rien n’empêche un littéraire d’avoir de l’intérêt pour la science, et vice versa. Le climat serait-il le terrain où les sublimes hypostases se rencontrent?

    1. Pour ce qui est de Big Brother, Inutile d’attendre, c’est commencé. Demandez par exemple aux Ouïghours. Pour ce qui est de l’apocalypse nucléaire, la menace est loin d’être écartée (et voici un peu de lecture à ce sujet  : https://blogs.mediapart.fr/peter-bu/blog/010318/deux-minutes-de-la-guerre-nucleaire). Quant à la catastrophe climatique, l’indice du prix des denrées alimentaires est un bon baromètre : lorsque vous constaterez que leur coût vous demandera de choisir entre vous nourrir et vous loger décemment, vous réaliserez l’ampleur du problème. Mais ce sera alors sans retour.

    2. Beaucoup de physiciens avaient prédit la fin de la loi de Moore, souvent trop tôt. On aurait pu s’en moquer et croire à la croissance infinie de la quantité de transistor par unité de surface. Sauf qu’on a atteint cette limite prédite par la physique. Plus tard que prévu ? Peut-être. Mais ceux qui avaient fait ces prédictions étaient plus fins que ceux qui s’en moquaient. Je pense qu’Husxley, Orwell et d’autres “catastrophistes” contemporains sont bien plus lucides, fins et éveillés que les perma-optimistes sceptiques qui s’en moquent. L’avenir jugera.

  6. Ce serait à cause du syndrome de la Reine rouge (d’après Lewis Carroll) par la goinfrerie d’énergie fossile.

Les commentaires sont clos.