Apollinaire : un poète devenu héros
Guillaume Apollinaire serait né à Rome en août 1880, et mourut à Paris le 9 novembre 1918, d’une grippe aviaire dite “grippe espagnole“. La faiblesse induite par une blessure à la tête, occasionnée par un éclat d’obus, l’empêcha de surmonter la maladie. A cause de son engagement durant le conflit 1914-1918, on le déclara mort pour la France. On en parle beaucoup, ce mois-ci, où l’on commémore le centenaire de la fin de la Grande Guerre et… le centenaire de la disparition du poète. Ainsi, je me contenterai de présenter le poème que je préfère de lui, et d’en invoquer les motifs.
Apollinaire et la guerre
L’on prétend qu’Apollinaire aimait la guerre. En homme curieux, ses mécanismes, ses enjeux, ses conséquences, la façon dont elle change les paysages et le comportement humain, le fascinaient probablement. Mais, quand je lis ce poème, je ressens surtout qu’il l’a trouvait aussi vulgaire qu’une certaine hypocrisie bienséante envers les affaires de sexe. Certes, il s’était engagé de son propre chef mais – selon Daniel Delbreil, professeur à l’université Sorbonne nouvelle-Paris III, spécialiste du chantre de la poésie moderne – afin d’obtenir la nationalité française, comme beaucoup d’étrangers qui vivaient en France à l’époque. Par ailleurs, personne ne pouvait prévoir l’hécatombe qu’allait devenir la Première Guerre mondiale.
Apollinaire et le sexe
J’ai découvert ce poème quand j’étais élève au Cours de l’acteur Florent, à Paris. Nous devions étudier une poésie et la présenter sur scène. Nous avions le choix du poème, pas du poète. Ma professeure de théâtre Michèle Harfaut m’a attribué Apollinaire. J’avais envie qu’il soit question d’amour. J’ai acheté Poèmes à Lou. J’ai toujours défendu la liberté sexuelle et ses diverses pratiques à condition qu’elles s’effectuent entre adultes consentants. Ce poème correspond exactement à ce que je pense : lorsque deux personnes – ou davantage – sont d’accord sur les règles du jeu, il ne saurait y avoir de débauche. Certaines choses de par le monde, à commencer par le peu de cas que l’on fait de sa destruction –par exemple – s’avèrent bien plus choquantes, à mes yeux, que ce qui se passe dans une alcôve entre adultes consentants. Mon choix s’était porté sur Parce que tu m’as parlé de vice dans ta lettre d’hier parce qu’Apollinaire y suggère clairement la sodomie et le SM.
Extrait de la préface de Poèmes à Lou et d’ Il y a
“Amant persuadé que
Le vice n’entre pas dans les amours sublimes
il chante la joie et la douleur des corps sans oublier que “le corps ne va pas sans l’âme”, à la fois rêvant d’un inaccessible absolu et acceptant les partages les plus dérisoires.
Soldat vivant au jour le jour les misères des premières lignes, il a le courage de contempler l’insolite beauté que suscite la guerre, et de la dire.
Mais dans la magnificence de l’amour comme dans l’émerveillement qu’il ressent, artilleur, sur la ligne de feu, il reste, proche de nous, l’homme qui sait sa faiblesse et le prix de l’attente:
Je donne à mon espoir tout l’avenir qui tremble comme une petite lueur au loin dans la forêt.
Article sur la grippe espagnole dans le journal Le Temps:
“Aucune autre pandémie dans l’Histoire n’a autant tué”.
Sources: