Eloge de l’ignorance

 

 

Dans la loi suisse sur l’analyse génétique humaine, il est un article sublime  dont le titre résume toute une pensée politique : « Le droit de ne pas savoir ». Si une femme enceinte bénéficie d’une analyse, qui révèle que le bébé à naître souffrira d’une maladie génétique grave, elle peut néanmoins refuser de l’apprendre. Elle ne sera pas  confrontée à un choix difficile. Elle ne choisira donc pas, en toute ignorance de cause. Elle sera dès lors une victime, mais pas une responsable : l’aveuglement est la meilleure attitude de repli devant un réel insoutenable.

Et ce n’est qu’un exemple parmi beaucoup d’autres. En certaines circonstances, sous l’éventualité d’une menace sur la santé, l’économie, le climat, la sécurité, certains préfèrent ne pas savoir. Ou pour dire les choses brutalement, ils préfèrent ignorer. La culture politique du pays possède un droit, qui n’est drôlement pas noté dans la constitution fédérale : le droit à l’ignorance.

Ce droit furtif va à l’encontre de deux articles explicites de la Constitution, le droit à la formation (Art. 19 et 20 Cst) et le droit à l’information (Art. 16 et 17 Cst). Nuance importante : ce sont des droits mais pas des devoirs. Car aucun citoyen n’est tenu de réussir son école obligatoire, ni d’acheter des journaux, ni de regarder la télévision, ni d’assister à des réunions électorales. Peut- être devrait-on ajouter un alinéa à l’article 10  Cst : « tout être humain a le droit à l’ignorance ».

En premier lieu, une ignorance réelle et spontanée permet d’imaginer des solutions simples à des problèmes compliqués, ainsi que des solutions apparentes à des problèmes insolubles. C’est le vaste domaine du yaka, yakapa, isufi. C’est l’évocation rituelle du bon sens, qui est la chose la mieux partagée du monde, puisque chacun pense en être pourvu, voire en être le détenteur privilégié. Or, c’est le concierge de l’esprit : il ne laisse pas pénétrer les idées suspectes parce que nouvelles. Pour les intellectuels en revanche, cette lamentable secte, l’intelligence commence précisément là où s’arrête le bon sens, dont ils sont donc dépourvus. Leur bon sens se perd par l’étude, la réflexion, la pensée, l’introspection, la formation.

En Suisse, on se lamente vertueusement sur le taux d’abstention lors des votations ou des élections. On devrait plutôt s’en réjouir, car il mesure le taux des ignorants, une majorité de braves gens qui ne savent pas quel parti adopter, qui ne savent même pas que l’on vote ou même qu’ils ont le droit de vote. C’est de la modestie, voire de l’humilité. Pour autant, ceci ne signifie pas que la minorité de ceux qui votent tout de même ne comprendrait pas elle aussi une majorité d’ignorants. Mais ces derniers font au moins l’effort de ne pas apparaitre pour ce qu’ils sont. C’est l’hommage révélateur du vice à la vertu. Ils votent ainsi au hasard ce qui entache les prévisions des sondages d’une marge d’erreur considérable. Prédire le résultat d’un vote ressemble de plus en plus à prévoir la sortie d’un numéro à la roulette. La science de la démocratie référendaire s’apparente de la sorte à la mécanique quantique qui est le lieu d’un hasard essentiel.

A côté de cette masse naturelle d’ignorants innocents, il est une classe d’ignorants délibérés. Ce sont ces prétendues élites que l’on daube actuellement : universitaires, journalistes, politiciens, artistes, sondeurs, et même des milliardaires simulant l’inculture pour se faire élire par la masse. Dans la mesure où ils ont accès à toute l’information et où ils jouissent par leur formation de la capacité de l’apprécier, ils sont placés devant un choix redoutable : comment démêler la complexité inextricable du monde, sinon en ignorant délibérément des faits, en simplifiant outrageusement la réalité, en éliminant les facteurs gênants pour aboutir à une situation simple qui dicte une politique évidente.

Cependant, toutes les élites ne pratiquent pas une commune ignorance et elles ne travestissent pas réalité de la même façon : c’est pourquoi il y a une droite qui néglige le social, l’écologique, le souhaitable en un mot et une gauche qui omet la finance, le marché, le possible en bref. Chaque aile ferme un œil pour mieux ouvrir l’autre. Ces deux travestissements du monde définissent l’enjeu de la politique, réduite à une sorte de match de football entre deux équipes portant des maillots de couleurs différentes, qui chantent cependant à l’unisson l’hymne national au début de la partie.

 

Les piliers de la démocratie sont la formation et la culture

La démocratie se mérite. Elle s’apprend. C’est tellement difficile qu’il faut compter en siècles. Est-ce un hasard si les pays scandinaves et la Suisse réussissent leurs démocraties ? Leurs racines se situent dès le Moyen Age. En sept siècles, la majorité des citoyens peut apprendre que le but de la politique n’est pas d’imposer le pouvoir de cette majorité, mais de respecter toutes les minorités qu’elles soient d’origine linguistique, ethnique, religieuse ou même sexuelle En fin de compte. la démocratie se résume au respect de chaque personne dans sa singularité. Elle est à la fois libérale parce que la responsabilité matérielle de chacun est nécessaire et cependant sociale car la solidarité s’impose en cas de malheur.

En sens contraire, il est des cas d’école. La France ne réussit pas à se dépêtrer de son modèle monarchique et aristocratique, car le petit peuple n’a que très peu voix au chapitre et que la simple idée d’une législation avec la soupape du référendum fait horreur. D’autres pays sont encore plus loin du compte : la Russie, la Chine, la Turquie, l’Arabie saoudite. Même si le processus est enclenché, sa réussite n’est pas en vue.

La grande découverte de cette semaine est la réalité décevante des Etats-Unis. Longtemps présentés comme une démocratie modèle, comme la matrice sur laquelle réformer toutes les dictatures du monde, la victoire de Trump a dévoilé la reine des nations. Ce qui semble aujourd’hui le plus inconcevable, c’est le déni des valeurs des Pères Fondateurs de la nation, ces immigrants venus du monde entier précisément pour fuir l’oppression et construire un pays de liberté, auquel une statue gigantesque prête un visage dès le port de New York. Comment peut-on depuis quatre siècles respecter des valeurs et subitement les nier ? Comment un personnage grossier, vulgaire, sexiste, affairiste, menteur s’est fait élire pour incarner les valeurs fondatrices ?

Les explications sont demeurées à la superficie : ce serait la mondialisation, la numérisation, les crises financières, l’écume des finances. Or, une composante révélatrice du discours trumpien est ce procès des élites représentées par Hillary Clinton. Il a donc fallu que la majorité du peuple ne se sente pas en consonance avec ces élites. On le comprend tout de suite en effectuant un voyage d’une côte à l’autre et en rencontrant l’Amérique profonde. Elle n’a rien à voir avec la Nouvelle Angleterre ou la Californie. C’est sur les rives océanes que se situent les universités prestigieuses, les meilleures du monde, accessibles en payant des dizaines de milliers de dollars chaque année comme minerval. Là se trouvent les théâtres, les salles de concert, les musées, les galeries de peinture, les librairies, les cinémas, en un mot les lieux de culture.

En revanche le reste du pays constitue un désert culturel. La presse locale ne se consacre qu’à la vie régionale, avec une ignorance totale de ce qui se passe dans le reste du monde. Les écoles, les universités sont de bas niveau. Le seul spectacle est dispensé par la télévision, dont les grandes chaines sont financées uniquement par la publicité. Elles diffusent des émissions stupides afin de collecter des téléspectateurs suffisamment abrutis pour être influençables par des séquences publicitaires interrompant les programmes jusque deux fois par quart d’heure.

Les migrants qui ont peuplé le centre des Etats-Unis provenaient des couches les plus défavorisées de l’Europe, fuyant la pauvreté, la persécution, même la famine. Ils n’ont pas emporté leur culture d’origine parce qu’ils n’y avaient pas accès. Dans un village de l’Amérique profonde, même dans une petite ville, inutile de chercher un commerce de proximité, un boulanger, un boucher, un vrai restaurant. Et donc, la défaillance de la démocratie était prévisible. La majorité du peuple américain ne dispose pas des outils pour en faire l’apprentissage en profondeur. Elle est ignorante et inculte.

Dès lors on doit se poser la même question pour les pays européens. Si le pouvoir d’achat de la classe moyenne est manipulé par la publicité et s’oriente vers des gadgets numériques au détriment de ce qui fait la joie de vivre, on aboutira au même résultat paradoxal. Bien que le revenu moyen en parité de pouvoir d’achat aux Etats-Unis (53001 $) soit comparable à celui de la Suisse (53997$), l’usage qui en est fait est totalement différent. Par rapport à un Suisse, l’Etatsunien ordinaire est moins bien logé, nourri, habillé, soigné, distrait ou formé. Le résultat global se mesure à l’espérance de vie, quatre année de moins qu’en Suisse

Il est des Trumps à l’affut en Europe et même en Suisse. Dans la logique de leur action, ils s’efforcent de démanteler le service public de la télévision, ils s’en prennent aux universités, ils rechignent à subventionner la culture, ils veulent boucler les frontières, ils se moquent du droit international. Si on les laisse faire, même ici on aboutira au même résultat. L’ignorance et l’inculture sont les piliers de la dictature.

La Suisse sauvera l’Erythrée

L’Erythrée a la réputation d’être une des pires dictatures au monde et la Suisse d’en être l’exact opposé, un exemple de démocratie participative. Dès lors il était logique que le bon se sente tenu de convertir le méchant. En février de cette année, quatre parlementaires fédéraux, qui ont fait le déplacement, en sont revenu avec l’impression d’un pays propre en ordre, comme c’est d’ailleurs la règle pour toute dictature bien organisée, qui réussit à se maintenir au pouvoir. Dès lors le mot d’ordre à Berne est devenu : « intensifier les échanges diplomatiques et le dialogue avec les représentants érythréens avec pour objectif, que moins d’Erythréens quittent leur pays pour chercher refuge en Suisse ». Une motion en ce sens a été adoptée par le Conseil national et le Conseil des Etats ainsi que par le Conseil fédéral.

Pourquoi pas ? Mais il faut une certaine dose de naïveté helvétique et d’ignorance crasse de l’Afrique pour accorder à ce plan quelque chance de réussite. L’Afrique n’est pas simplement l’Europe dotée d’un climat torride. Dans ce continent, il n’y a rien qui ressemble à la Suisse, une démocratie directe, fondée sur la libre adhésion de ses cantons, vivant en paix, jouissant de la prospérité, munie d’une presse libre. A de rares exceptions près, c’est tout l’inverse. Le pouvoir est confisqué par une bourgeoisie locale, incompétente et corrompue, soutenue par des lobbys économiques étrangers, qui mettent le continent en coupe réglée.

On oublie trop souvent que l’Afrique a subi plusieurs traumatismes historiques : l’esclavagisme des Européens et des Arabes, un siècle de colonisation, le découpage en pays artificiels selon les intérêts des colonisateurs faisant fi de la réalité ethnique, le tout achevé par une décolonisation bâclée laissant libre champ à la violence et au désordre. Or avant ces événements, les ethnies africaines disposaient de structures coutumières, qui représentaient une forme de démocratie, de solidarité et d’entente. C’est cette forme naturelle de gouvernance qui a été détruite. On ne peut espérer remplacer en quelques décennies cette tradition en imposant des démocraties parlementaires à l’occidentale.

Et donc la dictature de l’Erythrée est le résultat d’une tragédie historique. Les bonnes paroles ne suffiront pas. La coopération au développement non plus. La démocratie, l’Etat de droit, la séparation des pouvoirs, le respect des droits de l’homme finiront par triompher. Mais pas du jour au lendemain, parce que la Suisse s’en occupe. D’ailleurs le but véritable de Berne est de diminuer l’afflux de réfugiés érythréens, qui constituent un contingent supérieur à celui des Syriens. Cela se fait en deux étapes.

La première consiste à minimiser la cruauté de la dictature locale. Pour ce faire on décrie à Berne les rapports des ONG et des Nations unies. Car l’ONU a mandaté une commission d’enquête sur les violations des droits de l’homme commises par le régime depuis l’indépendance. Cette commission a conclu que le pouvoir érythréen a, depuis vingt-cinq ans, commis des « crimes contre l’humanité », tout en recommandant la saisie de la Cour pénale internationale par le Conseil de sécurité des Nations unies. En Erythrée, la moindre critique peut envoyer un dissident indéfiniment au ¬bagne, où jeunes et vieux sont conscrits dans un « service national » à durée indéterminée, que la commission a qualifié de « forme moderne d’esclavage ». Les conscrits sont rassemblés au camp militaire de Sawa décrit comme un enfer : les filles recrutées de force y subissent des sévices sexuels. Mais à Berne ces rapports font sourire. On se persuade qu’ils sont l’œuvre de gauchistes, des rêveurs impénitents, de tiers-mondistes attardés. Je puis tout de même y ajouter un témoignage personnel. Dans un camp de réfugiés en Sicile, je me suis entretenu avec un déserteur érythréen. En tant que soldat recruté de force, il était posté à la frontière, afin d’abattre ceux de ses concitoyens qui tentaient de s’échapper. Tout comme à l’époque de l’Allemagne de l’Est, le but de cette armée n’est pas protéger le territoire, mais d’y confiner une masse d’esclaves.

La seconde étape bernoise consistera à entreprendre une action diplomatique, voire une aide au développement (dans la mesure où le destinataire l’accepte). Au terme de cette manifestation de bonne volonté, la Suisse pourra proclamer qu’elle a fait tout son devoir, que la situation en Erythrée évolue favorablement et que les déserteurs érythréens doivent être refoulés. Ce qu’il fallait démontrer. Une fois de plus la fiction aura remplacé la réalité.

Penser le réel comme s’il existait

 

 

La politique est l’art difficile de falsifier les données de problèmes insolubles pour leurs proposer des solutions imaginaires et  donc inopérantes. Cela se fait en en élaborant un monde fantaisiste pour dissimuler les dures contraintes de la réalité.

 Dans le débat sur le retrait du nucléaire, partisans et adversaire de l’initiative verte tombent d’accord sur l’essentiel, à savoir qu’il faut ne plus construire de centrales neuves et fermer celles qui existent : ils ne diffèrent que sur le calendrier, mais intégralement, comme s’ils parlaient de deux réalités différentes. Pour les opposants à l’initiative, il ne faut pas une sortie hâtive. Ils doivent donc démontrer d’abord qu’il n’y a pas de raison de se précipiter et ensuite qu’il y a une raison de temporiser.

Il n’y aurait aucune raison de se précipiter. Alors que les adversaires du nucléaire insistent sur le danger perpétuel que des centrales en fonctionnement font peser sur une région aussi densément peuplée que le Plateau, les partisans se reposent mollement sur l’ISFN, l’instance chargée de la sécurité nucléaire. Celle-ci, dotée d’une compétence, d’une perspicacité et d’une autonomie, toutes les trois surnaturelles, garantit la « Sécurité », au point qu’on ne doive plus s’en préoccuper. Or les catastrophes de Tchernobyl, de Three Miles Island et de Fukushima ont été chaque fois causées et aggravées par des erreurs humaines. Par définition, celles-ci sont imprévisibles. Comme on ne peut s’en prémunir, on reste, malgré les meilleurs experts de sécurité, toujours à la merci d’une défaillance du personnel. Il n’y a pas de sécurité absolue, sauf dans le discours politique qui en a rudement besoin.

Il y aurait une raison de temporiser, apparemment technique. On évoque le spectre d’une pénurie d’électricité si on arrêtait en 2017 les centrales concernées par l’initiative des verts. Selon un argument repris en boucle, « notre infrastructure de réseau n’est pas adaptée pour absorber une hausse importante de nos importations ». Cette argutie ne tient pas compte de la véritable réalité technique. En 2015, la Suisse a consommé 62626 GWh, tout en important 42306 GWh et en exportant 43341 GWh. Au cœur de l’Europe, nous disposons de barrages qui peuvent exporter de l’énergie de pointe à un prix élevé et importer de l’énergie de base bon marché, fournie par le reste de l’Europe, nucléaire et charbon. Nous sommes donc la plaque tournante,  importateur et exportateur pour près de 70% de notre consommation selon les heures de la journée, suivant une routine technique classique. Dès lors, notre réseau est parfaitement capable d’absorber les importations résultant de la fermeture en 2017 d’un tiers de notre production nucléaire, soit 15% de notre consommation totale d’électricité.  D’autant plus que les centrales actuellement fermées pour cause d’entretien représentent la moitié de la production du nucléaire. Le discours politique invente ainsi un problème tout à fait  imaginaire.

On admirera la séquence : d’abord nier l’existence d’un problème réel, l’éventualité inéluctable d’une catastrophe majeure, pour certifier qu’il n’y a aucun empêchement à la poursuite du nucléaire ; ensuite inventer un problème imaginaire, l’incapacité d’acheminer du courant de l’étranger, pour prouver que la poursuite du nucléaire est inévitable. Dissimuler la vraie vérité pour en inventerune fausse. La réalité concrète est remplacée par une pseudo évidence, complètement inventée pour les besoins de la cause. Dans le discours du pouvoir, le réel se dissout comme un morceau de sucre dans le café bouillant.

Tout cela pour ne pas avouer la véritable raison, purement financière, de la survie du nucléaire. S’ils sont contraints à fermer leurs centrales, les exploitants menacent de réclamer des dommages substantiels, à charge naturellement des finances publiques, donc des citoyens. Par ailleurs, ils ne disposent pas des capitaux nécessaires pour le démantèlement. Enfin nul n’a prévu les coûts de gestion des déchets pendant des millénaires. Et bien entendu il n’y a pas d’assurance pour couvrir la responsabilité des dégâts d’une catastrophe. En résumé, l’aventure nucléaire se termine par une gigantesque banqueroute dont il faut dissimuler la réalité imminente par l’émission de brouillards artificiels. Cela s’appelle l’exercice du pouvoir.

Réalité technique et fiction diplomatique

Le réchauffement climatique, si longtemps nié par les instances économiques est maintenant une telle réalité qu’il n’est plus possible de le nier. Une conférence va donc se tenir à Marrakech en novembre pour essayer de concrétiser les efforts communs des pays présents. Poursuivi par la vindicte de la Chine communiste, Taïwan ne sera représenté que par un observateur. Or, il s’agit d’un problème qui est indiscutablement planétaire. Nous avons déréglé la composition de l’atmosphère depuis deux siècles et le résultat est fatal : personne ne peut prédire ce qui va se passer dans les décennies à venir.

Face à cette urgence vitale, il serait élémentaire d’enterrer de vieilles querelles et de résoudre pratiquement un problème qui est strictement technique. Mais le poids de la Chine, même si elle est le pollueur majeur de la planète, paralyse les Etats occidentaux, y compris la Suisse, une des premières à reconnaître le gouvernement de la Chine communiste. Dès lors elle n’a pas de représentation diplomatique à Taïwan et réciproquement ce dernier pays n’est pas représenté officiellement à Berne. C’est à prendre ou à laisser : la Chine ne supporte pas l’existence diplomatique de cette province qu’elle revendique. Néanmoins, elle est le premier partenaire commercial d’un pays dont elle postule l’inexistence. En sens inverse Taïwan est aujourd'hui le premier investisseur en Chine. Le total de ses investissements en Chine ont dépassé les 400 milliards de dollars américains. Il n’y a donc aucune relation entre la réalité économique et la fiction diplomatique : ce sont deux plans disjoints. On peut faire de fructueuses affaires avec un pays dont on affirme qu'il n'existe pas. C'est du reste ce que fait la Suisse aussi.

Or, Taïwan dispose du statut d’observateur ou de membre associé auprès de 20 organisations intergouvernementales et structures affiliées, telles que l' OMC et de l'APEC, l'OCDE, la Banque  américaine de développement ou encore la BERD. Taïwan entretient des relations diplomatiques avec seulement 22 États des 193 États membres des Nations unies. Cependant, en pratique, la plupart des pays ont des relations diplomatiques officieuses avec Taïwan par le biais de bureaux de représentation faisant office de consulats.

En revanche le CNUCC, acronyme imprononçable qui désigne la convention cadre des Nations unies sur les changements climatique, ne veut pas de Taïwan. Dans le désordre du monde, cela peut paraitre un détail. Mais c’est un exemple frappant parmi d’autres de déni de la réalité au niveau mondial. Pour la sauvegarde de la planète, la hargne antérieure de la Chine et la pusillanimité de la Suisse devaient être rangées au magasin des accessoires diplomatiques désuets. Sinon on finira par ne plus prendre la diplomatie au sérieux.

Les réacteurs fous

La stratégie du Conseil fédéral pour sortir du nucléaire se fonde sur un principe tacite : la Suisse doit produire toute son électricité sur son territoire. Certes, elle peut vendre de l’énergie de pointe produite par ses barrages et au contraire acheter de l’énergie de base produite par des centrales thermiques étrangères, nucléaires ou à gaz. Mais le bilan des kWh doit être équilibré. Ce serait une question de sécurité. On ne pourrait dépendre de l’étranger pour une ressource aussi essentielle. Cela ne se fait pas, ce serait en quelque sorte inconvenant. On n’a donc le droit d’arrêter les réacteurs nucléaires qu’après avoir créé sur le sol national des ressources équivalentes en énergies renouvelables. Et comme ce ne sera pas demain la veille, on ne peut fixer d’échéance rapprochée à cette extinction.

Ce principe impératif néglige le fait que nous dépendons de l’étranger pour tout le pétrole et le gaz et que nous nous accommodons de cet état de fait sans même y penser. En effet, il va de soi qu’il est strictement impossible de produire sur le territoire national tout ce dont le pays a besoin. Et même si c’était matériellement possible, il est souvent plus rentable de l’acheter. C’est la définition même du commerce international, glorifié par Adam Smith en bonne économie mercantile. Ainsi, nous importons la moitié de notre nourriture, bien plus indispensable pour notre survie que l’électricité. Nous achetons à l’étranger la plus grosse partie de notre textile. Nous ne fabriquons pas de voitures. Cela va aussi de soi.

Et donc, sous le beau principe de la production nationale d’électricité se trouve tout autre chose, la dissimulation d’une nécessité financière : arrivé en fin de vie, les réacteurs devront être démantelés à grands frais. Si les exploitants n'ont pas amassé un capital suffisant, cela se fera au détriment des contribuables. Et donc ceux-ci doivent constituer en tant que consommateurs cecapital au bénéfice d’exploitants privés. Or,la Suisse pourrait importer le courant qui  manquerait à l’arrêt de ces centrales. Il reviendrait bien moins cher, trois ou quatre fois moins que payé pour l’instant aux producteurs nationaux. Ceux qui surpayent ce sont les consommateurs privés, car bien entendu les entreprises ont accès libre au marché international. Mais nous, les citoyens, nous  continuons à payer notre courant trop cher pour accroître la cagnotte du démantèlement. Ne parlons même pas de la gestion des déchets pendant des millénaires. Cette facture sera refilée à nos lointains descendants, qui nous maudirons d’avoir été aussi imprévoyants que de construire des réacteurs dont nous n'avons pas prévu comment gérer les déchets.

Dès lors, dans cette impasse financière où des intérêts privés ont enfermé le peuple suisse, ne faudrait-il pas tout de même poursuivre l’exploitation de ces centrales aussi longtemps que possible ? La réponse serait positive si cette exploitation n’était pas sans un risque grandissant. Il y a des fissures dans la cuve de Beznau mais, selon les experts, la sécurité n’en est pas affectée. Comme si on avait pu se passer d’une cuve étanche dès le début, voire se passer totalement de cuve. Quel que soit l’état d’un réacteur, le rôle des experts est de réassurer et ils le font avec un aplomb incroyable.

Quel est le risque réel ? On laisse croire qu’une catastrophe serait certes insupportable, mais qu’elle a tellement peu de chance de se produire que c’est comme si elle n’avait pas de substance : ce serait une hypothèse totalement improbable. Ce faisant, on mélange astucieusement probabilité et gravité. Or la probabilité n’est pas faible : sur cinq cent réacteurs en fonctionnement, cinq cœurs ont fondu : dès lors la probabilité est de 1% par réacteur et de 5% pour le parc suisse. La gravité se mesure par un cercle de trente kilomètres de rayon, soit pour Mühleberg une zone incluant Berne, Neuchâtel, Fribourg et Berne. L’évaluation des dégâts et des pertes fluctue selon les sources entre 20 et 2 000 milliards, c’est-à-dire que l’on n’en sait rien et que l’on s’en moque. Cela ne se produirait pas car les ingénieurs suisses sont les meilleurs du monde :  par leur constitution héréditaire, leur éducation et leur formation, ils sont incapables de commettre une erreur humaine, comme le firent des Russes, des Américains ou des Japonais, ces peuplades arriérées !

Dans un pays aussi densément peuplé que la Suisse, la seule démarche technique raisonnable consiste donc à arrêter tous les réacteurs tout de suite. C’est impossible en termes financiers. Cela signifie que nous avons été attiré dans une arnaque dont il serait utile de définir quels ont été les arnaqueurs parmi les intérêts privés et quels ont été les gouvernants arnaqués par naïveté et ignorance. Il y a matière à une commission d’historien et à quelques procès en responsabilité civile.

Une mangeoire à la gare

Lorsque le buffet de la gare de Lausanne fut fermé, les habitués ont redouté qu’il ne rouvre plus. Cette crainte est maintenant confirmée : le buffet sera remplacé par une succursale d’un groupe spécialisé dans les repas végétariens. Un tel établissement fonctionne déjà dans la gare de Berne et tout ce que l’on peut en dire, c’est qu’il est possible d’y apaiser sa faim. Mais c’est tout. C’est une mangeoire pour combler le vide de l’estomac, ce n’est pas un restaurant.

Le buffet de la gare de Lausanne était un des attraits du lieu. On y dispensait une cuisine de brasserie, simple, appétissante, traditionnelle, conforme au goût local, arrosée de vins du pays : des filets de perche au papet vaudois en passant par la choucroute et le coq au vin. Tout cela disparaîtra et ne sera plus accessible. Il y a certainement plus d’argent à gagner par un buffet de salades et de petites graines que par une cuisine élaborée, qui requiert un personnel qualifié. Certes on a échappé à la mangeoire Mac Do, qui eut été un véritable blasphème en ce lieu, mais le résultat n’est pas meilleur.

Une ville n’est pas l’entassement dans des cages à lapin d’individus interchangeables qui consomment des nourritures standardisées, débitées par des grandes surfaces et de la restauration rapide. C’est un lieu d’agapes conviviales, consommées tranquillement dans un environnement agréable, bénéficiant d’une cuisine savoureuse et d’un service amical. Certes il subsistera en ville des bistrots sympathiques, mais c’était un privilège de Lausanne de présenter un lieu convivial dès le quai de la gare. Cela rappelait le bon vieux temps où du monde entier des touristes venaient en Suisse romande parce que le temps s’y était arrêté et qu’il y faisait tellement bon vivre.

La culture n’est une abstraction, gérée par le snobisme et la spéculation : des spectacles abscons, des peintures non figuratives, des musiques ennuyeuses, des nourritures chichiteuses. C’est une façon de vivre au sens plein du terme, de s’habiller, de se loger, de se nourrir, d’aimer, de se distraire, conformément à des traditions. En un mot c’est cultiver son plaisir en toutes choses. Une mangeoire végétarienne en est l’antithèse. On s’y abstient de viande et de poisson par suite d’un amour affecté pour les animaux, on se prive pour avoir bonne conscience, on se refuse au bien-être, on patauge dans le mal-être, on s’y vautre, on s’y accoutume.

Pour retrouver le plaisir, il ne reste plus alors que la violence, la biture vite fait, la pornographie et la drogue.

Langues à l’encan

Pour fonder un Etat, il ne suffit pas d’un territoire et d’une administration. Encore faut-il une communauté de vue. Elle se fonde le plus souvent sur deux facteurs culturels : la langue et la religion. La France a lentement éliminé le breton, le flamand, le catalan, le basque et l’alsacien par un enseignement obligatoire, gratuit et unifié ; elle s’est plus prestement encore débarrassée des protestants et des juifs avant qu’elle ne couve l’envie de brimer les musulmans. La Suisse a suivi un chemin différent : elle a maintenu quatre langues et a laissé aux cantons, les seuls Etats, le soin des religions et celui de l’enseignement obligatoire. Tout fut donc pour le mieux en évitant guerres de religion et guerres linguistiques.

L’économie moderne suppose la mobilité des travailleurs. Ceux-ci déménagent avec leurs familles. Les enfants passent d’un système cantonal d’enseignement à un autre, non sans dommage : un élève uranais passant à Bâle cumule un retard de quatre ans en français. La Confédération a donc commencé à se mêler d’harmonisation en évitant soigneusement d’envisager une unification quelconque : cela porte le joli nom d’HarmoS, un concordat aussi souple que possible.

Grave question : quand enseigner le français en Suisse alémanique ? Ou bien même enseigner ou non le français ? Pire : quand apprendre l’allemand à des enfants patoisants ? Le politique est tenté de donner priorité à la cohésion nationale, à imposer le français dès la 5e et l’allemand dès la première. Or, la motivation d’un élève n’est pas la cohésion nationale, mais bien l’usage utilitaire de la langue. Dès lors pour un enfant alémanique, l’allemand est un fardeau, l’anglais une nécessité et le français la cerise sur le gâteau. En contemplant une carte de Suisse, on le comprend tout de suite : les enfants romands ont un intérêt professionnel évident à apprendre l’allemand ; les Tessinois, d’être vraiment bilingue italien-allemand ; les cantons alémaniques le long de la frontière linguistique d’enseigner le français le plus tôt possible ; la Suisse centrale de s’en désintéresser ; et les Grisons empêtrés dans trois langues cantonales de l’oublier tout à fait.

Cela c’est la réalité. Mais la politique est toujours plus ou moins fondée sur son déni. Et donc on s’efforce de mettre en avant la cohésion nationale. Dans la plupart des pays elle repose sur une seule langue ; en Suisse sur le bilinguisme allemand-français. Mais quel est l’intérêt du premier concerné, c’est-à-dire l’élève qui devra gagner sa vie plus tard et qui souhaite voyager dans le vaste monde ? Pour une fraction non négligeable des enfants, apprendre et maîtriser la langue maternelle est déjà une charge trop lourde : ce sont les illettrés ; leur imposer une seconde langue est déjà trop. Pour les autres, l’anglais est une nécessité impérieuse sauf à ne pouvoir sortir de leur aire linguistique et à voyager en groupe accompagné, comme des Japonais. D’ailleurs l’apprentissage d’une langue étrangère à l’école est une entreprise difficile, peu efficace, médiocre si on la compare à une immersion par un séjour linguistique. Quant à enseigner deux langues étrangères dès l’école primaire, cela revient à laisser en route les moins doués et à se berner d’une illusion fatale : qui trop embrasse, mal étreint !

Le fédéralisme est la seule possibilité ouverte pour un pays multiculturel, mais il faut en accepter les limites. On ne peut pas supposer que le bilinguisme généralisé soit une solution à portée de main, sauf pour les enfants qui ont la chance de s’imprégner à la fois du français et de l’allemand parce qu’ils ont voyagé d’un canton à l’autre, parce qu’ils ont des parents bilingues, parce qu’ils sont particulièrement doués pour les langues. Ce n’est pas un hasard que les Fribougeois réussissent si bien en politique fédérale : ils bénéficient d’un canton vraiment bilingue.

Il suffit de vivre au parlement fédéral pour se rendre compte que beaucoup d’Alémaniques ne comprennent pratiquement pas le français, que les Tessinois sont souvent trilingues et les Romands plutôt bilingues : ce qui fonde la cohésion nationale, ce n’est pas l’uniformité mais la diversité, la contrainte théorique mais la liberté pratique. On peut tracer tous les plans d’étude que l’on veut, on ne changera rien à cette réalité : si un enfant n’est pas intéressé par une langue, il ne l’apprendra pas, d’autant plus qu’il sentira que le maître est du même avis.

Valeurs à vendre

En Pologne, en Slovaquie et en Hongrie, des majorités conservatrices invoquent les « valeurs nationales » pour se distancer de l’UE. En France, Marine Le Pen sera au deuxième tour des élections présidentielles. En Italie le mouvement 5 étoiles menace le gouvernement Renzi. Les extrêmes droites néerlandaise, belge et même allemande mènent le même combat. Et Trump risque de devenir l’homme le plus puissant de la planète. Ne nous plaignons donc pas trop de l’UDC : il y a pire.

Les partis populistes, nationalistes, pour ne pas dire fascistes, n’ont qu’un seul thème, obsessionnel : l’ennemi, c’est l’étranger, proche ou lointain ; le pire étant l’Islam, qui affronte nos valeurs « judéo-chrétiennes ». Quand un régime ne peut résoudre un problème lancinant, il reste la possibilité de désigner un bouc émissaire. Soit dit en passant, la référence au judaïsme est particulièrement folklorique pour des partis, qui sont des héritiers lointains (mais inavoués) de leurs précurseurs du siècle précédent, massacrant six millions de juifs.

Or que sont ces racines ? Les trois religions monothéistes partagent une même singularité : le respect de l’étranger. Loin d’être des religions tribales, elles ont une vocation universelle. En témoigne, parmi beaucoup d’autres, une citation de Deutéronome 24.17 : « tu ne tricheras pas avec le droit d’un étranger ». L’évangile de Matthieu 25.41 insiste : « allez loin de moi maudits, car j’étais un étranger et vous ne m’avez pas recueilli ». Et le Coran 49.13 ajoute : « nous avons fait de vous des nations et des tribus pour que vous vous entre-connaissiez. »

Certains Européens croient donc de bonne foi que l’invasion menace leurs « valeurs », alors qu’ils défendent celles-ci en les niant et surtout en les ignorant, car ils instrumentalisent une religion qu’ils ne connaissent, ni ne pratiquent. Les racines judéo-chrétiennes ne se distinguent pas de celles de l’Islam sur ce point crucial, parce que les trois religions abrahamiques se sont engendrées successivement dans le même terreau moyen-oriental. En prenant un recul suffisant, on peut considérer que ce sont trois variantes de la même religion, distinctes seulement par leurs origines chronologiques.

Nous sommes ici au cœur de la contradiction de notre société occidentale. Et cette contradiction n’est pas soluble dans l’avenir. Par centaines de milliers, par millions des peuples africains ne trouvent pas d’autre issue que l’émigration vers l’Europe prospère, pacifique, calme. Et l’exemple d’Angela Merkel démontre qu’il est impossible de les accueillir : si on le risque, on accroit l’audience des partis populistes ; si on insiste, ils finiront par conquérir le pouvoir pour ne plus jamais le lâcher. En défendant une valeur fondatrice de notre civilisation et même de toute civilisation, on risque de la détruire. Quelle est la juste mesure? Quelle est la bonne approche?

« On ne conserve pas des valeurs. On les transcende sans cesse. Sinon, elles meurent d'elles-mêmes. »

Les charmes empoisonnés du développement non durable

Le développement scientifique, technique et économique a permis d’élever le niveau de vie de la population de certains pays dans des proportions incroyables. Avant la révolution industrielle du XVIIIe siècle, un travailleur dépensait 70% de son revenu rien que pour se nourrir, mal vêtu, mal logé, non soigné, ni instruit. Aujourd’hui l’alimentation, riche et variée pèse moins de 10% du budget familial. L’espérance de vie est passée de 30 à 80 ans. Telle est la réussite mais tel est aussi le risque. Cela va-t-il continuer ou s’arrêter, suite à des grandes crises de l’environnement, des pénuries de matières premières, des conflits armés pour les ressources devenues rares, des invasions massives de réfugiés écologiques ou économiques? La réponse dépend de notre génération.

Aurons-nous la sagesse de limiter notre consommation, de récupérer les énergies renouvelables, de recycler nos déchets, de partager avec les nations défavorisées ? Il est évidemment impossible de refuser l’initiative constitutionnelle pour une économie durable, sans admettre que l’on est partisan d’une économie périssable. C’est cependant ce que le Conseil fédéral et le parlement viennent de proposer : prolonger un système économique précaire aussi longtemps qu’il ne s’écroule pas suite à ses contradictions.

Le but de l’initiative lui-même n’est pas combattu par le Conseil fédéral. Comment pourrait-on refuser un texte prescrivant aux pouvoirs publics d’encourager la préservation des ressources non renouvelables ? Ce qui ne se renouvelle pas finit par s’épuiser, par définition. Comment repousser des mesures législatives, fiscales, incitatives pour atteindre ce but ? C’est tout simplement impossible dans le contexte actuel de dégradation visible de la planète.

Cependant le terme fixé, 2050, est alors considéré comme irréaliste par l’appareil politique suisse. L’économie durable oui ! Mais le plus tard possible ! L’économie est déjà en trop mauvais état pour qu’on ne lui demande pas en plus de se réformer pour éviter son effondrement. Attendons l’effondrement. On sera bien forcé d’agir. Mais tant qu’on ne l’est pas, on peut tergiverser.

Depuis plus d’un quart de siècle, les instances politiques savent qu’il faudra un jour, tôt ou tard, cesser de produire du CO2 sauf à rendre la planète inhabitable pour sa population actuelle. En fait, malgré les beaux discours, on n’a rien fait. L’année passée la consommation planétaire de pétrole, au lieu de diminuer, a encore augmenté de 2%.

Si on ne se fixe pas une échéance, on la reportera sans cesse et on lèguera aux générations à venir un défi de plus en plus insurmontable. Notre confort d’aujourd’hui se paiera par leurs pénuries de demain. La Suisse n’est manifestement pas le pays le plus pollueur, mais son niveau de vie élevé repose sur l’importation de produits qui ont pollué ailleurs. C’est notre devoir de nation développée et civilisée de prendre nos responsabilités en appuyant massivement cette initiative.