L’absence de plancton mène à désertification de l’Atlantique et à l’arrêt de la fixation de carbone

Une expédition de science citoyenne donne des nouvelles alarmantes sur l’état du plancton de l’Atlantique.  Le mot plancton désigne les microscopiques habitants des eaux, microorganismes, végétaux ou animaux qui flottent dans les eaux des océans et servent d’aliment à des nombreux habitants des océans. 

Plusieurs voiliers ont traversé l’Atlantique du détroit du Gibraltar au Venezuela.  Ils emportaient des  volontaires qui ont collecté des échantillons d’eau en surface (3500 échantillons).  Ils espéraient trouver du plancton, les microscopiques végétaux et animaux qui flottent dans les eaux des océans,  et constituent la base de la chaîne alimentaire.  Au début, ils n’en n’ont pas trouvé du tout. Ils ont vu de nombreux des petits agrégats, qui pourraient résulter de la combustion de carbone.  

Ils ont ensuite prélevé des volumes d’eau plus importants et ont trouvé très peu de planton, environ un être vivant  dans 50 litres d’eau. 

Par contre les grumeaux résultant de la combustion de carbone étaient très nombreux, de 100 à 1000 particules de plus de 20 microns par litre d’eau, et il pourrait bien y avoir des milliers de particules plus petites. De nombreux navires marchands parcourent ce même trajet, alors ces aggrégats seraient des résidus  de leur combustible.   Ces déchets sont toxiques et pourraient nuire au plancton.  Les microparticules de plastique polluent aussi les océans. 

Sur le parcours de Grenada à Curacao, l’eau contenait plus de plancton et moins d’agrégats. 

D’autre part, les voiliers ont buté dans d’immenses tapis d’algues sargasses, qui se développement énormément récemment. Selon l’étude du plancton GOES, la cause en est la pollution et de la déforestation en Amérique du Sud et en Afrique. Les algues doublent rapidement, et consument les éléments nutritifs nécessaires aux autres habitants de l’océan, leur décomposition pollue les plages et les eaux des Caraïbes.

Organisme planctonique vu au microscope

Le plancton pourrait quitter ces zones de l’Atlantique à cause du réchauffement climatique, qui le ferait migrer vers des zones plus tempérées, et il ne serait pas remplacé. Le CO2 provoque simultanément l’acidification des océans qui perturbe la formation des coquilles de calcite de nombreux organismes.  L’expédition GOES évoque aussi la compétition des sargasses, mais surtout la pollution due aux navires marchands.

J’ai l’impression que le plancton disparaît aussi dans les eaux chinoises,  ce qui suggère que la pollution en est la cause. 

Le plancton, cyanobactéries et algues microscopiques, fixe une partie du carbone des océans. Ces organismes prolifèrent surtout dans les premiers mètres, éclairés par le soleil. Dans les gouttes d’eau de l’océan cohabitent les algues, le zooplancton, les bactéries et les champignons. Le plancton est ensuite ingéré par les animaux marins et forme la base de la chaîne alimentaire.  Si le plancton disparaît, les grandes algues pourraient survivre, mais il n’y aura quasiment plus aucun poisson. 

Le rapport du GIEC sur les océans signalait justement qu’il y a moins de poissons dans les océans, et particulièrement dans l’Atlantique Nord.

D’autre part, le plancton fixe le carbone. Il y a quelques années, il était admis qu’un tiers du carbone émis par l’Homme est fixé par les plantes terrestres, un tiers par les océans, et un tiers s’ajoute à l’atmosphère. Actuellement, les sécheresses mettent à mal la fixation de carbone des écosystèmes terrestres,  l’Amazonie est maintenant si perturbée que sa productivité diminue et qu’elle devient une source d’émission de carbone.  Si la fixation du carbone du plancton des océans diminue aussi, le réchauffement s’accélérera beaucoup, ce qui menacerait le vie sur Terre.

L’étude GOES  pourrait suggérer que la pollution due aux  navires marchands est responsable de la désertification de l’Atlantique Nord. Dans ce cas, nous pouvons inverser ce processus en construisant des navires marchands solaires et éoliens.  Nous pouvons aussi éviter le traffic absurde d’objets jetables entre les continents.   Les effets dus à la pollution et à la déforestation peuvent être inversés par des mesures adéquates.

Résumé sur le carbone dans les océans: https://www.lumni.fr/article/le-gaz-carbonique-l-oceahttps://blogs.letemps.ch/dorota-retelska/2021/06/13/les-microbes-fixent-le-carbone-dans-locean/n-et-le-climat

Exemple d’interaction de de carbone dans les océans: https://blogs.letemps.ch/dorota-retelska/2021/06/13/les-microbes-fixent-le-carbone-dans-locean/

 

Dorota Retelska

Dorota Retelska, décrypte les nouvelles du climat. Docteure ès Sciences de l’UNIL, auteure d’Antarctique-Ouest dans le Vide, elle alerte sur les dangers du climat depuis plusieurs années. Elle est active dans plusieurs organisations de défense du climat, entre autres l’Association Climat Genève, Greenpeace, TACA, et le Collectif Climat 2020.

11 réponses à “L’absence de plancton mène à désertification de l’Atlantique et à l’arrêt de la fixation de carbone

  1. bonjour Dorota,
    je suis abonné à votre newsletter. Vos articles me navrent et me rendent tristes sur le sort de la planète.
    c’est pour cela aussi que depuis des années, je me bats en travaillant artistiquement l’impacte de l’Homme dans son environnement. Mais mon art est tellement singulier et personnel qu’il m’est difficile de le montrer. les lieux d’arts préfèrent montrer des œuvres colorées ou très commerciales.

    je pense sincèrement que l’art peut apporter beaucoup et surtout toucher le maximum de personnes car il fait réfléchir et se poser des questions.

    mon travail est en quelque sorte le pied du mur où se trouve le visiteur. je le mets littéralement devant le pied du mur en lui montrant la pire chose qui pourrait arriver : la fin de l’Humanité.

    si mon travail vous intéresse et si vous désirez me contacter, je mettrais à votre disposition mon art et ma personne.

    https://www.danielmourre.com

    très cordialement
    Daniel MOURRE

  2. Pour apporter une note optimiste, n’est il pas envisageale que des variétés de plancton puissent adapter à leur nouvel environnement et que des nouvelles apparaissent ?
    Mais ça peut prendre quelque temps même si la nature est résilente.

  3. Votre article reflète-t-il vraiment l’état de la connaissance sur la disparition des planctons? Comment est-il possible que l’on n’en sache pas plus sur cette question absolument vitale?

    1. C’est une nouvelle scientifique récente. J’espère moi-même qu’il y a une erreur dans leurs mesures, qui peuvent être vérifiées par images satellites etc, mais c’est très inquiétant.

  4. Merci Dorothea, pour cet très interessant article.
    C’est juste déprimant de voir le saccage de la planète dont nous sommes tous responsables mais
    nous consommons par exemple, parce que on nous fournit au super-marché la marchandise emballée dans du plastic et nous n’avons pas toujours la possibilité ou le temps de faire nos achats différemment…
    et c’est pour tous les domaines la même chose. On nous offre, nous consommons mais à la source,
    les producteurs ne sont pas canalisés et/ou disciplinés par nos autorités… c’est là le problème
    le manque de vision et de courage de nos autorités qui pensent plus à leur réélection qu’à l’avenir
    de la planète…

    1. Tout à fait d‘accord avec votre commentaire. Aujourd‘hui on part du principe que l‘offre DOIT créer la demande. Même nos autorités vont dans ce sens sous couvert de progrès technologique. Je prend juste un exemple: la suppression de la transmission des émissions radio par OUC. Combien d‘appareils en parfait état de marche vont être jeté pour être remplacés par des récepteurs DAB?

      1. Bonne question! Et cette “avancée” technologique était-elle vraiment nécessaire
        ou seulement profitable à certaines entreprises ? idem pour la 5 G, mais je ne voudrais
        surtout pas aborder ce sujet très clivant…

      2. “on part du principe que l‘offre DOIT créer la demande” je pense que les politiques veulent avant tout “créer de la valeur” en favorisant le commerce. J’imagine que ce principe est établi… depuis la nuit des temps (on peut imaginer les échanges entre tribus, qui contribuaient à améliorer les connaissances, les outils et donc la survie ou le confort). Selon les libéraux, c’est en effet l’offre, donc les entreprises, qui font tourner l’économie. Le mécanisme est assez simple : les scientifiques font des découvertes (dans les université), les commerçants imaginent (dans les start-ups) comment transformer ces découvertes en technologie qui seront achetées par le peuple, parce qu’elles offrent un gain par rapport au techno précédentes, parce qu’elles répondent à un besoin ou parce qu’elles créent un plaisir. Le gros problème est que le coût des externalités (pollution, GES) n’est jamais pris en compte par les entreprises, notamment pour ce qui n’est pas chiffrable. Quel est le prix de la disparition du plancton ? d’un réchauffement de 5° du climat ? De la mort d’une rivière ? (amoureux de ces écosystèmes, je les ai vu se faire détruire par l’industrie et l’agriculture, voire le tourisme, depuis les années 70). Il y a deux réponses à mon avis à cela : la réponse libérale serait de faire payer le prix à l’entreprise, mais le prix “juste” n’a de sens que légal, donc ramène à la démocratie : le peuple, qui préfère se faire plaisir plutôt que protéger son environnement, élit des politiques qui leur font plaisir plutôt que protéger l’environnement, donc qui font des lois qui protègent toujours les entreprises plutôt que l’environnement. L’autre réponse, morale, consiste à décréter ce qui est bon ou bien pour le peuple et ce qui est mal : c’est très difficile à mettre en place et à faire accepter (la liberté individuelle est sacrée). Pour l’individu moyen, qui préfère son confort au plancton marin, lui imposer un comportement est du totalitarisme. Il déteste se faire imposer ce qui est “bien” par une élite (en générale éduquée, riche etc…). C’est donc très mal perçu et difficile à mettre en place (pourtant Macron avait testé des “conventions citoyennes” mais a torpillé le processus, il aurait de toute façon été contesté par le peuple qui se serait senti trahi par l’élite et non représenté). Je ne sais pas comment organiser ce consensus sur ce qui serait le “bien”, donc ce sur quoi il faut construire les lois, qui favoriseraient la demande du peuple (en toute conscience, en état de sobriété) plutôt l’offre des commerçants, souvent addictives et tournée vers le plaisir à court terme et le plaisir (l’ébriété). C’est la difficulté des politiques, probablement conscients du désastre à long terme mais incapable de canaliser le peuple à court terme. Je me demande comment une personne en 1980 (ou 1970) réagirait si on lui disait en 1980 ce que serait le climat d’aujourd’hui. La vidéo Tazzieff/Cousteau/journaliste de 1979 https://www.youtube.com/watch?v=tPjHLRYZiHM est très révélatrice sur cette question. Mais je ne suis pas sûr que si on laissait le choix à cette même personne de 1980 entre profiter de 50 ans de progrès techno, de plaisirs, de smartphone etc et savoir se contrôle pour lutter contre le réchauffement, cette même personne réagirait en faveur du climat. Je ne vois pas comment l’humanité, à part les 20% conscient, vertueux et consciencieux, pourrait être capable de se priver pour laisser place au plancton. C’est très triste, mais ça parait difficile. D’où l’importance d’informer comme Dorotha, de convaincre toujours plus de monde autour de nous, de sensibiliser. Mais je désespère de convaincre la majorité qu’il vaut mieux vivre lentement dans le respect de la vie qui nous entoure plutôt que de se faire plaisir toujours plus vite et plus fort… Je ne me sens pas représentatif de la majorité. Hélas…

        1. Merci pour cette très belle analyse; j’adhère complètement ; j’appartiens à cette génération qui aurait pu répondre à votre question en 1980… selon ma perception, tout est une question de prise de conscience beaucoup basée sur l’expérience de vie… mais si on avait su m’expliquer de façon concrète à l’époque ,
          je pense que j’aurai accepté malgré les sacrifices de confort et consommation qui en fait n’en sont pas. Finalement tout est une question de “comment les choses sont présentées” et le système à l’époque ne voulait pas – sur ce sujet – présenter les choses comme elles auraient dû l’être, vous relever d’ailleurs ce fait très justement. Ne perdez pas courage…

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