Inciter au lieu d’imposer

 

Le récent rejet de deux objets sur fond de problématique environnementale montre que les Suisses ne sont pas disposés à accepter des normes contraignantes. En réalité, ils ne demandent qu’à être encouragés sur la voie de la transition énergétique.

La commission de l’environnement du Conseil des États a relancé hier la révision de la loi sur le CO2, rejetée par le Conseil national à mi-décembre. Au terme d’un premier examen du projet, elle a soutenu la réduction des émissions de gaz à effet de serre de 50% d’ici à 2030 par rapport à 1990, comme le demande le Conseil fédéral. Au moins 60% de cet effort doit être réalisé en Suisse. Les observateurs relèvent que les récentes manifestations de jeunes en faveur de mesures climatiques pourraient avoir joué un rôle dans la reprise de ce projet.

Or, le week-end dernier, le peuple et les cantons ont rejeté l’initiative «Stop au mitage» par 63,7% des voix. Dans le même temps, les citoyens du canton de Berne ont refusé, certes de justesse, une loi destinée à lutter contre le réchauffement climatique. En plein questionnement sur l’avenir de la planète, ces résultats interpellent. D’autant plus que ces échecs devant les urnes surviennent eux aussi peu de temps après les manifestations de jeunes pour le climat. On peut donc en conclure que ces mouvements, pourtant très médiatisés, n’ont pas eu d’influence sur ces scrutins. A mon avis, ils montrent surtout que les Suisses, s’ils sont majoritairement acquis à la protection de l’environnement, ne sont pas prêts à se soumettre à des normes contraignantes en la matière, et ne veulent manifestement pas qu’on leur force la main. Inciter au lieu d’imposer, tel semble être le message entendu par les citoyens.

L’économie s’engage

Et les entreprises? Souvent montrées du doigt parce qu’elles sont génératrices de rejets divers dans la nature, elles sont en réalité bien plus conscientes de leur responsabilité environnementale que certains le pensent. Bien sûr, elles pourront toujours faire davantage et mieux. Et je ne doute pas qu’elles vont s’y atteler sans relâche. Car c’est un fait, l’économie s’engage pour la transition énergétique. Les industries, grandes consommatrices d’énergie, s’emploient à user de celle-ci de manière économe depuis des années. Et elles continuent de cibler les potentiels d’amélioration dans ce domaine. De leur côté, les PME, et cela même si leur consommation et leurs frais sont plus faibles, cherchent sans cesse des opportunités pour améliorer leur efficacité énergétique.

Les entreprises n’ont d’ailleurs pas attendu le débat actuel. Depuis 2001, elles peuvent s’appuyer sur l’Agence de l’énergie pour l’économie (AEnEc), organisation à but non lucratif issue de l’économie et au service de cette dernière. L’AEnEc offre un service d’évaluation et d’aide à la réalisation de mesures pour réduire la consommation d’énergie, les émissions de CO2 et les coûts énergétiques. Les firmes qui recourent à cette large palette de programmes obtiennent d’excellents résultats. Depuis 2001, les 3852 entreprises qui ont conclu une convention d’objectifs avec la Confédération, en collaboration avec l’Agence, ont évité l’émission de 2,3 millions de tonnes de CO2 par année. Selon les chiffres de l’Office fédéral de l’environnement, par ailleurs, les émissions de gaz à effet de serre par franc de PIB ont diminué de 39% pendant la période allant de 1990 à 2016 malgré la croissance de l’activité économique.

C’est un pas, et il en faudra sans doute bien d’autres pour que les entreprises réduisent encore plus significativement leur consommation énergétique et se tournent progressivement vers des solutions propres et innovantes. Mais de grâce, ne les enfermons pas dans un carcan de normes contraignantes, qui tuerait toute recherche et innovation. Elles sont parfaitement capables de relever le défi environnemental si on les y incite judicieusement.

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Claudine Amstein

Claudine Amstein est la directrice de la Chambre vaudoise du commerce et de l’industrie, depuis 2005. Après avoir été juriste et secrétaire générale de la Chambre vaudoise immobilière, elle en reprend la direction en 1993. Elle a été constituante au Grand Conseil vaudois, avant d’en être députée pendant dix ans. Elle est très engagée dans les associations faîtières de l'économie suisse.

2 réponses à “Inciter au lieu d’imposer

  1. Il ne sert à rien d’opposer les jeunes contre les vieux, les pollueurs contre les éco-bobos, le privé contre l’industriel, et il ne faut pas se contenter de mots ou d’initiatives, il faut le faire, car le temps presse, malgré les dividendes, s’ils veulent continuer à les toucher

  2. La transition énergétique n’apporte que des avantages, il suffit d’ouvrir les yeux pour le comprendre, en particulier pour l’industrie suisse de transformation puisque l’énergie durable gratuite et abondante ne peut fonctionner que grâce à la technologie. De plus , comme le prix des technologies diminue avec le temps, le prix de l’énergie verte va fondre progressivement et amener une nouvelle ère de croissance comme ce fut le cas avec le pétrole au XXème siècle. La Suisse a tout intérêt à se positionner à l’avant garde pour garder une longueur d’avance sur ses concurrents et avoir de nouvelles possibilités d’exportation .
    Le grand avantage de l’énergie verte est qu’elle apporte une solution DEFINITIVE à l’approvisionnement énergétique de toute la planète. On n’aura plus à chercher d’autres ressources , à creuser à des km de profondeur pour chercher du pétrole, puisqu’il suffit de lever la tête.
    Sur les 4000 km2 utilisés pour l’activité humaine en Suisse, il suffit d’en exploiter quelques pour-cent pour satisfaire nos besoins en électricité , la chaleur pouvant venir de la géothermie…
    C’est la seule solution qui apporte l’indépendance énergétique alors que nous sommes toujours dépendants à 80% par le pétrole!
    Elle règle aussi les problèmes écologiques en n’émettant aucune particule fine nuisible à la santé ni de CO2 augmentant l’effet de serre…
    Bref, que demande le peuple ou l’économie quand le Soleil nous l’apporte sur un plateau!

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