Psychanalyse et air du temps

Aux cookies stroboscopiques de nos écrans, je préfère les madeleines de nos mémoires et les kaléidoscopes.

Les débats, voire les combats, entre les partisans et les détracteurs de la psychanalyse ont terni son image auprès du public, même si les premiers ont souvent prêté le flanc. Entre discoureurs dogmatiques, esthètes sceptiques et désengagés du social d’une part et thérapeutes donnant des diagnostics dans les médias d’autre part, elle semble s’être coupée de la société.

Pourquoi faut-il défendre la psychanalyse ? Si la culture admet l’existence de l’inconscient, les temps ont changé. Grâce à Freud, la psychanalyse a révolutionné la pensée. Mais elle est née de la névrose et de l’hystérie. Les pathologies ont changé ; aujourd’hui ce qui fait souffrir, c’est la relation à soi.

Vendue par des coachs, des livres de développement personnel, des applications de téléphone ou des thérapies, la quête du bonheur serait d’abord celui d’une industrie et d’une perception individualiste de la société. On voit apparaître les « psytoyens »[1] et une nouvelle hiérarchie émotionnelle où les émotions négatives n’ont plus de place.

La psychologie positive portée par une partie de la société cherche à remplacer le sujet par l’individu. Être sujet, c’est penser, désirer, créer, partager. C’est aussi agir collectivement, aller au delà de ses singularités, ce qui est la condition de la liberté. Si le sujet est porté par l’individu, il ne s’y réduit pas. La psychanalyse nous enseigne que pour nous constituer comme sujet, nous devrions pouvoir répondre à des questions fondamentales, comme assumer une identité sexuée, se situer dans une lignée parentale, se reconnaître comme vivant ou mort, à la fois semblable et différent de l’autre et soumis à la loi. Les réponses à ces questions étant toujours provisoires, l’existence humaine se définit par sa dimension tragique.

 

L’homme n’est pas maître en sa demeure

La spécificité de la psychanalyse, par rapport aux autres techniques thérapeutiques se fonde sur la distinction entre vérité subjective et réalité objective. Le patient est considéré comme sujet de sa propre histoire et non comme victime d’une souffrance dont la source serait totalement extérieure à lui. C’est lui permettre de se découvrir à travers sa valeur propre et d’assumer le mieux possible ses désirs. Qu’il n’est pas le fruit d’un destin mais qu’il aurait la liberté à portée de main, sans complaisance mais sans illusion quant au fait que la vérité dernière lui échappera toujours. Pour Freud, la visée d’une cure n’est pas la promesse du bonheur mais la transformation de la souffrance névrotique en malheur ordinaire.

 

L’inconscient ne connaît pas le temps

Dans l’ère de la communication instantanée et du « temps réel », comment défendre une approche qui travaille dans le temps et avec le temps. Le règne du temps court supplante celui du temps long. Entre l’ivresse de l’urgence et l’intensité d’une éternité instantanée ou l’effondrement dans la dépression comme pour ralentir le temps. Comment défendre le déroulé du vécu subjectif ? Défendre le temps du voyage vers sa propre singularité. Lever la culpabilité du conditionnel passé « j’aurais du, j’aurais pu … » en se délivrant de cette part de soi qu’on ne comprend pas.

S’il est une chose à défendre dans la psychanalyse c’est bien sa dimension libératrice. Mais il faut s’appliquer à lui donner plus de rigueur scientifique et croire au défi d’objectiver la subjectivité.

 

[1] À lire l’essai intitulé Happycratie. Comment l’industrie du bonheur a pris le contrôle de nos vies de Eva Illouz et Edgar Cabanas, Premier Parallèle, 2018

sylvie saudan

D’orientation psychanalytique, Sylvie Saudan est psychologue-psychothérapeute FSP. Elle a travaillé pendant vingt ans dans un service de pédopsychiatrie où elle s’est spécialisée dans la prise en charge des adolescents. Depuis une dizaine d’années, elle exerce en cabinet, de manière indépendante ou en collaboration avec un médecin, pour des suivis principalement d’adolescents et de jeunes adultes.

Une réponse à “Psychanalyse et air du temps

  1. La psychanalyse n’a pas sa place dans le champ de la psychiatrie, ni celui de la psychologie. Il s’agit d’une pseudo-science qu’il est grand temps d’envoyer définitivement au cimetière. Rappelons que la France est particulièrement gangrénée par ce fléau, que les magistrats sont régulièrement induits en erreur dans leurs jugement par des experts de cette orientation, que des criminels à tendance récidiviste sont régulièrement relâchés sur la base de leurs conseils et que des innocents se retrouvent emprisonnés comme ce fut le cas pour Outreau. Que de vies détruites par la psychanalyse ! Rappelons que Freud n’était qu’un escroc en col blanc qui s’inventait des patients et des cas de guérison. Lacan fini par reconnaître lui-même que la psychanalyse n’est qu’une escroquerie, du bavardage, de la poésie, un délire scientifique… après qu’il eut été traité publiquement de charlatan par Noam Chomsky.

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