Policiers ou manifestants blessés, vitrines défoncées, mobilier urbain saccagé : les manifestations récentes ont souvent été émaillées de violence. Loin d’être un phénomène isolé, c’est bien l’outil irresponsable de certaines revendications…
Le droit de manifester est une base de nos sociétés démocratiques. Il permet de rassembler ouvertement autour de ses revendications. Mais, hélas, certains semblent aujourd’hui penser que les pavés sont des arguments aussi légitimes que les mots pour appuyer leurs demandes.
Pourtant, cette logique même leur serait défavorable. Avoir recours à la violence dans une manifestation, c’est considérer que la force brute est à même de triompher. C’est donc balayer d’un revers de main l’État de droit – celui où chacun peut se prévaloir des règles – pour promulguer la loi du plus fort. À ce titre, plus besoin d’arguments, mais de pavés, de balles et de canons. La société qui en ressortirait ne serait ni juste, ni démocratique. Et rien ne garantit qu’elle serait à l’avantage des manifestants…
Aujourd’hui, chacun est libre de porter son projet devant le peuple – que ce soit par le biais d’initiative ou en se déclarant candidat pour porter ses idées dans les institutions politiques. Remplacer cette méthode par la violence, c’est d’abord un aveu de faiblesse. C’est reconnaître son incapacité à convaincre la majorité du bien-fondé de son projet et vouloir l’imposer envers et contre tout, envers et contre tous. La violence comme moyen, c’est aussi l’assassinat de la démocratie.
Et pourtant… rien n’y fait. Plus de 200’000 francs de dégâts à Zurich pour le weekend du 1er mai. À Paris, une dizaine de policiers blessés, dont un grièvement, lors de la manifestation du 28 avril. Sur les parcours, on ne compte plus les vitrines brisées, les abribus saccagés ou les bancomats détruits. Et souvent, ensuite, le couplet de «quelques casseurs isolés» profitant de la manifestation. Mais ayons le courage de reconnaître la vérité : la violence n’est plus, aujourd’hui, un acte isolé !
Il y a ceux qui cassent, qui frappent, qui lancent des pavés. Ils sont là, lâches, sous leur cagoule ou leur masque. Mais il y a ceux autour d’eux, plus nombreux, et plus lâches encore, qui les entourent, les encouragent et les soutiennent. Ceux-là même qui s’en lavent les mains immédiatement après et déclinent toute responsabilité. Pourtant, ils sont aussi responsables et aussi coupables de ces violences.
Lorsque 300 casseurs sont présents, dès le début, dans la manifestation parisienne du 28 avril et que, loin d’être repoussés, ils sont accompagnés par la foule, acclamés lors de leurs déprédations puis soutenus pour fuir les forces de l’ordre, il ne s’agit plus d’un acte isolé. Lorsque les responsables syndicalistes qui ont appelé à manifester refusent de condamner ces violences, ils cautionnent l’usage de la force comme moyen de revendication. Lorsque le parti du travail défile, à Zurich, avec une banderole où est représenté un patron en train de se faire frapper à coups de poings et de pied de biche, il n’y a pas là une indifférence, mais bien une incitation à la violence.
La violence, c’est l’arme des faibles. Ceux qui y ont recours – qu’ils en soient les auteurs directs ou les responsables indirects – piétinent la démocratie et poignardent les idéaux qu’ils prétendent servir.