Au nom du Père et du fisc

Les récentes élections cantonales et les sondages en vue des élections fédérales de cet automne montrent une claire tendance à un renforcement des grands partis au détriment des petits. Sans l’admettre ouvertement, les responsables de ces derniers semblent plutôt inquiets face à leur avenir immédiat. Une exception confirme la règle : quasi-inconnu en Suisse romande et ignoré des instituts de sondage, le parti évangélique semble aujourd’hui avoir le vent en poupe. Outre un siège gagné au Grand Conseil zurichois (ce qui le place devant le PBD et à un siège du PDC), c’est surtout son influence sur les prochaines votations qui est remarquable.

On le mentionne rarement, mais c’est bien ce petit parti qui était à l’origine de l’initiative pour imposer les successions (soumise au peuple le 14 juin prochain) avant d’être rejoint par le PS et les Verts. Le PEV a trouvé là des relais à sa proposition. Mais, plus encore, il s’est ainsi affirmé comme une force de gauche au même titre que ses deux concurrents – un succès impressionnant pour un parti comptant seulement deux conseillers nationaux et 40 députés. Renforcé par la campagne qui débute, le parti va certainement s’imposer comme une nouvelle force à gauche et, peut-être, comme une alternative au parti socialiste !

Mais le PEV ne s’arrête pas là ; il se profile aussi fortement comme fer-de-lance de l’opposition au diagnostic préimplantatoire (également au menu des prochaines votations fédérales). Deux surprises dans ce début de campagne vont lui donner un nouvel élan. La première venait de sa droite : le 25 avril, les délégués du PDC se sont prononcés à 60% en faveur de l’article constitutionnel soumis au peuple. Les démocrates-chrétiens ont ainsi nettement tranché avec l’image de catho-conservateurs qui leur colle à la peau et renoncé à prendre place aux côtés de l’UDC dans l’opposition au progrès. Plus surprenant encore, malgré le soutien quasi-unanime de ses parlementaires (un seul sur 53 s’est opposé lors des votes finaux), le même jour, le parti socialiste a privilégié la liberté de vote sur cet objet, s’abstenant de prendre position. Suscitant l’étonnement de beaucoup, ce choix démontre surtout qu’il existe aussi, à gauche de l’échiquier, une tendance nettement moins progressiste que ce que revendiquent les directions politiques.

En se positionnant pour les prochaines votations fédérales, le parti évangélique a bien de la place : libéré de la concurrence religieuse du PDC contre le diagnostic préimplantatoire, soutenu sur ce même thème par une forte partie des socialistes et meneur des partisans d’un impôt fédéral sur les successions, le PEV s’est ainsi trouvé un créneau clair et distinct du reste de la mêlée. Concrétisera-t-il cela pour devenir une nouvelle alternative conservatrice, religieuse et socialiste ? La réponse sera connue le 18 octobre. 

 
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