Pour ceux qui cherchaient à comprendre le sens des mesures prises dans le cadre de Prévoyance 2020, ils sont servis ! En effet, dans la perspective de la votation populaire du 24 septembre prochain qui décidera de son avenir, l’Office fédéral des assurances sociales (OFAS) a produit une volumineuse documentation sur ce projet complexe disponible sur son site, en accompagnement du matériel d’explications qui sera envoyé prochainement à tous les citoyen(ne)s.
Il faut le dire sans ambages, ces documents constituent une excellente base pour comprendre la démarche et la manière dont ces changements sont censées produire leurs effets sur différentes catégories de la population, avec de multiples projections chiffrées. L’argumentaire est ainsi très clairement présenté et bien illustré.
Un système toujours plus compliqué
Mais, comme on dit, à l’impossible nul n’est tenu. Car quel que soit l’avis que l’on partage sur le contenu de cette réforme, on s’accordera sur un constat implacable : d’un système déjà extrêmement compliqué, il deviendrait encore plus inaccessible, même si l’on est quelque peu familier avec sa structure et son organisation. Il faut dire que certains des mécanismes mis en œuvre laissent perplexe, comme la compensation de la baisse du taux de conversion dans le 2e pilier – système par capitalisation – de 6,8% à 6% sur quatre ans par une augmentation uniforme de la rente AVS – système par répartition – de 70 francs pour tous les nouveaux assurés et le passage de 150% à 155% de la rente maximale individuelle pour les couples.
Le lien de cause à effet paraît difficile à établir de manière nette. Surtout si l’on songe qu’une grande partie des affiliés aux caisses de pensions est également assurée dans un régime surobligatoire, donnant lieu à un taux de conversion global largement en deçà des 6% prévus pour 2022. Dans ce cas, il s’agirait donc d’une sorte de rattrapage, si l’on comprend bien.
Compensation intégrale
Pour justifier le relèvement de l’AVS sous la forme d’un montant unique (en pourcentage pour les couples), l’OFAS met également en avant la possibilité offerte à un grand nombre de femmes de partir en retraite à 64 ans, soit avec une année d’anticipation sur la loi soumise en votation, en percevant la même rente AVS qu’aujourd’hui.
À l’appui de cette affirmation, l’OFAS part d’une rente AVS mensuelle d’environ 1’700 francs, soit pour un revenu annuel moyen de 39’000 francs, qui est le niveau salarial de près de la moitié des femmes actives : «La réduction pour perception anticipée sera de 70 francs environ, de sorte que le supplément de rente AVS compensera cette baisse.» On fait confiance à nos autorités pour la justesse des chiffres.
Mais on ne peut s’empêcher de se demander si c’était vraiment très judicieux de proposer ce relèvement de l’âge de la retraite. Pourquoi prendre le risque de faire capoter l’ensemble de la réforme si l’on pouvait le compenser intégralement de manière aussi aisée pour celles qui désireraient cesser leur activité professionnelle au même âge qu’auparavant ?
Génération privilégiée
Autre point qui laisse un peu songeur, c’est la création de plusieurs catégories de rentiers. En effet, toutes les personnes déjà retraitées ne pourront bénéficier de l’amélioration de leurs rentes AVS. Cette solution ne paraît pas absurde puisqu’ils ne seront affectés par les effets de la réforme que par la hausse de la TVA, qui touche tout consommateur.
Mais là où le bât blesse, c’est que les prochains rentiers – la génération des 45-65 ans – vont non seulement recevoir ces augmentations de rentes AVS mais conserver leurs droits acquis dans le 2e pilier ! Les moins de 45 ans apprécieront…
Pourquoi ne pas soumettre à la cotisation AVS tous les salaires ou gains, soit dès le début dans la vie active et imposer le même taux pour le deuxième pilier avant et après 50 ans, ce qui éviterait les retraites “forcées”, chômage et aide sociale ?
Je ne suis pas compétent mais comme citoyen lambda, je me demande s’il est vraiment judicieux de compliquer tellement en aval, au lieu de modifier l’amont et augmenter la TVA d’un demi-point ???
Bref, ce “machin” me semble effectivement difficile à saisir …
Bonjour,
Merci pour votre commentaire, sur lequel je me permets de réagir.
Pour l’AVS, je ne suis pas sûr que l’on dispose d’une grande marge de manœuvre car toute personne domiciliée en Suisse ou qui y exerce une activité lucrative y est soumis dès le premier janvier qui suit son vingtième anniversaire.
Les cotisations AVS qui pourraient être récoltées sur les très jeunes actifs ne seraient sans doute pas très substantielles. Par ailleurs, si l’on considère que ce sont les plus jeunes qui vont être le plus pénalisés par les réformes de la prévoyance au cours des années qui viennent, il n’est peut-être pas très pertinent de charger plus encore le bateau.
Quant à la question du taux dans le 2e pilier, j’imagine que vous faîtes référence aux taux de bonifications de vieillesse. Et là je vous rejoins : il est effectivement très pénalisant que ces taux passent de 10% pour la classe d’âge de 35 à 44 ans pour monter à 15% pour les 45 à 54 ans, et atteindre finalement 18% pour les personnes de 55 à 65 ans. Dans Prévoyance 2020, le taux serait encore relevé pour les actifs de 35 à 44 ans, pour passer à 11%, et pour ceux âgés de 45 à 55 ans, à 16%, laissant le taux inchangé à 18% pour les personnes de la dernière classe d’âge.
Ces taux de bonifications progressifs s’expliquent probablement par le fait qu’en principe les individus dégagent les revenus les plus élevés en fin de carrière, alors que simultanément leurs charges de famille diminuent à ce moment-là lorsque leurs enfants quittent le foyer. L’augmentation du taux permettrait donc de maximiser l’avoir de vieillesse, tout en laissant suffisamment de liquidités à l’assuré puisque prélevé sur un revenu au plus haut de sa carrière. Mais cela entraîne évidemment un effet pervers, puisque ces travailleurs deviennent particulièrement coûteux pour l’employeur en terme de cotisations. Ce serait sans doute plus judicieux d’aplanir cette progression, voire d’adopter un taux unique tout au long de sa carrière.
Avec tout le respect dû a l’auteur, celui-ci passe à côté de l’essentiel. Ces trois dernières années, les comptes de répartition de l’AVS (recettes cotisations et Confédération) dépassent le demi-milliard de déficit annuel. Les déficits cumulés atteindront 27 milliards d’ici 2025 et 65 milliards (oui!) en 2030. Prévoyance 2020 permet d’éviter ces déficits catastrophiques pour notre AVS. Quant au 2e pilier obligatoire, la baisse du taux de conversion devient urgente pour rétablir l’équité entre générations. Des mesures compensatoires sont prévues pour maintenir les rentes et favoriser la flexibilité de la retraite. Prévoyance 2020 est un compromis simple à comprendre: 2xOUI POUR SAUVER ET FAIRE ÉVOLUER NOTRE SYSTÈME AVANTAGEUX DES RETRAITES. Le non sera l’annonce de lendemains desenchanteurs….et un refus d’affronter de manière réaliste le défi démographique majeur.
Cher Professeur,
Je suis très honoré que vous ayez pris le temps de commenter mon modeste papier. Toutefois, je comprends mal le sens de votre intervention. Je partage évidemment avec vous l’idée qu’il faut absolument assainir notre système de prévoyance sociale. J’avais d’ailleurs applaudi dans le blog du 24 juin 2013 que je tenais alors sur L’Hebdo (repris sur ce blog) pour manifester mon soutien au projet annoncé par Alain Berset. Au point de titrer ce billet de la manière suivante : «AVS et 2e pilier : il y a un pilote dans l’avion !». Mais je m’inquiétais, avec raison, de ce qu’allait devenir ce projet bien ficelé au terme du processus parlementaire.
Le résultat n’est pas forcément enthousiasmant. Ses avantages l’emportent peut-être sur ses défauts. Faut-il absolument saisir cette occasion de réformer notre système de prévoyance pour lui assurer une certaine pérennité ? Ne vaudrait-il pas mieux attendre une nouvelle mouture ? Je n’ai pas de réponse à ces questions. C’est pourquoi j’attends avec impatience le lancement de la campagne pour affiner mon jugement et démêler l’écheveau entre les arguments des uns et des autres sur chaque point de cette réforme complexe. D’ailleurs, Alain Berset ne martèle-t-il pas depuis des semaines qu’il faudra «expliquer, expliquer, expliquer » jusqu’en septembre pour convaincre la population de voter pour Prévoyance 2020 ?
J’ai lu avec intérêt les différents commentaires suites aux explications premières.
Selon la Constitution fédérale, tous les citoyens de ce pays sont égaux mais en réalité c’est faux !
Il y a une inégalité flagrante au moment de la retraite : les chômeurs, les fins de droit, les femmes qui se sont occupées de leur progéniture sans demander à l’Etat de participer financièrement par des crèches, etc…, les licenciés pour cause économique, restructuration, coûtent trop chers (une jolie expression (l’ai vécu) ?), les personnes handicapées, etc… touchent une rente AVS diminuée et LPP dans la même veine.
Or, dans cette révision, rien n’est prévu si ce n’est ces fameux CHF 70.00 qui seront distribués y compris à ceux qui sont fortunés : belle injustice !!!
Pourquoi prévoir des calculs d’apothicaire pour les calculs rentes AVS ? Pourquoi les couples voient leurs rentes AVS diminuer au moment où le deuxième la prend ?
Explications différentes selon la source d’information, donc juste plus “soûlant” qu’un apéro bien arrosé. Mais chose surprenante: la TVA n’est augmentée qu’en 2021, alors que la réforme prend effet au 1er janvier 2018. La TVA touche tout le monde, y compris les riches qui paieront l’équivalent lors d’achat, ce qui n’est loin pas le cas avec le paiement des impôts. L’AVS simple qui diminue si le conjoint devient aussi rentier avec le partage de la rente de couple. Vraiment désolant en regard à Abu Ramadan, l’Imam haineux de Bienne qui n’a sûrement pas cotisé et qui touche plus de 2’000.-chf/mois de rente AVS et l’aide sociale. Des formes d’injustice juste pas admissibles qui font douter sur notre futur….