Un troisième parti politique est-il possible aux Etats-Unis ?

Sous l’impulsion de Donald Trump et de Joe Biden, et en marge des tensions dans les partis républicains et démocrates, un troisième parti américain de premier plan est-il envisageable ? Retour sur l’histoire, analyse des forces en présence et tentative de réponse et décryptage.  

Un système politique fait pour le bipartisme

Si nous devons présenter un paysage politique parfait pour un paysage politique à deux partis et hostile au multipartisme, c’est bien l’exemple américain. Avec son système de vote majoritaire à un tour et sans proportionnelle, il avantage nettement le duel de deux adversaires avec le gagnant qui est dit du « winner takes it all ».

Et c’est le cas pour l’élection présidentielle tout comme pour la chambre des représentants ou le Sénat. La puissance et la force de pénétration de deux partis principaux rend presque caduque et illusoire l’irruption d’un troisième larron. Quant à des coalitions de circonstances, elles ne sont pas dans la culture américaine.
United States presidential election of 1992 | United States government | Britannica

Le poids de l’histoire
Comme expliqué plus haut, aux Etats-Unis, vous êtes soit républicain, soit démocrate. Or, il n’en a pas toujours été ainsi. Il faut rappeler que ces deux monstres sont issus d’une scission du parti républicain-démocrate en 1824 (Democratic-Republican Party). Et oui, aussi incroyable que cela y paraît, les deux géants ne faisaient à l’origine qu’un en opposition au parti fédéraliste de George Washington qui se désintègre lui en 1820. Il y avait donc dès le départ déjà, un bipartisme que les experts attribuent à la simplicité du débat politique américain.

Un court précédant à trois partis
A la division du parti républicain-démocrate en 1824, le parti whig qui deviendra le parti républicain en 1854, ainsi que le parti démocrate prennent les devants de la scène politique américaine en bipartisme pour ne plus la lâcher. Il y aura, toutefois, bien des tentatives de troisième force mettant en danger les deux ogres. Dans une atmosphère encore plus polarisée qu’aujourd’hui (oui, c’est possible), le Populiste Party (défense des paysans) aurait pu faire vaciller les démocrates entre 1890 et 1900, avant de les rejoindre.

Plus incroyable, le Progressive Party était encore plus proche d’imposer une troisième voie aux Etats-Unis. Fondé en 1912 pour ramener l’ancien président Théodore Roosevelt au pouvoir, le parti est une division de l’aile progressive républicaine. Le succès est au rendez-vous, puisque Roosevelt termine 2ème de l’élection avec 27%, mais avec seulement 88 grands électeurs. Le format de l’élection majoritaire à un tour a encore frappé. Le nouveau parti au logo d’un élan (face à l’âne démocrate et l’éléphant républicain) a fait partiellement chuter le grand parti républicain et pensait ensuite pouvoir attirer les progressistes démocrates.
Mais les mid-terms de 1914 qui suivent sont un gros échec. Et en 1916, sous l’influence du revenant Roosevelt, le parti républicain adapte des valeurs plus progressistes pour retrouver leur poids et mettre fin au parti progressiste. L’histoire retiendra que les deux anciens partis ont tremblé et une occasion unique a été manquée.theodore roosevelt a progressive bull moose,Free delivery,OFF67%,welcome to buy!

Les Américains tiraillés

Mais qu’en est-il du souhait des Américains de voir émerger une troisième voie près de 100 ans après ? S’il étaient moins de 35% à en vouloir en 2000 après la défaite d’Al Gore (soi-disant due à l’entrée du Green Party dans la course), ce chiffre bondit à presque 50% en 2019 et 60% en 2021. Un arbre cache cependant la forêt, puisque ce sont en majorité des réactions passagères au sein des partis. D’une part, contre la personne de Donald Trump, ou contre la politique migratoire de Joe Biden (au sein des démocrates).

De simple menaces avec un risque trop élevé
Avec le party Libertarian et le Green Party qui existent maintenant depuis plusieurs décennies, il semble que toute tentative de troisième parti soit vouée à l’échec. En effet, les résultats de ces deux mouvements sont une suite de déceptions sans noms, et l’exemple de la présidentielle de 1992 avec Ross Perot est éloquent. Cet indépendant se lance contre Bill Clinton et Georges Bush, jusqu’à créer un débat à trois à la télévision américaine. Perot obtiendra 19% des voix mais aucun grand électeur. Un exploit en chiffres (20 millions de votes), mais un échec en terne d’élection pure. Et comme l’histoire se répète, Clinton reprendra une partie de ses idées et son mouvement sera marginalisé.

Alors, en 2021, les menaces de certains républicains, Liz Cheney en tête (fille de l’ancien vice-président Dick Cheney), de contrer le pouvoir de Donald Trump au sein du Gran Old Party ne semblent pas tenir la route. Bien que les réactions face à l’ascendance trumpiste et populiste soient de plus en plus nombreuses, un nouveau courant progressiste ne saurait être viable à long terme. Et le constat est encore plus implacable du côté démocrate, où Alexandra Ocasio Cortez et Bernie Sanders ne jouent que sur la peur d’une scission pour renforcer leur courant d’idées.

Vers un statu quo
Pour conclure, comme l’ont montré les élections de 1912, 1992 ou 1912, les troisièmes partis dans la politique américaine sont plutôt perçus comme des solutions de facilité que de recours. Comme semble le confirmer l’éminent politique Gregory Koger de l’University of Miami : « Les Etats-Unis sont un des rares pays démocratiques à avoir un système électoral qui récompense la voie à deux partis. Tant au niveau local que national, il en est ainsi fait. En conséquence, les élections et les électeurs ont tendance à préférer un des deux favoris probables face à l’émergence d’un troisième candidat. La conclusion est que leur influence peut être grande mais leur succès moindre. »
This four-word line packed a punch in 1980's election - CNN Video

Mais en politique, comme en sport, c’est bien connue, il ne faut jamais enterrer quoi que ce soit.

Ludovic Chevalier

Ludovic Chevalier a tout d'abord étudié l’économie et le management touristique avant de se spécialiser dans le marketing. Après un premier passage aux Etats-Unis, il a décidé de s’établir sur la côte ouest américaine pour au moins six mois. Il nous livre un récit de sa vie américaine, universitaire et sportive. En 2020, Ludovic a également obtenu le certificat universitaire suivant: "U.S. Public Policy: Social, Economic, and Foreign Policies".

2 réponses à “Un troisième parti politique est-il possible aux Etats-Unis ?

  1. Intéressant.

    Je pense que le candidat populiste de droite Ross Perot n’était qu’un plastron destiné à faire perdre Bush et gagner Clinton. Les troisièmes candidatures aux USA ne servent qu’à ça. Si Trump se représente en 2024, ce qui me paraît vraisemblable, il y aura peut-être un plastron populiste style Ross Perot pour tenter de diviser l’électorat populaire de droite. Mais je pense que ça ne marchera pas car Trump a gagné l’électio n de 2020 in a landslide et il cartonnera encore plus en 2024. Le sénile Robinette Biden n’a été élu que par la fraude massive et grâce aux machines de vote du deep state.

    Je pense que Trump gagnera en 2024 avec une marge tellement énorme que les autres seront écrasés et ne pourront rien faire, à moins qu’on refasse le coup de la fraude. Mais cette fois-ci les gens seront vigilants et ce sera plus difficile d’organiser une fraude réussie.

    Il y aura toujours un système bipartisan aux USA mais maintenant le trumpisme rassemblera tout ce qui n’est pas gauchiste, woke, cancel culture, BLM etc. L’électorat populaire black est favorable à Trump et non aux démocrates. Par conséquent il ne restera plus que des gauchistes au parti démocrate. Les Democrats for Nixon et les Reagan Democrats basculeront dans le trumpisme et ne reviendront pas au vote démocrate. C’est comme en Suisse les électeurs PDC, PS, et radicaux qui ont passé à l’UDC, ils ne reviendront jamais à leur ancien parti.

    La gauche woke US va s’apercevoir qu’elle ne représente rien. Ce sera un constat très douloureux pour certains mais ils devront se rendre à l’évidence. Ca leur prendra une génération pour élaborer d’autres stratégies qui permettront au parti démocrate de reprendre du poil de la bête après l’ère Trump. Mais de toute façon vous avez raison, il n’y aura pas de troisième parti.

    1. Merci pour votre commentaire. Nul ne sait si Ross Perot était un plastron mais il a effectivement fait perdre Bush comme ce fut le cas pour Al Gore en 2000. Et en ce sens mais surtout à cause du système de vote, les troisièmes candidatures subissent souvent la comparaison d’intrus ou sont accusés des défaites des autres. Leur intention est pourtant louable bien que la rivalité républicain-démocrate soit passionnante.

      Trump gagnera peut-être en 2024, par contre je ne peux vous laisser dire qu’il a gagné l’élection de 2020. Ce sont des fakes news, des mensonges, théories complotistes malhonnête. Et la Cour Suprême des USA qui est à grande majorité républicaine a confirmé et validé la légitimité du résultat de ce scrutin.

      Comment expliquez-vous qu’il faut arrêter de compter en Géorgie et Pennsylvanie à 1h du matin (parce que Trump est en tête), alors qu’il faut continuer de recevoir tous les votes d’Arizona et prolonger North Carolina (car Trump était derrière). C’est arranger et changer la vérité, c’est du fake-news et mensonges.
      La vérité est que Trump a fait un très bon résultat avec plus de 70 millions de voix mais que le système électoral l’a enterré. Comme ce fut le cas pour Hillary Clinton en 2016. N’oubliez pas qu’elle a perdu la Pennsylvanie ou l’Arizona pour très peu de voix. En 2020, c’est l’inverse.

      Il n’y a pas eu de fraude et le problème de la livraison tardive des résultats provient du fait que la loi est différente dans chaque état. La Géorgie avec à sa tête un républicain pouvait recevoir les votes par correspondance plus longtemps (et notamment des militaires, pas toujours démocrates…)
      Alors, oui il faut peut-être harmoniser tout ceci et changer le délai de vote par correspondance, mais il n’y a pas eu de manipulation de bulletins. Ou alors, autant ne plus croire à la démocratie et mettre un dictateur…
      Je vous laisse responsable de vos mots sur la Suisse et la gauche américaine également.

      Par contre il se peut bien qu’on reste à un système de bipartisme. De nombreux afro-américains voteront pour le candidat Trump ou le républicain en 2024 si Biden ne fait pas du bon travail. Le vote populiste franchit les frontières politiques, les origines et les couleurs, et un exemple parfait est la Floride avec tous les latino-américains qui ont voté pour Trump.

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