Un peu de Suisse à Strasbourg… et réciproquement

Le 25 juin, j’ai eu l’immense honneur d’être élue à la présidence de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe. Un honneur mais aussi un défi, dans un contexte particulièrement délicat de séisme institutionnel.

Je pense bien sûr aux allégations de corruption qui ont touché, insidieusement, un organe pourtant chargé de promouvoir la démocratie (lire à ce propos mon article dans Le Temps du 8 mai 2018). L’Assemblée a depuis adopté une véritable stratégie de lutte contre ce fléau. Sous ma présidence, elle poursuivra la reconquête de son honneur et sa mue vers une transparence totale.

Si ce séisme permet au final de construire des fondations plus saines pour l’Assemblée elle-même et pour d’autres institutions nationales ou internationales, alors celui-ci n’aura pas été vain. Mieux, il aura contribué à renforcer les valeurs du Conseil de l’Europe, lesquelles ne sont pas à vendre, pas plus que le Conseil de l’Europe ne s’achète par le biais de cadeaux ou d’autres promesses indues.

Ces valeurs ont plus que jamais besoin d’être promues, portées, vécues, sur le continent européen et au-delà. Car les vents contraires ne soufflent pas qu’à l’interne de cette institution. La montée des extrémismes, des violences et de la répression, dans un contexte migratoire et sécuritaire très tendu, requiert que nous réaffirmions haut et fort la primauté des droits humains, de la démocratie et de l’État de droit.

Il s’agira aussi de résister aux coups de boutoir souverainistes portés par certains États membres du Conseil de l’Europe, notamment contre la Convention Européenne des Droits de l’Homme. La Suisse elle-même devra voter prochainement sur l’initiative visant à consacrer la primauté du droit constitutionnel national sur le droit international, avec le risque d’affaiblir la protection des droits fondamentaux de ses citoyen·ne·s.

Ma présidence sera celle d’une Suissesse, imprégnée de dialogue et de recherche de solutions constructives. Et, de même que j’apporterai un peu de Suisse à Strasbourg, j’amènerai un peu de Strasbourg en Suisse. J’espère y faire mieux rayonner le Conseil de l’Europe, souvent méconnu, et renforcer les liens qui unissent historiquement, culturellement, profondément notre pays à cette institution. La Suisse n’est-elle pas, après tout, le berceau des Conventions de Genève, de la Croix-Rouge et du Conseil des droits de l’homme ?

Ma présidence sera aussi celle d’une femme, pour la quatrième fois seulement à l’Assemblée. C’est avec la conviction qu’une véritable démocratie ne peut oublier la moitié de l’humanité et que les femmes doivent être dignement représentées, y compris dans les hautes fonctions, que je ferai de la promotion de l’égalité l’une de mes priorités.

Je me réjouis de ce mandat aussi exigeant que passionnant au sein d’un Parlement qui réunit des représentant·e·s de 47 pays du continent européen, autour de valeurs si proches et si cruciales. Le terme d’ « assemblée » prend ici tout son sens : c’est, plus qu’une réunion, une union, riche de ses pluralités, autour de l’Europe que nous aspirons à construire ensemble. Une Europe unie, où le respect de la dignité humaine est le pilier de la société.

Liliane Maury Pasquier

Sage-femme, Liliane Maury Pasquier a une longue expérience politique : après le législatif communal de Veyrier et le Grand Conseil genevois, elle siège au Conseil national, de 1995 à 2007, qu'elle préside en 2002. Depuis 2007, elle siège au Conseil des États et dans la délégation au Conseil de l'Europe. Depuis 2018, elle préside l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe.

Une réponse à “Un peu de Suisse à Strasbourg… et réciproquement

  1. En tant que citoyenne suisse et femme, je suis fière que vous ayez reçu et accepté ce mandat. Je suis persuadée que vous apporterez beaucoup à cette institution d’importance primordiale, et je vous souhaite plein de succès. J’adhère entièrement à vos opinions énoncées dans le blog.

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