Pénurie de médecins suisses pendant dix ans encore

 

Il suffit de se brancher sur les actualités pour enregistrer deux nouvelles dont la juxtaposition suscite d’étranges réflexions. Pourquoi la Suisse décide-t-elle de former trop peu de médecins (ou s’abstient de corriger la situation) ? Cinq réponses :

1/Personne ne sait ou personne ne veut savoir.

2/ La Confédération ne serait pas habilitée

3/ Les cantons universitaires n’auraient pas les ressources

4/ En formant moins de médecins, on croit qu’on contiendra les primes d’assurance maladie

5/ Le personnel médical poursuit une vocation, ce qui permet de l’exploiter sans risques.

Rappelons encore que plus du tiers des médecins pratiquants en Suisse ont été formés à l’étranger et qu’il faut dix ans pour qu’un étudiant devienne opérationnel. La situation actuelle perdurera donc jusqu’en 2033.

 

Pénurie de médecins

Des médecins urgentistes tirent la sonnette d’alarme dans la presse dominicale. “Nous sommes au bord de l’effondrement”, déclare le coprésident de la Société suisse de médecine d’urgence Vincent Ribordy. “L’ampleur actuelle de la charge de travail est sans précédent”.

14’779 emplois sont actuellement à repourvoir dans le secteur des soins. 3904 médecins sont également recherchés.

Le problème, qui est d’ampleur nationale, est “lié au fait que nous n’avons pas assez de personnel”, abonde dans le même sens le médecin-chef au service des urgences du Centre hospitalier du Valais romand, Vincent Frochaux. Illustration du manque de personnel, le site de Martigny du Centre hospitalier du Valais romand a dû d’ailleurs fermer ses urgences la nuit.  Vincent Frochaux parle d’un “cercle vicieux”. “Des gens expérimentés partent parce qu’ils sont fatigués. Ils sont remplacés par des personnes plus jeunes, qui ont moins d’expérience et qui prennent donc plus de temps pour accomplir les mêmes tâches. Du coup, la charge de travail se reporte sur le personnel plus aguerri, qui se fatigue

Outre un risque d’erreur plus élevé, la situation actuelle conduit à un traitement parfois indigne des patients, note Vincent Ribordy, avec de longs temps d’attente et une augmentation de la mortalité et de la morbidité. “Dans certains cas, l’anesthésie ne peut être réalisée qu’à l’aide de gaz hilarant ou d’opioïdes, car le personnel formé pour l’anesthésie fait défaut”.

Selon le coprésident de la Société suisse de médecine d’urgence, les collaborateurs souffrent de démotivation, de dommages moraux ou psychiques ou de burnout et tournent le dos à la profession pour cette raison.

« Chez nous aux urgences, un chef de clinique travaille par exemple 50 heures par semaine, dont quasiment 65% sont effectuées dans des horaires compris entre 19h00 et 07h00, ainsi que les jours fériés et le week-end”.

()RTS)

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Limitation du nombre d’étudiants

Au vu du nombre d’inscriptions parvenues dans les délais à la Conférence des recteurs des universités suisses (CRUS), la CUS recommande à nouveau de limiter pour l’année académique 2013/14 l’accès aux études de médecine humaine, dentaire et vétérinaire dans les Universités de Bâle, Berne, Fribourg et Zürich. Un test d’aptitudes réalisé en français, en allemand et en italien aura lieu, par conséquent, le 5 juillet 2013 pour les personnes inscrites dans ces disciplines.
3’270 personnes se sont inscrites aux études de médecine humaine pour la rentrée 2013 dans les quatre universités pratiquant le numerus clausus. Le nombre d’inscriptions est de 396 pour les études de médecine dentaire et de 478 pour les études de médecine vétérinaire. Malgré le retrait prévisible avant le test d’environ 20% des candidats, on doit s’attendre à un dépassement des capacités d’accueil en première année qui ne pourra pas être résolu par des transferts opérés avant le début des études.

A l’Université de Genève, les capacités d’accueil en médecine humaine sont dépassées de 32% (soit 530 inscriptions pour 400 places). Entre 2010 et 2012, les candidats aux études de médecine ont passé le même test d’aptitudes que leurs collègues alémaniques, à la différence près que les résultats n’avaient qu’une valeur indicative et non pas sélective. En décembre 2012, le Département de l’instruction publique du Canton de Genève et l’Université de Genève ont décidé de renoncer à ce test dès la rentrée académique 2013.
Les capacités d’accueil en médecine humaine sont également dépassées dans les Universités de Lausanne (+80%, 539 inscriptions pour 300 places) et Neuchâtel (+82%, 100 inscriptions pour 55 places).

(Etudiants.ch)

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Jacques Neirynck

Jacques Neirynck est ingénieur, ancien conseiller national PDC et député au Grand Conseil vaudois, professeur honoraire de l'École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), d'origine belge, de nationalité française et naturalisé suisse. Il exerce la profession d'écrivain.

45 réponses à “Pénurie de médecins suisses pendant dix ans encore

  1. Merci de soulever le problème de la relève médicale.
    Depuis qu’elle est entre les mains des gestionnaires administratifs et financiers, elle flirte avec la médiocrité composés que d’esprits comptables.
    L’hôpital est « managé » comme une manufacture, selon des critères anglo-saxons de rentabilité et du marché financier que cela représente.
    Cette vision bureaucratique se heurte à la réalité biologique, car le nombre de malades et de maladies potentielles ne sont pas prévisibles (la récente pandémie a pris tout le monde de cours). L’équation est donc évidement difficile à résoudre.
    Ne serait il pas opportun de généraliser et compléter lorsque nécessaire la composition des organes qui détiennent la bourse, par du personnel médical expérimenté pour co décider et ajuster à la réalité biologique et médicales la formation des personnels (médecins, infirmier/ères, aides soignant(e)s).

    1. Merci d’évoquer le problème de la relève médicale en Suisse. On peut penser que la pénurie de médecins va se prolonger bien au-delà de 10 ans. Il n’est peut-être pas opportun de parler de médecins suisses puisqu’un nombre important de médecins étrangers s’occupent d’ores et déjà de la population suisse, médecins étranger formés à grand frais ailleurs et réfugiés économiques ou réfugies tout court en Suisse au détriment de leur pays d’origine.
      En réalité, la pénurie de médecins est hétérogène. Elle touche moins les grandes villes que les régions moins densément peuplées, moins les cliniques privées que les hôpitaux publics et moins la médecine spécialisée que la médecine générale.
      Dans une lettre datée de 1990, le président de la société neuchâteloise de médecine et moi-même attirions l’attention du conseiller fédéral en charge de la santé publique sur le déséquilibre croissant se dessinant entre généralistes et spécialistes. La réponse signalait l’incompréhension du problème par les services concernés et leur incompétence. Et il n’est pas besoin d’évoquer l’accroissement de la population ou son vieillissement pour justifier la pénurie actuelle, des démographes avertis comme Pierre Gilliand en faisaient déjà des projections correctes voilà plus de trente ans.
      La médecine suisse (comme aussi la française, la suédoise ou l’anglaise, aussi bien pour des services étatisés que « privés ») évolue vers un système de santé à deux vitesses sur le modèle très libéral que connaissent les USA : le système de santé y est le plus onéreux du monde et n’apporte pas de soins à l’entier de la population. Le système de santé est devenu un secteur économique extrêmement lucratif. Cette évolution est favorisée par les parlementaires et par les assurances-maladie (et leurs complémentaires) très présentes sous la coupole. Les bénéficiaires de ce système très lucratif ne sont pas la médecine générale ou l’hôpital public, assujetti à des exigences économiques très strictes, sauf là où un service d’urgence ou de soins intensifs est nécessaire, pas assez rentable pour des établissements privés qui, soit dit en passant, ne participent pas à la formation des jeunes médecins donc pas non plus à la relève médicale.
      Concernant cette relève, on peut prendre comme exemple la région neuchâteloise ou jurassienne. L’université de Neuchâtel assure la première année de formation de médecine mais seule une vingtaine d’étudiants peuvent poursuivre leurs études en Suisse romande (les facultés alémaniques leur sont interdites), qui est le nombre de places réservées à Lausanne et Genève aux heureux élus indépendamment d’un seuil d’exigence académique.

  2. Je n’ai pas très bien compris le § “Limitation du nombre d’étudiants” qui traite les années 2012-2013. Est-ce une coquille ? Ou n’y a-t-il pas d’informations actualisées 2022-2023 ?

    1. 15.02.2023

      Délai d’inscription auprès de swissuniversities

      Mars 2023

      Recommandations du Conseil des hautes écoles sur l’introduction d’une restriction d’admission après analyse de la situation d’inscription

      23.05.2023

      Délai d’inscription auprès de swissuniversities pour la participation au test

      07.07.2023

      Date de mise en œuvre du test

      Début août 2023

      Décisions des hautes écoles aux participantes et participants sur la base des résultats du test

      Mi-août 2023
      Si vous avez obtenu une place d’études: Confirmation de la place d’études dans le délai imparti par la haute école.

      1. Comme d’hab, vous omettez:

        “Auprès des universités de Genève, Lausanne et Neuchâtel, en revanche, il n’y a pas de restrictions d’admission sous forme de test d’aptitude. Dans ces universités, le processus de sélection s’intensifie à la fin de la première année d’études. Pour ces universités, il suffit de s’inscrire auprès de swissuniversities jusqu’au 15 février, puis de s’inscrire à l’université souhaitée, pour autant que les conditions d’admission soient remplies.”

        https://www.swissuniversities.ch/fr/service/inscription-aux-etudes-de-medecine

        1. Je n’omets pas puisque le texte parle des universités romandes en dehors de Fribourg :
          “A l’Université de Genève, les capacités d’accueil en médecine humaine sont dépassées de 32% (soit 530 inscriptions pour 400 places). Entre 2010 et 2012, les candidats aux études de médecine ont passé le même test d’aptitudes que leurs collègues alémaniques, à la différence près que les résultats n’avaient qu’une valeur indicative et non pas sélective. En décembre 2012, le Département de l’instruction publique du Canton de Genève et l’Université de Genève ont décidé de renoncer à ce test dès la rentrée académique 2013.
          Les capacités d’accueil en médecine humaine sont également dépassées dans les Universités de Lausanne (+80%, 539 inscriptions pour 300 places) et Neuchâtel (+82%, 100 inscriptions pour 55 places).”
          Il n’y a pas de numerus clausus mais une procédure d’élimination en fin de première année année qui revient au même. Le résultat est une pénurie de médecins évidente.

  3. Le problème n’est pas vraiment la formation, mais le fait que les meilleurs professionnels partent, car ils ne voient plus le sens de leur travail dans les conditions actuelles.
    Le système actuel brise l’envie de travailler aux urgences. Le tout technologique et technocratique a ses limites. Cela manque d’humanité, de vision long terme.
    Demandez aux professionnels pourquoi ils partent. Ce serait le début de la réflexion.
    Au lieu de cela, on se demande seulement comment remplacer ceux qui partent, sans changer les règles de ce milieu pour le rendre plus propice à bien fonctionner sur le plan humain.

  4. La réponse est simple.
    Nous approchons les 9 millions de personnes, avec des infrastructures pour 7 millions.

    Nos autorités ont programmé des investissements pour 10x d’arrivées depuis 20 ans. Et pour ne pas faire monter l’UDC, ont menti sur le chaos engendré par ces arrivées massives.

    Nous avons donc 20 ans de retard dans les investissements.

    1. Il faut beaucoup d’imagination pour rendre les immigrants responsables de la saturation des soins médicaux puisque le service de santé ne pourrait fonctionner sans eux, le tiers des médecins et la moitié des infirmiers.

      1. Il faut beaucoup d’imagination pour ne pas voir que + 2 millions de personnes engendrent la surcharge actuelle de nos infrastructures.

        https://www.udc.ch/actualites/publications/communiques-de-presse/beaucoup-trop-detrangers-viennent-en-suisse-et-ce-ne-sont-pas-les-bons/

        “Dire que la libre circulation des personnes remédie à la pénurie de main-d’œuvre qualifiée est une fable. « Quatre immigrés sur cinq ne sont pas des spécialistes – ce ne sont donc pas les spécialistes qui dominent, mais les travailleurs bon marché et les familles qui viennent en Suisse », explique le Conseiller national Andreas Glarner.”

          1. Source? Avenir Suisse? lol.

            58%
            https://www.avenir-suisse.ch/fr/publication/la-nouvelle-immigration/

            55%
            https://www.avenir-suisse.ch/fr/la-libre-circulation-des-personnes-reduit-elle-le-niveau-de-qualification-de-la-main-doeuvre/

            Soyons sérieux. Leurs constatations ne veulent rien dire: “Il est vrai que les personnes ayant seulement un diplôme de fin d’études obligatoires prédominent parmi les immigrés de la LCP par rapport à la population active suisse. Toutefois, la proportion de salariés ayant suivi une formation tertiaire est plus élevée chez les immigrés LCP que chez les ressortissants suisses.”

            Comprenne cette phrase qui pourra.

          2. La phrase parle des personnes de l’UE. Effectivement, au niveau des formations universitaires, il y a beaucoup d’Européens très bien formés en Suisse. Les meilleures des pays voisins viennent volontiers travailler en Suisse, pour y gagner correctement leur vie.
            Mais prétendre que ce serait 60% au niveau de tous les immigrants est erroné. On parle de l’UE et de la libre circulation des personnes avec la Suisse.
            Les immigrants qui viennent d’autres parties du monde ont des niveaux de formation souvent moins élevés, et cela ne signifie pas pour autant qu’ils soient moins travailleurs et moins intelligents.
            De fait, je crois que la limitation de l’immigration a ses raisons – ne pas créer plus de division au sein de la population, notamment en temps de crise économique. A ce jour, l’immigration en Suisse a plutôt bien fonctionné, et la Suisse dans son entier en a plutôt profité, mais peut-être faudrait-il quand même mettre quelques limites et fournir un travail décent à toutes celles et ceux qui sont déjà en Suisse? Le taux de chômage est bas, mais pas celui de l’aide sociale, ni celui de la pauvreté (qui augmente aussi parmi la population suisse), ni le taux d’endettement (qui est une bombe à retardement).
            Et je ne dis pas cela pour diviser les gens, ou pour exploiter cette division, comme le font certains politiciens. C’est une question sans réponse.

          3. Selon la Source : Migration-Mobility Survey, NCCR On the Move
            Entre 2006 et 2026, 62% des immigrants toute origine confondue ont un diplôme universitaire. Vous ne supposez tout de même pas que j’invente des chiffres.
            Le sujet du blog n’est pas la migration mais le numerus clausus dans les facultés de médecine qui forme trop peu de médecins suisses et est compensée par une migration scandaleuse de médecins formés à l’étranger aux frais des pays voisins. En n’affectant pas un budget suffisant aux facultés on déclenche cette migration. Ce sont les mêmes milieux politiques qui refusent la dépense et se plaignent du résultat.

          4. Pas que vous inventez, mais que vous omettez de donner les sources, nous privant ainsi de la possibilité de les consulter et de les discuter.

            Vous faites référence à ça ?

            https://nccr-onthemove.ch/indicators/quel-est-le-niveau-de-formation-des-personnes-migrantes/?lang=fr

            Attention: il s’agit d’une extrapolation basée sur un échantillon minuscule. Et généralement, ceux qui répondent à ces questionnaires, sont les plus formés…

            “Note méthodologique : Le niveau de formation des migrant·e·s est estimé à partir des relevés structurels 2010 à 2018 mis ensemble. Les données sont pondérées pour être représentatives de la population étrangère résidant de manière permanente en Suisse. Les personnes arrivées en Suisse entre 20 et 65 ans sont prises en compte et classées selon l’année de leur arrivée. Il faut noter que les résultats sont une extrapolation reposant sur le niveau de formation des migrant·e·s qui résident toujours en Suisse au moment de l’enquête et ne tiennent pas compte de ceux et celles qui sont reparti·e·s.”

            ***
            Moi, je vous oppose:

            Office fédéral de la statistique:

            “Parmi les personnes issues de la migration de 1re génération, la répartition des niveaux de formation est plus homogène (entre 26% pour l’école obligatoire et 36% pour le degré tertiaire). Dans la population issue de la migration de 2e génération ou plus, les personnes ayant l’école obligatoire et les personnes ayant une formation de degré tertiaire comme niveau de formation le plus élevé présentent des taux proches (20% et 30%).”

            source:
            https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/statistiques/population/migration-integration/indicateurs-integration/indicateurs/niveau-acheve.html

            Détails (UE, Europe, autres):

            https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/statistiques/population/migration-integration/indicateurs-integration/indicateurs/niveau-acheve.assetdetail.23647363.html

            Comment pourrions-nous avoir un taux de formation tertiaire des immigrés de ~ 60% (selon vous) et de 36% (selon l’OFS, pour la 1ere génération) ????

            Parce que vous omettez dans votre réflexion que, souvent, le migrant vient en famille, et que seul parent 1 a une formation tertiaire. Et les 3 autres coûtent à la société d’accueil plus que parent 1 rapporte et ne travaillent pas avant au moins une dizaine d’années (parent 2 au foyer, et enfants 1 et 2 à la crèche et au primaire).

          5. La Suisse possède deux particularités : elle a un taux de migrants parmi les plus élevés ; elle jouit d’un pouvoir d’achat tout aussi spectaculaire. En revanche les milieux populistes répètent inlassablement que la migration nous ruine. Il y a là comme une sorte de contradiction, inventée pour des raisons électoralistes.

          6. Le taux de formation universitaire de 60% n’est pas mon invention comme vous l’écrivez mais le chiffre publié par l’Université de Neuchâtel.

          7. Merci pour la source, c’est intéressant. A vérifier.
            NB. Selon ce que je comprends, il s’agit de sondages sur 17’000 personnes et non de chiffres complets. Je ne doute pas que cela soit correct pour l’UE.
            Et pour le reste du monde? Est-ce représentatif?
            Méthodologiquement, il faudrait voir comment est formé l’échantillon, et notamment si les personnes plus difficiles à contacter s’y trouvent correctement représentées (ex. personnes qui nécessitent traduction, avec faible niveau d’étude).
            Un biais est rapidement important, selon les personnes contactées.

          8. “Le sujet du blog n’est pas la migration mais le numerus clausus dans les facultés de médecine qui forme trop peu de médecins suisses et est compensée par une migration scandaleuse de médecins formés à l’étranger aux frais des pays voisins.”

            Le facteur coût mis à part, ne règnerait-il pas ailleurs qu’à l’Université de Genève, championne de ce que l’historien Michel Porret, professeur honoraire de cette Université et président des Rencontres internationales de Genève, appelle la “ségrégation internationaliste” dans son article de ce jour sur l’élection du futur recteur de l’UNIGE? (Michel Porret, “Cap rectorat 2023: l’université au cœur de la cité méritocratique”, Le Temps d’hier et d’aujourd’hui).

            “A valeurs analogues, à profils d’excellence comparables, à qualités scientifiques et humaines proches, voire similaires, la personne non issue de l’alma mater a plus de crédibilité pour un poste que celle qui en est issue”, écrit cet auteur. Il ajoute:

            “Depuis des années, à Genève ou ailleurs en Suisse, dans le champ des sciences humaines et sociales, la relève, formée à un coût scientifique, humain et financier très élevé, paie le prix fort du différentiel professionnel lié à l’impératif de l’internationalisation comme pivot de la gouvernance universitaire.

            Combien sont-ils aujourd’hui les jeunes docteur-e-s de l’Unige qui, malgré l’excellence de leur profil, ont été blackboulé-e-s en commission de nomination professorale au motif conjoncturel, idéologique et partial de l’internationalisation académique? Laquelle commission, pratiquement, entérine d’actifs réseaux d’influence et de troc de services établis entre collègues en amont du recrutement.

            Premier résultat des courses: en 2023, combien de personnes au brillant dossier académique émargent à la caisse du chômage ou survivent entre mandats ponctuels et tâches subalternes? Certaines personnes évincées au nom de l’impératif internationaliste avaient pourtant montré leur excellence académique (publications, recherche, enseignement exemplaire, ancrage dans la cité) durant près de quinze ans! Que dire de cette ingratitude institutionnelle qui multiplie les évincé-e-s? Second résultat des courses: combien de profs turbo coupés de tout ancrage civique galopent entre leur mère patrie et Genève?”

            Parmi les candidat(e)s évincé(e)s et les “profs turbo”, combien de futurs médecins et/ou de “profs (de médecine) turbo” titularisé(e)s?

            Une évaluation statistique de ce que M. Porret, qui plaide pour un recrutement selon la formule des “trois tiers” – un tiers d’internationaux, un tiers de Suisses et un tiers de locaux – appelle “le non-dit de la ségrégation internationaliste” qui règne selon lui non seulement à Genève, mais dans toutes les Universités suisses, ne serait-elle pas la bienvenue?

          9. Il est très difficile d’expliquer à qui n’est pas du métier académique que chaque profil de candidat à un poste de professeur est singulier et qu’il est impossible de commencer par établir entre deux candidats qu’ils sont : ““A valeurs analogues, à profils d’excellence comparables, à qualités scientifiques et humaines proches, voire similaire” et de donner ensuite en toute bonne conscience la priorité à un candidat national. Pendant longtemps ce mécanisme a joué dans la plupart des universités européennes et j’en fus moi-même la victime dans mon propre pays où la règle était de nommer quelqu’un de la même province!
            Il est aussi difficile d’expliquer que d’une certaine façon, les universitaires comme les artistes d’ailleurs ont une nationalité secrète, bien plus forte que celle de leur passeport. Une carrière et une réputation se construisent dans le monde entier. Les bonnes revues scientifiques sont internationales. Un candidat qui n’a jamais travaillé en dehors de son université d’origine et qui n’a jamais publié que dans des revues locales est suspect a priori et à juste titre, tout comme un musicien qui n’aurait jamais donné de concert que dans sa ville natale.
            Cette mondialisation de la science repose sur une évidence : la recherche progresse dans beaucoup de pays et un fragment de connaissance obtenu quelque part n’a pas de passeport. Notre physique a reçu des apports anglais, français, allemands et américains, mais elle est une et cette unité est sa véritable marque. Il faut le délire nazi ou soviétique pour soutenir une science nationale.
            Concrètement l’EPFL a grandement bénéficié d’un président fribourgeois qui était médecin après des présidents tous vaudois et ingénieurs. La nationalité du futur recteur de Genève est le type même de faux problème par lequel des médiocres essaient de se promouvoir.
            Parler de “ségrégation internationaliste” est une contradiction dans les termes puisque l’internationalisme consiste précisément à ne pas établir de ségrégation sur base du passeport qui ne dit rien de la qualité du candidat et tout du hasard de sa naissance.

          10. @Monsieur Neirynck,

            Vous écrivez: “La nationalité du futur recteur de Genève est le type même de faux problème par lequel des médiocres essaient de se promouvoir.”

            Depuis 1968, les recteurs de l’Université de Genève, tous genevois, étaient-ils donc si médiocres pour que, sous leur gouvernance, l’UNIGE se soit hissée parmi les 50 meilleures universités du monde selon les “rankings” internationaux? A croire que, parfois, la médiocrité paie…

            Quant aux universitaires suisses qui participent à des projets de recherche, ne publient-ils pas au moins autant que leurs collègues étrangers dans les revues et actes de colloques à l’échelle internationale?

          11. Vous me faites dire ce que je n’ai pas dit. J’ai bien écrit que jusque récemment : ” on donnait ensuite en toute bonne conscience la priorité à un candidat national. Pendant longtemps ce mécanisme a joué dans la plupart des universités européennes”. Les recteurs d’origine genevoise se conformaient à la coutume de l’époque. Le problème n’est pas de sortir de la médiocrité mais de continuer à s’élever au niveau international où on ne se pose pas le problème de l’origine du personnel académique.
            La mondialisation de la science a changé la donne. Prétendre qu’il faut poursuivre la routine antérieure revient effectivement à faire passer l’origine avant la compétence.
            Les universitaires suisses publient dans des revues internationales bien évidemment et je n’ai pas dit le contraire. Il semble que le candidat canadien possède un mérite supérieur. Il ne suffit pas de publier. Il y a aussi des niveaux. Toute le monde n’est pas Prix Nobel et ceux qui le sont ont fait mieux que d’autres.

          12. “elle a un taux de migrants parmi les plus élevés ; elle jouit d’un pouvoir d’achat tout aussi spectaculaire.”

            Oui, mais la Suisse baisse dans les classements car nous sommes toujours plus à se partager le gateau. De plus en plus sombrent donc dans la pauvreté car les mailles du filet (social) ont de plus en plus de trous.

            Oui, nous parasitons les personnes bien formées à l’étranger. Mais pas que. Pour enviton 33% qui (nous) rapportent, nous payons pour les autres 66% (crèches, écoles, hôpitaux, intégration, aide sociale, police, justice, …). Nous avons la chance qu’une fraction de ces personnes rapportent énormément. Mais nous avons aussi un déficit d’investissement.

            En résumé:
            – On vivrait mieux avec 2 millions de personnes en moins (à la condition d’attirer la quelque centaine de personnes qui rapportent des milliards);
            – On vivrait collectivement moins bien si nous investions ce que nous devons investir pour accueillir selon nos standards les deux derniers millions de personnes, mais les plus pauvres vivraient mieux.

            Conclusion: nous avons un déficit d’investissement massif. Nous vivions mieux en 2002, même si le PIB a augmenté.

          13. D’où sortez vous que la Suisse baisse dans les classements du PIB par habitant? D’après la Banque mondiale, nous sommes au huitième rang mondial bien avant nos pays voisins et dépassés seulement par les émirats pétroliers, le Luxembourg et l’Irlande. De 2020 à 2021, le PIB par habitant, la part du gâteau, est passé de 84434 $ à 87339 $.
            Comment peut-on vivre mieux si le pouvoir d’achat diminue? Expliquez.

          14. “Toute le monde n’est pas Prix Nobel et ceux qui le sont ont fait mieux que d’autres.”

            Alors la Suisse, qui compte le plus de prix Nobel par habitant – il est vrai, tous ne sont pas issus du terroir mais trois d’entre eux, en ce seul début de siècle, ne sont-ils pas moins romands? – ne s’en sort pas si mal.

            Quant au candidat canadien au poste de recteur de l’UNIGE, être reconnu par ses pairs est une chose, encore faudra-t-il qu’il sache convraincre ses futurs bailleurs de fonds. Or, dans ce domaine, le moins qu’on puisse dire est que les Hautes Ecoles ne brillent pas toujours par la transparence. Quand Michel Porret écrit dans son article que la commission de nomination de l’UNIGE “pratiquement, entérine d’actifs réseaux d’influence et de troc de services établis entre collègues en amont du recrutement”, s’exprime-t-il en étroit nationaliste?

          15. J’ai fait partie de commissions de nomination et je n’ai jamais décelé ces réseaux et ce troc dont parle Porret. Cela fait partie du complotisme. Les membres d’une telle commission savent qu’ils tiennent le destin de l’établissement en mains et ils ne sont pas totalement démunis de conscience professionnelle.

          16. L’explosion du chiffre d’affaires de Glencore et du trading de matières premières ne profitent pas au plus grand nombre en Suisse.

            Notre prospérité repose sur les PME et le service public; et les deux ont des indicateurs moroses.

            Le gateau grossi, le nombre de personnes qui quemandent une morce augmente, mais les parts sont réservées à un petit nombre puis des miettes ruissellent.

          17. “et le pouvoir d’achat moyen augmente.”

            Parce que nous souffrons d’un manque d’investissement, donc les impôts sont artificiellement bas.

            Vous ne me lisez pas ??

          18. On ne trouvera pas beaucoup de contribuables-électeurs pour trouver que les impôts sont artificiellement bas. Ceux qui vous liront supposeront que vous n’en payez pas.

          19. “J’ai fait partie de commissions de nomination et je n’ai jamais décelé ces réseaux et ce troc dont parle Porret. Cela fait partie du complotisme.”

            Michel Porret, professeur honoraire de l’UNIGE, a lui aussi fait partie de commissions de nomination. Voici ce qu’il en écrit:

            “Dans les commissions de nomination du recteur où j’ai eu l’honneur de siéger, la question cruciale de l’ancrage socioculturel et politique dans le terreau du cru prévalait. Mais moins dans le sens de rétablir le “réduit national” que dans celui du fonctionnement institutionnel de l’université, liée à des partenariats scientifiques et à des forces tutélaires que porte la culture politique helvétique et genevoise.

            Certains disent tout haut ce que d’autres pensent tout bas: il existe un “complexe internationaliste” à l’Université de Genève.”

            L’auteur de ces mots, par ailleurs président des Rencontres Internationales, serait-il complotiste? Le cas échéant, qu’est-ce qu’un(e) complotiste?

          20. Un complotiste est persuadé que tous les événemnets importants sont téléguidés par des instances secrètes.

          21. “pas beaucoup de contribuables-électeurs pour trouver que les impôts sont artificiellement bas.”

            Ah ah.
            Pourtant, l’objet de votre blog est de dénoncer le manque de ressources dans les hôpitaux. A part l’argent magique cher à votre courant de pensée, vas falloir soit augmenter les impôts pour financer les infrastructures et le personnel nécessaires à + 2 millions de personnes (donc perdre en pouvoir d’achat), soit accepter un déclin de la qualité de notre service public.

            Je trouve extraordinaire que vous dénoncez le manque de médecins, mais refusez de mettre ce manque en lien avec (1) +2 millions de personnes, et (2) un manque d’investissement (donc de levée d’impôts).

            Suisse:
            2002 : 7,285 millions d’habitants
            2022 : 8,824 millions d’habitants

            Je vous invite à lire ce rapport

            Stratégie pour lutter contre la pénurie de médecins et encourager la médecine de premier recours

            https://www.bag.admin.ch/dam/bag/fr/dokumente/berufe-gesundheitswesen/medizinalberufe/medizinische-grundversorgung/bericht-br-strat-aerztemangel-foerderung-ha-med.pdf.download.pdf/bericht-br-strat-aerztemangel-foerderung-ha-med-fr.pdf

            J’en tire la conclusion suivante:

            En 2009, la Suisse avait 32’000 médecins, soit 4.12 médecins pour 1000 habitants (p. 15).

            En 2020, la Suisse avait 38’502 médecins, soit 4,45 médecins pour 1000 habitants. 17 610 médecins exercent dans le secteur hospitalier.

            Comparaison internationale:

            https://www.oecd-ilibrary.org/sites/edf82383-fr/index.html?itemId=/content/component/edf82383-fr

            Le problème n’est pas le manque de médecins, mais le manque d’investissements publics pour dispenser des soins de qualité pour + 2 millions d’habitants dans le système hospitalier.

            Nous devons investir massivement dans les infrastructures, pour rattraper notre retard d’investissement et mieux utiliser les spécialistes présents.

            … donc augmenter les impôts pour payer le juste coût de la (libre) circulation du parent 1 travailleur et sa famille à (notre) charge. Et cessez de mentir à la population sur le coût réel de l’ALCP.

            PS: je me réjouis de lire votre bon mot, déconnecté de mon commentaire…

          22. Le sujet du blog n’est pas le manque d’investissement dans les hôpitaux mais le manque de formation pour des étudiants en médecine. Il y faudra un budget supplémentaire. Mais où le trouver?
            Ce n’est pas la prérogative de la Confédération puisque la formation, y compris universitaire, est la charge des cantons. Un canton universitaire n’augmentera pas ses impôts pour fournir des médecins aux autres cantons. Les diplômés suisses auront tendance à rester sur son territoire. On peut ainsi arriver à former trop peu de médecins pour la Suisse et assez pour les cantons qui ont le pouvoir de décision.
            Comme nous sommes dans une démocratie, les citoyens contribuables disposent de l’élection des exécutifs. Proposer d’augmenter les impôts n’est pas favorable à un parti sauf s’il regroupe des classes sociales qui ne paient pas d’impôts. La majorité des contribuables a donc un pouvoir de décision.
            La Suisse n’a pas pour l’instant une pénurie trop criante de médecins parce qu’elle pompe les ressources de ses voisins jusqu’au tiers de ses besoins. C’est cela le sujet du blog.

          23. Nous voilà passé de votre sous-titre “Pénurie de médecins” à pas une pénurie de médecins “trop criante” (criarde?).

            J’en termine là.
            Nous parasitons certes les médecins de nos voisins, ce qui n’est pas un gage d’avenir.
            Ce que nous avons cependant besoin, c’est investir massivement dans nos infrastructures pour faire face au défi de + 2 millions de personnes.

            Il nous faut des hôpitaux, des écoles, des postes de police, des prisons, etc.

            Nous devons payer le prix de l’ALCP, donc augmenter nos impôts, et cessez de nous mentir. Ces + 2 millions de personnes ont un coût gigantesque pour notre collectivité, sauf à laisser une Suisse moins efficace et belle à nos enfants/petits-enfants.

            L’immigration a un coût; cessons de le cacher.

          24. Les immigrants paient des impôts et des cotisations, travaillent et produisent du revenu. C’est trompeur de les présenter comme une pure charge pour les citoyens suisses. Sans immigration, nous n’aurions pas le même système de santé, la même recherche et la même formation. A moins d’être aveugle nous avons des écoles, des hôpitaux et des postes de police bien mieux équipés que ceux de nos voisins. C’est le personnel qui manque.

          25. Vous savez… la réalité existe.

            C’est bien de répéter le discours du XXe siècle; c’est mieux de vivre et décrire le réel du XXIe siècle.

  5. Au lieu d’un numerus clausus, puisque la Suisse n’a pas la capacités de former assez de médecins , la solution est que cantons et confédération payent la formation à l’étranger.
    A l’heure actuel, en cas de rejet d’entrée aux études de médecine, si on n’a pas une famille aisée, la formation à l’étranger est hors de portée.

    Il est temps que la Suisse passe des accords avec des pays et paye la formation de médecin. C’est le moyen le plus rapide de rattraper notre retard.

    1. La Suisse est parfaitement à même de former ses propres médecins mais elle n’engage pas le budget nécessaire. Celui-ci dépend des cantons universitaires qui ne peuvent ou ne veulent pas payer pour les autres. La solution déjà maintes fois proposée est de donner aux facultés de médecine le statut fédéral comme les deux EPF. Mais il est tellement plus économique de se fier à l’immigration tout en prétendant qu’on n’en veut pas.
      Les autres pays ont les mêmes limitations que les nôtres et n’accepteront pas facilement des foules d’étudiants suisses. Depuis notre exclusion d’Erasmus, les étudiants suisses ne disposent pas des mêmes droits que ceux de l’UE.

      1. Ma solution serait du temporaire pour les recalés en attendant que ça bouge. La formation de médecin, on peut certainement la faire dans des pays de l’Est à condition que la Suisse paye la formation pas seulement les frais d’étudiants. En Ukraine, on a vu qu’il y avait eu beaucoup d’étudiants africains.
        Cette situation d’études à l’étranger, pourrait amener à réagir vite, question de fierté.
        L’EPFL accueille beaucoup d’étudiants du Maghreb, Erasmus est un autre sujet.

        1. Si la pénurie de médecins a pour cause réelle le manque de budget, il n’y a pas de solution en affectant l’équivalent de ce budget à des pays étrangers.

          1. Merci d’évoquer le problème de la relève médicale suisse. On peut penser que la pénurie de médecins va se prolonger bien au-delà de 10 ans. Il n’est peut-être pas opportun de parler de médecins suisses puisqu’un nombre important de médecins étrangers s’occupent d’ores et déjà de la population suisse, médecins étranger formés à grand frais ailleurs et réfugiés économiques ou réfugies tout court en Suisse au détriment de leur pays d’origine.
            En réalité, la pénurie de médecins est hétérogène. Elle touche moins les grandes villes que les régions moins densément peuplées, moins les cliniques privées que les hôpitaux publics et moins la médecine spécialisée que la médecine générale.
            Dans une lettre datée de 1990, le président de la société neuchâteloise de médecine et moi-même attirions l’attention du conseiller fédéral en charge de la santé publique sur le déséquilibre croissant se dessinant entre généralistes et spécialistes. La réponse signalait l’incompréhension du problème par les services concernés et leur incompétence. Il n’est pas besoin d’évoquer l’accroissement de la population ou son vieillissement pour justifier la pénurie actuelle, des démographes avertis comme Pierre Gilliand en faisaient déjà des projections correctes voilà plus de trente ans.
            La médecine suisse (comme aussi la française, la suédoise ou l’anglaise, aussi bien pour des services étatisés que « privés ») évolue vers un système de santé à deux vitesses sur le modèle très libéral que connaissent les USA : le système de santé y est le plus onéreux du monde et n’apporte pas de soins à l’entier de la population. Le système de santé est devenu un secteur économique extrêmement lucratif. Cette évolution est favorisée par les parlementaires et par les assurances-maladie et leurs complémentaires très présentes sous la coupole. Les bénéficiaires de ce système très lucratif ne sont pas la médecine générale ou l’hôpital public, assujetti à des exigences économiques très strictes sauf là où un service d’urgence ou de soins intensifs est nécessaire, pas assez rentable pour des établissements privés qui, soit dit en passant, ne participent pas à la formation des jeunes médecins donc pas non plus à la relève médicale.
            Concernant cette relève, on peut prendre comme exemple la région neuchâteloise ou jurassienne. L’université de Neuchâtel assure la première année de formation de médecine mais seule une vingtaine d’étudiants peuvent poursuivre leurs études en Suisse romande (les facultés alémaniques leur sont interdites), qui est le nombre de places réservées à Lausanne et Genève aux heureux élus indépendamment d’un seuil d’exigence académique.

  6. La pénurie de médecins suisse est très hétérogène en terme de spécialités et de répartition géographique. Mais il me paraît fort douteux qu’elle ne dure que dix ans.
    Dans une lettre au chef du département de l’intérieur de l’époque, Flavio Cotti, le président de la société neuchâteloise de médecine et moi-même signalions en 1990 la diminution du nombre des candidats à la médecine générale en Suisse au profit des spécialistes. La réponse lénifiante témoignait de la mauvaise connaissance du dossier du responsable de l’exécutif de l’époque et de ses successeurs et la situation actuelle en est partiellement l’aboutissement.
    En réalité, le secteur de la santé est devenu un secteur économique florissant construit sur le modèle ultralibéral importé de USA où l’importance des profits est à la mesure du déficit de soins aux moins bien nantis. Une médecine à deux vitesses s’installe chez nous aussi avec l’accord des parlementaires élus par les citoyens (c’est une évolution ultralibérale ET démocratique) et avec l’aide des caisse-maladies et leurs assurances complémentaires très influentes sous la coupole fédérale. Dans ce système de profit, la médecine de famille ou les hôpitaux publics ont peu de place et sont soumis à des impératifs financiers stricts. Si bien que peu de gens importants sont soignés en médecine générale ou ailleurs qu’en clinique ou qu’en division privée de l’hôpital public sauf si des infrastructures coûteuses et non rentables comme les urgences ou les soins intensifs sont nécessaires.
    Quand à la relève: un exemple. L’Université de Neuchâtel offre la première année de formation en médecine. Des nombreux candidats, seuls une vingtaine pourront continuer leurs études indépendamment de leurs motivations ou de leurs résultats aux examens. C’est le nombre de places d’accueil offertes par les facultés romande de médecine, les facultés alémaniques leur étant définitivement interdites.
    Manque de volonté politique, manque de place de formation, difficultés à recruter toujours plus de médecins réfugiés ou réfugiés économiques étrangers…La pénurie de médecins pourrait bien durer plus de dix ans. Le vrai problème est que dans les pays industrialisés et peut-être encore davantage ailleurs, l’impératif économique vient bien avant les préoccupations de santé pour la planète ou pour la population.

  7. Merci d’évoquer le problème de la relève médicale suisse. On peut penser que la pénurie de médecins va se prolonger bien au-delà de 10 ans. Il n’est peut-être pas opportun de parler de médecins suisses puisqu’un nombre important de médecins étrangers s’occupent d’ores et déjà de la population suisse, médecins étranger formés à grand frais ailleurs et réfugiés économiques ou réfugies tout court en Suisse au détriment de leur pays d’origine.
    En réalité, la pénurie de médecins est hétérogène. Elle touche moins les grandes villes que les régions moins densément peuplées, moins les cliniques privées que les hôpitaux publics et moins la médecine spécialisée que la médecine générale.
    Dans une lettre datée de 1990, le président de la société neuchâteloise de médecine et moi-même attirions l’attention du conseiller fédéral en charge de la santé publique sur le déséquilibre croissant se dessinant entre généralistes et spécialistes. La réponse signalait l’incompréhension du problème par les services concernés et leur incompétence. Il n’est pas besoin d’évoquer l’accroissement de la population ou son vieillissement pour justifier la pénurie actuelle, des démographes avertis comme Pierre Gilliand en faisaient déjà des projections correctes voilà plus de trente ans.
    La médecine suisse (comme aussi la française, la suédoise ou l’anglaise, aussi bien pour des services étatisés que « privés ») évolue vers un système de santé à deux vitesses sur le modèle très libéral que connaissent les USA : le système de santé y est le plus onéreux du monde et n’apporte pas de soins à l’entier de la population. Le système de santé est devenu un secteur économique extrêmement lucratif. Cette évolution est favorisée par les parlementaires et par les assurances-maladie et leurs complémentaires très présentes sous la coupole. Les bénéficiaires de ce système très lucratif ne sont pas la médecine générale ou l’hôpital public, assujetti à des exigences économiques très strictes sauf là où un service d’urgence ou de soins intensifs est nécessaire, pas assez rentable pour des établissements privés qui, soit dit en passant, ne participent pas à la formation des jeunes médecins donc pas non plus à la relève médicale.
    Concernant cette relève, on peut prendre comme exemple la région neuchâteloise ou jurassienne. L’université de Neuchâtel assure la première année de formation de médecine mais seule une vingtaine d’étudiants peuvent poursuivre leurs études en Suisse romande (les facultés alémaniques leur sont interdites), qui est le nombre de places réservées à Lausanne et Genève aux heureux élus indépendamment d’un seuil d’exigence académique.

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