Bilan d’un exercice impromptu

Il semble bien que le pire ait été évité, du moins provisoirement. Le nombre de malades hospitalisés en Vaud est largement inférieurs à ce qu’il était le 25 mars. C’est dû d’abord à la qualité du système médical, qui a si souvent été critiqué pour son coût. C’est pareil avec les assurances : on n’en admet le prix qu’en cas d’accident. Il n’y a donc pas trop de médecins en Suisse, il y en a trop peu en cas d’urgence. Le quart a été formé à l’étranger. Il est temps de supprimer le numerus clausus de nos facultés de Médecine. Si, comme elle en avait le droit, la France avait mobilisé tout son personnel médical, y compris les frontaliers travaillant dans les hôpitaux suisses, comment aurait-on accueilli les patients dans les cantons de Vaud et de Genève ? Nous avons évité cette catastrophe, en accueillant à titre de réciprocité européenne, les malades que les hôpitaux alsaciens ne pouvaient plus traiter. Comme le Luxembourg et l’Allemagne. Parce que la solidarité prime l’isolement. Parce que c’était l’évidence : Bâle est plus proche de Colmar que de Lugano.

Néanmoins, certains se permettent de critiquer le Conseil fédéral pour son inaction face à l’épidémie. Ce procès est injuste. Un véritable gouvernement aurait anticipé de longue date la survenue d’une épidémie, préparé des stocks de masques, de respirateurs, de lits de réserve ; il aurait confiné tout le monde dès la première attaque fin janvier et pas deux mois plus tard ; il aurait dirigé, non pas coordonné, l’action des cantons vaquant en ordre dispersé.

Oui, si le Conseil fédéral avait été un véritable gouvernement. Non, puisqu’il ne l’est pas, puisque que le peuple n’en veut pas. Il n’a pas de chef, pas d’équipe homogène, pas de programme et pas de majorité de soutien au parlement. On ne peut pas demander à sept personnes, élues au hasard des scrutins une par une, en fonction de critères divers et parfois contradictoires, sans compétences particulières, de constituer un gouvernement fort face à l’adversité. Ignazio Cassis ancien médecin cantonal tessinois a été tenu à l’écart des conférences de presses de quatre conseillers fédéraux, appelés seuls à prendre la parole, précisément parce qu’ils étaient incompétents en la matière. Il s’agit donc bien d’une modeste délégation parlementaire, représentant tous les partis, choisie parmi les plus consensuels. C’est idéal pour expédier les affaires courantes en ne faisant de peine à personne. Ce choix, fait voici 170 ans, a bien réussi jusqu’à présent à préserver l’unité du pays des quatre nations.

Mais notre présent n’est plus le passé. Nous vivons dans un monde dangereux dominé par trois grandes puissances, engagées dans un bras de fer, n’hésitant pas à recourir à une guerre économique sans pitié. Toujours au risque de dégénérer en conflits armés, soigneusement limités dans l’espace, en choisissant comme arènes de pauvres pays sous-développés qui ne peuvent pas se défendre. Ces puissances ont installé le règne du non-droit, agissent avec brutalité à l’égard des pays faibles, se moquent bien des Droits de l’homme. La Chine a réussi à faire oublier qu’elle est responsable de la gabegie actuelle en exhibant des transports de matériels médical, vendus au-dessus de leur prix à de petites puissances qui ont eu la faiblesse de lui confier l’essentiel de leur approvisionnement vital.

Dans ce monde de brutes, on ne doit pas attendre grand-chose d’un exécutif suisse, qui n’en est pas un, car démuni de pouvoir puisque toute loi est susceptible d’être annulée en votation populaire. La Suisse n’est pas une démocratie directe, mais une acratie, une absence de pouvoir. Celui-ci est dissous en de minuscules parcelles au point qu’en cas de malheur – et nous y sommes- il est impossible de trouver le responsable. Il n’y en a point car il faudrait trouver la personne qui a pris la mauvaise décision. Comme une personne seule ne prend jamais une décision, c’est impossible.

Quand la poussière sera retombée, on mettra certainement en activité un comité quelconque, chargé de faire toute la lumière. Il fera un acte de contrition comme la Commission Bergier, en exagérant même la responsabilité collective, sans désigner quelque responsable que ce soit. Personne n’a fait d’erreur parce que personne n’est en position d’en faire.

Dès lors, s’il faut tirer quelques leçons du malheur qui nous accable, la première serait celle-ci : dans certaines circonstances graves, il faut prendre des décisions lourdes, impopulaires et rapides. En principe, selon l’article 185 Cst., le Conseil fédéral a tous pouvoirs en cas d’urgence. En pratique, les personnes qui le composent n’ont pas été choisies pour ce cas de figure. Représentant tous les partis, elles n’ont pas les mêmes réactions face aux menaces. Il n’y pas de chef, tous sont égaux, la décision est collégiale. Des oppositions sur le fond peuvent mener, sinon à la paralysie, du moins à de funestes retards.

Ce qui vient de se passer ne mènera pas à une révision déchirante de nos institutions. Comment l’orienter du reste ? Comment se mettre d’accord puisque le dernier des citoyens aura son mot à dire ? Il n’y a pas de majorité pour soutenir fut-ce un seul article du programme nécessaire.

A savoir dans l’immédiat : la constitution de stocks sous la responsabilité clairement définie d’une instance connue, la fin du numerus clausus en Médecine, un meilleur statut pour les infirmières ; un entrainement réel de l’armée et de la protection civile pour ce genre de catastrophe plutôt qu’un improbable combat de chars ou une bataille aérienne ; plus de recherche fondamentale pour rendre la mise au point d’un vaccin plus rapide.

A plus long terme pour gérer la transition climatique qui est la vraie menace : la fin complète de l’extraction des combustibles fossiles, charbon, pétrole, gaz ; la relocalisation des productions essentielles ; un pouvoir d’achat réorienté vers la production locale non seulement d’énergie, de biens mais aussi de services ; plus d’éducation, de culture et de soins de santé ; moins de tourisme de masse, moins de résidences secondaires, moins de vacances sur les plages ou dans la montagne ; peu ou pas de publicité ; des médias orientés vers l’information, la formation, l’éducation, la culture, plutôt que le divertissement inculte ; une gérance rationnelle de la démographie nationale et une gestion humanitaire des migrations.

Plus de solidarité internationale et moins de repli. Et donc pour couronner le tout : nous mettre sous l’égide de la seule grande puissance à savoir l’UE, qui puisse tenir tête aux trois pays-voyous dominant la scène. Travailler, à titre de membre de plein droit, à transformer cette alliance informe en une grande puissance. La concevoir comme un espace économique capable de subsister en autarcie.

Personne n’en veut pour l’instant. Il faudra encore quelques épidémies, l’explosion d’une centrale nucléaire, un épisode de sécheresse, le franchissement de la frontière par des hordes de réfugiés. Les grands malheurs sont source de sagesse.

Jacques Neirynck

Jacques Neirynck est ingénieur, ancien conseiller national PDC et député au Grand Conseil vaudois, professeur honoraire de l'École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), d'origine belge, de nationalité française et naturalisé suisse. Il exerce la profession d'écrivain.

21 réponses à “Bilan d’un exercice impromptu

  1. Cher Monsieur Neyrinck, je me permets de transmettre souvent vos propos sur ce blog à un maximum de personnes car vous avez le mérite de dire tout haut ce que tout le monde n’ose encore penser.
    Hier à l’émission Forum a été posé une question à Messieurs Berset et Koch qui ont prouvé par leur réponses qu’ils savaient parfaitement “coordonner” les actions que le gouvernement se doit de faire en cette période.
    La question était pourtant simple:
    “”Il y a eu exercice NATIONAL de Sécurité qu’a dirigé Mme Keller Sutter le 31octobre 2019 ! l’exercice précédent portait aussi sur une Pandémie en Suisse !
    Comment comptez-vous à l’avenir protéger la population des risques sanitaire sérieux provenant d’autres régions du monde ? “”
    Réponse de M. Berset : on a depuis quelques années changé la loi sur les pandémies….

    OK bien reçu, ceci est donc un super job de la part de nos fonctionnaires fédéraux.
    Et je me demande donc à part cette magnifique loi, qu’est ce qui a été réalisé de concret sur le terrain ?
    Visiblement rien, comme vous le décrivez si justement M. Neyrinck.

    Donc, M. Berset n’a toujours pas intégré dans la réflexion du conseil fédéral la prise en compte des exercises de “Sécurité National” ou Mme Keller Suter avait convié plus de 300 responsables de tous cantons.
    Donc de tous ces exercises de “Niveau National”, absolument rien n’a été retenu !
    Si peut être qu’il faille absolument acheter un certain nombre de Jet pour l’armée car il y a surement un très gros risque pour notre population de se faire attaquer par des peuplades belliqueuses.

    Donc en définitive, de ces brassages d’air au niveau national, il n’en ressort pratiquement RIEN qui puisse nous permettre de dire aujourd’hui que nous avons des “Managers” ou Conseillers Fédéraux qui sachent mettre en place une stratégie et non pas juste une coordination basé sur de la réactivité.

    Pas facile de se rendre compte de tout ceci maintenant seulement à la lumière de cette pandémie qui nous touche tous!

  2. Cher Monsieur Neirynck,
    Vous voici de nouveau en plein exercice d’un de vos sports favoris : taper sur le CF !
    A notre âge, n’avons-nous pas encore appris que la perfection n’est pas de ce monde ?
    Au risque de vous contrarier, je trouve que le CF vient de trouver un leader indiscutable en la personne d’Alain Berset (qui a pour seul défaut d’être socialiste). Comparez par exemple le niveau de leurs conférences de presse avec celles de l’inénarrable Sibeth (tant pis si je suis accusé de racisme primaire) Une fois de plus la « Main Invisible » nous a évité le pire ! Cette main invisible ne serait-elle pas le gros bon sens dont nous sommes miraculeusement dotés, dû en partie à la majorité alémanique de notre pays (qui nous a déjà épargné l’improbable aventure européenne) ? L’équilibre sur lequel repose notre réussite est fragile. Ne le remettons pas en cause en écoutant quelque « spin doctor » plus apprenti-sorcier d’ailleurs que docteur !

    1. “Néanmoins, certains se permettent de critiquer le Conseil fédéral pour son inaction face à l’épidémie. Ce procès est injuste.”
      Voilà ce que j’ai vraiment écrit. Vous en déduisez que je tape sur le CF. Il faudrait lire ce qui a été écrit et non pas ce que vous projetez dessus.

    2. En parlant de “main invisible”, vous voulez parler des Etats et/ou des banques centrales?

      Ce ne me semble pas la fameuse main, comme aux cartes, qui demande des subsides à tout va…
      … et rebelote, nationaliser les pertes et privatiser les bénéfices, toutes catégories confondues.

      Le summum, ou l’as des pilotes, étant quand même Easyjet.

      Les avocats et autres notaires ne devraient pas tarder à réclamer aussi une manne de main invisible et bienveillante à votre ami Milton!

      C’est un scoop, gardez-le pour vous 🙂

  3. Notre petit pays ne peut rien faire face aux dinosaures poliment voyous, sauf que quelques petites entités industrielles et/ou commerciales pensent pouvoir s’en sortir à l’individuel, mais cela ne semble pas les mettre à l’abris de demander une aide de l’Etat en cas de problème. L’Alleingang prôné par certains partis n’est à mon humble avis certainement pas une solution d’avenir et la collaboration active à un projet et une cause commune comme l’Europe est vraisemblablement plus intelligente et utile pour notre petit pays. La crise en cours est aussi révélatrice de plusieurs incohérences, dont personne n’est responsable, alors que une autre crise, moins aigüe, nous guette à moyen terme, le climat de notre planète. Homo sapiens avait compris que ses chances de survie sont meilleures si regroupés qu’individuellement. Restons optimistes, mais nos décideurs vont, je le crains, avoir dans un avenir immédiat de sérieuses décisions à prendre.

  4. Notre pays , fédéraliste jusqu’au bout des ongles que M. Neirynck n’a toujours pas compris , s’en sort mieux que la Belgique qui compte trois plus de victimes !
    Il est encore trop tôt pour tirer toutes les leçons de cet épisode pas encore terminé et chaque épreuve permet de se perfectionner pour les suivantes …
    Le moment est très mal choisi de parler d’une quelconque adhésion à l’UE qui va traverser une zone de turbulences pendant ces prochaines années, dont on ne sait pas comment elle va s’en sortir !
    Je ferai remarquer au passage que toutes les frontières nationales étaient fermées et donc que chaque chaque pays européen a adopté ses propres mesures sans concertations !!!
    De même , le peuple suisse a ratifié la loi sur la transition énergique pour 2050, alors que les 28-1 en sont au mieux aux pourparlers préliminaires et n’ont aucune stratégie commune ! L’UE (comme les USA) est tout autant dépendante de la Chine que la Suisse en ce qui concerne ses stocks sanitaires !
    M. le donneur de leçons ferait mieux de revoir ses informations avant de nous faire part de ses analyses grotesques …

    1. Je vous renvoie à mon ouvrage “Le Secret des Suisses” qui est un éloge du fédéralisme.
      Je ne vois pas ce que cette référence à la Belgique vient faire dans votre critique de mon blog. Je n’en parle pas.

    2. C’est quoi cette allusion à la Belgique ? Vous voulez dire que M. Neirynck serait mal placé pour parler du sujet sous prétexte qu’il serait “d’origine” étrangère ? Mais je rêve !

      Bravo M. Neirynck. Vous éclairez notre pays par vos articles bien sentis.

      1. Effectivement on me jette mon origine régulièrement à la tête pour me faire taire ou pour me déconsidérer. C’est le sort de toutes les catégories spéciales accusées de tous les maux, les juifs, les homosexuels, les francs-maçons, les Noirs. Pourquoi les Belges? Pourquoi pas les Portugais ou les Estoniens? Mystère de la mesquinerie ordinaire.
        J’ai publié volontairement le commentaire de M.Giot pour montrer quelle est la mentalité dominante.

      2. haha, vous êtes sympa, chère Antoinette, d’abord parce que vous en avez… du courage, autant que de l’âge et j’ai cru lire dans vos échanges avec une certaine blogueuse, une certaine force, même si, n’y prêtez pas attention, vous savez mieux que moi, que la vie est faite de tout.

    3. Par “analyses grotesques”, entendez-vous vos propres inepties? Vos propos sur le fédéralisme relèvent du pur fantasme. Vous rêvez d’une Suisse d’avant Marignan et ne supportez pas que d’autres soutiennent des opinions contraires à vos préjugés. Vous ne leur opposez que vos humeurs du moment, vous remuez sans cesse la même bouillie, incapable que vous êtes de leur répondre sans raisonner comme une soupape.

      Comme l’a fait sur son propre “blog” monsieur Brisson, que vous n’avez pas épargné non plus par vos radotages, monsieur Neirynck devrait vous refuser l’accès au sien. S’il vous publie, c’est par pure probité intellectuelle, vous montrant du même coup qui est fédéraliste.

      J’espérais pouvoir me dispenser de vous le dire, mais, comme d’autres vous l’ont déjà fait remarquer, sans succès, semble-t-il, vous abusez par trop de l’espace que ce journal vous concède. Le plus grand service que vous puissiez rendre aux lecteurs, c’est de disparaître. Sinon, comme vous l’a conseillé monsieur Brisson, de vous faire soigner.

    4. Monsieur Hubert GIOT, Ce n’est pas par vos remarques imprégnées de ressentiments et vos analyses superficielles qui font avancer le sujet.
      Je connais peu de politiciens qui proclament haut et fort que la vérité est une exigence primordiale, indispensable à la confiance envers nos élus politiques. Je déplore aussi que nos représentants parlementaires ne soient pas plus nombreux à être de formation scientifique. Par ailleurs, après avoir parcouru le monde, je peux affirmer que pour avoir une opinion objective de son propre pays il faut sortir de son petit jardin de confort. (Et peut être participer à l’aventure Européenne ?) Ainsi le fait de connaitre une autre culture que celle de « la lutte à la culotte » est certainement un avantage (par exemple celle de Belgique).
      Merci Monsieur Neirynck pour vos initiatives

  5. J’ai lu votre article avec beaucoup d’intérêt, mais les chiffres que je consulte ne disent pas la même chose.
    Le site « www.corona-19.ch » le 25 mars dans le canton de Vaud, il y avait 2.215 cas de personnes infectées le 10 avril il y en a 4.424 et vous trouvez que c’est une amélioration. Moi pas.
    Quand au rapport qualité-prix de la médecine suisse, là aussi j’ai des doutes. Si vous regarder la courbe « Cumulative Prévalence pour 10.000 habitants » du même site, la Suisse a de plus mauvais résultats que l’Italie.
    Contrairement à vous, je me pose la question : Pourquoi payons-nous si cher pour un résultat médiocre ?
    J’aime beaucoup vos articles mais cette fois j’ai du mal à vous suivre.

    1. Nous avons subi une infection plus large mais une moindre mortalité. Ce qui baisse pour l’instant, ce n’est évidemment pas le nombre cumulé d’hospitalisation de puis le début qui ne peut faire que croitre mais le nombre d’hospitalisés qui est en train de diminuer. Plus de gens sortent de l’hôpital qu’il n’en rentre. C’est très visible sur le site coronavirus vaud.

    2. Il n’y a pas 2215 cas de personnes infectées: il y a 2215 de personnes qui ont été testées positives à la présence du virus. Comme les critères pour tester diffèrent d’un pays à l’autre (peut-être aussi par manque de réactifs), les chiffres ne sont donc pas comparables. La même nuance s’applique aux morts attribuées au coronavirus: mort “avec” le virus ou “du” virus, ou même “suspicion” de mort du virus (USA). Les chiffres que vous mentionnez sont exacts, mais ils reflètent seulement le fait que le canton de Vaud a beaucoup testé, ce qui est une des qualités qu’on attend des cantons puisque la santé est une compétence cantonale.

  6. Il a certainement des choses perfectibles, mais vous répondant de France (Alsace) de quoi vous plaignez vous ? Ici ça a été et c’est encore le folklore complet grâce à “l’élite centralisée”: comme l’indiquait un journaliste du temps cela a rappelé “La Grande Débacle” à ceux qui l’ont connu. C’est d’informations suisses que j’ai pu dès début mars prendre des précautions et les diffuser entre autres dans des entreprises locales: Merci. Cela rappelle que nous devons comptez sur nous même: la notion de responsabilité individuelle est elle la même en comparant le comportement des suisses et des parisiens ?
    Quand à la gestion des hôpitaux il suffit de lire les rapports de la Cour des Comptes depuis 15 ans pour voir qu’un entrepreneur dans le même cas aurait son entreprise en faillite, ses biens saisis et logerait en prison

  7. Cher Monsieur, intéressant votre programme. Je relève cependant qu’il ne concerne guère le conseil fédéral dont vous critiquez la faiblesse de par sa composition de sept membres sans chef autoritaire – mais concerne le parlement. Dieu merci les sept du conseil fédéral sont sept et non pas un seul Jupiter. Vous semblez être comme tout le monde : préférence in fine pour la dictature… à condition d’être soi-même de dictateur. Et joyeuses Pâques!

    1. Effectivement le Conseil fédéral ne peut relever le défi puisqu’il n’a pas les attributions d’un gouvernement. Je crains autant la dictature que vous mais la nature a horreur du vide et les lacunes des institutions sont de occasions pour des apprentis dictateurs.

  8. Voilà un article où sont résumées les idiosyncrasies du Professeur Neirynck.

    Pour lui, les problèmes ne peuvent être traités qu’au niveau mondial. On aligne des noix sur un bâton en faisant croire qu’il serait possible de “décider” par des aréopages internationaux de sachants éclairés, sous entendu sans recourir au suffrage universel, qui refuserait tout : “la fin complète de l’extraction des combustibles fossiles, charbon, pétrole, gaz ; la relocalisation des productions essentielles ; un pouvoir d’achat réorienté vers la production locale non seulement d’énergie, de biens mais aussi de services ; plus d’éducation, de culture et de soins de santé ; moins de tourisme de masse, moins de résidences secondaires, moins de vacances sur les plages ou dans la montagne ; peu ou pas de publicité ; des médias orientés vers l’information, la formation, l’éducation, la culture, plutôt que le divertissement inculte ; une gérance rationnelle de la démographie nationale et une gestion humanitaire des migrations. Plus de solidarité internationale et moins de repli. Et donc pour couronner le tout : nous mettre sous l’égide de la seule grande puissance à savoir l’UE, qui puisse tenir tête aux trois pays-voyous dominant la scène. Travailler, à titre de membre de plein droit, à transformer cette alliance informe en une grande puissance. La concevoir comme un espace économique capable de subsister en autarcie.”

    Là toute personne qui se situe sur le terrain du réel doit constater le caractère utopique des vues du sympathique écrivain ingénieur professeur politicien. Bien sûr certaines de ces idées sont valables, mais ce qui manque surtout, c’est le sens du possible. Or, la politique n’est-elle pas l’art du possible?

    Et puis de toute façon, dans ce programme, il n’y a pas de place pour le peuple suisse, sa volonté de rester indépendant, sa démocratie semi directe, etc. Car pour réaliser le programme rêvé par Mr Neirynck, il faudrait mettre entre parenthèses les droits populaires. Autrement c’est impossible. Ce programme est beaucoup trop dirigiste, élitiste et autoritaire. Il exige une sorte d’empire universel soumis au despotisme éclairé des savants. La démocratie n’y a aucune place.

    La conclusion, c’est le pompon : “Il faudra encore quelques épidémies, l’explosion d’une centrale nucléaire, un épisode de sécheresse, le franchissement de la frontière par des hordes de réfugiés. Les grands malheurs sont source de sagesse.”

    Bref, il faut appeler de nos vœux les calamités, car elles seules forceront le peuple abruti, ignare, inculte, inconscient des enjeux, attaché à sa bagnole, à ses loisirs, à son vulgaire niveau de vie, bref tous ces bœufs, de consentir aux volontés de l’élite éclairée.

    Soit dit en passant, là Mr Neirynck prend un gros risque. Il fait un pari. Parce qu’il se pourrait aussi que les conséquences d’une pandémie (dépression économique qui nous pend au nez) ou du franchissement des frontières par des hordes de réfugiés, soient plutôt un raz de marée des affreux “populistes” qui ainsi arriveraient au pouvoir. Donc, l’argument est à double tranchant.

    Bref, vraiment il est clair que ce qui intéresse Mr Neirynck, n’est pas tant de résoudre pragmatiquement les problèmes, c’est avant tout d’édifier une République universelle, autrement dite “Gouvernance mondiale”. Il prend prétexte du réchauffement climatique pour réclamer la gouvernance mondiale. Mais ce n’est qu’un prétexte. Si le climat se refroidissait, il exigerait la gouvernance mondiale quand-même, pour combattre le refroidissement. Il ne perd jamais de vue son obsession.

    Quant à la pandémie, tout démontre que seuls les pays qui ont agi en état souverains, fermant leurs frontières et comptant sur leurs propres forces, ont réussi à la maîtriser. Mais c’est égal: il y a une pandémie, donc la question, pour un mondialiste, est: comment tirer parti de cette pandémie pour faire avancer l’idée d’une solution mondiale? En l’occurrence la solution mondiale a échoué, mais c’est égal. Dans un cerveau mondialiste, l’utopie est plus forte que tout.

    Quand on lit ce genre d’articles, on se sent de plus en plus “populiste”.

    1. Le mot “gouvernance mondiale” n’est prononcé nulle part dans mon blog. C’est le commentaire qui l’introduit. Cela s’appelle de l’amalgame en rhétorique.

      1. Vous bottez en touche.

        C’est vrai que vous n’employez pas cette expression en toutes lettres dans ce texte. Mais elle est en filigrane dans la plupart de vos articles. Et puis, ne soyons pas de mauvais foi: vous avez souvent écrit que ces problèmes de transition climatique, de migrations etc., ne pouvaient se régler qu’à l’échelon multilatéral et international. Vous avez plaidé pour une résolution mondiale du problème climatique. Vous êtes très probablement partisan du Pacte de Marrakesh sur les migrations, sous l’égide de l’ONU, projet mondialiste par excellence. D’ailleurs ce n’est pas un hasard si votre blog a choisi pour emblème l’assemblée générale de l’ONU.

        Ce qui est très intéressant, je dois le reconnaître, c’est que vous semblez avoir perdu confiance, en effet, dans l’échelon mondial. Sans doute est-ce dû au fait que la première puissance du monde, qui portait jusqu’ici le projet de gouvernance mondiale, c’est à dire les USA, sont désormais gouvernés par un populiste fieffé qui a des chances réelles d’être réélu.

        Vous semblez donc vous être rabattu sur un projet d’intégration européenne totalement abouti, pour remplacer la puissance hégémonique américaine défaillante de votre point de vue. SIl me semble que c’est un peu dans l’esprit du président Macron, l’un des principaux porte-paroles actuels des intérêts mondialistes , qui sont sur la défensive.

        Je veux bien vous concéder que dans cet article vous en appelez à une gouvernance intégrée européenne et non mondial. DSSont acte.

        Vous l’esquissez en ces termes: “Plus de solidarité internationale et moins de repli. Et donc pour couronner le tout : nous mettre sous l’égide de la seule grande puissance à savoir l’UE, qui puisse tenir tête aux trois pays-voyous dominant la scène. Travailler, à titre de membre de plein droit, à transformer cette alliance informe en une grande puissance. La concevoir comme un espace économique capable de subsister en autarcie.”

        Le plus curieux c’est que vous envisagiez désormais une forme d’autarcie européenne. Ca, c’est un virage important par rapport au plan mondialiste de départ qui était pour le libre échangisme mondial. Un repli tactique, ou stratégique.

        Je vous lis attentivement et vous considère comme un bon représentant des élites intellectuelles mondialistes et donc européistes. Certes pas au niveau de pouvoir décisionnel d’un Javier Solana ou d’une Ursula von der Leyen, mais vous appartenez à ce milieu intellectuel et vous êtes un porte-parole de leurs projets. A mon avis votre positionnement actuel reflète une évolution générale du projet initial de gouvernance mondiale vers une acceptation du monde multipolaire, – certes à regret – et un repli vers un projet eurocentré, avec une Europe, au besoin même autarcique (ça c’est la nouveauté), comme patrie du projet mondialiste, en attendant des temps plus favorables permettant à nouveau de relancer la vieille idée de République universelle.

        De toute façon tout cela est incompatible avec la souveraineté, la liberté et l’autodétermination du peuple suisse. Donc, de mon point de vue, cela doit être combattu.

Les commentaires sont clos.