Action commune pour effet global

Cette semaine, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) publiait un nouveau rapport. 234 scientifiques de 66 pays y alertent l’opinion publique sur la rapide dégradation de la planète. L’organisme international détaille ainsi l’importance cruciale d’une diminution de grande ampleur de nos émissions de gaz à effet de serre. S’il est important d’agir, il conviendra de le faire tous, main dans la main.

Ces dernières années, partis politiques, sociétés civiles et population ont plutôt donné l’image de prêcher chacun pour leur chapelle, se montant les uns contre les autres, au lieu de chercher une voie commune. Parfois, on a l’image d’une société qui ne fait plus rien pour la communauté. A force de reporter stérilement sur les autres la responsabilité du changement, on n’avancera plus, on reculera même.

Au coup de semonce climatique lancé par le GIEC, et à la suite du rejet de la loi CO2, il convient donc de s’engager rapidement dans une nouvelle voie. Il serait cependant trop simpliste de reporter la responsabilité de cette situation sur les seuls milieux économiques, mais bien au contraire il faut considérer que ces derniers font partie de la solution. Ils sont même un acteur clef pour apporter des actions concrètes. L’industrie notamment est l’un des domaines qui a effectué la mue la plus impressionnante ces dernières années et cela continue

Le nouveau projet de loi devra non seulement être efficace du point de vue du climat mais aussi politiquement réaliste. Si les investissements sont urgents, il faudra avant tout consentir à un soutien à l’innovation. Il conviendra aussi de comprendre que pour apporter la contribution la plus importante possible à cette cause commune, il sera indispensable de veiller à ce que notre économie reste pleinement compétitive.

Dans les mesures nécessaires à court terme, le prolongement du système des conventions d’objectifs pour les entreprises est incontournable. Sous la menace de son expiration fin 2021, le parlement doit chercher une solution transitoire. Ces conventions devront par ailleurs figurer dans le prochain projet de loi CO2 et s’étendre rapidement à toutes les entreprises quelle que soit leur taille. Outre le programme pour la rénovation des bâtiments, il s’agit de veiller à trouver aussi une vision politique liée aux taxations du CO2. D’un point de vue libéral, payer le prix de ce que l’on fait, soit des émissions de CO2, est responsable. Le succès de la solution résidera donc dans le juste milieu du montant de ces taxes.

En soumettant un contreprojet à l’initiative pour les glaciers, le Conseil fédéral maintient l’objectif de zéro émission nette d’ici à 2050. Toutefois, confiant en la capacité de notre pays, le gouvernement ne souhaite pas d’interdiction générale des agents énergétiques fossiles à compter de 2050. Selon lui des exceptions doivent demeurer possibles si les technologies de substitution ne sont pas supportables sur les plans économique ou social. La fameuse voie commune évoquée plus haut…

La transition énergétique nécessite une réflexion urgente

Le récent refus de la loi sur le CO2 et l’abandon de l’accord-cadre interrogent sur l’avenir de notre approvisionnement électrique. De fait, l’option nucléaire resurgit. Il s’agit de l’une des questions à laquelle nous allons être amenés à réfléchir.

L’adoption claire par la population suisse, en mai 2017, de la révision de la loi sur l’énergie (58,21% de oui) a ouvert la voie à la transition vers les énergies renouvelables et scellé le sort du nucléaire en Suisse. Depuis lors, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts, et ce n’est pas une métaphore sur les intempéries ravageuses qui ont hélas tendance à se multiplier.

En quatre ans, l’avenir radieux qui se dessinait pour la durabilité en matière énergétique a fait place aujourd’hui à un inquiétant amoncellement de nuages sombres. Il y a d’abord eu le rejet inattendu de la loi sur le CO2, qui prive la Suisse des moyens d’atteindre dans les délais requis ses objectifs de réduction de dioxyde de carbone. Et pendant ce temps, paradoxalement, l’Union européenne planche sur une taxe carbone, celle-là même qui a coulé la loi précitée… A cela s’est ajouté l’abandon de l’accord-cadre par le Conseil fédéral, qui ferme la porte à un accord sur l’électricité avec l’UE pourtant indispensable pour chasser le spectre d’un blackout à terme.

A la croisée des chemins

Dix ans après la catastrophe de Fukushima, la Suisse se trouve de nouveau à la croisée des chemins. La transition vers les énergies renouvelables est trop lente. Il n’est dès lors pas étonnant de voir l’option nucléaire refaire surface, dix-huit mois après la fermeture de Mühleberg sous les flonflons. L’on songe aujourd’hui à prolonger la durée des vies des quatre centrales encore en activité qui assurent, rappelons-le, le tiers de notre production électrique.

Dans certains milieux, la construction d’une nouvelle centrale n’est même plus taboue. Cette question émotionnelle est toutefois légitime, et notre pays va devoir se la poser rapidement, car la concrétisation d’un tel projet prendrait des années, voire des dizaines d’années, sans parler de la problématique des déchets qui reste entière. La société tout électrique qui se profile, notamment dans le domaine de la mobilité, nécessitera un réseau dense et fiable. Devoir dépendre de centrales à charbon étrangères ne ferait guère avancer la difficile équation environnementale.

Malgré ces atermoiements politiques, l’économie, elle, déploie une belle énergie pour se décarboner. Conventions d’objectif, recherche et développement, innovation: les entreprises apportent leur contribution dans cette véritable course contre la montre climatique. Les images de dévastation de ces dernières semaines – inondations, glissements de terrain, incendies de forêts, phases de canicule extrêmes – ne laissent plus la place au moindre doute: la bataille contre le réchauffement doit être menée sans tarder. Alors agissons, et vite!

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Quelques clés pour le retour au bureau

La démotivation aurait gagné nombre de salariés restés éloignés de leur lieu de travail pendant la pandémie. Pour éviter un retour compliqué aux collaborateurs, les employeurs ont un rôle central à jouer: leur donner envie d’y retourner.

«Ces Français qui n’ont plus envie de travailler…» Ce titre choc barrait la une de l’hebdomadaire «Le Point» le 17 juin dernier. Le constat est préoccupant chez nos voisins d’outre-Jura: le chômage partiel aurait développé «une sorte d’oisiveté obligatoire» comme l’analysait un patron de restaurant cité par le journal. Résultat: le travail aurait perdu toute valeur et tout sens pour certains, au point qu’un nombre non négligeable de travailleurs hexagonaux auraient tout largué ou ne veulent tout simplement pas y retourner. L’hebdomadaire évoque l’effet pervers des aides massives dont ont bénéficié les Français. L’Allemagne, moins généreuse en termes d’indemnisations, connaîtrait une reprise plus vigoureuse.

S’il est difficile de comparer les réalités européennes avec celles qui ont cours en Suisse, on peut sans peine imaginer que le retour en entreprise ne doit pas être évident pour tout le monde. Il faut rappeler que chez nous, plus d’un million de travailleurs se sont retrouvés en RHT pendant de longs mois. On pense aussi à celles et ceux qui ont travaillé à distance. Reprendre une activité, revenir en présentiel, redevenir pendulaire, redéfinir des objectifs peut être source d’appréhension, voire d’angoisse. Dans ce contexte, les employeurs ont de toute évidence un rôle central à jouer: celui de remotiver leurs troupes. Un vrai défi, car il s’agit parallèlement de faire redémarrer les affaires et de remplir les carnets de commande.

Pour ce coach spécialiste du bien-être en entreprise, cité par «Le Point», «il faut donner envie aux gens d’y retourner. Les salariés ont un grand besoin de reconnaissance. Les entreprises doivent prendre conscience de ce phénomène et les accompagner dans ce sens pour les remotiver. C’est essentiel pour aller chercher ces points de croissance dont on a besoin.» Les vacances d’été qui se profilent permettront déjà une transition en douceur.

Prendre soin des équipes

On parle beaucoup, aujourd’hui, de remettre l’humain au centre de l’entreprise. La pandémie que nous venons de vivre, et dont on espère qu’elle prendra fin prochainement, constitue une occasion de concrétiser ce concept qui sonne un peu alibi aux yeux de certains. Les chefs d’entreprise doivent, bien plus que par un passé encore récent, prendre soin de leurs équipes, de leurs cadres et de leurs clients. Bien-être au travail et management bienveillant doivent figurer en bonne place dans le manuel du bon manager. Les dirigeants d’entreprises, de leur côté, doivent veiller à prendre soin d’eux afin de pouvoir accompagner leurs équipes de la meilleure des manières.

Un mot encore sur le home office: il est certain que la pandémie a contribué à renforcer son attrait. Il s’agira désormais d’ouvrir un peu plus la porte à ce mode de travail, tout en rappelant que rien ne remplacera jamais le contact direct avec les collègues, ni même les pauses à la cafétéria qui, bien souvent, stimulent les échanges et renforcent l’esprit d’équipe.

Enfin, à la veille de grandes vacances que chacun a bien méritées, j’aimerais exprimer toute ma reconnaissance aux chefs d’entreprise pour le travail qu’ils ont effectué ces derniers mois afin de maintenir leurs sociétés à flot, de garantir l’emploi mais aussi la prospérité qui en découle.

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Des relations sous haute tension

En tirant la prise de l’accord-cadre, le Conseil fédéral met non seulement en péril notre avenir bilatéral avec l’Union européenne, mais aussi notre approvisionnement électrique, en particulier en hiver. Faudra-t-il un black-out pour faire avancer ce dossier? 

L’Union européenne l’avait seriné depuis des mois, voire des années: sans accord institutionnel, pas d’accord sur l’électricité! Ce dernier, qui devait réglementer la participation de la Suisse au marché européen et, notamment, l’importation hivernale de courant étranger, ne verra pas le jour puisque le Conseil fédéral a abandonné l’accord-cadre le 26 mai dernier. On commence aujourd’hui à mesurer les conséquences de cet acte politique irraisonné.

Château d’eau de l’Europe, notre pays a paradoxalement un talon d’Achille, et pas des moindres: sa production hydroélectrique hivernale insuffisante rend nécessaires des importations de courant européen pendant ces mois où les nuits sont longues et froides. La sécurité de notre approvisionnement dépend donc de la bonne entente avec nos grands voisins. L’abandon graduel du nucléaire, même s’il doit être remplacé peu à peu par des énergies renouvelables, rend plus que jamais indispensable une coordination au niveau continental.

La Suisse marginalisée

Swissgrid, l’organisme chargé de transporter l’énergie électrique et d’assurer une bonne fourniture en électricité, a rappelé dernièrement que l’accord européen dans ce domaine devait lui permettre «d’être prise en compte dans les calculs des partenaires européens et de disposer d’informations préalables sur les flux d’électricité traversant la Suisse». Las, notre pays se retrouve aujourd’hui exclu de plusieurs comités européens importants et ne dispose de facto d’aucun droit de regard, ce qui aura à terme des conséquences négatives sur la stabilité du réseau et la sécurité de notre approvisionnement. Les milieux professionnels n’hésitent plus à évoquer un risque de black-out, soit un effondrement de la totalité du réseau électrique. Faudra-t-il en arriver là pour réveiller les consciences?

Le Conseil fédéral a donné dernièrement mandat au DETEC et à l’ElCom, l’autorité fédérale indépendante de régulation dans le domaine de l’​électricité, d’analyser les effets du rejet de l’accord-cadre sur notre approvisionnement. Les pistes évoquées pour atténuer les risques d’un black-out consistent en un renforcement du réseau et des outils de production. Mais il apparaît certain aux yeux des milieux concernés que ces mesures ne suffiront pas. L’Association des entreprises électriques suisses (AES), qui a organisé hier à Lausanne un événement sur le thème de la politique énergétique, a elle aussi fait part de son inquiétude.

Alors oui, il faut de toute urgence renouer le dialogue avec Bruxelles et trouver un modus vivendi afin d’éviter que la situation ne se péjore encore.

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Les enseignements de la pandémie pour le monde du travail

L’essor du télétravail pendant la crise sanitaire fait craindre à terme des délocalisations d’emplois. Si le risque est réel pour certaines professions connectées, d’autres, bien ancrées dans le concret, demeureront ici. Apprentissage et formation continue joueront un rôle-clé.

La tentation pourrait désormais être grande chez certains employeurs: profiter du boum du télétravail pour recruter du personnel sous d’autres cieux moins onéreux. Ce scénario, inspiré par la pandémie de Covid, est esquissé par un institut anglais dans une étude que «24 heures» détaille dans son édition de lundi. Selon le Tony Blair Institute for Global Change, en Grande-Bretagne, les contraintes du home office ont débouché sur une révélation pour les chefs d’entreprise: la productivité a augmenté durant le confinement. De ce fait, un emploi sur cinq risquerait d’être délocalisé. Parmi les jobs susceptibles de migrer vers des contrées aux salaires moins élevés, l’institut de l’ex-premier ministre pointe tous ceux dont les tâches sont effectuées via un ordinateur.

Dans un monde globalisé qui se numérise à marche forcée, il est logique que le marché du travail cherche à s’adapter. Fort heureusement, il reste un grand nombre de professions «bien ancrées» dans le réel que l’on ne saurait transférer. Prenons le secteur de la construction, par exemple. A travers un apprentissage, bien des métiers passionnants ne sont pas menacés d’obsolescence. Mieux: l’innovation jouera un rôle de moteur pour les jeunes avides de nouvelles connaissances. Songeons, par exemple, aux maisons que l’on doit rendre moins énergivores.

Le rôle de l’humain

Face à cette évolution vertigineuse, la formation continue demeure la meilleure manière de maintenir, voire d’accroître son employabilité. On sait aujourd’hui qu’il s’agira de se former en permanence, de redonner constamment du sens à ses activités et aux échanges. Replacer l’humain au cœur des entreprises n’est pas qu’un slogan, il s’agit d’une nécessité. C’est ce qui fera la différence face à l’émergence de l’intelligence artificielle, qui ne saurait se substituer au génie et aux contacts humains.

Autre enseignement de cette problématique générale, qui a valeur de confirmation: la difficulté que certaines entreprises rencontrent pour recruter les talents manquant sur le marché suisse, en particulier dans les domaines numériques de pointe. Il faut dire aux geeks qui préfèrent résider à Berlin ou à Barcelone, et c’est le devoir de nos autorités de marteler ce message, que le canton de Vaud offre une qualité de vie remarquable et variée. Sports d’été, sports d’hiver, nature intacte, vie nocturne et tranquillité constituent des atouts susceptibles d’attirer des jeunes gens talentueux.

Et puis, si ces talents ne veulent décidément pas profiter des avantages que procure la douce Helvétie, pourquoi ne pas recourir à leurs compétences à distance? Ce qui vaut dans un sens vaut aussi dans l’autre.

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Fiscalité et prospérité vont rimer un peu moins bien

Les pays du G7 viennent de se mettre d’accord sur un impôt harmonisé d’au moins 15% pour les grandes entreprises. La Suisse pourrait-elle en pâtir? Sans doute, mais la charge fiscale n’est heureusement qu’un des critères pour le choix d’un lieu d’implantation. Les conditions-cadres restent déterminantes. A nous d’œuvrer à leur pérennisation.

L’intention, dans l’air depuis un certain nombre d’années, s’est concrétisée au début de ce mois sous l’impulsion du nouveau président des Etats-Unis, Joe Biden. Les responsables des Finances du G7 ont annoncé un accord «historique» sur un impôt mondial minimum et une meilleure répartition des recettes fiscales provenant des multinationales, et particulièrement des GAFAM, les géants du numérique. Il s’agit d’un premier pas: le G20 doit encore mettre cette proposition sur la table et convaincre les 140 pays qui travaillent sur le projet de réforme fiscale sous l’égide de l’OCDE.

Il n’empêche: c’est «une véritable révolution, comme l’a confié Xavier Oberson, avocat fiscaliste et professeur de droit fiscal suisse et international, sur les ondes de la RTS. C’est la première fois que la communauté internationale se met d’accord sur une sorte d’harmonisation mondiale pour avoir un taux minimum.» Les pays du G7 entendent manifestement mettre fin à la concurrence fiscale dans le monde à un moment où les caisses des Etats ont été vidées par la pandémie, pendant que celles des colosses du digital se remplissaient grâce au confinement. Il faudra cependant veiller à ce que les Etats-Unis ne maintiennent pas leurs niches fiscales, comme l’Etat du Delaware, ou des déductions qui contribueraient à baisser l’imposition.

Vue d’ici, la décision du G7 a toute l’apparence d’une mauvaise nouvelle. Terre d’implantation de nombreuses multinationales, la Suisse pourrait ainsi être contrainte de revoir sa fiscalité favorable et perdre de ce fait de son attractivité, d’autant plus que les coûts de production y demeurent élevés. Dans ce contexte de grand lissage fiscal à venir, il s’agira plus que jamais de mettre en avant l’atout essentiel que représentent nos conditions-cadres: la sécurité juridique, un écosystème innovant et performant, des Hautes écoles de haut niveau, ainsi que la stabilité politique.

Vent de fronde malvenu

Attention toutefois à ce dernier aspect! Les récentes votations (entreprises responsables, accord de libre-échange avec l’Indonésie, loi sur le CO2) ont montré qu’un vent de fronde souffle au sein de la population contre cette Suisse de l’économie qui serait source de tous les maux. Les temps où les mots d’ordre du Conseil fédéral suffisaient pour convaincre la population d’adhérer à ses vues ouvertes sur le monde semblent révolus, alors que ceux des partis sont de plus en plus broyés et dévoyés par les réseaux sociaux.

C’est oublier un peu vite que l’économie représente des emplois, des salaires, des recettes fiscales et un système social éprouvé, et qu’elle constitue de ce fait rien de moins que le socle de notre prospérité. Pour les organisations économiques, un important travail d’explication devient dès lors indispensable. La CVCI saura porter ce message, soyez-en certains.

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Un oui indispensable pour soutenir l’emploi et la reprise

Les aides financières prévues par la loi Covid-19 sont absolument nécessaires pour permettre aux entreprises de surmonter la plus grave crise depuis la Seconde Guerre mondiale. Un rejet remettrait en cause les mécanismes de soutien cantonaux.

Dix milliards de francs d’aides, dont six destinés aux PME dont le chiffre d’affaires atteint 5 millions au plus. La loi Covid-19, sur laquelle le peuple se prononcera le 13 juin prochain, revêt une importance cruciale pour les entreprises victimes de la pandémie. Elle permet de soutenir financièrement des centaines de milliers de personnes et de sociétés qui sont dans une situation de détresse, et donc de préserver emplois et salaires. Les aides ont été sans cesse réévaluées au fil de la crise. Le processus s’est stabilisé, il faut maintenant adopter ce texte. L’économie en a encore besoin, car en dépit de la vaccination qui progresse, la crise n’est pas encore derrière nous.

Ce texte traite pour l’essentiel des mesures pour les cas de rigueur destinées aux entreprises, en son article 12. L’enveloppe est complétée par une aide de 3 milliards prévue pour les grandes entreprises actives dans toute la Suisse, dont le chiffre d’affaires dépasse 5 millions. En cas de rejet, comme il s’agit d’une loi urgente, toutes les aides prendraient fin le 25 septembre, laissant l’économie dans la panade. Il faudrait alors légiférer de nouveau, ce qui constituerait une perte de temps dangereuse. Ces aides sont indispensables pour compenser le préjudice que cette pandémie a causé à l’économie sans qu’elle en soit responsable. Un non remettrait par ailleurs en question les mécanismes d’aide mis en place par les cantons. Ceux-ci ne tiennent que par les aides fédérales. Les indépendants et les dirigeants d’entreprise, exclus de tout droit à une indemnisation, bénéficieront aussi des mesures prévues dans la loi, par le biais d’allocations pertes de gain. C’est pourquoi la CVCI invite ses membres à accepter la loi Covid-19 dans moins de 15 jours.

Pas une mesure liberticide

Les adversaires de cette législation ont monté ces dernières semaines une polémique stérile sur le certificat sanitaire, couché à l’art. 6a de la loi. Il ne s’agit en aucune manière d’une contrainte, ni d’une mesure liberticide, mais d’une solution qui nous aidera à sortir rapidement de la crise et à retrouver un semblant de cette normalité à laquelle nous aspirons tous. Cet outil permettra notamment de goûter de nouveau aux voyages et d’assister à de grands événements. Qui n’en rêve pas? La Confédération, en outre, assumera le coût des tests, ce qui n’est pas négligeable. En revanche, ce texte n’a aucune influence sur la levée des restrictions mises en place par le Conseil fédéral, qui s’appuient sur la loi sur les épidémies.

Les dispositions de la loi Covid-19 ont permis jusqu’à présent de préserver des emplois et d’éviter des faillites. Son rôle ne s’arrête pas là: elle pose les jalons d’une reprise de l’économie et d’un retour à une vie normale. Autant de bonnes raisons pour l’adopter le 13 juin prochain.

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La voie bilatérale est en grand danger

En décidant hier d’enterrer l’accord-cadre avec Bruxelles, le Conseil fédéral affaiblit dangereusement notre place économique. L’avenir de nos relations avec l’UE se complique. Il s’agit désormais de se montrer inventif après ce coup de Trafalgar.

Tout ça pour ça! Même si la décision était dans l’air depuis plusieurs semaines, on peine à concevoir que le Conseil fédéral a bel et bien interrompu abruptement les discussions avec Bruxelles sur l’accord-cadre! Comme le redoutait hier dans «Le Temps» l’ancien secrétaire d’Etat Jean-Daniel Gerber, «nous risquons de nous retrouver dans une situation proche de celle de 1992 après le non du peuple à l’Espace économique européen». Durant la décennie qui avait suivi ce rejet, rappelons-le, la Suisse avait connu la plus faible hausse du PNB en Europe, juste devant l’Italie…

Mais quelle mouche a bien pu piquer le gouvernement? Cet accord, qu’il a souhaité dès le début, était censé consolider les relations bilatérales avec notre principal partenaire commercial, et permettre d’autres accords sectoriels à venir. Et là, patatras! Divisé, sans leadership, sans plan B, le Conseil fédéral a plombé nos perspectives. Les syndicats portent eux aussi une part de responsabilité dans cet échec, qui risque de péjorer l’emploi en Suisse à terme. Une première conséquence, hormis le fait de fâcher Bruxelles, va se faire sentir immédiatement: dès aujourd’hui, l’accord sur la reconnaissance mutuelle des produits médicaux tombe. Si la plupart des medtech suisses s’y sont préparées en recourant à un système de mandataires, il existe un risque de pénurie de dispositifs médicaux et de perte de compétitivité. Certaines d’entre elles seront peut-être même tentées de délocaliser leur production.

Ce n’est hélas pas tout! Des conséquences funestes pourraient toucher les domaines de la recherche et de la formation, sans parler d’autres échéances à venir concernant les produits agricoles ou encore le domaine des transports. La Commission européenne a par ailleurs fait savoir qu’un rejet de l’accord institutionnel barrait la route à un nouvel accord sur le marché de l’électricité. On le voit, à chaud, les perspectives ne sont pas très encourageantes.

Bruxelles ne nous fera pas de cadeaux

Comme l’a fait savoir hier la faîtière economiesuisse, «une relation stable à long terme avec l’Union européenne et ses États membres reste de la plus haute importance pour l’économie suisse. Préserver les avantages de la voie bilatérale doit donc rester un objectif prioritaire.» L’accord-cadre aux oubliettes, il s’agit maintenant de stabiliser les accords existants et de limiter les dommages prévisibles pour notre place économique. La tâche s’annonce ardue, car Bruxelles ne nous fera pas de cadeaux après avoir été éconduite d’une façon aussi arrogante. Berne juge-t-elle réaliste de proposer autre chose qu’une reprise du droit européen sans réciprocité?

En jetant cet accord à la corbeille, le Conseil fédéral empêche enfin la population de se prononcer sur nos relations avec l’UE. Même si ce domaine relève de la compétence gouvernementale, il me semble que les enjeux en présence méritaient largement que l’on donne la parole aux citoyens. Berne a failli sur toute la ligne.

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Les tests en entreprise virent au casse-tête

L’obligation de télétravail devrait devenir, dès le 31 mai prochain, une simple recommandation pour les sociétés qui proposent des dépistages réguliers. La mise en œuvre de ces derniers ne s’apparente pas à une formalité. Surtout pour les PME.  

Depuis janvier, pandémie oblige, les employeurs ont l’obligation de décréter le télétravail partout où la nature des activités le permet et pour autant que cela soit possible sans efforts disproportionnés. Cela pourrait changer dès le 31 mai prochain, pour peu que le Conseil fédéral confirme d’ici là les assouplissements qu’il a annoncés la semaine dernière. Ainsi, l’obligation du travail à domicile deviendra une simple recommandation pour les entreprises qui proposent des dépistages réguliers. Afin de faciliter ces derniers, la Confédération prendra non seulement en charge le coût des tests, mais également le coût des tests groupés (pooling).

Cet allègement annoncé du dispositif sanitaire est réjouissant. Au gré des vaccinations qui progressent dans notre pays, l’espoir du retour à une certaine normalité se fait plus grand. Mais dans les faits, la levée de l’obligation du télétravail telle qu’elle est prévue suscite presque plus de questions qu’elle n’apporte de réponses.

D’un point de vue logistique, tout d’abord, il faut admettre que la mise sur pied de tests hebdomadaires en entreprise s’annonce à la fois compliquée et contraignante, en particulier pour les petites PME. Surtout, on peine à comprendre la logique du système. Que l’on teste les employés non vaccinés est compréhensible, mais pourquoi devrait-on soumettre les collaborateurs qui ont reçu leur seconde dose au même régime? Du point de vue de la logique sanitaire, force est d’admettre qu’une certaine confusion règne. On le voit aussi avec les masques: le président américain, Joe Biden, ne vient-il pas de décréter que leur port n’est plus utile aux gens vaccinés? Quid chez nous? Les réponses manquent encore, et ces incertitudes ne sont bonnes ni pour la société ni pour l’économie.

Message peu clair

Par ailleurs, ces tests en entreprise risquent de décourager les employés qui n’ont pas encore trouvé le temps de se faire vacciner, ou qui hésitent encore à passer par la case piqûre. A quoi bon franchir le pas s’il faudra de toute manière se soumettre à un dépistage régulier? A l’heure où les autorités martèlent que la vaccination est la seule issue pour sortir de la crise, il faut bien avouer que le message manque là aussi de clarté.

Les employeurs ont l’obligation d’assurer la protection de la santé de leurs collaborateurs, ainsi que le prescrit l’article 6 de la loi sur le travail. La vaccination, que les entreprises recommandent et mettent même sur pied dans le Canton à l’initiative de la CVCI, me semble faire partie intégrante de ce devoir. Il reste qu’il n’existe pas, en Suisse, d’obligation vaccinale. Seule une information régulière et didactique permettra aux personnes qui hésitent encore de changer d’avis. Les campagnes de l’OFSP, que l’on doit saluer, vont dans ce sens. Les entreprises font le maximum pour que l’économie redémarre enfin. On ne peut pas leur demander l’impossible.

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Le modèle suisse a encore de l’avenir

Notre enquête conjoncturelle de printemps montre que l’économie vaudoise résiste relativement bien malgré la pandémie. Mais que va-t-il se passer lorsque les aides étatiques vont prendre fin? Conserver et entretenir de bonnes conditions-cadres sera l’une des clés pour rebondir.

Nul besoin d’être grand clerc pour l’imaginer: l’année 2020 a été difficile pour les entreprises vaudoises, comme le montrent les résultats de notre enquête conjoncturelle de printemps, qui vient d’être publiée. La pandémie a lourdement pesé sur la marche des affaires pour plus de la moitié d’entre elles, comme l’illustre notamment l’évolution générale des chiffres d’affaires et bénéfices. Bien que la grande majorité des sociétés sondées ne prévoie pas de réduction d’effectifs, seul un quart d’entre elles s’attend à une situation bénéficiaire en progression cette année.

La présentation de ces résultats montre que malgré la soudaineté, la dureté et la durée de la crise pandémique, l’économie vaudoise résiste relativement bien. Mais que va-t-il se passer lorsque les aides étatiques vont se terminer? C’est bien là que se situe l’enjeu majeur pour notre économie. La plupart des pays, Etats-Unis et Union européenne en tête, mettent en place des programmes d’aides massives, notamment de relance industrielle, sans considération du poids de la dette qui en découlera sur les générations futures. Ce n’est pas une manière de procéder usuelle dans une économie typiquement libérale comme la nôtre.

Une voie qui a fait ses preuves

La prospérité de notre pays s’est construite sur des conditions-cadres performantes et favorables pour les entreprises. Poursuivre dans cette voie me paraît opportun. Les pistes d’un rebond futur ont pour noms diversification de nos échanges et promotion de la numérisation. Il s’agira notamment d’investir dans le développement durable à travers la technologie, afin que la Suisse devienne leader dans le domaine. Une piste que le Fonds pour le climat prévu par la loi sur le CO2 exploiterait judicieusement, d’ailleurs. Avec son tissu économique innovant et ses Hautes écoles de premier plan, notre pays dispose d’un potentiel prometteur.

Dans une longue interview publiée par «Le Temps» samedi dernier, Gerhard Schwarz, président du laboratoire d’idées Progress Foundation, ne dit pas autre chose. Il est d’avis que la Suisse conserve d’excellentes perspectives malgré la pandémie. Pour lui, nos particularismes politiques ne sont pas des obstacles à sa prospérité, mais l’une des meilleures raisons. C’est la thèse qu’il défend dans son ouvrage «Die Schweiz hat Zukunft». «La Suisse est un modèle qui ne fonctionne pas uniquement par beau temps», écrit-il. Plus loin, il affirme que «la Suisse n’est pas en déclin. Elle n’est pas entièrement conservatrice. Elle avance et se réforme par petites touches. Le modèle suisse est promis à un bel avenir. Aucun autre pays n’accueille autant de multinationales, relativement à sa population.» Il est vrai que si la diversité de notre tissu économique est un atout majeur, les entreprises internationales sont l’un des piliers de notre réussite, ce que l’on l’oublie trop souvent.

Pour l’auteur, enfin, les conditions-cadres restent un formidable atout à conserver et entretenir.» On ne saurait mieux dire.

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