Covid19, plastiques, déchets: si on arrêtait de jouer au coucou-caché?

Vous souvenez-vous de vos jeux de cache-cache ? A-t-on grandit depuis cette phase heureuse de la petite enfance ? Pas vraiment, il semble. La façon dont la pandémie de Covid-19 a surpris les gouvernements du monde entier en est une démonstration éclatante. Il en va de même avec les déchets et les risques qu’ils nous font encourir à petit feu. Des mesures d’urgence s’imposent.

Si vous n’avez plus le souvenir de vos premières années, alors visualisez vos dernières facéties avec vos enfants tout petits ou vos petits-enfants. Le jeu du “coucou-caché” fonctionne avec les très jeunes enfants parce que dans sa construction psychologique, un enfant qui se cache (entièrement derrière un poteau, un rideau ou en mettant ses mains devant les yeux) ne peut pas imaginer qu’on puisse le voir.

Il me semble qu’on n’a pas agit autrement avec cette catastrophe actuelle de Covid-19. Car cette pandémie était prévisible. Richard Werly nous rappelait hier que, depuis la crise du H1N1 il y a onze ans, les pays européens savent qu’ils doivent se préparer. Notamment en constituant des stocks de matériel de protection, de médicaments et de masques. Voir son article “Ces stocks médicaux européens imaginés puis peu à peu délaissés“. Jouer au “coucou-caché”, c’est penser: “je suis (mal) caché, je ne risque rien et je vais gagner au jeu”. Dans le contexte actuel, cela équivaut à penser : “cela arrive en Chine, c’est très loin la Chine, le virus y restera”! Idem avec le virus d’Ebola (“bah, c’est un truc en Afrique, mais chez nous, c’est impossible, y’en a point comme nous!”).

D’autres que moi tirent un parallèle entre l’impréparation constatée partout dans le monde et la crise climatique que l’on annonce depuis plus de 40 ans maintenant. Même schéma de base: les données irréfutables sont là, les experts s’expriment, les rapports s’accumulent… et on oublie. On s’occupe de choses plus urgentes et plus pressantes. Des sujets immédiats qui rapportent sans doute plus de voix en période électorale…

C’est pareil avec le volet plus ciblé des “déchets” et des “plastiques à usage unique”. L’ONU prédit qu’il y aura plus de plastiques que de poissons dans les océans d’ici 2050.

“Chaque année, la population mondiale jette une quantité de plastiques qui serait suffisante pour faire quatre fois le tour de la Terre. Au moins 8 millions de tonnes de plastiques finissent dans les océans, l’équivalent d’un camion à ordures complet chaque minute, causant la mort d’un million d’oiseaux de mer et de 100.000 mammifères marins. Le monde utilise 500 milliards de sacs en plastique chaque année et 50% du plastique que nous utilisons est à usage unique ou jetable.

Les bouteilles en plastiques sont aussi un gros problème puisque que nous consommons 1 million de bouteilles en plastique chaque minute. Le plastique représente 10% de tous les déchets que nous produisons.

Pour le bien de la planète, l’ONU estime qu’il est temps de repenser notre utilisation du plastique et de renoncer au plastique jetable.”

Antonio Guterres, 5 juin 2018

Faites une rapide recherche avec ces quelques mots : vous obtenez un panel très large d’articles venant de différentes sources. Le Forum économique mondial de Davos, les grands journaux, la presse scientifique et spécialisée, les gouvernements… tous le savent, tous l’ont rapporté. Pas pour réfuter cette prédiction hautement probable, mais pour la faire connaître.

Et ?

Fait-on quelque chose contre cette menace directe de notre approvisionnement alimentaire (et de tout le reste)? Non, notre Parlement chipote et refuse d’interdire les bouteilles PET à boissons ou les sachets en plastique. Les océans de plastique, c’est si loin. Il n’y a pas ça chez nous, n’est-ce pas? On est les champions du recyclage, entend-on tout le temps ! Depuis, des évidences nous ont montré que dans nos lacs et nos rivières aussi, le plastique est un fléau en quantité importante. Regardez ce sujet que la RTS a consacré au problème du Léman l’année passée.

C’est effarant: chez nous, la majorité de nos parlementaires jouent encore à coucou-caché quand il s’agit d’environnement et de déchets. D’autres pays, autrement plus impactés par ce plastique destructeur (Inde, Indonésie, Thaïlande, Oman, même l’Union européenne, mais oui!) ont pris les bonnes mesures: l’interdiction pure et simple.

(c) Reuters

Gouverner, c’est tenir le gouvernail, mille sabords!

Prévoir, se préparer, prendre des mesures, c’est gouverner, dit-on. Alors, comment se peut-il qu’on subisse une pénurie scandaleuse de masques et de gel hydroalcoolique alors que l’on sait qu’une pandémie nous pend (et que d’autres nous pendront) au bout des bronches ? Où était caché le capitaine ? Pas derrière son gouvernail, on dirait.

On va vivre une profonde récession, prédisent les économistes. Ah, les économistes, on les écoute, ceux-là. Et on les croit un peu trop aveuglément, aussi quand ils prétendent qu’une croissance infinie dans un monde par définition fini, aux ressources limitées, est possible (c’est la base du capitalisme du 18ème siècle, juste?). N’est-il pas temps de changer d’oracles ?

Au moment du pénible redémarrage de nos échanges commerciaux, nos gouvernants ont l’opportunité de prendre des mesures courageuses, celles qui s’imposent pour faire passer notre vieux schéma économique linéaire à un modèle moderne et vertueux comme celui de l’économie circulaire. Vous savez, cette économie qui ne produit aucun déchet, qui réutilise à l’infini les ressources qu’elle a utilisées pour produire des biens ?

Ce modèle, vous le connaissez, vous le croisez à chaque foulée quand vous allez respirer le bon air (sans virus) en forêt: c’est le modèle qui fonctionne dans la nature depuis que la Terre existe. C’est aussi celui qui a prévalu en majorité jusqu’avant la dernière guerre mondiale. On allait faire ses courses avec son panier en osier (pas de sacs en papier), on emballait la salade dans du papier journal (pas de sachet plastique), on remplissait son bidon à lait (pas de bouteilles en PEHD) ou son dentifrice en poudre à la pharmacie dans sa petite boîte personnelle (pas de tube plastique). En autres exemples… Relisez la “Guerre des boutons” de Louis Pergaud au passage.

OFEV, 2016. Elimination des déchets – Illustrations en Suisse.

Il est possible de prendre des mesures énergiques et rapides, le Conseil fédéral l’a démontré en cette période de crise pandémique. La nécessité de les prendre ne fait pas débat en période de pandémie, car l’urgence est là, et le but est de permettre à notre système hospitalier et de santé de pouvoir continuer de soigner toutes les urgences. Il est donc primordial que la courbe des infections soit la plus étalée possible dans le temps.

Question: la crise engendrée par le gaspillage quotidien des ressources n’est-elle pas suffisamment grave pour autoriser d’autres décisions tout aussi brutales et nécessaires en matière d’économie et d’environnement ? Ma réponse est oui. C’est grave, ça l’était déjà avant Covid-19, cela le sera toujours une fois la crise passée.

Alors comment s’y prendre ? Comme pour les épidémies…

Changeons de modèle économique… radicalement!

Première étape: le Parlement adopte une loi qui autorise le Conseil fédéral à se substituer aux cantons et aux communes et à prendre des mesures fortes quand cela est nécessaire. Maintenant, quoi! Adressez-vous à ceux et celles que vous avez élu.e.s! Ils vous doivent des comptes!

Deuxième étape: nos sept sages, en se basant sur les travaux des scientifiques et en concertation avec eux, prennent des mesures urgentes. Cela veut aussi dire que les les lobbies économiques sectoriels sont laissée de côté (industrie agro-alimentaire, liée à celle de l’emballage, du plastique, etc…).

Quelques idées de mesures :

  • Tous les fabricants qui veulent vendre quoi que ce soit dans notre pays fixent désormais le prix de leurs produits en fonction de leur utilisation et pas de leur possession. Vous n’êtes plus propriétaire de votre ordinateur, de votre machine à laver le linge ou de votre voiture: vous ne faites que d’acheter les fonctions que ces objets vous rendent. Du coup, les constructeurs et les industriels auront un véritable intérêt à récupérer vos vieilles bécanes (pour les matériaux à réutiliser), à leur garantir de nombreuses réparations possibles et une longue vie (c’est dans leur intérêt), à conserver les pièces de rechange nécessaires, etc. En fin de course, quand l’objet ne remplit plus ses fonctions ou que de nouvelles sont développées, qu’il ne peut plus être réparé, le constructeur le remplace chez vous.
  • Taxer très fortement tout objet qui a été conçu pour être fichu au bout de quelques mois ou quelques années. On combat ainsi efficacement l’obsolescence programmée, comme en France.
  • Tout ce qui est à usage unique est par principe interdit, à moins d’une dérogation pour des raisons d’intérêt ou de santé publique ne doive être accordée (pour une partie du matériel médical, mais là aussi, on peut réutiliser beaucoup de choses en passant par la case stérilisation).
  • La consigne est de retour, obligatoire pour tous les contenants de vente, quels qu’ils soient (boissons, produits de nettoyage, sauces, confitures…).
  • Servir les produits alimentaires au poids dans les contenants amenés par les clients est la règle. Ou alors on met en place des contenants consignés, comme les boîtes ReCircle utilisées dans la restauration rapide: on ramène sa boîte sale, qui sera lavée et remise en circulation par le commerçant.
  • L’enseignement de l’économie est renouvelé dans toutes les universités et instituts spécialisés: on pense désormais au modèle circulaire, on oublie le modèle linéaire.

Certes, il y a du job à repenser notre modèle économique. Rien n’est simple. D’autres mesures seront nécessaires, leur ordre de priorité peut-être plus judicieux. L’important est d’ouvrir le chemin, de faire le premier pas.

Vous avez peur d’une nouvelle catastrophe ? Moi pas. On l’entend aussi souvent: les entreprises (comme les êtres humains en général) savent s’adapter à de nouvelles règles très rapidement, heureusement.

Au lieu de jouer à coucou-caché sans arrêt, si on ouvrait grand les yeux ? N’est-il pas temps de grandir enfin ?

En attendant, restez confinés le plus souvent possible et portez-vous bien.

Plastique: on aura tout vu… et on n’a encore rien vu !

Depuis le 1er janvier, le plastique a usage unique est interdit à la vente en France. Des distributeurs savent déjà comment contourner la loi. Il faut dire que les enjeux sont énormes. Pour s’en rendre compte, faisons un petit tour en Italie et en Russie.

Il est de ces hasards de lecture qui parfois me donnent le frisson.

Dans mon journal du jour, voilà deux articles qui attirent mon attention. Surtout, ils se télescopent avec des photos que j’ai vues passer sur le site de Zero Waste France.

Reprenons dans l’ordre… Le premier article fait état de l’implication de la Suisse dans la gabegie de l’élimination des déchets en Italie, un marché lucratif – le plus lucratif au monde, semble-t-il, qui a été investi par la mafia. On apprend que, selon l’Institut supérieur de recherche et de protection de l’environnement (ISPRA) italien, “la Suisse en exporte quelque 70 000 tonnes par an (…).” Le problème est que l’élimination de nos déchets ne se fait pas du tout selon nos standards suisses. Les mélanges entre types de déchets se feraient allègrement, de sorte que beaucoup de (nos) rebus toxiques finissent dans la nature, près de chez nous ou un peu plus loin. Bien sûr, nos autorités sont persuadées que cette exportation est tip-top en ordre, que les formulaires idoines sont toujours scrupuleusement remplis et correspondent à la réalité…

S’il fallait encore un argument pour (vous?) convaincre qu’il est urgent de ne pas produire de déchets, en voilà un de taille! Même si on trie, même si on a dix poubelles différentes à la maison pour bien faire, nos déchets vont en partie alimenter les activités de la mafia! Rien que ça!

Le second article, toujours dans le même numéro de mon quotidien, m’apprend qu’une déferlante de plastique va arriver en provenance du grand Nord, plus précisément de Russie, qui exploite les ressources de gaz en Arctique. Qui dit industrie extractive de gaz dit aussi production de plastique, en raison des hydrocarbures (méthanol) présents utilisés par l’industrie pétrochimique. Ce procédé de transformation MTO (méthanol to olefins) semble dater d’il y a une douzaine d’années seulement, selon Les Echos, qui publiait un schéma parlant sur le procédé.

(c) Les Echos, article du 15 octobre 2008

Le lien étroit entre industrie du gaz et celle du plastique a déjà été mis en évidence aux Etats-Unis, qui exploitent à fond le gaz de schistes. Ainsi, “(…) l’envahissement actuel du monde par le plastique ne résulte pas tant d’une augmentation de la demande que d’une industrie pétrolière à la recherche de débouchés pour ses hydrocarbures.” dénonçait déjà l’Observatoire des multinationales en 2018.

Donc si je résume, d’un côté de nombreux grands pays se lancent à coup de milliards dans l’exploitation de gaz dans des zones de plus en plus reculées, au mépris des risques qu’ils font encourir à l’environnement, bien plus fragile en zone arctique. Ils font des pieds et des mains – et surtout des ponts d’or – pour attirer l’industrie pétrochimique sur place qui va produire du plastique. Ce plastique, très bon marché, va inonder nos économies, si ce n’est pas déjà le cas.

De l’autre, quelques timides interdictions de plastique à usage unique, comme en France. Toujours rien chez nous, même pas les misérables sacs plastique vendus 5 centimes en supermarché. Que font alors les distributeurs d’outre-Jura ? Ils s’ingénient à contourner la loi en apposant la mention “100% réutilisable” sur de la vaisselle et des couverts qui se jettent normalement après un seul usage. Comme par magie. C’est Zero Waste France qui dénonce la manoeuvre et lance la campagne avec le hashtag #onlaissepaspasser. Le groupe Carrefour mis en cause par des photos de leurs produits semble faire marche arrière, mais ce n’est pas le seul à avoir trouvé l’astuce.

A votre avis, qui va gagner dans cette guerre du polyéthylène et du polypropylène? Il est vrai que ces millions de tonnes produites ne seront pas toutes converties en couteaux et en gobelets. Elles vont servir dans la construction et dans beaucoup d’autres domaines.

Donc même si nous boycottons tous ces plastiques inutiles au quotidien (parce que facilement remplaçables par du réutilisable à l’infini), ce n’est pas demain que le plastique va cesser de nous envahir. Et pourtant, c’est avec notre porte-monnaie qu’on vote et qu’on influence l’assortiment des magasins, on le sait bien! C’est donc toujours aussi urgent d’éviter d’acheter ce genre d’articles, même s’ils sont très bon marché. Histoire de ne pas alimenter la mafia, vous voyez…?

A un niveau global par contre, par où et comment saisir le problème ? Quand des milliards sont investis dans de ces industries par d’immenses groupes privés ainsi que par des gouvernements, il y a aussi des moyens incommensurables pour “trouver les débouchés”. Et par conséquent pour influencer les décisions politiques et soutenir celles qui seront favorables à ce secteur économique d’arrière-garde (parce que basé sur des ressources non renouvelables).

Notre parlement est déjà bien investi par l’industrie du gaz et du pétrole. Selon Lobbywatch, pas moins de 31 organisations, dont Socar et Gazprom dont il est question dans l’article sur la Russie, ont tissé des liens directs et indirects avec 7 élus PLR, 4 UDC, 3 PS, 2 PDC et 1 PBD.

Le frisson est plutôt glaçant ce soir.

Gloire aux vers de terre!

Que penser de la dernière affiche électorale de l’UDC ? Je suis consternée: le parti qui annonce officiellement défendre la paysannerie considère les vers de terre comme des nuisibles.  A l’heure de la permaculture, de la perte de fertilité des sols, ce faux-pas démontre combien la politique traditionnelle de certains partis est déconnectée des défis majeurs à relever en matière d’environnement. Et pourquoi sans doute beaucoup de jeunes sont dégoûtés par la politique en général.

La très mauvaise illustration politique de l’UDC en vue de la campagne pour les élections fédérales.
Petit lombric, je t’aime!

Ce qui me chagrine, c’est le statut que les vers de terre ont pour les caciques et financiers zürichois de ce parti. Un vers de terre n’est pas un nuisible, bien au contraire.

Les vers de terre, ce sont de véritables architectes du sol. Ils sont bénéfiques pour toute la vie présente dans le sol, champignons, bactéries, plantes ainsi que pour sa structure. Ils retournent et aèrent la terre.

Comme le décrit Agri-hebdo dans son dossier consacré aux vers de terre, ces habitants rampants sont à favoriser plutôt qu’à éliminer. On promeut des techniques culturales avec moins de labours et à des moments choisis pour éviter de les tuer. Car en 100 ans, certaines parcelles ont vu leur population de lombrics passer de 2 tonnes à l’hectare à 50 kilos et même moins.

Au contraire des étrons humains sur la lune (voir l’article précédent), les déjections des lombrics sont un véritable trésor. Un turricule (joli nom donné aux déjections de vers de terre qui prennent la forme d’un petit monticule de tortillons de terre) concentre l’humus et les sels minéraux directement assimilables. Un caca de lombric contient quatre fois plus d’azote, sept fois plus de phosphore, onze fois plus de potasse, trois fois plus de magnésium, deux fois plus de calcium que la terre environnante: c’est un véritable engrais bénéfique pour vos plantes de jardin ou de balcon! A vos cuillères!…

Turricule de vers-de terre: un très bon engrais!

Et quand on n’a pas de jardin pour faire pousser ses salades et y composer les déchets de la cuisine, on fait comment ? Pour digérer le tiers de nos poubelles (eh oui, les bio-déchets constituent environ 30% de nos déchets et pourraient être valorisés au lieu d’être incinérés), les adeptes de la réduction des déchets conseillent à tous de se lancer dans un véritable élevage de vers rouges (Eisenia Foetida), de ceux que l’on trouve dans les composts, en fabricant un “vermicompost”. Sans odeurs quand il est bien équilibré, il produira du compost solide bien noir et du compost liquide bien utiles pour les plantes de balcon.

Vers de compost ou Eisenia Foetida

Mais attention, Eisenia Foetida n’aime ni le soleil direct, ni le gel.  Il est très timide et fuit la lumière: il n’y aucun risque de les voir se carrapater à l’extérieur du lombricompost. L’idéal est de conserver son installation à la cuisine et de nourrir régulièrement ses petits vers domestiques.

On peut fabriquer son vermicompost avec des boîtes de récupération empilées (en plastique ou de polystyrène, voire les tutos nombreux disponibles sur youtube!), ou bien acheter un modèle tout mignon et très design…

Un bien joli vermicompost…

A quand la réforme de la pensée par le travail?

Certes, tous les moyens sont bons pour faire le buzz, y compris attaquer frontalement au niveau national ses partenaires sur les listes électorales cantonales.

Certes, l’iconographie du premier parti de Suisse (pour le moment, c’est toujours vrai) fait souvent jaser. Il récupère des images d’un autre temps, celle des années 30 qui ont vu la montée du parti national socialiste allemand et porter les Nazis et un Führer au pouvoir. En matière de comm’, l’UDC ne manque ni d’argent, ni de gêne.

Il n’en reste pas moins que de nombreux agriculteurs et agricultrices se déclarent démocrates du centre, sans doute par tradition. N’oublions pas qu’avant de se (mal) nommer ainsi, l’UDC se nommait Parti des Paysans, Artisans et Indépendants (PAI). Et pourtant, eux savent bien combien les vers de terre leur sont utiles…

Un Zürichois démocrate du centre – qui plus est très fortuné – devrait plus souvent aller à la campagne: pas pour rejoindre le week-end – en 4×4 sur routes goudronnées – une gentille résidence secondaire campagnarde entretenue avec force de personnel. Non, je parle de la vraie ferme, de celles où les odeurs sont fortes, où il est préférable de porter des bottes Dunlop ou Atrium et pas des mocassins de chez Bally, de celles où on travaille la terre et où on produit notre nourriture, là où se font durement sentir le dérèglement climatique, la canicule estivale, les inondations, la perte de fertilité des sols et j’en passe…

Si j’étais conseillère en culture organisationnelle de ce parti, je prônerais dare-dare des stages pratiques d’agriculture durant tout l’été à tous les intellectuels de l’UDC! Allez hop, messieurs, aux champs! Comme au temps du Grand Timonier (on n’est pas à un paradoxe près…!), mais en bien moins long et cruel !

Si au moins les têtes pensantes de ce parti savaient de quoi elles parlaient, on n’assisterait pas à des attitudes dignes d’autruches par rapport à l’urgence climatique que nous connaissons (exemple récent: “L’UDC ne choisit pas ses thèmes de campagne en fonction du temps qu’il fait!” dixit Albert Rösti… ha-ha, la bonne blague, le bon mot que voilà!). Ce défi dépasse la durée d’une législature et il s’agit d’y répondre intelligemment, sans facilité ni populisme, sans jeux de mots simplistes. Et bien sûr, en glorifiant nos amis les vers de terre!

“Rendons à César…” De la responsabilité des déchets

Le transfert de la responsabilité du fabricant sur le dos des consommateurs est un enfumage bien connu du lobbyisme économico-politique, qui fonctionne depuis des décennies!  Il a court en matière de déchets (surtout plastiques), et avant cela, dans celui des aliments trop sucrés, trop gras et trop salés. Le même principe était à la base des actions du lobby du tabac. Dernier avatar: le domaine de la santé. Récapitulons…

Res-pon-sa-bi-li-ser! C’est le leitmotiv, le mantra qui viendra à bout de tous les problèmes! Car c’est dit: si on a des problèmes en ce bas monde (de santé, d’environnement, de budget…), c’est de notre faute en tant qu’individus! Les entreprises veulent bien vous coacher pour vous aider dans votre tâche, comme le dit si élégamment la directrice du groupe d’assurance maladie CSS, Philomena Colatrella. Grâce à des apps qui vont siphonner vos données et lever le voile sur tous les détails de votre vie privée. C’est tout bénéfice pour les entreprises puisqu’au passage, les assurances auront gagné gratuitement des millions de “data” qui valent très chères…

Dans un monde économique qui fonctionne bien, le producteur d’un bien est responsable de la qualité de ce qu’il produit. Cette responsabilité ne se limite pas à la qualité du produit qui sort de ses usines: elle s’étend aussi aux effets sur ses consommateurs. Elle devrait être étendue au delà encore. Notamment en ce qui concerne les effets sur l’environnement de son élimination (ou de sa réutilisation).

L’industrie est la seule responsable de ses produits et de leurs effets

C’est en raison de ce principe que l’on exige de l’industrie pharmaceutique des études sur les effets directs et secondaires de ses médicaments. Ou que le législateur a inscrit une étude d’impact obligatoire pour tout projet relevant de la Loi sur l’environnement. Ou bien encore que les marques de cosmétiques doivent fournir une “évaluation de sécurité”, qui tienne compte “de l’usage auquel le produit cosmétique est destiné ainsi que de l’exposition systémique attendue aux différents ingrédients dans la formulation finale.”, comme le stipule l’ordonnance sur les cosmétiques révisée en 2016 (OCos, art. 4 al. 2).

Quand on découvre que les effets de l’amiante, du tabac ou du sucre à longue échéance sont invalidants et souvent mortels pour les êtres humains qui y ont été exposés (activement, comme passivement), les choses se corsent. La logique voudrait que les fabricants, quand ils ont connaissance de ces effets délétères et/ou mortels, soient tenus pour responsables des coûts de traitement ou des décès que leurs produits ont engendrés. Dans le cas du tabac, il a été démontré que l’industrie connaissait parfaitement, depuis des décennies, les effets dévastateurs de leur produit sur la santé de leurs consommateurs réguliers, ainsi que des personnes soumises à l’exposition de la fumée du tabac de manière passive.

L’enfumage de l’industrie de l’emballage

Devinez quoi! En matière de déchets, la responsabilité du fabricant n’est jamais engagée. Jamais ! Ou alors elle s’arrête dès que son produit est entre les mains du consommateur. Les effets sur l’environnement? Tant qu’elle n’a pas à en assumer les frais, elle les ignore et les fait payer à d’autres.

Ainsi il est démontré que l’entreprise Coca-Cola sait depuis les années 70 que la bouteille en verre consignée et réutilisée est la meilleure en termes d’impact sur l’environnement que toute autre matière (verre perdu, plastique, PET…). Elle a donc troqué son système de bouteilles en verre consignées par des bouteilles en plastique. C’est bien moins cher pour elle! Les coûts à charge de l’environnement seront payés par Mère Nature ou par l’argent du contribuable.

La bouteille Contour de Coca-Cola telle qu’elle a été créée par la Root Glass Company en 1915. (c) www.processalimentaire.com

L’industrie du tabac a montré la voie, suivie de près par l’industrie alimentaire et des produits sucrés (dans laquelle la première a bien vite investi quand elle a senti le vent tourner pour elle). Le poids de la responsabilité, pour ces industries, repose clairement sur le consommateur. Selon leur communication, seul le comportement individuel est à même de mettre un frein et un terme à l’épidémie d’obésité, de diabète de type II et autres maladies liées au syndrome métabolique. Il est si simple d’être rai-son-nables! “Si vous êtes malades, c’est de votre faute, c’est que vous avez manqué de volonté!” Voilà le message que ces industries ont réussi à faire passer. En oubliant au passage que les produits du tabac sont addictifs (à cause de la nicotine) et que le sucre l’est tout autant. Or, une addiction ne se combat pas avec de la seule volonté, interrogez n’importe quel-le spécialiste de santé publique!

En matière de déchets, c’est pareil. Si tant d’emballages et de plastiques étouffent les rivières, les lacs, les mers et les océans, si la faune aquatique meurt d’en ingérer au quotidien, si au final nous les mangeons aussi en retour sous forme de microparticules, c’est de notre faute! Si nous n’avions pas jeté à tout vent tous ces emballages, il n’y aurait pas de problèmes environnementaux, notre santé ne serait pas mise en danger.

Cet albatros a été retrouvé la panse remplie de déchets plastiques…

Bons princes, les industriels de l’emballage – au lieu de se remettre en question – lancent de gigantesques opérations de nettoyage des plages… et de leur conscience.

Ainsi, Pack2Go Europe – les professionnels de l’emballage alimentaire – martèle que tout est question d’éducation. L’industrie de l’emballage a lancé l’association “Clean Europe Network”, qui nous organise des journées “Clean Up” où les stupides et seuls responsables – les consommateurs bien sûr – vont ramasser les déchets ici, là ou ailleurs. Pack2Gp Europe et Clean Europe Network sont logés à la même adresse à Bruxelles, et leurs sites internets sont quasiment identiques. L’enquête de Cash investigation de France 2 sur le plastique (“Plastique: la grande intox“) a découvert le pot aux roses.

Cette stratégie est celle du prestidigitateur: “regardez ma main droite!” pendant que le tour de magie s’opère dans la main gauche. “Aidons le consommateur à prendre ses responsabilités, et ainsi détournons le regard sur une autre cible que nous-mêmes!”. Voilà le message !

Avatar suisse du réseau “écolo” de l’industrie de l’emballage : IGSU

En Suisse, c’est aussi le message délivré par l’association IGSU ou Communauté d’intérêts Monde propre, un membre du réseau mis sur pied par l’industrie de l’emballage Clean Europe Network !

C’est simple: au lieu de participer à l’un de leurs prochains “Clean Up Day”, je préfère ramasser au jour le jour ce que je vois traîner sur la voie publique. Je fais ainsi ma part sans offrir un coup de pub gratuit et indirect à l’industrie de l’emballage qui s’achète une bonne conscience au passage. Car il est démontré qu’un déchet attire d’autres déchets. Voir un truc qui traîne nous “autorise” à jeter le nôtre en se disant: “bah, puisqu’il y en a déjà un…!”. Le film “Fenêtre sur déchets” du cinéaste italien Salvo Manzone, récemment projeté durant le Festival du Film Vert, l’a bien mis en images: à Palerme ou à Naples, il suffit d’un premier sac de détritus pour qu’une décharge sauvage se constitue très vite. En ramassant ce que vous voyez, vous êtes bien plus efficaces que de participer à ces actions de bonne conscience de l’industrie.

Mais bon, si le coeur vous dit de participer à une action collective et de sensibilisation, ce qui peut être sympa avec les enfants, préférez les actions “Coup de balai” que la Cosedec (Coopérative romande de sensibilisation à la gestion des déchets) organise avec votre commune.

Parce que finalement, qui donc les produit ces emballages plastiques? Ce n’est pas le consommateur! Le consommateur consomme le produit. Il ne peut être tenu responsable de son emballage. Si sa salade lui est vendue dans un emballage réutilisable, recyclable ou biodégradable, il va la consommer pareil que si elle est vendue en barquette plastique.

Rendez à César…

“Rendez à César ce qui appartient à César… et à Dieu ce qui est à Dieu!” a répondu un certain Jésus, que les Pharisiens avaient voulu piéger avec une question portant sur la conformité à la loi juive le fait de payer des impôts romains.

Une pièce de monnaie romaine à l’effigie de César

Pour paraphraser cet immense révolutionnaire à l’origine de notre culture judéo-chrétienne (dont les propos m’épatent à chaque fois que je les lis!), on peut dire aujourd’hui: “Rendez à l’industrie du plastique et de l’emballage la responsabilité de tous les ennuis que ces matières ont engendrés!”

Et fichons la paix aux consommateurs!

Le rôle majeur des communes dans l’incitation à réduire les déchets

Une fois que j’ai mis mon sac à ordures dans la benne, qui s’en occupe ? Ce sont bien sûr les services de la commune où j’habite. Selon les communes, différents systèmes ont été adoptés pour gérer la montagne de déchets produite par ses habitants. Certains sont efficaces, d’autres vont dans le mur. L’action de citoyens engagés est alors indispensable. Revue non exhaustive.

Petit rappel: en Suisse, chaque habitant produit en moyenne 702 kg de déchets, dont une moitié est incinérée et l’autre moitié part dans des filières dites de “recyclage”. La Suisse figure au palmarès des pays les plus producteurs en matière de déchets. Mais c’est aussi un pays où on a l’illusion d’être de bons élèves, car “on trie et on recycle” beaucoup.

Le tri, c’est bien. Mais ce n’est qu’un début de réponse au problème des déchets.

Depuis 2016, l’ordonnance sur les déchets révisée est entrée en vigueur. Son titre complet est “Ordonnance sur la limitation et l’élimination des déchets (OLED)”. Bien souvent, on ne retient que le mot “élimination”, et on oublie que le premier but est la “limitation”, donc la réduction des déchets.

C’est là que le rôle des communes est primordial. Certes, elles doivent exécuter les prescriptions fédérales et cantonales. Et notamment elles doivent couvrir les frais qu’occasionnent la gestion et l’élimination des déchets avec des taxes, selon le principe du pollueur-payeur inscrit dans la loi fédérale sur la protection de l’environnement (LPE, art. 2). Pour cela, elles adoptent des règlements sur diverses taxes. Il en existe de deux sortes (incitatives et fiscales) et les communes doivent recourir aux deux. Voyons comment…

(suite…)

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Comment l’homo-consommatus est devenu un être fractionné

La segmentation est une technique marketing bien connue… et très aliénante. On ne va pas vendre du vernis à ongle à une mécanicienne sur auto (quoique…!) ou un anti-histaminique à quelqu’un en pleine forme. Pour vendre, il est nécessaire d’adapter son discours à son public, pour mieux l’atteindre. Le principe est simple à comprendre. Là où le bât blesse, c’est quand la segmentation conduit à la fragmentation de tout et de tous, à l’infini. A contrario, le mode de vie qui vise à réduire ses déchets passe automatiquement par un exercice permanent de simplification quant à la façon de consommer. En soi, le mode de vie Zero Waste s’oppose à la fragmentation et engendre une réunification de l’homo/femina consommatus (ou homo-femina-economicus).

La segmentation du marché, cela s’applique à deux concepts: diviser le marché et ses consommateurs en segments, afin de mieux définir le public auquel on destine un produit et ainsi, affiner sa façon de s’adresser à lui afin qu’il se sente concerné… et achète le produit en question. Le second concept consiste à diviser une catégorie de produits (prenons l’exemple d’une crème cosmétique pour la peau) en sous-groupes spécifiques (crème pour les mains, crème pour le corps, etc.).

L’une comme l’autre sont problématiques. Voyons pourquoi. (suite…)

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Ce petit mégot de rien du tout…

Une si jolie plage au sud du Lac de Neuchâtel

L’autre jour à la plage, je me dorais la pilule au soleil couchant de fin d’après-midi quand une odeur de tabac fumé est venu titiller mon odorat, qui lui jamais ne s’assoupit. A l’air libre, la fumée se dissipe pourtant assez facilement. Est-ce mon passé d’ado fumeuse qui a laissé des traces ? Je détecte très rapidement l’odeur d’une cigarette à des dizaines de mètres à la ronde. Dire que cela me gêne, c’est peu dire. Une trentaine d’années après ce passage débile (au sens latin du terme: manquant singulièrement de courage pour dire non aux copains de l’époque!), une volute tabagique m’insupporte aussi sûrement que le crissement d’un ongle sur une surface lisse.

Mais comme je me trouvais à l’extérieur, je me suis donc résolue à prendre mon mal en patience. Hélas, ma voisine de serviette de plage n’était pas seule et elle avait pas mal de munition. C’était l’heure de l’apéro et le petit groupe de joyeux baigneurs dégustait une bouteille de rosé, accompagné de quelques chips et autres amandes salées. Son paquet de cigarettes était tout neuf. Une demi-douzaine de cigarettes ont été réduites durant la collation.

La fin du jour étant longue et chaude, une fois la bouteille terminée, le petit groupe a résolu d’aller manger du plus solide. Les quatre jeunes adultes ont tout ramassé et rien laissé derrière eux, ou presque. La plage étant privée et les picnics y étant interdits, les poubelles étant situées juste à côté du débit de boissons, chacun a intérêt à être discret et à ne rien laisser derrière soi. Rien… sauf les mégots de cigarettes.

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Journée mondiale de l’eau – Oui à la gourde, non au PET !

Depuis 1992, l’ONU attire l’attention de tous sur l’importance de l’eau et tente de promouvoir la gestion durable des ressources en eau douce grâce à la Journée mondiale de l’eau. En totale opposition à la privatisation de cette ressources essentielle, un des objectifs poursuivis par les Nations Unies est de garantir l’accès de tous à l’eau. Une eau qui mérite notre respect, à chaque bout de la conduite.

La Suisse est le château d’eau de l’Europe, ce qui explique que l’on n’a-t-on plus tellement conscience de la chance que l’on a d’y vivre! Chaque jour, sans interruption, nous ouvrons nos robinets et pouvons nous abreuver d’une eau de qualité. Chaque jour, nous prenons des douches sans devoir cracher tous les deux minutes pour éviter d’ingurgiter des bactéries nocives. Chaque semaine, nous pouvons laver notre linge dans une eau claire et propre. Et chaque jour, nous faisons nos besoins dans de l’eau potable! Malgré notre chance de veinards géographiques, les ventes d’eau en bouteille sont toujours aussi florissantes… Allez comprendre…

Chutes du Rhin

Comme l’écrivait le magazine Bon à savoir en septembre 2016, “en Suisse, hors considérations gustatives personnelles, il n’y a aucune bonne raison de consommer de l’eau en bouteille plutôt que de l’eau du robinet. Elle est moins chère, plus écologique et tout aussi saine.” Mettre de l’eau en bouteille et la vendre est un moyen assez simple de remplir les caisses. Une belle étiquette, beaucoup  de marketing pour faire croire que cette eau-là soignera toutes sortes de bobos et l’affaire est faite. Mais pour garantir de grands profits à moindre coût, encore faut-il avoir fait main basse sur les sources. C’est la stratégie poursuivie par de grands groupes alimentaires depuis des décennies, parfois au mépris des intérêts des populations locales.

L’eau, cette ressource indispensable à la vie, est devenu un bien privé, ici et ailleurs. Il semble que l’air pur non pollué soit aussi l’objet de tels appétits commerciaux du côté de la Chine

Les chères bouteilles d’eau en PET en décharge… Crédit photo: lemieuxetre.ch

Et pour goûter à ces eaux minérales, on va les acheter en bouteilles PET le plus souvent. L’ennui est que pour chaque kilo de polyéthylene terephthalate produit, il est nécessaire d’utiliser un demi kilo de pétrole. Pas très durable comme habitude de consommation.

De plus, au delà d’un certain temps de stockage, un phtalate probablement cancérigène pourrait s’y développer. Une étude américaine a analysé 250 eaux en bouteilles en provenance de 9 pays: publiée il y a une semaine, elle nous apprend que 93% des échantillons contenaient des micro-plastiques: polypropylène, nylon et polytéréphtalate d’éthylène. Pas très sain comme habitude de consommation.

 

Alors que faire?

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Produire moins de déchets – Mais par où commencer ?

Chaque jour, chaque produit consommé génère ou a généré un déchet. Les éviter semble être un objectif irréaliste et inatteignable, surtout en Suisse, championne du recyclage et de la quantité de déchets produits. Quand j’ai débuté sur le chemin du mode de vie “Zéro Déchet”, j’étais un peu découragée devant l’ampleur des efforts à fournir. Ce sentiment déprimant mène souvent à une certaine résignation: “de toute façon, c’est peine perdue, cela ne sert à rien à mon échelle!”. Et il conduit à abandonner sa première bonne intention de faire baisser sa montagne de sacs poubelles. Comment faire pour passer cet écueil ?

Les Suisses sont champions du recyclage ! Plus de la moitié des déchets urbains (52%) est recyclée, selon l’Office fédéral de l’environnement OFEV. Ce taux avoisine la perfection pour le verre (96%), l’aluminium et le papier (91%), les bouteilles en PET (83%). Certes, mais ces médailles ont aussi leurs revers, de taille : d’une part, la quantité totale de déchets suit la croissance démographique et économique – elle augmente inexorablement, et d’autre part les coûts de leur traitement et de leur élimination ne cessent d’augmenter.

Le principe du pollueur-payeur s’en prend au budget des ménages : nos impôts paient une partie de ces coûts, et nous passons encore à la caisse avec des taxes annuelles forfaitaires et une taxe à l’élimination pour chaque cornet poubelle éliminé, au volume ou au poids. Effet collatéral à l’organisation du retraitement de nos déchets, le littering augmente : les gens abandonnent leurs déchets sur la voie publique. L’élimination de ces déchets dits “d’incivilité” se chiffre à 200 millions par an ! Je vois souvent des gens qui réussissent à faire entrer leur petit cornet de déchets quotidiens dans les rares poubelles publiques encore disponibles, poubelles dont les communes ont resserré les ouvertures… Triste humanité qui n’a plus les moyens de ses déchets !

Nous sommes aussi champions de la production de déchets en comparaison internationale. Chaque personne vivant dans notre beau pays produit presque 2 kg de déchets chaque … jour ! L’année passée, 715 kg par habitant ont dû être éliminés, recyclés, traités, payés… Ce chiffre nous place sur le podium des pays européens et industrialisés! En 2015 et en Europe, seul le Danemark nous devançait et nous nous placions devant l’Allemagne et la France. La même année, le World Economic Forum nous classait au quatrième rang des pays producteurs de déchets domestiques, derrière la Nouvelle Zélande, l’Irlande, la Norvège, mais devant … les Etats-Unis et la Chine ! Ce trophée de me rend pas particulièrement fière.

Qu’y a-t-il dans votre poubelle ? Regardez donc…!

On peut mieux faire, largement. L’administration fédérale s’est penchée sur le contenu de nos poubelles. On y trouve encore beaucoup trop de matières valorisables, donc qui pourraient éviter la case de l’incinération. Un cinquième des déchets que l’on produit en Suisse est concerné, dont les deux tiers sont des biodéchets, c’est-à-dire des déchets qui peuvent être compostés ou méthanisés. Non seulement ces biodéchets représentent la plus grande partie des ordures, mais leur quantité a encore fortement augmenté depuis 2001, nous dit l’OFEV.

(c) Tribune de Genève

A Genève, la poubelle standard est à l’image de la poubelle suisse. Trop de matières organiques valorisables s’y retrouvent.

Mais alors que faire ? Comment se fait-il qu’on doive éliminer autant de déchets chaque semaine ? Une démarche vers la réduction des déchets commence par une étape pas très glamour : ouvrir sa poubelle ! Pincette sur le nez, il faut commencer par en faire l’inventaire pour comprendre quelles sont nos habitudes de consommation.