Porto-Vecchio, une cité au goût de paradis

Troisième commune de Corse, Porto-Vecchio est la principale ville de la côte orientale après Bastia.

Magnifique cité, cette destination phare du tourisme balnéaire connaît actuellement une fulgurante expansion. En effet, située entre mer et maquis, c’est un élixir de beauté mais également un héritage à préserver. Baignée d’iode et d’air marin, la ville de Porto-Vecchio bénéficie d’une parfaite situation géographique.

Elle est entourée au nord et sud par de somptueuses plages de sables fin et dispose d’un écosystème marin exceptionnel avec des eaux transparentes et cristallines qui se mélangent au ciel céruléen, aux embruns marins et aux effluves boisées de pinède et de maquis.

Nichée dans un décor à couper le souffle et bordée de maquis odorant, la plaine de Porto-Vecchio, riche de superlatifs, s’étend à l’Ouest vers Figari, s’élève progressivement au nord dans un cirque montagneux envahi par le maquis vers le massif de Cagna, l’Alta Rocca, Bavella et ses aiguilles, puis l’Incudine «l’enclume », point culminant de la Corse-du-Sud (2134 mètres).

Les plaines alluviales sont arrosées par trois rivières, le Cavu, l’Osu et le Stabiacciu.

L’arrière-pays comprend de nombreux sites archéologiques à l’instar de Tappa, Ceccia, Araghju ou encore Cucuruzzu. En langue Corse Porto Vecchio s’écrit “Portivechju”, et signifie vieux port.

 

Vue aérienne de Porto-Vecchio. Année 1951. Crédit photo : Portivechju Di Tandu

Le 24 juin, jour de la Saint Jean Baptiste, accessoirement patron des Porto-Vecchiais, marque le début des réjouissances d’été.

Au 6 ème siècle avant J-C, le site est occupé par les grecs puis par les romains et s’appelle à cette époque Porto Siracusanus.

Tout d’abord, il convient à l’évidence de rappeler le fait que la Corse, sous domination génoise depuis le 13ème siècle, lutte sans cesse contre les invasions barbares.

Ainsi, en 1453, La République de Gênes confie l’île à une riche et grande banque génoise : l’Office de San Giorgio. La naissance de la ville actuelle ne date que de la première moitié du 16 ème siècle et voit le jour après l’édification le 24 décembre 1539, d’une place-forte, afin de préserver la sécurité des colons, ceux-ci étant menacés par des incursions barbaresques et notamment celles du pirate turc “Dragût”.

Qui plus est, son concepteur n’est autre que l’un des ingénieurs préférés de Charles Quint, Giovan Maria Olgiati. Les « Compere » allouent 40.000 écus pour la construction de Porto-Vecchio.

Route de Bonifacio. Crédit photo : Portivechju Di Tandu

Tout au long du 16 ème siècle, la ville est maintes fois attaquée et pillée par les Turcs. En 1564, celle-ci est également prise par Sampiero Corso, qui a la volonté de combattre les envahisseurs et de défendre l’île.

En 1578, elle prend le nom de Vintimiglia La Nova avec la venue de 900 colons de Vintimiglia. Ils seront décimés par le paludisme.

Quasiment toutes les cartes entre 1560 et 1670 appellent le golfe de Porto-Vecchio, le golfe d’Arsiano.

Le 15 mai 1768, à l’initiative du ministre Choiseul, le roi Louis XV achète la Corse à la République de Gênes.

Le 13 juin 1769, suite à la conquête française et la bataille perdue de Ponte-Novo, le 8 mai,  Le chef de la résistance corse, Pasquale Paoli, embarque avec 300 de ses fidèles sur des navires anglais ancrés dans le golfe de Porto-Vecchio et part en exil alors que l’armée française tente de l’assassiner.

Le 18 mai 1795, le roi George III de Grande-Bretagne, d’Ecosse et de Corse donne l’autorisation à Giovan Paolo d’établir des salines à Porto-Vecchio.

De fait, la « cité du sel » doit son surnom aux vingt années de la grande expansion des salines entre 1795 et 1815 et au fait que les salines de Porto-Vecchio sont les seules existant en Corse depuis cette époque.

Par ailleurs, Napoléon Bonaparte fait valoir qu’avec le golfe de Porto-Vecchio on se trouve en présence « d’un des meilleurs mouillages de la méditerranée » mais qu’il n’y a pas assez de fond car en étudiant le port il a trouvé « beaucoup de bas-fonds et de roches ».

Porto-Vecchio. Crédit photo : Portivechju Di Tandu

En 1848, Porto-Vecchio est reliée à Bastia par la route. La commune compte alors 2 000 habitants. Elle vit de l’exploitation des chênes lièges, du charbon, du bois et des marais salants.

Mais l’histoire de Porto-Vecchio est aussi marquée par le travail du liège. De 1876 à1975, l’usine Saint Joseph produit bouchons, isolants, agglomérés, flotteurs pour les filets de pêche. Face à la concurrence du bouchon en plastique, il ne reste plus que 2 exploitants à Porto-Vecchio. Aujourd’hui l’ancienne usine à liège est un lieu culturel organisant des pièces de théâtre.

Jusqu’au XIX ème siècle, la majorité des habitants vivent principalement à la montagne pour échapper aux maladies. L’hiver, les bergers de Serra-di-Scopamène et de Quenza descendent à Porto-Vecchio et logent dans des cabanes éparses. L’été, les habitants gagnent la montagne. L’élevage transhumant et l’exploitation des forêts de chênes lièges constituent leurs principales ressources.

Cependant, au début du 19è siècle, des routes sont construites, des industries apparaissent et le port est aménagé : c’est le commencement du développement touristique et économique de Porto-Vecchio. Les marais à l’origine des maladies vont être asséchés pour rendre la ville plus saine.

La ville est reliée à Bastia par chemin de fer en 1935, par la prolongation de la ligne existant déjà jusqu’à Ghisonaccia. Mais ce tronçon connaît une existence éphémère. Très endommagé pendant la guerre au cours du retrait des troupes allemandes, les ponts détruits ne furent jamais reconstruits et les rails furent démontés.

Ce n’est qu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale, alors que la Corse est un enjeu stratégique en méditerranée pour les alliés et l’OTAN, que les américains assainissent les marais grâce à l’emploi massif du DDT (dichloro-diphényl trichloréthane), molécule insecticide synthétisée en 1939, par un universitaire bâlois, Paul Hermann Müller. (Le DDT est aujourd’hui suspecté de favoriser des cancers du foie et du sein, et classé « cancérogène probable » par l’OMS.)

Santa Giulia. Crédit photo : Portivechju Di Tandu

Mais c’est au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, que Porto-Vecchio connait un essor particulièrement rapide dû à la disparition du moustique anophèle responsable de la malaria, à l’aménagement d’un port de commerce, à la mise en valeur de la plaine orientale et surtout au développement d’un tourisme.

Malheureusement, face à la frénésie immobilière et au tourisme de masse qui détruisent la biodiversité de l’île de Beauté, polluent les ressources naturelles et défigurent les espaces remarquables, cela entraîne en retour, un impact négatif et les conséquences sont dramatiques.

Il faut ajouter à cela, l’urbanisation des sols qui rend les habitants plus vulnérables face aux risques d’inondations et des coulées de boue, ce qui conduit à une aggravation des pressions environnementales et au danger pour les espèces animales.

Plus que jamais, il est désormais crucial de songer à préserver cet équilibre fragile…

 

Serge Kurschat

 

Références :

Antoine-Marie Graziani. Naissance d’une cité : porto-vecchio. Editions Alain Piazzola, 171 pp.

Simon Grimaldi, Porto-Vecchio d’hier à aujourd’hui,‎ Éd. A Stamperia, 288 pages.

Xavier Poli, La Corse Dans L’Antiquité Et Dans Le Haut Moyen Age, Kessinger Publishing, 222 pages.

Michel Vergé-Franceschi, Histoire de Corse: Le pays de la grandeur, Editions du Félin, 629 pages.

Crédits photographiques : Portivechju Di Tandu.

 

Serge Kurschat

Historien diplômé de l'Université de Franche-Comté, multientrepreneur, chroniqueur sur le blog du journal Le Temps.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *