“Economie verte” ou quand le conseil fédéral se contredit dans un même discours!

Ce jeudi 18 août, le Conseil Fédéral démarre sa campagne anti-initiative "Economie verte". Le ton est donné, ce sera une campagne jouant avec les peurs des votants!

 

Encadrée par deux conseillers nationaux PLR et PDC ainsi que par le Président de la société Lonza, la Conseillère Fédéral Doris Leuthard était certaine de ne pas commettre d'outrage à l'économie.

 

Ainsi, dans un discours d'une quarantaine de minutes, les quatre figurants ont su habilement jouer sur la crainte permanente des citoyens. A savoir : Une économie suisse qui risquerait de s'écrouler en cas d'acceptation d'un texte extrémiste tel que celui présent dans l'initiative «Pour une économie durable et fondée sur une gestion efficiente des ressources (économie verte)».   

Dans le même discours, nous pouvons entendre tout et son contraire : 

Pour commencer, un GRAND avertissement qui fait bien peur à tout citoyen qui se respecte :  "l'initiative pour une économie verte «ne sera pas applicable et coûtera trop cher»

En tant que bon citoyen, je me suis demandé quels serait cette surcharge pour l'économie décriée par notre Conseillère Fédéral. Aussi, je me suis mis à lire le texte de l'initiative. 

Je vous l'avoue, je n'ai pas encore trouvé de quelle manière ce texte arriverait à clouer au lit notre économie.

 

Pour preuve, voici le passage le plus contraignant du texte en question : 

L’«empreinte écologique» de la Suisse est réduite d’ici à 2050 de manière à ce que, extrapolée à la population mondiale, elle ne dépasse pas un équivalent planète.

De prime abord, se fixer un objectif visant à ne pas consommer plus de ressources que ce que la planète peut nous fournir ne me semble pas si irresponsable que ça, bien au contraire!

 

Peut-être les initiants ont-ils eu les yeux plus grands que le ventre pour imaginer qu'il serait souhaitable d'arriver d'ici à 34ans à ne plus mettre autant en péril notre environnement que ce que nous faisons aujourd'hui?

 

A titre personnel, j'en doute fort et me dis que cet objectif est même le minimum syndical à atteindre pour pouvoir aspirer à un futur décent pour nos enfants. 

D'ailleurs, en parcourant le texte, je me rends compte que ce dernier propose des pistes qui, au lieu de mettre en péril notre économie, lui permet au contraire d'obtenir un soutien. Ou plutôt que les outils proposés par l'initiative permettront de soutenir les acteurs de l'économie qui daignent aujourd'hui s'intéresser au futur de notre planète et donc de notre économie. Ce n'est pas pour rien qu'un acteur comme Ikea soutient un tel texte! Il doit certainement receler un bon sens pratique favorable aux entreprises souhaitant évoluer!

J'en veux pour preuve le texte qui sera soumis aux suisses le 25 septembre prochain : 

Pour encourager une économie durable et fondée sur une gestion efficiente des ressources, la Confédération PEUT NOTAMMENT :  – encourager la recherche, l’innovation et la commercialisation de biens et de services, ainsi que les synergies entre activités économiques;  – édicter des prescriptions applicables aux processus de production, aux produits et aux déchets, ainsi qu’en matière de marchés publics;  – prendre des mesures de nature fiscale ou budgétaire; elle peut en particulier mettre en place des incitations fiscales positives et prélever sur la consommation des ressources naturelles une taxe d’incitation à affectation liée ou sans incidences sur le budget.

En résumé, la confédération POURRA (à contrario de DEVRA) soutenir les synergies entre sociétés pour éviter les gaspillages de ressources naturelles et entrer enfin dans une économie circulaire. Un des outils qui me semble des plus prometteur est notamment celui des incitations fiscales positives.

 

Pour revenir au soutien d'un géant comme Ikea pour l'initiative, je me dis qu'en effet, cette entreprise qui mise depuis longtemps sur le raccourcissement des circuits et la réduction de son emprunte environnementale se verrait donc récompenser fiscalement par cet effort si un tel texte était approuvé par les suisses.

 

Au contraire, une entreprise vivant depuis des décennies sur ses acquis et n'ayant ni l'intention ni la vision d'améliorer sa situation se verrait alors pénaliser dans le cas d'une surconsommation de ressources naturelles.

 

Il n'est donc pas si surprenant de voir le Président du Conseil d'Administration de Lonza comme fervent démolisseur de l'économie verte! Lonza étant tout aussi soucieuse de son impact sur l'environnement que sur la santé des personnes habitant en périphérie de son usine. 

 

Mais revenons plutôt au message du jour du Conseil Fédéral avec tout de même un message positif pour réconforter le votant et qui laisse penser que, finalement, tout va bien se passer Madame la Marquise d'ici à 2050 car : 

"Il faut continuer sur une approche volontaire et laisser aux entreprises le temps de s'adapter. La Suisse est sur le chemin de l'économie verte, mais il ne faut pas précipiter les choses, «c'est l'affaire d'une génération»

En conclusion, selon le Conseil Fédéral, le texte de l'initiative Economie verte est a rejeté car nous n'aurons jamais le temps en 34ans de réduire notre consommation en ressources naturelles MAIS que tout va bien car l'économie y arrivera de toute façon dans le courant d'une génération (soit 25-30ans). 

 

A la lecture d'une telle nouvelle, je suis presque tenté de me vautrer dans mon canapé en me disant "OUF, on est sauvé".

 

Malgré tout, une petit voix désagréable résonne en moi et se demande donc pourquoi le Conseil Fédéral ne souhaite pas voir cette initiative constitutionnelle aboutir alors même que nous arriverons aux buts recherchés par cette dernière en laissant les choses en l'état?

 

Après réflexion, je me dis qu'il doit tout de même y avoir filouterie pour que le Conseil Fédéral tente maladroitement de nous faire passer des arguments contradictoires dans le même discours!

OU ALORS, c'est pour nous démontrer qu'ils sont résolus à faire l'économie de leurs propres ressources naturelles personnelles!

Avec tant de mauvaise foi, je vous souhaite à tous une excellente campagne et que celui qui aura les meilleurs arguments l'emporte.. comme d'habitude! 

 

 

A lire pour les intéressés : 

Texte complet de l'initiative "Pour une économie durable et fondée sur une gestion efficiente des ressources (économie verte)"

Art. 94a (nouveau) Economie durable et fondée sur une gestion efficiente des ressources

1 La Confédération, les cantons et les communes s’engagent à mettre en place une économie durable et fondée sur une gestion efficiente des ressources. Ils encouragent la fermeture des cycles de vie des matériaux et veillent à ce que l’activité économique n’épuise pas les ressources naturelles ni, dans toute la mesure du possible, ne menace l’environnement ou lui cause des dommages.

2 Pour mettre en œuvre les principes énoncés à l’al. 1, la Confédération fixe des objectifs à moyen et à long termes. Elle établit au début de chaque législature un rapport sur le degré de réalisation de ces objectifs. Si les objectifs ne sont pas atteints, la Confédération, les cantons et les communes prennent, dans les limites de leurs compétences respectives, des mesures supplémentaires ou renforcent les mesures déjà prises.

3 Pour encourager une économie durable et fondée sur une gestion efficiente des ressources, la Confédération peut notamment:

encourager la recherche, l’innovation et la commercialisation de biens et de services, ainsi que les synergies entre activités économiques;

édicter des prescriptions applicables aux processus de production, aux produits et aux déchets, ainsi qu’en matière de marchés publics;

 

prendre des mesures de nature fiscale ou budgétaire; elle peut en particulier mettre en place des incitations fiscales positives et prélever sur la consommation des ressources naturelles une taxe d’incitation à affectation liée ou sans incidences sur le budget.

Les dispositions transitoires de la Constitution sont modifiées comme suit:

Art. 197, ch. 8 (nouveau)2

8. Disposition transitoire ad art. 94a (Economie durable et fondée sur une gestion efficiente des ressources)

L’«empreinte écologique» de la Suisse est réduite d’ici à 2050 de manière à ce que, extrapolée à la population mondiale, elle ne dépasse pas un équivalent planète.

 

Michel Dupertuis

Entrepreneur et Secrétaire Général des Vert'libéraux vaudois. En 2008, Michael Dupertuis lance sa startup "Ecowizz". En 2013, il co-fonde la SwissTechAssociation. Aujourd'hui, il conjugue ses journées entre sa vie de famille, son activité d'entrepreneur, de politicien et de Président de la Coopérative Brassicole La Mine à Bex.

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