Les cadeaux d'entreprise comme risque de corruption et avantage stratégique, par Elena Debbaut, gestionnaire de crise turnaround

Cadeaux d’entreprise — une gâterie périlleuse

Les cadeaux destinés aux entreprises sont un moyen de témoigner de la gratitude, de l’appréciation et du respect, mais aussi un moyen de renforcer les relations d’affaires entre les parties. Du moins, en théorie. Soyons sincères, qui n’aime pas recevoir un cadeau, aussi insignifiant soit-il ?

Les cadeaux d’affaires peuvent ainsi prendre la forme de cadeaux perçus comme innocents — par exemple, une boîte de chocolat ou quelques objets publicitaires.

Mais il y a aussi des cadeaux plus conséquents comme de l’argent, voyages, divertissements, ou encore sous la forme d’autres faveurs envers les clients plus importants, ou les collaborateurs qui se sont surpassés dans l’atteinte de leurs objectifs professionnels.

Là où les choses se compliquent c’est quand les cadeaux ont une intention plus ou moins cachée envers le destinataire. Car oui, il y a toujours une idée cachée derrière un cadeau. Or, la période de fin d’année est particulièrement délicate.

Cette publication passe brièvement en revue les risques de trafic d’influence par les cadeaux, différents mécanismes d’action, ainsi que quelques solutions pour éviter les détournements qui peuvent impacter négativement une entreprise ou organisation.

En fin d’article, je partage quelques observations généralistes et recommandations pratiques tirées de la pratique du terrain.

 

Conseil entreprise - Elena Debbaut - redressement de projet et entreprises en difficulté

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Les cadeaux d’entreprise

Depuis longtemps, les cadeaux sont une forme traditionnelle d’influence au sein des entreprises. La période idéale est celle de fin d’année — l’atmosphère traditionnellement festive participe grandement à accepter plus aisément ces gratifications.

Après tout, c’est la fin d’une année et l’esprit des fêtes fait que les barrières tombent un peu.

Les cadeaux pour les employés

Les recompresses sont d’abord utilisées pour récompenser les employés, mais aussi pour les fidéliser tout en leur témoignant de la reconnaissance du travail effectué. Mais ces cadeaux peuvent influencer le comportement et les performances des employés de diverses manières.

La forme la plus courante et communément admise dans le monde des entreprises est l’octroi d’une prime ou d’un salaire supplémentaire aux employés qui présentent des bonnes performances ou qui ont atteint d’objectifs spécifiques complexes. Mais il y a aussi des récompenses comme des voyages dans des endroits plus luxueux, ou des cadeaux matériels d’une grande valeur, comme une montre ou une voiture.

Cette pratique a pour but de motiver à travailler davantage encore, et à augmenter ainsi la productivité future. Cette forme de cadeau peut également être utilisée pour récompenser les collaborateurs qui assument des responsabilités supplémentaires.

Une autre méthode est consiste à offrir aux employés des avantages en nature, ou des réductions sur des produits ou services auprès des entreprises partenaires. C’est un aussi un signal aux autres collaborateurs de faire plus, afin de recevoir aussi des cadeaux — la jalouse entre collègues est bien réelle.

Par exemple, une entreprise peut offrir des réductions sur un abonnement fitness dans une salle de sport, un repas à midi dans les restaurants proches de son siège, la liberté d’utiliser la voiture d’entreprise à but personnel, ou l’utilisation des points de fidélité sur un billet d’avion lorsqu’ils voyagent en famille. Ce type de cadeaux officieux sont admis, et sans pour autant se compliquer la vie avec la partie administrative.

Les cadeaux pour les clients

Les cadeaux pour les clients peut prendre de nombreuses formes, comme les remises et articles gratuits, en passant par des offres plus explicites d’argent ou objets à échanger contre une “monnaie virtuelle” comme les points acquis après des achats. Ces pratiques sont acceptée et même attendues dans certains secteurs, comme le commerce de détail B2B ou l’industrie hôtelière.

Cependant, dans certaines situations, ces cadeaux sont contraires à l’éthique et illégales quand le client est une entreprise. Certains cadeaux peuvent créer des situations dans laquelle les clients ne prennent pas leurs décisions en fonction de ce qui est le mieux pour leurs équipes ou pour l’entreprise — mais plutôt en fonction de ce qu’on leur offre en échange. Cela peut conduire à prendre de mauvaises décisions pour l’entreprise cliente.

Les cadeaux deviennent problématiques quand un représentant commercial propose à un client des vacances gratuites, ou des produits de luxe ou argent, ou des rabais en échange d’avis positifs en ligne, ou la fourniture de services ou produits gratuits à titre personnel quand l’achat se fait au nom de l’entreprise.

Afin de prévenir la corruption des clients, les entreprises doivent mettre en place des politiques claires indiquant quels types de récompenses commerciales sont acceptables, et à quel niveau la notion de pots-de-vin comme incitation n’est plus acceptable.

Idéalement, les entreprises doivent s’assurer que tous leurs employés connaissent ces politiques envers les clients existants, et que tous les cas de corruption de clients sont signalés et traités de manière appropriée.

Enfin, les entreprises doivent s’efforcer de créer une culture éthique, afin que les clients se sentent à l’aise, et ne pas avoir le doute si le prix du cadeau est intégré dans le prix de vente. Ainsi, le cadeau pour les clients doit avoir un rôle d’appréciation et pas toujours d’incitation commerciale.

Les cadeaux pour les entreprises

Lorsque ces cadeaux s’échangent entre entreprises, ils peuvent devenir une forme de corruption.

Certains cadeaux peuvent cacher un échange qui est demandé immédiatement ou laissé pour plus tard, ou encore, pour obtenir un avantage injuste dans une transaction commerciale, ou une compétition sous la forme d’enchères ou concours. Par exemple, une entreprise peut offrir à une autre entreprise un cadeau dans l’espoir d’avoir accès à sa liste de clients ou pour signer un gros contrat.

La pratique de la corruption d’entreprise est un délit grave, qui peut avoir de graves conséquences. En effet, l’utilisation de cadeaux comme forme de corruption d’entreprise est courante, malgré son illégalité. Cette approche peut entraîner des amendes, des peines de prison, voire même une atteinte à la réputation de l’entreprise. En outre, elle peut mettre l’entreprise dans une position difficile si ces informations sont rendues publiques.

Même si un cadeau est offert avec les meilleures intentions du monde, il peut être considéré comme une forme de corruption. La meilleure méthode afin que les entreprises évitent le soupçon de corruption est de s’abstenir d’offrir ou de recevoir des cadeaux, surtout pour la période en fin d’année.

En même temps, si une entreprise offre un cadeau, celui-ci doit être petit et peu coûteux — comme une carte pour souhaiter bonnes fêtes, ou une boîte de chocolats, ou une boite de biscuits ou bricelets. En outre, le cadeau d’entreprise ne doit pas être lié à l’attente de recevoir quelque chose en retour, même si cette attente existe toujours.

Les limites des cadeaux d’entreprise

Les cadeaux ont des limites — autant pour ceux qui les achètent que ceux qui les reçoivent. En effet, il peut s’agir d’une forme de corruption lorsque les cadeaux sont offerts au-delà de ce qui devrait être considéré comme normal ou coutumier.

Dès lors, les entreprises doivent fixer des limites précises quant au montant qui peut être dépensé ou reçu, et s’assurer que les cadeaux sont bien en rapport avec les relations d’affaires. En effet, la corruption peut être facilement dissimulée selon une grande variété de transactions.

Certaines entreprises considèrent les cadeaux et la forme de corruption qui y est associée comme une composante inévitable dans le fonctionnement des entreprises.

Il est donc important d’aborder cet aspect dans le cadre de la stratégie d’entreprise; la lecture entre les lignes est souvent bien utile pour les personnes avisées. L’ignorance comme stratégie d’entreprise est une approche risquée dans ce type de situations.

 

L'implémentation opérationnelle de la stratégie d'une entreprise avec Elena Debbaut, Operating Partner Solutions et Consultante en Entreprise dans la gestion de crise

Lire l’article publié sur LeTemps: Elena Debbaut sur l’ignorance comme stratégie d’entreprise

 

Dans certaines situations et contextes, le fait d’offrir un cadeau, et cela peut importe sa valeur, peut être perçu comme controversable.

En soi, ce n’est pas interdit par la loi d’offrir un cadeau à ses collaborateurs, employés, clients, ou aux autres entreprises.

Par contre, les tentatives d’influencer des décisions et corrompre, surtout au niveau gouvernemental est une action qui est punissable dans les législations de nombreux pays.

Dès lors, il est important pour les entreprises d’être conscientes quant aux conséquences potentielles, et veiller à ce que les cadeaux ne constitue pas, ou ne sont pas être identifiés clairement à une forme de corruption.

Les processus de contrôle pour les cadeaux d’entreprise

Le contrôle du processus de corruption est une partie cruciale de toute organisation commerciale, car il peut aider à prévenir les pratiques potentiellement illégales, réduire les risques de fuite des talents, et maintenir un environnement commercial plus éthique que ses compétiteurs.

Il est donc important d’élaborer une politique et une procédure décrivant les mesures à prendre en cas d’allégation de corruption. Un processus de contrôle pour les cadeaux d’entreprise fait partie intégrante de ces politiques.

 

Le manque de processus dans une entreprise et comment corriger les dysfonctionnements. Une publication par Elena Debbaut, consultante en entreprise

Lire l’article publié sur LeTemps: Elena Debbaut sur les processus d’entreprise

 

Tout d’abord, une entreprise doit créer un cadre d’évaluation des risques permettant de rapidement identifier et documenter les risques de corruption dans le cadre de ses opérations courantes. Cela doit inclure un examen de la conformité aux lois et règlements anti-corruption, ainsi qu’un examen des politiques et procédures internes de l’organisation.

Les domaines couverts sont ceux qui ont un traditionnellement un contact direct avec une autre personne et peuvent en tirer un avantage — comme les départements de ventes, achats, logistique, ressources humaines.

Une fois l’évaluation des risques terminée, il est recommandé de créer un processus de signalement des actes de corruption et cela, dès que toute allégation est signalée, même par les bruits du couloir. Ce cadre de travail ne doit pas seulement inclure un processus d’enquête détaillé, mais aussi un formulaire de signalement.

 

L'implémentation opérationnelle de la stratégie d'une entreprise avec Elena Debbaut, Operating Partner Solutions et Consultante en Entreprise dans la gestion de crise

Lire plus dans le journal LeTemps: Elena Debbaut sur la stratégie d’entreprise: un échec annoncé sans la partie opérationnelle.

 

Dans ce contexte, l’entreprise doit également créer un Programme de Prévention de la Corruption. Ce type programme permet également de traiter de manière proactive les risques de corruption. Par exemple, grâce à une formation et questionnaires réguliers, les collaborateurs et la direction ont les méthodes et le savoir pour identifier et signaler les activités de corruption potentielles.

D’ailleurs, il est possible d’automatiser une grande partie de ces opérations par un système de surveillance et d’évaluation constante des risques de corruption. L’automatisation robotisée des processus (Robotic Process Automation — RPA) est une méthode de plus en plus utilisée dans ce cadre.

Enfin, l’entreprise doit créer un programme d’audit interne pour examiner et évaluer l’efficacité de ses efforts de prévention de la corruption.

Ce programme doit inclure un examen des politiques et procédures internes de l’organisation, ainsi qu’une évaluation de l’efficacité du programme de prévention de la corruption. Un Code Déontologique peut également être utile dans certaines situations.

Quelques pistes pour la création d’un Programme de Prévention de la Corruption

Des mesures proactives peuvent aider à réduire les risques d’une mauvaise utilisation des cadeaux d’entreprise. Parmi ces mesures, il est à noter une communication claire, surtout au niveau des contrats gouvernementaux ou entre les entreprises, des procédures de conformité rigoureuses, ou l’éducation et la sensibilisation quant à ces aspects.

L’anonymisation totale des fournisseurs de cadeaux peut être une idée intéressante, surtout pour vérifier si l’idée d’appréciation est réelle ou motivée par d’autres intérêts. De même, les récompenses pour avoir résisté aux tentatives de corruption par les cadeaux peut être une autre piste utile.

 

Pistes pour la conception d'un Programme pour la Prévention de la Corruption - infographie crée par Elena Debbaut, consultante en entreprise
– Un exemple de cadre général pour la création d’un Programme de Prévention de la Corruption –
retrouvez cette infographique en format .pdf en cliquant sur ce lien pour le télécharger

 

En mettant en œuvre ces quelques mesures, une entreprise peut créer un système de contrôle du processus de corruption au sein de son entreprise. Cela permet de s’assurer que ses opérations restent éthiques et conformes aux lois et réglementations anti-corruption qui s’appliquent selon la région ou le type d’entreprise.

Quand le trafic d’influence se transforme en corruption

Le trafic d’influence a toujours existé à l’intérieur des entreprises et dans les relations commerciales entre les organisations. C’est la base même pour fédérer des personnes autour d’une idée ou d’un projet intéressant.

Mais quelque fois, ce trafic d’influence se transforme en corruption.

Et les situations d’influence sont aujourd’hui plus subtiles. La limite entre un cadeau symbolique à but publicitaire et un cadeau qui exige un retour de services ou autres avantages est de plus en plus vague.

Par exemple, faut-il accepter le joli panier avec produits régionaux ? Ou le repas fastueux avec un fournisseur de services ou un vendeur ? Ou accepter un voyage tous frais payés à l’étranger, dans un hôtel de luxe, et cela juste pour éventuellement faire connaissance avec quelques personnes clés ?

Ces questions ont été soulevées par le passé, notamment dans le domaine politique ou les organisation non-profit, en plus d’entreprises bien établies sur le marché. Certaines de ces situations ont été même jugées par la loi, mais paradoxalement, elles restent toujours d’actualité.

La corruption est définie comme un échange illégal de cadeaux d’une valeur élevée ou perçue comme étant élevée, comme de l’argent, ou autres formes de contrepartie — le but étant d’influencer le processus décisionnel. À son niveau le plus basique, la corruption consiste à offrir quelque chose de valeur afin d’obtenir un avantage injuste.

Mais la corruption au sein des organisations commerciales est une question complexe. Un certain nombre d’organisations et entreprises ont adopté des politiques visant à la prévenir, mais elle reste toujours un problème majeur. Il s’agit d’une question qui affecte non seulement les entreprises directement concernées, mais aussi le public, ainsi que l’environnement commercial et politique au sens large.

La cause la plus courante de la corruption est l’absence de normes éthiques et de responsabilité ainsi que les mauvais exemples de la direction elle-même. Le manque de confiance envers les responsables d’entreprise ou les institutions supposées contrôler ces dérives est de plus en plus visible.

Le récent scandale dans le parlement européen semblent aller dans ce sens: “«Les loups ne se mangent pas entre eux». Le pire c’est qu’il n’y a même plus de surprise devant ces typologies de scandales.

L’absence de normes claires et punitions

En effet, devant l’absence d’un ensemble de normes claires et d’un moyen pour les faire respecter et punir, alors la corruption peut devenir une pratique acceptée plus ou moins ouvertement au sein d’une entreprise ou toute autre organisation économique ou politique, et même au niveau des fondations ou associations non-profit.

La corruption peut être motivée par le désir d’obtenir un gain personnel, ainsi que par le désir d’obtenir un avantage sur les concurrents. Mais les conséquences de la corruption dans les organisations peuvent être considérables.

Les entreprises peuvent être tentées par les cadeaux d’entreprise sous la forme de corruption principalement en raison de facteurs économiques comme une concurrence intense pour les ressources ou les contrats.

Et la compétition est actuellement très importante pour un un grand nombre de secteurs.

Les secteurs compétitifs sont plus à risque de corruption

Ainsi, les récompenses pour contrats signés avec les agences marketing, ou tout autre service comme le soutien administratif, ou l’obtention de mandats de conseil en entreprise, voire même pour favoriser l’embauche de personnes pas toujours capables dans leur métier sont devenus un non-dit sous la forme d’un secret de polichinelle.

Il arrive très souvent que les responsables des achats dans une entreprise ou les responsables de ressources humaines ou toute autre personne à responsabilités ne se cachent même plus.

La question de “et moi, qu’est-ce que j’y gagne personnellement (!)” arrive dans les premières 10-15 minutes d’une discussion. Dans ce type de situations, le vendeur de services ou produits ne lance pas de démarches pour dénoncer ce type de comportements — après tout, la sagesse commerciale dit qu’il ne faut pas brûler les ponts.

Quant aux exemples sur les chercheurs d’emploi ou les candidats à la location d’un appartement, ceux-ci ne se trouvent pas toujours dans une position favorisée pour refuser.

Les exemples sont multiples, et affectent tous les aspects de la vie personnelle et professionnelle. Les scandales qui s’en suivent aussi.

La corruption cynique

Au niveau macro-économique, la situation actuelle n’a rien d’anormal.

D’ailleurs, les politiques néo-libérales encouragent ce type de comportement individualiste, sous le couvert d’une prétendue main invisible” du marché.

Oh, l’ironie.

Ou plutôt le cynisme d’un système qui semble avoir perdu sa tête.

Dans la plupart des cas, les méthodes de corruption ne sont pas nécessairement choisies par nécessité directe, mais parce que ceux qui les utilisent pensent qu’elles leur donneront un avantage plus rapide et plus intéressant que par le cheminement classique.

Cette pensée est encore plus développée dans les environnements chaotiques et/ou avec une compétition déloyale. Quand il n’y a pas d’alternative économiquement viable à un choix dit “éthique” alors l’absence d’une autre solution se reflète dans la rentabilité et les flux de trésorerie.

En effet, l’éthique dans les affaires a une définition et une compréhension variable. De plus, aucune organisation, qu’elle soit ouvertement commerciale ou sous la cachette d’une étiquette non-profit, ne fonctionne selon des normes morales, mais seulement les obligations légales.

De plus, chaque humain est potentiellement corruptible.

Les personnes intègres sont rares.

La question est de savoir quel est le montant à partir duquel quelqu’un serait prêt à “céder” et se lancer dans toutes sortes de “combines” sachant que les risques légaux sont souvent insignifiants.

La réalité du terrain est que de plus en plus souvent, les cadeaux d’entreprise se transforment en pots-de-vin, avec des objectifs clairement affichées.

Ce qui était un moyen légitime pour garder les bonnes relations et un contact informel à but publicitaire est devenu aujourd’hui une démarche stratégique afin d’obtenir un avantage concurrentiel de base.

Or, de nos jours c’est devenu beaucoup plus difficile à gérer ce type de situations.

D’un côté, le public est devenu presque insensible à ce sujet — malgré les mobilisations temporaires contre les entreprises reconnues coupables de pratiques frauduleuses. Voici une sorte de “hyper-normalisation” soit l’acceptation incontestée de toutes décisions prises à un haut niveau, et avec une réduction intentionnelle des actions à un niveau individuel.

En effet, si les punitions ne sont pas exemplaires, cela ne fait que renforcer l’idée que “ils (!) sont tous pareil et toute résistance est inutile“.

Il y a une belle part de vérité dans cette pensée.

Aussi longtemps que les risques de punition sont plus bas que les avantages, alors ce type de situations vont continuer de plus belle et vont encore plus se généraliser. D’ailleurs, l’économie numérique s’y prête fort bien.

 

La face cachée de l'économie numérique, un essai d'économie et gestion, par Elena Debbaut

 

Anticiper les risques de corruption

Dans l’ensemble, pour anticiper les risques de corruption au sein d’une entreprise ou organisation, il est important d’établir des politiques et des procédures claires.

La partie implémentation consiste à de mettre en place des contrôles internes et des systèmes de suivi réguliers. Enfin, il faudra s’engager dans une évaluation et une gestion proactives des risques.

Cela pourrait impliquer la conduite périodique d’évaluations des risques permettant d’identifier les potentiels facteurs de corruption, puis la mise en œuvre de stratégies qui atténuent ces risques.

Il peut s’agir, par exemple, d’exercer une “due diligence” raisonnable sur des partenaires commerciaux potentiels, ou les collaborateurs, ou encore, d’implémenter quelques mesures visant à renforcer la transparence et la responsabilité individuelle. Cela passe par de processus d’audit et de reporting réguliers, ou des systèmes de surveillance anticipatifs, ainsi que de l’utilisation de la technologie pour surveiller les comportements suspects.

Faut-il donner et recevoir des cadeaux d’entreprise ?

Les cadeaux d’entreprise d’une grande valeur monétaire peuvent affecter des décisions comme la signature des contrats, les enchères, les embauches. Mais l’impact de ces “cadeaux” est aujourd’hui de plus en plus visible.

Je suis suffisamment âgée pour avoir connu une période quand la direction avait une “Politique” pour donner des cadeaux, mais … aucune pour les recevoir. Pas si loin que 25 à 30 ans en arrière, le budget “cadeaux à offrir” était tout aussi élevé que la place dans l’organigramme.

Les attentions sous la forme d’un cadeau avaient plutôt un rôle publicitaire, comme des calendriers, des stylos, un agenda annuel, un petit parapluie, des breloques, une tasse ou une calculette, et le tout, assorti du logo et le numéro de téléphone de l’entreprise. Ou encore, un arrangement floral, une petite boîte à chocolats, ou une corbeille de fruits.

Le bon vieux temps — quand un membre de la direction avait “droit” à un stylo ou une tasse, alors que sa secrétaire recevait presque toujours une minuscule agenda papier, et même pas avec une jolie couverture.

Au fil du temps, ces typologies de cadeaux sont devenus “innocents” — et surtout à l’égard de ce qui se fait aujourd’hui. Les cadeaux d’entreprise ont évolué, et leurs codes aussi.

La corbeille de fruits s’est transformé en panier à crabes.

Signe d’un changement de mœurs, un grand nombre d’entreprises et organisations se sont dotées d’un Code Déontologique, voire même des Programmes de Prévention de la Corruption. Ces documents indiquent clairement ce qu’un collaborateur peut ou ne peut plus faire quand il s’agit de recevoir ou donner un cadeau.

Les mécanismes et les motivations personnelles pour recevoir ou donner des cadeaux qui ont une intention plus ou moins directe de corruption sont complexes et variées — mais l’objectif final reste en priorité l’obtention d’un avantage plus ou moins mérité, et pas toujours un remerciement anodin.

La question controversée est de savoir s’il faut entrer dans ces “combines” et recevoir, ou offrir des cadeaux.

La réponse est que cela dépend d’une multitude de situations et cultures.

Comme nous l’avons pu voir plus haut, certains secteurs ou domaines hautement compétitifs fonctionnent sur la base de favoritismes, et les cadeaux aident à avoir une bonne base. Mais le choix de l’entreprise ou de ses responsables reste purement individuel.

Si les compétiteurs font la même chose, et que les lois sont intentionnellement vagues, et que les risques sont plus bas que les gains, alors il faudra peut-être procéder de la même manière pour garder son avantage compétitif.

Si, à l’inverse, les lois sont hautement punitives et que l’impact des scandales sera fortement négatif, alors il vaut mieux s’abstenir et faire le nécessaire pour justement, contrôler ce processus.

Un montant maximal sur les cadeaux acceptés peut ajouter une limite facile à comprendre — par exemple cela peut couvrir toute faveur d’une valeur monétaire supérieure à 70 francs environ. Cette valeur est celle que je recommande pour le marché suisse, car elle n’est pas suffisamment importante pour risquer la déshonneur.

Je suggère également de toujours déclarer les cadeaux données ou ceux reçus, et cela peut importe leur valeur. Ainsi, des formulaires en ligne standardisés et préremplis avec le nom, et avec seulement quelques cases à cocher facilitent cette surveillance. Un système d’information centralisé peut être utilisé avec de très bons résultats pour le suivi.

En outre, je recommande aux entreprises de ne jamais prendre des décisions stratégiques ou d’achats sous l’influence d’un cadeau (ni plusieurs). En effet, les risques de malversations financières, abus de pouvoir, favoritisme, fraude, et détournements de budgets impactent négativement le fonctionnement d’une entreprise ou organisation, et cela quel que ce soit sa taille ou son secteur d’activités.

Idéalement, une entreprise devrait prendre des décisions basées sur la logique, mais ce n’est pas toujours le cas.

Pourquoi ?

En général, l’humain est faible, et assez souvent, facilement manipulable.

Les esprits libres et éthiques sont rares.

Le pouvoir individuel a une grande capacité de corruption.

Et les cadeaux aident grandement à obtenir plus facilement des faveurs.

Le problème ne réside pas dans le système d’une entreprise ou organisation, ni dans les lois, mais dans le fait que ceux-ci sont administrés par des humains — et tous les humains sont imparfaits d’une manière ou d’une autre. Quelques solutions comme les processus de contrôle ou la limitation des pouvoirs décisionnels peuvent aider à réduire et anticiper les risques, mais le dénouement et le choix final ne pourra pas être contrôlé avec certitude.

Alors, faut-il encore recevoir et/ou donner des cadeaux d’entreprise ?

C’est toute une affaire.

Une affaire d’humains, après tout.

 

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Les gourous d'entreprise prêchent qu'il faut se réveiller à 3:30 la nuit pour réussir. Ils rêvent.

Les gourous d’entreprise prêchent qu’il faut se réveiller à 3:30 la nuit pour réussir. Ils rêvent.

J’ai assisté à une conférence qui parlait de la réussite entrepreneuriale. C’est une activité très amusante. Je découvre toujours quelques perles fort divertissantes et qui me mettent de bonne humeur pendant au minimum quelques semaines.

Cette conférence était offerte par un entrepreneur de succès. Un entrepreneur homme d’un certain âge très respectable; c’est très important de le préciser. Habituellement, pendant que j’écoute les présentations pendant les webinars, je peux faire d’autres activités en parallèle. Mais sa lecture était suffisamment fascinante pour lui accorder mon entière attention.

J’entends un conseil prodigué sur un ton bien convaincant: “pour réussir, il faut se réveiller à 3:30“. Oui, trois heures trente. La nuit.

Qui se lève de bonne heure arrive à la fortune, dit la sagesse populaire.

Le CEO d’Apple se lève à 3:45. D’autres, plus paresseux, se réveillent au maximum une demi-heure plus tard à 4:15. C’est ainsi aux États Unis.

En Suisse, l’entrepreneur se réveille à 3:30.

Enfin, s’il arrive à dormir.

Compte tenu du succès de leur fortune, cela doit être la bonne tranche horaire. Selon un article publié dans le journal LeTemps en 2016 le sommeil serait même un truc de loosers. Le succès se réveille, lui aussi, de très bonne heure pour attendre tranquillement les coureurs qui l’ont cherché pendant les 15 (quinze) kilomètres de jogging.

 

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Les résultats de mon expérience

Déjà très enthousiaste pendant la conférence, chose qui m’arrive très rarement pendant ce type de présentations, je décide de faire un essai pour contempler la forme de ce nouvel succès. Mon entourage fut vite très curieux sur ma démarche.

Jour 1 du réveil à 3:30

J’ai commencé la première journée de mon expérience par mettre mon réveil à trois heures trente du matin. Selon le fuseau horaire en Suisse cette heure est en pleine nuit. J’ai donc utilisé le mode vibrateur, afin de ne pas réveiller l’entier du bâtiment où j’habite.

Oui, 3:30 est en pleine nuit: tout est noir et silencieux.

Mon époux a brièvement ouvert son œil droit en guise de question muette: c’est pour entrer se coucher, ou aller dans une expédition nocturne aux toilettes ? Ni une ni l’autre, je répondis en silence: c’est pour une journée remplie de succès.

Mon esprit a vacillé quelques secondes, étant bien entourée par la chaleur du lit.

Mais l’appel du succès a été plus fort.

Quand il faut y aller, il faut y aller !

Ma quête du succès commence devant la machine à café.

Une pensée vive me retient brusquement avant d’appuyer sur bouton qui la met en route. Quel serait le niveau du bruit ? Une recherche sur Google me permet de contrôler la fiche technique. C’est incroyable le bruit qu’une machine à café peut faire: quelque 67 décibels. Rien que ça. Ce niveau de bruit est similaire à celui d’une machine à laver. Or personne ne lance une machine à laver en pleine nuit. En tout cas, pas en Suisse, pas avec une famille, et surtout pas dans un immeuble locatif.

Pas de thé non plus. Il se trouve que certaines bouilloires électriques peuvent même aller jusqu’à 95 décibels, soit le bruit d’une tondeuse à gazon. En pleine nuit, c’est fortement déconseillé. Je me dis que le grille-pain fait aussi du bruit, tout comme la préparation de mon omelette, alors je décide de sauter le petit-déjeuner. Pour un premier jour, je me dis que je vais reprogrammer aussi le jogging de 15 kilomètres.

J’arrive au bureau par des rues désertes, et je sors le badge d’accès.

Refusé.

Le bureau, ça ouvre à 7 heures du matin.

Ça ne s’annonce pas très bien.

C’est seulement 4 heures le matin, et le succès lui, est très impatient d’y entrer. Je le sens.

image du success en entreprise

Je note qu’il faudrait que j’envoie aux propriétaires de mon bureau le lien vers la conférence de l’entrepreneur à succès.

Ces propriétaires doivent laisser les portes ouvertes 24/7jours parce que beaucoup de personnes commencent à chercher le succès à 3:30 la nuit.

Une voiture de police me voit. Les deux policiers s’arrêtent et me demandent si tout va bien et quelle est la raison de ma présence sur les lieux en pleine nuit.

Je leur explique que je cherche le succès à 3:30. Ils notent quand même mes coordonnées; si jamais ils trouvent le succès nocturne avant moi.

Je fais le choix d’une journée télétravail pour regagner le temps perdu avec mon déplacement au bureau, en pleine nuit.

Je continue jusqu’à 13:30 quand je prends mon déjeuner. Vers 14 heures j’étais déjà endormie. Je me réveille vers 15:30 soit pendant ma pause habituelle. Je conclus que les patrons et les directeurs ont une très bonne raison pour fermer la porte après la pause déjeuner. Pendant ce temps, les fidèles cadres opérationnels, eux, travaillent.

Je finis ma journée à 19:30, comme c’est dans mes habitudes des 20 dernières années.

Mon époux me demande pendant le souper: alors, ta journée ? J’esquisse un sourire enthousiaste. Je n’ai pas été en mesure de continuer la totalité de mon repas, ni même de commencer le film du lundi soir sur la RTS.

Vers 21h j’étais déjà endormie.

Profondément.

Jour 2 du réveil à 3:30

Le réveil vibre.

Je suis toujours motivée pour trouver le succès en pleine nuit.

Je saute du lit, mais je reste en télétravail. Je fais quand même un détour dehors sur 4 kilomètres, question de rencontrer le succès. Mais outre quelques chats très curieux suite à ma présence nocturne, rien d’autre.

Je travaille jusqu’à midi et je prépare le déjeuner. Je répète la sieste après le déjeuner. Je travaille pratiquement sans interruption jusqu’à 19:30.

En fin de journée je me dis que ce n’est pas trop mal, faire une sieste après le déjeuner.

La fin de deuxième journée arrive à 19:30, et l’heure du coucher arrive encore plus vite, à 20:30. Ma soirée fut encore plus courte que celle de la journée précédente.

Jour 3 du réveil à 3:30

C’est mercredi.

Je me suis réveillée avant l’heure, à 3:10. C’est toujours la nuit. Magnifique, après seulement 3 jours je commence à m’habituer à un nouveau rythme. L’humain s’habitue à tout.

Je me dis que si je continue ainsi, avec un gain de 20 minutes chaque jour, alors en 15 jours je vais me réveiller même à 10:30 heures le soir d’avant. Ça, c’est un vrai succès: l’heure du coucher qui coïncide avec l’heure du réveil. Je me fais la réflexion que l’humain du futur sera tellement amélioré techniquement qu’il n’aura même plus besoin de dormir.

Pour le moment, et afin d’aider mon expérience, j’ajoute une sieste de plus en pleine matinée. Pas trop mal non plus. Sauf le facteur qui me réveille vers 10:30 pour un colis et une lettre. Les appels téléphoniques aussi.

En fin de journée à 19:30 je cours pendant 10 kilomètres. Je m’arrête et je fais quelques exercices sportifs de pom-pom girl pour compenser les 5 kilomètres manquants. Pas trop mal non plus, c’est bien physique.

Le chat du voisin qui a l’habitude de m’accompagner me regarde très curieusement. Il suit mes mouvements. Je lui explique comment atteindre le succès avec le réveil à 3:30 la nuit. Il écoute très attentivement, les yeux dans les yeux. Un autre chat se joigne à nous. Je commence à rire, encore quand je vois trois autres chats qui s’approchent pour participer à ma présentation improvisée.

Un voisin s’arrête et nous regarde, lui aussi. Il trouve mon auditoire de chats en demi-cercle très amusant, presque magique. Je lui explique à lui aussi, le réveil à 3:30 et qui est supposé apporter le succès. Les tremblements de sa moustache lui donnaient un air clairement perplexe et incrédule. Mais il ajoute quelques bons points: même les poules ne se réveillent pas à 3:30 la nuit, mais peut-être les chats, eux, sont débout toute la nuit et dorment ensuite toute la journée pendant 18 heures. Ça doit être un truc de patron et directeur, il avait conclu.

Sur le chemin de retour, je fais remarquer à mon voisin que les poules n’ont pas beaucoup de succès et travaillent chaque jour pour pondre un œuf, sinon elles finissent à la casserole.

Par contre, le coq, lui, est un vrai chef: il pousse un chant bien puissant dès les premiers rayons de lumière pour réveiller tout le monde. Le coq est debout au minimum 90 minutes avant le lever du soleil et il chante même pendant la nuit quand c’est pleine lune. Les petits coqs en surplus finissent en pâte à nuggets, seul le vrai coq résiste. Belle illustration pour la réussite entrepreneuriale.

La comparaison entre un coq et un entrepreneur a eu beaucoup de succès, y compris parmi les trois chats qui nous ont suivi très sagement. Mais le voisin a persisté dans son opinion: un entrepreneur est plutôt comme un chat, selon une de mes publications plus anciennes.

Autrement, ma soirée a vite fini, parce que je suis allée dormir à 20:30 heures, et sans finir mon repas.

Jour 4 du réveil à 3:30

Enfin, le jeudi.

Je me dis que la semaine est presque finie.

J’attends presque impatiemment le vendredi, bien que j’aime plutôt les lundis.

Mais un semblant de succès est déjà là: mon livre sur l’économie numérique a été accepté pour la publication. Je ressens aussi une connexion avec les humains qui se réjouissent à l’avance du dernier jour de la semaine. Pendant une grande partie de ma vie, y compris la scolarité, le dernier jour de la semaine a été le samedi, alors un vendredi est presque contre-nature.

Le soir, après les courses, je m’effondre en plein repas.

Ma conversation sur la journée et mon livre a été limitée à quelques grognements et une multitude de grimaces muettes.

Je me suis endormie à 20:10 précises.

Jour 5 du réveil à 6:30

La journée de vendredi s’annonce très bien.

Je me suis réveillée le matin à 6:30 exact, sans aucune alarme, et comme je me réveille depuis deux décennies. La vibration de l’alarme à 3:30 n’a pas été suffisante pour me réveiller. Mon expérience qui consistait à me coucher avec les poules et me réveiller avant le coq n’a pas été concluante.

La journée de travail commence à 7:30 le matin.

Et la journée finira exactement à 19:30, comme c’est le cas depuis presque 2 décennies.

La journée fut productive, et sans aucune sieste. En fin de journée, le chat du voisin arrive en courant pour me saluer pendant que je récupère le courrier, et comme il le fait chaque soir de la semaine à 19:30 précises.

Encore une semaine pendant laquelle je n’ai pas écrit d’article académique, ou pour un autre livre. J’ai fini la semaine avec un article qui a partagé une expérience et une autre vision sur les conseils prodigués par les gourous d’entreprise.

Le repas commence à sentir bon.

La table est prête, et je peux enfin tenir une conversation sans m’effondrer de fatigue.

Je passe ensuite une très belle soirée.

Et si c’était ça, le succès et la bonne fortune ?

La vie, tout simplement.

Alors, cette expérience du réveil à 3:30 ?

Si vous êtes arrivés jusqu’ici, c’est que le sujet vous intéresse.

Le réveil à 3:30 et la fin d’une journée de travail à 19:30 avec 21 heures au maximum pour aller dormir n’est pas pour moi, et peut-être pour vous non plus. Avec un tel rythme vous vivez décalé et pour la plupart des journées, en totale solitude.

Mon expérience m’a fait penser que la plupart de gens font l’erreur de suivre à la lettre les gourous d’entreprise, au lieu de définir leur propre succès et sa stratégie pour y arriver.

Il est possible de faire plus avec un tel rythme

Certes, avec un tel rythme de travail il est possible de faire beaucoup de choses et couvrir beaucoup de projets, mais il faudra impérativement ajouter au minimum trois périodes de siestes pendant la journée et passer vers un sommeil multi-phases.

Selon mon expérience de 7 ans pendant mes études et le travail en parallèle j’ai pratiqué le sommeil multi-phases de manière intensive. Cette méthode a bien fonctionné pour moi. Ainsi, je m’endormais pendant les cours à l’université, les examens, le transport, ou encore les réunions ennuyantes. Un sommeil volé. En 24 heures je pouvais avoir mes 4 à 7 heures de sommeil, avec quelques périodes difficiles de seulement 2 heures 30.

Cela m’a permis de couvrir efficacement les 16 à 18 heures de travail intense chaque jour pour mon entreprise, mes études, et mes obligations familiales. Le sommeil multi-phases est très exigeant et je ne recommande pas cette méthode sur de longues périodes. Il faudra retenir que toute “dette du sommeil” se paye par une dégradation de l’état de santé. Cette dégradation se voit après seulement quelques mois, alors que les effets négatifs peuvent durer même quelques années.

En effet, le sommeil est indispensable pour correctement fonctionner et prendre les bonnes décisions, surtout au niveau de la direction. Hasard du calendrier, la date de publication de cet article est 19 mars, soit la journée du sommeil.

L’aide externe est indispensable

Encore: si vous décidez de suivre un tel rythme intensif, alors vous devez avoir au moins une personne qui vous assiste avec les tâches administratives de la vie courante ou celles ménagères comme le nettoyage ou la préparation des repas.

Soit vous payez quelqu’un pour ces tâches, soit, en absence de capital, vous allez devoir utiliser le support familial. Vous ne pourrez pas tout faire. Pour ne rien arranger, la pression sociale pour externaliser ces tâches est même mal perçue pour les femmes entrepreneur.

Je conclus aussi que le réveil à 3:30 peut mieux fonctionner si vous êtes un homme d’un bon niveau socio-culturel qui est né dans une bonne famille, avec un revenu régulier, et qui habite dans une maison individuelle pour pouvoir faire du bruit nocturne. De plus, le capital de son entreprise doit être suffisant important pour embaucher les bonnes équipes qui exécutent l’ensemble des tâches opérationnelles.

En effet, il y a une grande différence entre donner des ordres et “venir avec des idées” en guise de stratégie et la finalité de l’implémentation opérationnelle.

 

L'implémentation opérationnelle de la stratégie d'une entreprise avec Elena Debbaut, Operating Partner Solutions et Consultante en Entreprise dans la gestion de crise

Lire l’article publié sur LeTemps: Elena Debbaut sur la stratégie d’entreprise: un échec annoncé sans la partie opérationnelle.

 

C’est les équipes opérationnelles et les cadres qui concrétisent les idées de la direction ou de tout entrepreneur et c’est souvent par les heures supplémentaires après 19:30, alors quand notre entrepreneur a fini sa journée.

Or, les entrepreneurs ne voient plus ce travail accompli tard pendant la soirée ou les nuits; et ils sont même très contrariés quand les équipes opérationnelles ne sont pas toujours réveillées au petit matin. Mais les collaborateurs de nos jours ne veulent plus être limités à un simple rôle d’exécutant, ni exploités selon des méthodes d’une autre époque.

L’innovation et la culture d’entreprise souffrent

Les entrepreneurs qui appliquent ce modèle de travail décalé n’ont pratiquement aucune interruption en pleine nuit.

Chaque matin, ils ont donc suffisamment de temps pour réfléchir et venir avec de nouvelles stratégies, alors que les équipes opérationnelles n’ont même pas fini d’implémenter les idées de la journée précédente. Ainsi, il n’est pas rare que les équipes opérationnelles suivent un rythme effréné et qui finira souvent … vers 3:30 le matin. Soit à l’heure quand notre entrepreneur se réveille.

Les coûts et l’épuisement de type burn-out pour les collaborateurs à tous les échelons est ainsi très grand. Les personnes de qualité qui composent les bonnes équipes opérationnelles quittent ce type d’entreprises et ces entrepreneurs.

De plus, ce décalage dans la manière de travailler n’est pas propice à l’innovation.

En effet, de nos jours, l’innovation n’est plus l’idée d’une seule personne, mais c’est devenu un processus.

L'innovation est avant tout un processus, consulting entreprises avec Elena Debbaut

Lire l’article: Elena Debbaut sur l’innovation: L’innovation est avant tout un processus

 

La pratique du terrain

Revenons maintenant à la réalité du terrain.

La très grande majorité des entrepreneurs implémentent eux-mêmes leurs propres idées et investissent leurs économies, très souvent sans aucune aide familiale. Cet investissement entrepreneurial permet de développer et présenter aux investisseurs un produit ou un service minimum viable.

Par la suite, si ce produit ou service est intéressant, et qu’il n’a pas été copié par d’autres entreprises, alors il est possible d’obtenir une augmentation du capital pour s’agrandir.

Pendant cette période, le manque de sommeil est cruel et les nuits blanches sont la normalité. En pratique, l’heure de 3:30 la nuit correspond plutôt à l’heure du coucher. Au final, si l’entreprise fonctionne, il est possible d’espérer un revenu régulier et un horaire plus adapté au rythme naturel diurne.

En réalité, c’est dans cet ordre que les choses se passent.

Comme vous pouvez déjà l’imaginer, les chances de “succès” d’une entreprise sont minimes.

Rien n’est garanti.

Et gare aux entrepreneurs qui succombent à la propagande entrepreneuriale et le réveil à 3:30 qui apporterait le succès.

Le réveil à 3:30 c’est toute une affaire, et même une mauvaise affaire, au bout du compte.

 

📌 Droits de Réutilisation …

 

Déchiffrez les réalités du terrain, et ce qui se cache derrière les tendances du moment avec Elena Debbaut - conseil restructuration entreprises et projets en difficulté

 

 

 

Archives du Blog LeTemps - Toute une Affaire - Elena Debbaut

 

 

 

Comprendre la dynamique du télétravail - entreprise et collaborateur - conseil entreprise Elena Debbaut

Comment une entreprise peut réussir son projet de télétravail, tout en évitant les erreurs et les oublis

Cet article présente quelques recommandations d’ordre général permettant de faciliter l’acceptation culturelle et l’implémentation opérationnelle d’une telle forme de travail.

Il s’agit des pratiques qui fonctionnent dans une majorité des cas, comme l’identification du bon candidat et l’organisation de l’entreprise. À la fin, je partagerai quelques expériences pratiques pour éviter les échecs les plus habituels dans le télétravail.

Le point de vue dans cet article varie selon une approche focalisée tantôt sur les besoins d’une entreprise, tantôt comme collaborateur sous statut indépendant ou employé. En effet, la compréhension des deux points de vue permet le succès d’un projet de télétravail.

Cet article ne couvre pas des aspects concrets quant à l’implémentation du télétravail, mais une approche plus généraliste et simplifiée. Cet article n’a pas non plus la prétention d’être exhaustif — mais une approche entrepreneuriale et pratique permettant d’identifier quelques pistes de réflexion.

Conseil entreprise - Elena Debbaut - redressement de projet et entreprises en difficulté

 

Conseil entreprise - Elena Debbaut - redressement de projet et entreprises en difficulté

 

Introduction

J’ai commencé avec le télétravail à une époque où ce concept était très peu connu et il y a avait même une opinion fortement négative sur cette méthode.

C’était au printemps de 1991.

Pendant les presque 30 ans qui ont suivi, j’ai pu voir les améliorations technologiques, la diminution des barrières d’entrée, et surtout, percevoir de manière directe l’évolution des mentalités. Mon expérience en télétravail couvre des entreprises de diverses tailles, y compris les grandes multinationales, et même comme indépendante, dans plusieurs zones géographiques, divers fuseaux horaires, et secteurs d’activité.

Cet article consolide diverses expériences.

Vous pouvez ainsi éviter quelques oublis et erreurs habituelles, sans tomber dans le piège des listes réchauffées avec des étapes inapplicables. Une fois que vous avez compris la dynamique du télétravail, vous pourrez expérimenter et appliquer une méthodologie qui fonctionne bien dans votre situation.

Le télétravail ou le travail à distance

Je vois le télétravail plutôt comme un processus évolutif et pas du tout comme une simple méthode “clé en main” qui pourrait être appliquée sans aucune préparation.

Le grand avantage c’est que de nos jours, l’implémentation de ce processus est grandement facilitée et plus rapide. Mais attention, la facilité de compréhension et mise en service ne veut pas dire que tout est “facile“.

Les pièges et les fausses idées sur le télétravail sont encore nombreux.

Peu importe sa taille, une entreprise ne réussira pas ce processus quand son implémentation se fait sans réflexion suffisante par rapport aux besoins à moyen et long terme. Ainsi, la direction peut très bien décider de manière stratégique sur le choix majoritaire du télétravail, mais réduire la partie opérationnelle à des improvisations d’urgence et seulement en situation de crise.

 

La réflexion sur le télétravail doit se faire de manière réfléchie: les réactions urgentes en situations de crise sont une solution temporaire.

Elena Debbaut

 

Le télétravail est un projet qui est souvent mal compris.

Dans un article de 2019 sur l’organisation du travail et des équipes, que j’ai publié sur mon blog du journal LeTemps, j’avais écrit que “Les nouvelles formes et lieux de travail doivent s’adapter à l’entreprise et aux collaborateurs existants, et pas l’inverse“. C’est une adaptation par rapport à la culture existante. Un chapitre sur le télétravail proposait quelques suggestions à ce sujet.

Retrouvez l’entier de cet article en suivant ce lien: https://blogs.letemps.ch/elena-debbaut/2019/02/19/organisation-du-travail-et-des-equipes-selon-les-nouvelles-formes-et-lieux-dactivite-un-partage-dexperience/

La technologie facilite le télétravail

Dans les années 1990, quand j’ai commencé ma vie professionnelle, l’accès et le coût technologique était dissuasif pour un indépendant.

Il fallait investir plusieurs milliers de francs pour un ordinateur et l’accès Internet était encore réservé en priorité à un usage académique, les organisations mass-média comme les journaux ou la télévision, ou les très grandes entreprises. La communication vidéo et la coordination centralisée en temps réel via Internet étaient des notions inexistantes. Les barrières pour faire du télétravail étaient donc assez élevées. Le télétravail était perçu comme “repos” à la maison.

30 ans plus tard, voici que le télétravail commence à être de plus en plus pratiqué, mais l’implémentation à grande échelle de ce type de projet est toujours retardée par les entreprises. Les raisons sont multiples; mais la méconnaissance des principes du télétravail est un élément mis en avant. La méfiance est une autre justification.

Dans la vie de tous les jours, la majorité d’entre nous appliquent déjà les principes du travail à distance. En effet, depuis plus d’une vingtaine d’années il est possible de commander en ligne (au lieu d’aller dans un magasin), accéder à des informations en ligne (au lieu de se déplacer pour les consulter), et donner accès depuis l’extérieur à son endroit de présence physique (vidéos, audio). Chacun d’entre nous a déjà fait une ou plusieurs de ces activités.

Or, les mêmes principes de base s’appliquent pour le télétravail.

Ces principes peuvent s’adapter à la situation de chacun selon divers autres critères comme la taille de l’entreprise, la nature du travail, le degré du télétravail. Les collaborateurs, les fournisseurs et l’entreprise peuvent ainsi très bien travailler et s’organiser à distance, d’autant plus que la technologie est à disposition et devient de plus en plus performante et moins coûteuse.

 

Aujourd’hui, et sans même s’en rendre compte, nous appliquons déjà les principes du télétravail.

Elena Debbaut

 

Certains collaborateurs vont adorer cette manière de travail, pendant que d’autres seront impatients de revenir dans les locaux de l’entreprise. D’autres n’ont aucune préférence et sont confortables avec les deux méthodes.

 

Il y a une grande variété d’activités qui peuvent être exécutées en télétravail, même ceux industriels et techniques.

Elena Debbaut

 

Le travail tertiaire dans le domaine des services se prête particulièrement bien au télétravail mais il existe une multitude d’autres métiers — même ceux qui nécessitent un usinage et assemblage en petite série — qui peuvent être très bien être exécutées dans un autre endroit que les locaux de l’entreprise.

Quelques fausses idées sur le télétravail

La terminologie “télétravail” contient le mot “travail“.

Très souvent, il y a cette confusion entre “télétravail à un autre endroit que les locaux de l’entreprise” – “travailler depuis la maison” – “travailler dans la maison“. Ces 3 notions n’ont pas la même signification.

Tout d’abord, le télétravail peut se faire depuis d’autres endroits, comme les espaces de coworking, bureaux temporaires, pendant un déplacement, ou dans d’autres locaux professionnels loués pour l’occasion comme les studios d’enregistrement ou les salles de formation. Le télétravail ne veut pas dire de “toujours travailler depuis la maison“. En effet, le télétravail est synonyme de “travail à distance“.

Ensuite, le travail “depuis la maison” est souvent compris dans le sens des activités domestiques “pour” la maison ou “dans” la maison. Je l’ai déjà écrit, et je le répète: ce n’est pas possible de travailler sur la table de cuisine, surveiller les gamins, s’occuper de la préparation des repas, et lancer une machine à laver en même temps. Sinon, la productivité sera à un très bas niveau.

Ainsi, un parent qui souhaite aller vers le télétravail en pensant “pouvoir accorder toute (sic!) son attention aux enfants” et avec des “horaires totalement libres” n’est pas adapté à cette forme de travail à distance. Certes, le travail à distance permet une certaine flexibilité au niveau des horaires, mais pour certains projets et équipes, au minimum 70-80% du temps doit être commun avec les autres collaborateurs.

 

Le télétravail est un travail “à distance” des locaux d’entreprise – ce travail ne doit pas être compris comme “travailler toujours depuis la maison” ni travailler “pour la maison”.

Elena Debbaut

 

Le fait d’être “présent à la maison” dans le cadre de son travail ne donne pas une autorisation pour qu’un ami ou un membre de la famille débarque à l’imprévu et sans raison valable.

Si le travail a lieu dans un autre endroit extérieur au domicile personnel, alors ces mêmes personnes n’avaient jamais à l’esprit d’entrer dans la salle de réunion et interrompre les participants. Il en va de même pour ceux qui possèdent un local technique et des équipements ou outillages spécifiques; ces personnes ne prendraient même pas le risque de s’y aventurer.

Il faudra aussi garder à l’esprit que les responsabilités dans le cadre de son travail restent les mêmes, peu importe l’endroit d’exécution. Avec le télétravail, il ne s’agit pas de faire “ce qu’on a envie” (sic!), encore moins avoir le luxe de “choisir ses projets et clients“. Malgré les fausses idées, même un indépendant n’a pas ces libertés totales. Cette approche libertarienne n’est donc aucunement envisageable avec un employé qui a une relation de travail plus stricte avec l’entreprise.

Souvent, les fausses idées par rapport au “télétravail” se résument à l’endroit, les horaires et les responsabilités.

Les exigences du télétravail

Travailler depuis la maison implique le même cadre que le travail au bureau.

Les exigences réglementaires sont les mêmes et passent par le respect des conditions légales, techniques, de qualité, de sécurité et confidentialité, suivi des instructions hiérarchiques. Concrètement, voici ce que cela veut dire en grandes lignes:

  • un projet délivré selon les conditions convenues de qualité, ressources, budget, délais
  • un espace de travail bien aménagé, nettoyé et accueillant
  • du matériel technique professionnel comme une station fixe de type desktop, ou un ordinateur portable, imprimante, casque téléphone ou caméra vidéo, ou toutes autres sortes d’outils et machines

Pour certains métiers, ces quelques points ne sont pas tous obligatoires.

Si la nature du travail l’exige, il faudra prévoir des solutions logicielles permettant un accès Internet sécurisé. Le niveau de sécurité peut varier, voici pourquoi le télétravail ne représente pas une option viable pour quelques secteurs d’activité comme les banques.

Reste que les interruptions dans l’exécution de son travail, les distractions et les bruits externes doivent toujours être réduits au minimum. Il n’y a rien de plus désagréable que d’appeler un collègue travaillant depuis la maison et entendre en fond les paroles d’un poste de télévision ou les hurlements déchirants d’un ou plusieurs bébés. Surtout quand cela commence à devenir la règle, et dépasse le stade amusant d’une interruption qui fait le buzz mondial pendant une intervention en direct avec BBC. Encore pire: prétexter des pannes Internet ou électricité qui n’existent pas.

 

Travailler à distance implique avoir (i) une discipline et coordination presque militaire, (ii) une force mentale pour être suffisamment confortable en solitude, et (iii) une maîtrise technologique qui soit bien supérieures à la moyenne.

Elena Debbaut

 

Dans le cadre du télétravail, les interactions avec ses collègues et le monde extérieur sont profondément changés. Voici pourquoi les quelques contraintes et exigences mentionnées ci-avant sont indispensables pour augmenter les chances de succès.

Comment éviter les échecs du télétravail

Comme vous pouvez lire en continu sur le site du journal LeTemps, la situation actuelle de pandémie COVID-19 n’a aucun précèdent, et nombreux sont ceux qui se sont démunis devant l’ampleur du désordre dans la société et les entreprises.

Pendant ces situations, les injonctions pour aller vers le télétravail sont plus prononcées.

 

La plupart des gens découvrent le télétravail seulement pendant une période de crise. Souvent, il n’y a personne pour montrer “comment faire” et c’est la panique.

Elena Debbaut

 

La gestion de crise et le télétravail

En théorie, une entreprise (et pas seulement) doit appliquer des actions précises pendant une gestion de crise. Quand il y a des perturbations sur les opérations courantes, il y a toujours des adaptations ponctuelles selon le développement de la situation; mais une réflexion d’ensemble sur les actions principales doit être faite avant la crise.

Le manque d’anticipation a un impact immédiat sur toutes les opérations courantes. Oui, la gestion de crise et la solution de recours au télétravail est aussi un processus. Une entreprise fonctionne efficacement grâce aux processus. Autrement, comme je l’ai déjà écrit par le passé: “le manque de processus est une des causes qui peut être à l’origine des profonds dysfonctionnements“.

Ces dysfonctionnements sont encore plus graves et visibles en situation de crise. Le manque d’anticipation a un impact immédiat sur toutes les opérations courantes. La direction exige trop d’efforts pendant que les collaborateurs sont inquiets et surpris par l’inconnu.

 

Voici pourquoi une entreprise a besoin de processus fiables - Elena Debbaut

Lire l’article: Voici pourquoi une entreprise a besoin de processus fiables.

 

Si l’état d’urgence est déclaré à l’échelle d’une entreprise, une région ou un pays, il y a un impact très négatif quant à la productivité des collaborateurs. C’est normal, et c’est humain d’accorder son attention à d’autres sujets. Il faudra donc garder à l’esprit que le télétravail dans le cadre d’une gestion de crise ne va pas tout résoudre.

 

La magie n’existe pas, et les humains ne sont pas des robots. En situation de crise, c’est irréaliste et inacceptable d’exiger une productivité élevée. Le télétravail n’est pas la seule solution pour assurer la continuité des opérations.

Elena Debbaut

 

Certes, certains métiers exigent encore une présence physique obligatoire sur place, mais grâce à des processus bien établis, une entreprise peut assurer, au pire, un service minimum, tout en rassurant les collaborateurs sur la direction à suivre. L’existence d’un plan d’un plan de continuité enlève un grand stress autant pour l’entreprise que pour tous ses autres intervenants internes et externes. Chacun doit connaître son rôle dans une telle situation.

Là où c’est possible, le télétravail offre la possibilité de continuer partiellement ou totalement, une majorité des activités courantes. Il s’agit du fameux “plan de continuité“. Même en manque de commandes, une entreprise peut choisir de réorienter très rapidement une partie de ses travailleurs vers des projets internes. Or, seul un processus de gestion de crise permet de sereinement envisager et s’adapter à une situation de crise.

En pratique et dans une majorité des cas, les choses ne se passent pas ainsi.

Les entreprises mal préparées n’ont aucun processus de continuité. Les autres processus opérationnels sont approximatifs. Les exigences du télétravail n’ont même pas été prises en compte; il manque même une liste actualisée avec les adresses e-mail ou le numéro de téléphone des collaborateurs, les responsabilités, ou un inventaire des besoins. Le budget pour achat de matériel comme les ordinateurs ou les écrans n’existe pas, l’expérience pratique et les compétences font défaut.

Les difficultés principales du télétravail

Plus la taille de l’entreprise augmente, plus c’est difficile d’implémenter le télétravail. Pourquoi ? Parce qu’il y a un plus grand nombre de collaborateurs et exigences supplémentaires comme l’harmonisation des processus, la communication, la coordination générale, ou la technologie.

 

Une entreprise de petite taille peut adopter plus rapidement le télétravail. La Suisse a plus de 99% de petites entreprises. C’est une chance qu’il faut saisir.

Elena Debbaut

 

D’un point de vue opérationnel et selon mon expérience sur le terrain, c’est surtout la culture d’entreprise qui décide du succès d’un projet de télétravail. Ensuite, au niveau des collaborateurs, c’est essentiellement l’intelligence d’un esprit indépendant, mais capable de s’adapter et travailler en coopération avec les autres équipes.

Pas dernièrement, c’est l’existence des bons processus d’entreprise et qui définissent clairement qui, quoi, comment, à quel moment. C’est donc le processus qui “connecte” le collaborateur à l’entreprise.

La structure de l’entreprise et le secteur d’activité ont aussi un grand impact sur le télétravail. Il en va de même pour sa zone géographique. Pour les projets pluridisciplinaires il faudra prévoir à ce que les horaires de travail se superposent en majorité avec ceux des autres collaborateurs.

Aux problématiques usuelles du télétravail se rajoutent des contraintes et limites qui sont souvent d’ordre technologique comme la sécurité, la capacité des serveurs entreprise, l’éventuel réseau virtuel privé (VPN), le réglage des différentes solutions logicielles en nuage et locales, les accès aux autres données ERP, CRM, système d’information.

Cet article n’a pas comme but de détailler l’aspect technologique mais rester sur l’aspect business de l’entreprise. Vous pouvez néanmoins lire plus d’articles spécialisés et études de cas sur les stratégies et opérations IT en suivant le lien qui se trouve sous ma description à droite ou tout à la fin de cet article.

L’organisation de l’entreprise et des collaborateurs en télétravail

Dans les grandes entreprises multinationales ou dans les secteurs d’activité orientés sur le long terme il y a une dynamique particulière.

Les collaborateurs des “services de soutien” sont habitués avec un rythme de travail qui est plus lent. De plus, dans ce type de structures, les responsabilités ne sont pas clairement définies et la politique de bureau fait des ravages. L’esprit des demi-mesures pour contenter un plus grand nombre d’intervenants et équipes se trouve souvent privilégié au détriment des initiatives individuelles. Tout cela a un fort impact sur l’aspect stratégique et opérationnel. Dans ces conditions, l’implémentation du télétravail s’avère difficile.

Les collaborateurs dans les multinationales des secteurs technologiques ou FMCG (biens à consommation rapide) ainsi que ceux des petites entreprises PME ou les startups ont l’habitude de réagir beaucoup plus rapidement et s’adapter plus facilement au télétravail.

Comment identifier les bons candidats au télétravail

Un collaborateur peut exprimer un désir sincère d’aller vers le télétravail, mais après un essai, cela peut se solder avec un échec. Le désir, à lui seul, ne fait pas tout. L’expérience passée avec le télétravail non plus.

Ces deux éléments peuvent éventuellement faciliter le processus. En réalité, il arrive que certains collaborateurs ne s’expriment pas sur le sujet et n’ont aucune expérience avec cette méthode de travail, mais finissent par s’intégrer parfaitement avec les autres équipes à distance.

Selon mon vécu sur le terrain, c’est surtout l’éthique du travail qui prime dans le choix parmi tous les candidats potentiels au télétravail. Avec le télétravail il y a beaucoup de liberté et d’auto-responsabilité. C’est précisément pour cette raison qu’il faudra très vite identifier cette qualité.

Ensuite, un bon collaborateur en télétravail est celui qui se distingue par sa fiabilité et livre comme convenu – même en absence d’une supervision directe sur la partie opérationnelle. Les indépendants et les consultants externes sont souvent reconnus pour cette capacité, mais ce n’est pas une règle absolue.

Au final, les bons candidats pour le télétravail sont des gens diablement efficaces qui n’ont pas besoin de gesticulations politiques ou des heures de présence pour être “bien vus” par la direction. Les résultats parlent pour eux.

De plus, ces personnes sont souvent polyvalentes et arrivent à se débrouiller très rapidement avec les ressources existantes. Cela arrive souvent en cas de panne technique comme visioconférence, connexion Internet, arrêt de téléchargements ou blocages réseau et matériel défectueux, voir même un remplacement d’urgence d’autres collaborateurs.

Effectivement, quand le travail se fait à distance, il y a des limites physiques dans la stratégie du “le faire voir … mais lentement” au détriment du “délivrer rapidement … et le faire savoir“.

Comment organiser l’entreprise pour le télétravail

Pour des nombreuses personnes, le travail dans les locaux de l’entreprise représente bien plus que l’exécution des tâches: c’est être vu, socialiser, boire un café ou manger ensemble, et aussi partager quelques rumeurs croustillantes.

 

Là où cela peut s’appliquer, le télétravail augmente la productivité et malgré les fausses idées, la coopération entre les équipes.

Elena Debbaut

 

J’ai observé que le télétravail privilégie la productivité en lieu et place de la visibilité des gesticulations politiques. Nombreux sont ceux qui prétendent “maîtriser et aimer” la technologie, mais l’organisation d’une simple audio ou visioconférence avec un clic leur semble trop compliqué. Ces personnes préfèrent “voir” les gens; même si cela implique une perte de temps plus importante que la réunion elle-même.

Avec le télétravail, les différences dans le “professionnalisme” sont encore plus visibles.

Un directeur ou manager peut donner les mauvaises instructions à ses équipes, tout simplement parce qu’il ne sait pas s’exprimer à distance ou ne possède pas la capacité d’assimiler et comprendre rapidement une grande masse d’informations. Avec le télétravail, ces informations manquent de contexte fourni par le langage corporel. Ainsi, des collaborateurs peuvent accuser un retard par rapport à d’autres. Les infrastructures, les procédures “dans la tête” et le manque de documentation écrite peuvent empêcher l’efficacité opérationnelle du travail à distance.

Voici pourquoi une entreprise doit clairement définir un cadre pour le télétravail.

Quelles sont les activités qui peuvent être faites à distance ? Quelles sont les activités qui ne peuvent pas l’être ? Les activités peuvent être organisées de manière synchrone comme les réunions, ou de manière asynchrone, comme le développement informatique ou le support client par e-mail ? Quel est le niveau de sécurité ? Quels sont les outils ou les équipements nécessaires ? Quelles sont les ressources disponibles ? Le temps gagné ? Le budget ? Les personnes ?

L’établissement d’un cadre de travail qui soit clairement défini offre un avantage compétitif à toute entreprise. Le télétravail ne fait pas exception. En même temps, les questions ci-avant ne donnent qu’une partie de réponse. Car oui, une entreprise peut avoir des très bons processus opérationnels, mais passer à côté de quelque chose d’important qui ne peut pas être mesuré par les chiffres.

La notion de “confiance” dans le télétravail

Le télétravail est basé sur la confiance, et c’est un élément qui ne peut pas être déclaré, et encore moins mesuré. Une entreprise qui fait confiance à ses collaborateurs peut sembler contre-intuitif, mais selon mon expérience, c’est quelque chose qui fonctionne.

Une entreprise peut appliquer différentes formes de télétravail, et avec différents taux d’occupation (partiel ou total). Ces choix sont assez souvent dictés par les préférences des collaborateurs. Mais c’est surtout l’organisation de l’entreprise et son degré de confiance qui décident sur le succès du télétravail. Les contraintes et les risques varient selon l’organisation prédominante dans l’entreprise.

Selon mes observations sur le terrain, il y a 3 grandes catégories d’entreprise. Voici leurs caractéristiques principales et la capacité d’aller vers le télétravail.

1 — entièrement sur site: ces entreprises privilégient le travail en personne, seulement dans les locaux de l’entreprise, et selon des horaires stricts.

Le premier exemple pour illustrer ce modèle se trouve dans les usines de fabrication. Une présence sur site est obligatoire pour les équipes de production; ce n’est pas possible autrement. Une grande partie du travail fourni par les équipes de services de soutien peut aller vers le télétravail sans impacter la sécurité des informations. C’est le cas de la comptabilité, la gestion administrative, le marketing. En même temps, l’entreprise choisit de ne pas le faire, par manque de confiance.

Un autre exemple c’est les entreprises actives dans le domaine des services mais qui pourraient aller partiellement en télétravail mais ne le font pas par souci de sécurité: c’est le cas des services financiers, bancaires, médicaux.

Il y a aussi des entreprises actives dans le domaine des services avec un besoin sécuritaire bas ou moyen mais qui exigent une présence obligatoire dans les locaux de l’entreprise. C’est souvent le cas des entreprises qui offrent un support client, des agences marketing ou des petites entreprises de développement informatique. Si tel est le cas, alors il s’agit souvent des entreprises fortement hiérarchisées, politisées, et très peu confiantes quant aux avantages technologiques (malgré le matériel publicitaire qui dit le contraire).

Pour toutes ces entreprises, le passage au télétravail sera difficile et lent. Une fois que la supervision directe n’existe plus, les collaborateurs vont “se lâcher” et la qualité du travail va baisser. Les contrôles des risques inhérents au télétravail sont trop coûteux, surtout à cause de la surcharge administrative ou de sécurité.

2 — plusieurs sites: ces entreprises ont plusieurs centres, distribuées géographiquement. Cela peut être un siège principal avec diverses filiales dans le même pays, ou situées à l’étranger.

Ces entreprises font régulièrement du télétravail avec les centres éloignés, pendant que des personnes sont périodiquement présentes sur un site défini.

Le télétravail peut être toléré, mais il n’y a aucun processus en place. Le passage à un taux plus élevé de télétravail est facilité parce que les connaissances techniques et organisationnelles existent déjà. Le degré de confiance varie selon les zones fonctionnelles de l’entreprise. Habituellement, le département informatique bénéficie le plus, avec les ressources humaines et marketing au plus bas.

C’est surtout pendant les déplacements ou les réunions que le télétravail est utile. Pour les entreprises dont les sites couvrent plusieurs fuseaux horaires, le télétravail est très respectueux pour les collaborateurs et permet d’éviter les allers-retours. Il est ainsi possible d’organiser une réunion à 6 heures le matin ou 10 heures le soir, avec une pause plus grande en milieu de la journée.

Une clarification et officialisation des “règles non-dit” par rapport au télétravail et le travail sur site peut réduire les risques organisationnels. Il faudra toujours identifier les bons candidats au télétravail.

3 — aucun site: ces entreprises travaillent totalement à distance.

Avec ce modèle, il est possible d’avoir quelques centaines de personnes. Le chiffre de quelque 200 collaborateurs semble une limite pour garder l’efficacité opérationnelle de l’entreprise.

Il s’agit souvent des entreprises en phase de start-up, et très rarement des grandes entreprises. Les entreprises qui choisissent ce modèle le font surtout pour des questions de coûts fixes et un accès très rapide à plusieurs zones géographiques. En effet, les coûts des charges usuelles pour maintenir plusieurs sites et locaux sont inexistants. Selon la stratégie de l’entreprise, cela permet un développement plus rapide.

Les entreprises qui appliquent ce modèle sont actives dans le domaine des services comme le développement informatique ou les agences marketing et communication. Les activités étant en majorité asynchrones, cela facilite une très grande liberté au niveau des horaires. Tout le monde a son propre espace de travail et équipements choisis par ses propres soins.

Le plus grand risque pour l’entreprise réside dans la diversité des solutions technologiques et organisationnelles, parce que chaque collaborateur a ses propres préférences. La centralisation dans un système d’information est donc encore plus importante, de même que la sélection du bon collaborateur. Dans un tel contexte, toute erreur d’embauche se paye encore plus cher parce que même la sélection du collaborateur se fait entièrement à distance.

Conclusions

Comme vous pouvez le constater, il n’y a pas de “modèle parfait” pour organiser le télétravail. Il n’y a pas non plus de “candidat parfait” même si certaines typologies de personnes sont plus adaptées à ce style de travail. C’est surtout l’organisation de l’entreprise et sa culture qui décident sur le succès du travail “à distance“.

 

Pour un employé ou un indépendant, le télétravail peut être un style de vie. Pour l’entreprise, c’est une partie de sa culture et sa capacité organisationnelle.

Elena Debbaut

 

Autant pour l’entreprise que pour le collaborateur, le télétravail peut être un moyen de réduire les coûts fixes, augmenter la réactivité et la productivité. C’est une relation gagnant-gagnant, dans une majorité des cas.

Les entreprises et les collaborateurs qui pratiquent activement le télétravail peuvent assurer la continuité des opérations pas seulement en période de crise, mais aussi pendant d’autres situations. Par exemple, une alarme incendie qui se déclenche sans suites n’empêche en rien de continuer son travail depuis un autre endroit. Une courte visite de contrôle chez le médecin n’entame pas une demi-journée de congé, une partie du travail pouvant être réalisée dans la salle d’attente. C’est pour cette raison que la confiance doit être présente des deux côtés.

L’existence des processus permet de maîtriser les risques et d’assurer une continuité de cette méthode de travail.

Finalement, le télétravail c’est toute une affaire … et ne se passe pas toujours à la maison.

 

📌 Droits de Réutilisation …

 

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