Les sols de toute la Planète absorberont le carbone

Le carbone peut être accumulé dans le sol et compenser l’aridification

Une nouvelle publication  émanant des instituts Crop Science and Resource Conservation et Bio-and Geosciences, en Allemagne suggère d’enterrer l’effet de serre et propose une marche à suivre.  Le sol de la Planète contient énormément de carbone, deux à trois fois plus que l’atmosphère. L’agriculture, a des nombreux endroits, a épuisé et appauvri ces sols.  Un enrichissement en carbone serait bénéfique pour les sols et pourrait limiter ou même éliminer l’effet de serre.

Les émissions humaines augmentent d’environ 5 Gigatonnes par année. D’après le GIEC, il est possible de capter dans le sol entre 0,79 et 1,5 Gigatonne de carbone par année.  Pour y arriver, il faut mettre en place des résolutions politiques et des encouragements économiques .

Trois projets internationaux se sont penchés sur ce thème: l’initiative française 4p1000, les Koronivia workshops, et le programme RECSOIL de la FAO. Le premier proposait d’absorber les émissions annuelles excessives en augmentant la teneur du sol en carbone de quatre pour mille, d’où son nom. Tous les trois soulignent que la terre peut contribuer à réduire l’effet de serre, et qu’elle bénéficierait de cet enrichissement en carbone.

La sequestration du carbone dans le sol permet de restaurer les sols appauvris et d’augmenter le rendement. Le potentiel, les techniques et la gouvernance varient selon les régions du globe. La gestion est très décentralisée, et souvent à charge des fermiers individuels.

Il faut cartographier les sols appauvris

Un tiers des sols de la Planète sont appauvris par l’agriculture humaine. Leur stabilité est réduite, l’érosion augmente, ils accumulent moins d’eau et de nutriments. C’est une menace pour la sécurité alimentaire. La perte de carbone se produit surtout lors de l’agriculture intensive sans ajout de carbone.  L’augmentation de carbone du sol améliorerait les rendements du maïs et du blé, et réduirait les besoins en engrais.  Elle éviterait le besoin de défricher de nouvelles terres au risque d’une perte de carbone supplémentaire. La priorité devrait être donnée aux régions aux sols très appauvris, l’Afrique Sub-Saharienne, et l’Asie du Sud et de l’Ouest.  Il faudrait tout d’abord restaurer les sols appauvris par l’exploitation humaine. Malheureusement la surface totale des sols dégradés n’est pas bien définie. La dégradation des sols est bien étudiée dans les pays développés. Dans certains pays en voie de développement par contre,  c’est une grande inconnue.

Les auteurs de ce papier suggèrent des recherches additionnelles pour pour évaluer le potentiel de capture des différents sols et des différentes fermes, en tenant compte de la gestion du sol passée et des expériences passées de séquestration de carbone dans le sol.

Selon eux, il faut rapidement mettre en place: (i) un système d’information global sur le statut du sol et son niveau de dégradation; (ii) des pratiques de gestion du sol correspondantes à chaque situation; (iii) arrêter la perte de carbone de certains sols qui pèseraient lourd dans la balance climatique. Actuellement, quelques pays seulement ont un système de surveillance suffisant. Le programme Global Soil Partnership de la FAO a initié l’harmonization de l’acquisition des données.

Les techniques sont connues

Les coûts d’une gestion des sols accroissant la teneur en carbone pourraient aller de 3$ à 130$ par tonne de CO2.   L’impact sur le rendement est variable, il dépend aussi d’autres facteurs tels que l’abondance d’eau.

Différentes techniques d’amélioration du sol peuvent être utilisées suivant le type de sol et dans différents pays.  table de l’article Elles incluent la gestion des engrais et des résidus organiques, le chaulage, le biochar, le paillage, les plantes de couverture,  l’agriculture en sillons, l’inversion du sol profond, le transfert d’argile, l’utilisation de plantes spécifiques, et des mélanges de plantes précis. Les encouragements pourraient inclure des subsides, des taxes, des payements basés sur le marché et le système ‘cap and trade’.

Les auteurs de l’article suggèrent de limiter la perte de carbone de certains sols riches en carbone, et de régénérer les tourbières.  Je crains que les tourbières et les marais ne soient  très menacés par le changement climatique, à  mon avis il faudrait prévoir des systèmes d’irrigation pour les protéger.

La capture du carbone dans le sol est certainement la meilleure solution, qui régénérerait les champs et réduirait la pollution.  Les coûts du changement climatique pourraient être très importants, ou notre civilisation serait détruite à un point irréparable.  Il faut absolument pousser à l’accumulation du carbone dans le sol. J’imagine que chaque agriculteur pourrait être assorti de dix techniciens occupés à la capture du carbone.  L’agriculture a un grand potentiel d’absorption de carbone, qui pourrait encore être développé, si les moyens investis sont plus importants.  Je crois qu’on pourrait aller plus loin, que l’élevage pourrait être remplacé par la culture de noyers et  par l’agroforesterie.

L’afforestation est une autre  excellente solution durable. La croissance des forêts et d’arbres épars accumule aussi du carbone dans le bois et dans le sol, et doit être développée au maximum.

La même publication présentée par  l’INRA

Dorota Retelska

Dorota Retelska, décrypte les nouvelles du climat. Docteure ès Sciences de l’UNIL, auteure d’Antarctique-Ouest dans le Vide, elle alerte sur les dangers du climat depuis plusieurs années. Elle est active dans plusieurs organisations de défense du climat, entre autres l’Association Climat Genève, Greenpeace, TACA, et le Collectif Climat 2020.

6 réponses à “Les sols de toute la Planète absorberont le carbone

  1. Le chaulage et l’inversion des horizons du sol sont à éviter car ils détruisent la pédofaune. Ceci dit les pratiques agricoles sont cruciales pour limiter les effets liés à nos émissions de GES et le semis-direct ne doit pas être oublié (voire les travaux du CIRAD qui informent que de tels pratiques peuvent permettre de stocker dans ces sols autant de GES que des forêts). Les animaux ont aussi un rôle important à jouer notamment à l’aide de techniques utilisées dans les zones semis-désertiques (voire travaux d’Allan Savory TedX) ou en Sibérie (voire les travaux des chercheurs Sergueï Zimov et fils). Le reboisement est lui aussi très important tout comme l’arrêt des coupes rases pour faire des granulés pour les chaudières ou pire du méthane dont les fuites rendent le procédé inutile sur le plan climatique.
    Mais vous mettez l’accent sur un sujet majeurs qui pour l’heure n’est pas assez pris au sérieux par nos institutions publiques malheureusement, en témoigne le nouveau projet de PAC.
    Merci!

  2. Bonjour,
    Cela semble bien logique. Mais on verra bien si cela va se réaliser dans les prochaines décennies. Quant à moi, j’ai des doutes.

  3. Même à 1 seul dollar la tonne, il faudrait investir 35 milliards par année pour éponger nos émissions de CO2 qui atteignent environ 35 milliards de tonnes par années ( + 1 ppm CO2 = 17 giga tonnes CO2 ), selon les références officielles :
    Ne croyez-vous pas qu’il serait plus logique d’investir pour des énergies vertes afin de mettre fin à ces émissions au lieu de gaspiller de l’argent à éliminer ce CO2 qui est de toute manière absorbé par la nature à hauteur de 50% de nos émissions plus efficacement et surtout gratuitement !
    ( Les océans brassent 50 fois plus de CO2 que l’atmosphère et les roches calcaires en ont stocké des milliers de fois plus … )
    Croire que nous pouvons remplacer la nature est juste absurde ! Il faut au contraire utiliser son potentiel !

    1. Absolument. Bravo.
      De nouveaux apprentis sorciers à l’œuvre…
      70 ans de dégradations des sols et on pas encore compris que la nature est notre meilleure alliée.

  4. Le méthane qui est bien plus réchauffant que le CO2 ne semble pas pouvoir être absorbé par le sol. Je ne connais pas les chiffres, mais c’est surtout l’élevage industriel des animaux qui est à l’origine des émissions de méthane, donc à l’échelle individuelle nous devons réduire notre consommation de viande d’autant plus qu’il y a des alternatives végétales intéressantes, beaucoup moins émettrices de GES.
    Bien sûr, les pratiques agricoles actuelles qui épuisent le sol sont à revoir.

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