Loi sur la chasse : un référendum nécessaire

La première semaine de session des Chambres fédérales a permis aux parlementaires de débattre de nombreux sujets, dont certains ont été abondamment médiatisés, et d’autres un peu moins. Parmi cette deuxième catégorie, il y a la révision de la Loi sur la chasse, qui est l’objet depuis plus d’une année d’un ping-pong entre Conseil National et Conseil des Etats, sur fond de divergences sur divers points. Le National a pratiquement terminé jeudi 12 septembre son travail de révision, ne laissant qu’une petite divergence à traiter par la commission de conciliation des deux Chambres.

À l’heure où l’on parle de baisse alarmante de la biodiversité dans notre pays, avec un tiers des espèces menacées et un appauvrissement généralisé de la diversité génétique, cette révision sonne comme un camouflet pour l’environnement !

Pour rappel, cette loi, dont le nom complet est “Loi sur la chasse et la protection des mammifères et oiseaux sauvages” a à priori pour but de protéger les espèces menacées. Les lettres a et b de son premier article sont ainsi claires lorsqu’elles disent que :

La loi vise à:

a.
la conservation de la diversité des espèces et celle des biotopes des mammifères et oiseaux indigènes et migrateurs vivant à l’état sauvage;
b.
la préservation des espèces animales menacées;

Pourtant, il est ici question d’une mise en danger de plusieurs espèces, parmi lesquelles le loup, le lynx, le castor, le héron cendré ou encore le bouquetin.

Concrètement, les cantons auraient désormais la compétence, sans devoir obtenir l’aval de l’Office fédéral de l’environnement, d’autoriser le tir d’animaux menacés ou protégés, s’ils figurent, malgré leur statut de protection, sur la liste des espèces régulables. Cette liste pourrait par ailleurs être modifiée en tout temps par le Conseil Fédéral par voie d’ordonnance, sans aucune consultation du Parlement et donc sans possibilité de référendum.

En transférant certaines prérogatives de la Confédération aux cantons, on risque de donner plus de poids aux intérêts particuliers au détriment de l’intérêt général. Il est plus difficile pour des autorités cantonales de faire la sourde oreille face aux demandes de certains lobbies, ou de contrer les velléités de groupes d’intérêt. Cela est vrai lorsqu’il est question d’aménagement du territoire comme de protection des espèces menacées. La distance de la Confédération et de son administration restent les mieux à même pour veiller à ce que les intérêts supérieurs, ceux de la Nature et des générations futures par exemple, soient pris suffisamment en considération.

Au delà de ce transfert de compétences, l’introduction de la notion de “tirs préventifs” est un autre point hautement problématique de cette révision. Avec ce principe, des animaux protégés pourront être abattus avant même d’avoir effectivement causé des dégâts. On annule ainsi toute incitation à prendre des mesures pour protéger les troupeaux. À quoi bon rendre plus difficile l’accès du loup au bétail si on peut le tirer dès que sa présence a été confirmée dans le périmètre ?

Cette révision est donc une mauvaise réponse aux réels défis que pose la cohabitation entre une population plus nombreuse et aux activités plus invasives et la faune sauvage. Oui. les grands prédateurs peuvent constituer une menace pour les animaux de rente dans les alpages. Oui, les castors provoquent des dégâts sur certaines berges de rivières. Oui, les intérêts des éleveurs et des agriculteurs doivent être protégés. Mais les réponses à tout cela doivent se trouver dans des politiques volontaristes de prévention et de soutien financier aux adaptations nécessaires, plutôt que dans la fausse simplicité d’une éradication d’un problème par son anéantissement physique.

Les politiques de “gâchette facile” ont de par le passé porté de graves atteintes à la biodiversité dans notre pays. Alors que l’urgence environnementale est bien là, un retour à ces pratiques d’antan est tout sauf une bonne affaire. Il semble donc nécessaire que le peuple ait le dernier mot sur cette révision, et Les Verts comme les associations de protection de l’environnement ont déjà annoncé le lancement d’un référendum dès la version définitive de la révision approuvée par les deux Chambres.

Alberto Mocchi

Alberto Mocchi est député vert au Grand Conseil vaudois et Syndic de la commune de Daillens, dans le Gros de Vaud. À travers son blog, il souhaite participer au débat sur les inévitables évolutions de notre société à l'heure de l'urgence écologique.

2 réponses à “Loi sur la chasse : un référendum nécessaire

  1. La nature régulée par ordonnances et les chasseurs grands gourous de sa gestion… Comme si la nature avait besoins d’être “dirigée” par quiconque. Comme le démontre l’exemple de Chernobyl, laissée a elle même la nature sait se gérer toute seule. Je trouve un peu paradoxal qu’une même loi s’attèle à poser les limites de la chasse et à protéger les mammifères et les oiseaux sauvages. Une manière subtile de reconnaître que le plus grand danger pour ces espèces ce sont bel et bien les chasseurs !

  2. Les citadins et les “verts” doivent absolument comprendre que le chasse évolue comme tout dans notre société. La chasse est une activité dans les gènes de l’être humain et fait parti de la gestion de la nature. Le WWF et l’UCIN publient sur leur site internet que la chasse bien gérée est nécessaire et bénéfique:
    “Dans certains cas limités et rigoureusement contrôlés, y compris pour les espèces menacées, des preuves scientifiques ont montré que la chasse au trophée peut être un outil de conservation efficace dans le cadre d’un large éventail de stratégies. ”
    Ceci est rarement dit! De même que l’UCIN a démontré scientifiquement que le rhinocéros blancs a été sauvé grâce à la chasse! Étonnant ne trouvez-vous pas? Il faut donc arrêter de montrer un seul côté de l’histoire! Le débat est important, mais un débat honnête!

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